La réforme visant à rétablir la confiance dans la vie politique

Publié le 14/12/2017

Cette réforme visant à rétablir la confiance dans la vie politique, qui avait été présentée le 14 juin 2017 en conseil des ministres, se décline en deux volets : une loi organique et une loi ordinaire. Ces deux lois cherchent à renforcer la transparence de la vie politique ainsi que l’exigence de probité et d’exemplarité des élus. Elles viennent également moderniser le financement de la vie politique.

Par ses décisions nos 2017-753 DC et 2017-752 DC du 8 septembre 2017, le Conseil constitutionnel a validé l’essentiel des dispositions de ces deux lois pour la confiance dans la vie politique 1 qui concrétisent certains engagements pris par Emmanuel Macron au cours de la campagne présidentielle.

Dans un communiqué, la ministre de la Justice, Nicole Belloubet, a souligné que le Conseil constitutionnel a déclaré conformes à la Constitution « les mesures phares » des deux textes et n’a pas modifié « l’économie générale de cette réforme ambitieuse ».

Cette dernière concerne tout d’abord l’exercice du mandat parlementaire. Elle vient également renforcer les règles de probité des élus. Enfin, elle comporte un volet dédié au financement de la vie politique.

I – La réforme des conditions d’exercice du mandat parlementaire

Elle interdit l’emploi de collaborateurs familiaux par les parlementaires. Elle supprime l’indemnité représentative des frais de mandat et la pratique de la réserve parlementaire.

A – La suppression de l’indemnité représentative des frais de mandat (IRFM)

La loi ordinaire prévoit la disparition de l’IRFM des parlementaires dont l’utilisation n’est pas transparente et son remplacement par un système de remboursement sur justificatifs.

Elle complète l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires en indiquant que les parlementaires seront désormais « défrayés sous la forme d’une prise en charge directe, d’un remboursement sur présentation de justificatifs ou du versement d’une avance par l’assemblée dont ils sont membres », et cela dans la limite des plafonds qui devront être fixés par le bureau de l’assemblée (art. 4 sexies).

Il appartiendra au bureau de chaque chambre, après consultation de l’organe chargé de la déontologie parlementaire2, de déterminer le régime de prise en charge des frais de mandat et d’arrêter la liste des frais éligibles.

Le législateur renforce les prérogatives de l’organe chargé de la déontologie parlementaire qui sera chargé du contrôle des dépenses des parlementaires donnant lieu aux prises en charge, remboursement et avances (art. 4 sexies).

Par ailleurs, la loi ordinaire vient fiscaliser les indemnités de fonction complémentaires versées en vertu d’une décision prise par le bureau de chaque assemblée (art. 21).

Enfin, le Conseil constitutionnel a censuré l’article 23 de la loi ordinaire qui imposait au Premier ministre de prendre un décret en Conseil d’État déterminant les conditions de prise en charge des frais de représentation et de réception des membres du gouvernement. Il a estimé que cet article portait atteinte au principe de la séparation des pouvoirs qui est inscrit à l’article 16 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789.

B – L’interdiction des emplois familiaux de collaborateur

La commission des lois de l’Assemblée nationale a adopté un dispositif d’encadrement des emplois familiaux à deux niveaux, sur le modèle québécois.

La loi ordinaire vient compléter l’ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires en interdisant aux parlementaires d’employer comme collaborateurs des membres de leur famille directe (conjoint, parents, enfants, beaux-parents et beaux-enfants), sous peine d’être condamné à 3 ans de prison et à 45 000 € d’amende3.

De plus, les députés et sénateurs seront tenus d’informer le bureau et l’organe chargé de la déontologie parlementaire de l’assemblée à laquelle ils appartiennent s’ils emploient comme collaborateurs des membres de leur famille élargie (frère, sœur, beau-frère et belle-sœur, ancien conjoint, neveu et nièce).

S’agissant des membres du gouvernement, la loi leur interdit également d’employer comme collaborateurs des membres de leur famille directe, sous peine d’être condamnés à 3 ans de prison et à 45 000 € d’amende. Ils seront tenus d’informer la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) s’ils emploient comme collaborateurs des membres de leur famille élargie. Il en va de même pour les élus locaux à qui il est aussi interdit de recruter des membres de leur « famille proche »4.

Cette interdiction a été également prévue concernant les collaborateurs du président de la République par le décret n° 2017-1098 du 14 juin 2017.

Comme le rappelle le Conseil constitutionnel, avec l’interdiction des emplois familiaux, le législateur cherche à accroître « la confiance des citoyens dans l’action publique en renforçant les garanties de probité des responsables publics et en limitant les situations de conflit d’intérêts et les risques de népotisme ». Selon le juge constitutionnel, cette mesure emblématique de la loi ordinaire ne méconnaît pas le principe d’égal accès aux emplois publics. Elle ne porte pas non plus atteinte à la liberté contractuelle. Elle n’introduit pas une « discrimination à l’emploi (ne se justifiant) par aucun motif d’intérêt général » comme le soutenaient les députés requérants.

Enfin, on notera que le Conseil constitutionnel a censuré les dispositions habilitant la HATVP « à adresser aux personnes concernées une injonction, rendue publique, tendant à mettre fin à leurs fonctions en cas de conflit d’intérêts »5. Il a considéré qu’elles méconnaissaient le principe de la séparation des pouvoirs.

C – La suppression de la réserve parlementaire

La suppression « sèche » de la dotation d’action parlementaire, dite « réserve parlementaire », par l’article 14 de la loi organique, a été l’un des points de désaccord importants entre l’Assemblée nationale et le Sénat qui a été à l’origine de l’échec de la commission mixte paritaire sur le projet de loi organique, le 1er août 2017.

Légalisé par la loi organique du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique6, ce dispositif permet aux parlementaires de décider, avec l’accord du gouvernement, de l’attribution de certains crédits à des collectivités territoriales et à des associations.

Le Sénat s’est opposé à sa suppression qui est, selon lui, de nature à pénaliser les petites communes et les associations. L’Assemblée nationale a estimé, quant à elle, que l’aide apportée aux collectivités territoriales et aux associations ne doit pas dépendre du choix discrétionnaire des parlementaires qui seront toujours soupçonnés de clientélisme. Elle a écarté le mécanisme transformant la réserve en « dotation de soutien à l’investissement des communes et de leurs groupements » que les sénateurs avaient proposé.

Enfin, si le Conseil constitutionnel a validé la suppression de la réserve parlementaire, il s’est opposé à la suppression de la réserve ministérielle qui « relève des seules prérogatives du gouvernement ». Il a effectivement censuré l’article 15 de la loi organique qui interdisait au gouvernement d’attribuer des subventions aux collectivités locales au titre de la pratique de la réserve ministérielle. Il a jugé que cette disposition portait atteinte à la séparation des pouvoirs7.

II – Le renforcement des garanties de probité dans l’exercice des mandats électifs et des fonctions exécutives

La réforme améliore la prévention des conflits d’intérêts. Elle permet la vérification de la situation fiscale des parlementaires nationaux et européens ainsi que des membres du gouvernement. Elle prévoit enfin des sanctions à l’encontre des personnes qui manquent aux exigences de la probité en leur interdisant d’accéder aux fonctions électives.

A – Les mesures de prévention des conflits d’intérêts

L’article 5 de la loi ordinaire prévoit que les représentants d’intérêts seront tenus de s’abstenir de verser toute rémunération aux collaborateurs du président de la République, aux membres de cabinets ministériels et aux collaborateurs d’un parlementaire ou d’un groupe parlementaire. Cette disposition vient compléter l’article 18-5 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique. S’agissant des collaborateurs parlementaires, il est à noter que l’article 12 de la loi ordinaire ouvre la voie à la création d’un statut pour ces derniers.

Le législateur a aussi prévu la création d’un « registre des déports » pour les parlementaires et les membres du gouvernement qui auront décidé de se mettre en retrait sur un sujet en raison d’un risque de conflit d’intérêts.

Selon le nouvel article 2 de la loi du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, un décret en Conseil d’État précisera les modalités de tenue d’un registre accessible au public, recensant les cas dans lesquels un membre du gouvernement considère ne pas devoir exercer ses fonctions compte tenu d’une situation de conflit d’intérêts.

Le nouvel article 4 quater de l’ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires indique qu’il appartiendra à chaque chambre de déterminer « les modalités de tenue d’un registre public recensant les cas dans lesquels un parlementaire a estimé devoir ne pas participer aux travaux du Parlement en raison d’une situation de conflit d’intérêts ».

Il incombera à chaque assemblée de fixer des règles destinées à prévenir et à faire cesser les conflits d’intérêts « entre un intérêt public et des intérêts privés dans lesquels peuvent se trouver des parlementaires ».

Cette nouvelle définition des conflits d’intérêts, qui servira de base à la création du registre des déports, est plus restrictive que celle figurant à l’article 2 de la loi du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique8 car elle ne fait pas référence aux conflits entre deux intérêts publics. « Concrètement, cela signifie par exemple qu’un parlementaire qui siégerait au conseil d’administration d’une société publique d’aménagement ne serait pas concerné par ce registre si le projet d’infrastructure concerné fait l’objet d’un débat au Parlement »9.

Chaque chambre précisera les conditions dans lesquelles chaque député ou sénateur veille à faire cesser immédiatement ou à prévenir les situations de conflit d’intérêts dans lesquelles il se trouve ou pourrait se trouver10.

Par ailleurs, l’article 146-1 du Code électoral est modifié par la loi organique afin de restreindre la possibilité pour un parlementaire d’exercer une activité de conseil.

Il sera interdit à tout député de commencer à exercer une fonction de conseil qui n’était pas la sienne avant le début de son mandat. Cette interdiction sera désormais applicable aux membres des professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé.

Il sera interdit également à tout député de poursuivre une telle activité lorsque celle-ci a débuté dans les 12 mois précédant le premier jour du mois de son entrée en fonction.

Afin qu’aucune puissance étrangère ne puisse s’attacher les « services » d’un parlementaire via un cabinet de conseil, un amendement adopté par l’Assemblée nationale interdit à tout député de « fournir des prestations de conseil à des gouvernements, entreprises publiques, autorités administratives ou toute autre structure publique étrangers ».

Les déclarations d’intérêts des parlementaires devront préciser les « participations directes ou indirectes qui confèrent le contrôle d’une société, d’une entreprise, ou d’un organisme dont l’activité consiste principalement dans la fourniture de conseils »11. Saisi par le bureau de l’assemblée, le ministre de la Justice ou le parlementaire lui-même, le juge constitutionnel pourra examiner si ces participations sont compatibles avec un mandat parlementaire.

Enfin, l’ONG Transparency International, qui lutte contre la corruption, a regretté que plusieurs amendements visant à plafonner les revenus tirés des activités annexes des parlementaires, comme c’est le cas aux États-Unis, aient été rejetés lors du débat parlementaire.

B – Le contrôle de la régularité de la situation fiscale des parlementaires et des membres du gouvernement

L’article 4 de la loi organique instaure une procédure visant à garantir qu’un parlementaire, au moment de son entrée en fonction, ne méconnaît pas ses obligations fiscales en matière de déclaration et de paiement des impositions dont il est redevable12. Dans le mois suivant la date de son entrée en fonction, l’administration fiscale transmettra au député une attestation constatant s’il a satisfait ou non à ses obligations fiscales.

Si l’attestation fait état d’une non-conformité, il sera invité, dans un délai d’un mois, à se mettre en conformité ou à contester cette appréciation. Au terme de ce délai, l’administration fiscale transmettra l’attestation au bureau de la chambre et l’informera également, le cas échéant, de l’existence d’une contestation.

À défaut de mise en conformité, le Conseil constitutionnel saisi par le bureau de l’Assemblée nationale pourra, en fonction de la gravité du manquement, déclarer le parlementaire inéligible à toutes les élections pour une durée maximale de 3 ans et démissionnaire d’office de son mandat.

Dans le cas des parlementaires européens, l’administration fiscale transmettra l’attestation au président de la HATVP. Lorsqu’il constatera une absence de mise en conformité, ce dernier saisira le Conseil d’État13.

Par ailleurs, le président de la République pourra, avant la nomination de tout membre du gouvernement, solliciter la transmission par l’administration fiscale d’une attestation constatant si la personne pressentie pour entrer au gouvernement satisfait ou non à ses obligations fiscales 14. Mais certains ont regretté qu’il s’agisse d’une simple possibilité de vérification fiscale offerte au président par le législateur. C’est le cas de l’ONG Transparency International.

C – La peine complémentaire obligatoire d’inéligibilité en cas de manquement à la probité

Le législateur n’a pas finalement retenu l’obligation pour les candidats à une élection d’avoir un casier judiciaire vierge de toute condamnation pour manquement à la probité.

Pour le gouvernement, rendre inéligibles les personnes ne disposant pas d’un casier judiciaire vierge pouvait présenter un « risque d’inconstitutionnalité » car cela pouvait être considéré comme une peine automatique. Le juge constitutionnel estime en effet que les peines automatiques sont contraires au principe constitutionnel d’individualisation des peines garanti par l’article 8 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789.

L’article 1er de loi ordinaire prévoit à la place une « peine complémentaire obligatoire d’inéligibilité » qui sera inscrite au casier judiciaire des contrevenants.

S’agissant des infractions pouvant conduire à cette peine, le texte initial visait les infractions les plus graves que constituent les crimes et les atteintes à la probité et à la confiance publique. Les infractions retenues concernaient essentiellement la probité financière.

Un amendement déposé par les membres du groupe La République en marche à l’Assemblée nationale est venu ensuite ajouter « les faits de discrimination, injure ou diffamation publique, provocation à la haine raciale, sexiste ou à raison de l’orientation sexuelle ». Par le biais d’un sous-amendement, le gouvernement a souhaité aussi étendre le dispositif aux infractions sexuelles et au harcèlement.

Le Conseil constitutionnel a censuré comme portant une « atteinte disproportionnée » à la liberté d’expression, « qui revêt une importance particulière dans le débat politique et dans les campagnes électorales », les dispositions de l’article 1 prévoyant que l’inéligibilité est obligatoirement prononcée pour certains délits de presse punis d’une peine d’emprisonnement. Les délits punis d’une peine d’emprisonnement prévus aux articles 24, 24 bis, 32 et 33 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse ne feront donc pas partie des délits pour lesquels l’inéligibilité sera obligatoirement prononcée.

Enfin, le juge pourra, par une décision spécialement motivée, décider de ne pas prononcer la peine complémentaire obligatoire d’inéligibilité, « en considération des circonstances de l’infraction et de la personnalité de son auteur ».

III – La modernisation du financement de la vie politique

Le législateur a souhaité mieux encadrer le financement des partis et des campagnes électorales. En contrepartie, l’accès au financement pour les candidats et partis politiques sera amélioré grâce à la création d’un médiateur du crédit aux candidats et aux partis politiques. Sa création s’inspire de celle, en 2008, du médiateur du crédit pour les entreprises. Le gouvernement souhaite également remédier aux carences du financement bancaire privé avec la mise en place d’une « Banque de la démocratie ».

A – L’encadrement du financement des campagnes électorales et des partis et groupements politiques

L’article 25 de la loi ordinaire vient prolonger les mesures de transparence introduites par la loi n° 2017-286 du 6 mars 2017 tendant à renforcer les obligations comptables des partis politiques et des candidats.

Il modifie le troisième alinéa de l’article 11-4 de la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique afin d’interdire aux personnes morales de consentir des prêts aux partis et groupements politiques. Pourront cependant déroger à cette interdiction, les partis et groupements, ainsi que les établissements de crédit ou les sociétés de financement ayant leur siège social dans un État membre de l’UE ou partie à l’accord sur l’Espace économique européen.

D’autre part, afin de renforcer « la transparence et la qualité de la gestion financière et comptable des partis »15, le mandataire financier d’un parti ou groupement politique sera tenu à l’avenir de collecter l’ensemble des ressources de ce dernier, et non plus seulement les dons reçus16.

Par ailleurs, le nouvel article 11-3-1 de la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 vient limiter à 5 ans la durée des prêts accordés par les personnes physiques à des partis politiques et plafonner leur montant. Il renvoie à un décret en Conseil d’État le soin de fixer le plafond et les conditions d’encadrement du prêt consenti de façon à garantir qu’il ne constitue pas un don déguisé.

Il renforce les garanties pour le prêteur puisque le parti ou groupement politique devra notamment lui fournir les informations relatives aux caractéristiques du prêt (taux d’intérêt, montant total du prêt, durée…).

Le nouvel article 11-7 de la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 impose que la comptabilité des partis et groupements politiques soit désormais tenue selon un règlement défini par l’Autorité des normes comptables. Il s’agit de garantir une uniformisation des comptes déposés à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) et de faciliter le contrôle de la CNCCFP.

Enfin, les peines encourues en cas de violation des règles de financement des campagnes électorales et des partis et groupements politiques seront portées à 3 ans d’emprisonnement et 45 000 € d’amende, contre un an d’emprisonnement et 3 750 € d’amende actuellement.

B – Le médiateur du crédit aux candidats et aux partis politiques

L’article 28 de la loi ordinaire institue un médiateur du crédit aux candidats et aux partis politiques chargé d’une mission de conciliation avec les banques.

Le médiateur sera « investi d’une mission de conciliation, à l’exclusion de tout pouvoir coercitif à l’égard des établissements de crédit »17. Il pourra être saisi par tout candidat, parti ou groupement politique dont une demande de prêt s’est vue rejetée.

Il aura vocation à favoriser ou susciter « toute solution de conciliation propre à assurer le financement de la campagne des candidats, partis ou groupements politiques présentant des garanties de solvabilité suffisantes ».

Le Sénat a souhaité que sa mission de médiation soit étendue aux difficultés rencontrées par un mandataire financier ou une association de financement de parti ou groupement politique dans l’ouverture et le fonctionnement d’un compte bancaire. Il est précisé que le médiateur devra agir « dans un délai raisonnable ».

Les constatations qu’il pourrait faire ou les déclarations qu’il pourrait recueillir dans le cadre de sa mission seront couvertes par le secret. Pour lui permettre d’accomplir sa mission, la loi ordinaire rend également inopposable au médiateur du crédit le secret bancaire protégé par l’article L. 511-33 du Code monétaire et financier.

Le médiateur sera nommé par décret du président de la République pour une durée de six ans non renouvelable après avis des commissions compétentes en matière de lois électorales et après avis du gouverneur de la Banque de France. La procédure de nomination prévue à l’article 13, alinéa 5, de la constitution a vocation à offrir toutes les garanties nécessaires pour favoriser la désignation d’un médiateur indépendant.

Enfin, la loi impose au médiateur du crédit de remettre chaque année un rapport au Parlement dans lequel il fera notamment un bilan de son activité.

C – La « Banque de la démocratie »

La CNCCFP a fait état des difficultés rencontrées par les candidats aux fonctions électives dans leur accès à l’emprunt bancaire. Le gouvernement a souhaité apporter une réponse à ces difficultés en créant une structure chargée de consentir des prêts, avances ou garanties aux partis et groupements politiques et aux candidats aux élections.

Selon le gouvernement, si l’intervention du médiateur du crédit aux candidats et aux partis politiques est de nature à remédier, dans certains cas, aux difficultés rencontrées par les candidats et partis, elle ne pourra pas permettre de surmonter tous les obstacles rencontrés par ces derniers qui sont confrontés à un besoin immédiat de financement en vue d’une élection déterminée.

Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le gouvernement est habilité à créer par ordonnance une « Banque de la démocratie » pour que les candidats, partis et groupements politiques puissent à compter de novembre 2018, « en cas de défaillance avérée du marché », financer les campagnes électorales nationales et européennes, via des prêts, avances ou garanties. L’article 30 de la loi ordinaire indique que le dispositif retenu pourra notamment prendre la forme d’une structure dédiée dont l’ordonnance précisera « les règles de fonctionnement, dans des conditions garantissant à la fois l’impartialité des décisions prises (…) et la viabilité financière (…) ».

En conclusion, il apparaît que cette réforme s’inscrit dans la lignée des différentes lois visant à restaurer la confiance entre les citoyens et leurs élus qui ont été adoptées ces dernières années18. Malgré certaines limites19, elle est de nature à améliorer la transparence de la vie politique.

Notes de bas de pages

  • 1.
    Le Parlement a définitivement adopté le projet de loi ordinaire le 3 août 2017. Il a définitivement adopté le projet de loi organique le 9 août 2017. La loi organique n° 2017-1338 du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique et la loi n° 2017-1339 du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique ont été publiées au JO du 16 septembre 2017.
  • 2.
    Il s’agit du déontologue de l’Assemblée nationale et du comité de déontologie parlementaire du Sénat.
  • 3.
    Ord. n° 58-1100, 17 nov. 1958, art. 8 quater.
  • 4.
    L. n° 84-53, 26 janv. 1984, portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, art. 110.
  • 5.
    Cons. const., communiqué de presse, 8 sept. 2015.
  • 6.
    V. Lemaire E., « La réserve parlementaire sous l’angle du droit constitutionnel », Jus Politicum, n° 17.
  • 7.
    Ce faisant, le Conseil reste fidèle à sa jurisprudence qui applique strictement le principe de la séparation des pouvoirs lorsqu’il s’agit de distinguer les prérogatives des assemblées de celles du gouvernement (v. Mathieu C., « La séparation des pouvoirs dans la jurisprudence du Conseil constitutionnel », thèse, Montpellier, 2015).
  • 8.
    « Au sens de la présente loi, constitue un conflit d’intérêts toute situation d’interférence entre un intérêt public et des intérêts publics ou privés qui est de nature à influencer ou à paraître influencer l’exercice indépendant, impartial et objectif d’une fonction » (L. n° 2013-907, 11 oct. 2013, art. 2).
  • 9.
    https://transparency-france.org/loi-retablissant-la-confiance-dans-laction-publique.
  • 10.
    Ord. n° 58-1100, 17 nov. 1958, art. 4 quater.
  • 11.
    C. élect., art. LO 135-1.
  • 12.
    C. élect., art. LO 136-4.
  • 13.
    L. n° 77-729, 7 juill. 1977, relative à l’élection des représentants au Parlement européen, art. 5-3.
  • 14.
    L. n° 2013-907, 11 oct. 2013, relative à la transparence de la vie publique, art. 8-1.
  • 15.
    Étude d’impact du projet de loi, 14 juin 2017, p. 78.
  • 16.
    L. n° 88-227, 11 mars 1988, art. 11-1.
  • 17.
    V. rapp. AN nos 105 et 106, 20 juill. 2017, p. 264.
  • 18.
    C’est le cas notamment des lois organique et ordinaire du 11 octobre 2013 relatives à la transparence de la vie publique, de la loi du 6 décembre 2013 relative à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière, et de la loi du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique.
  • 19.
    Ainsi, par exemple, le maintien du « verrou de Bercy », c’est-à-dire du monopole du ministère du Budget en matière de poursuites pénales pour fraude fiscale, a été contesté. L’Assemblée nationale a rejeté un amendement proposant une levée partielle du « verrou de Bercy » qui avait été adopté à l’unanimité par le Sénat ; un amendement conforme à une recommandation de la Cour des comptes, laquelle a estimé en 2013 que « cette situation est aujourd’hui préjudiciable à l’efficacité de la lutte contre la fraude fiscale ».
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