Conte de Noël – Philippine et la colombe (II)

Publié le 24/12/2021

Une nuée d’oiseaux au plumage blanc se précipitent à l’intérieur de l’édifice.

BGF

De la fenêtre de sa chambre, pourtant située à l’étage de la maison, Philippine ne distingue pas le toit du pigeonnier, caché par celui des anciennes étables. « Du colombier ! », corrige son frère. Les nuages sont bas, mais on perçoit des lueurs roses dans le ciel. « Cela veut dire de la neige ! », hurlent les enfants en cette veille de Noël. Hier, ils ont aidé leur grand-mère à dresser la crèche, toujours d’importance, dans la cheminée du salon. Le sapin lui aussi installé, surveille ce petit monde de santons et jette sur lui des éclairs depuis ses guirlandes. Philippine se propose de conduire la chienne Rhapsodie dans les allées pour sa promenade matinale. On l’aura compris, elle veut surveiller sa tour. Elle a entendu des bruits de machines et de scies, ignorant de quels travaux il s’agissait. La jeune fille court derrière la chienne qui saute dans les quelques feuilles mortes oubliées. Soudain, ses yeux s’écarquillent, le colombier surgit nu, débarrassé de sa couverture de feuillages. Personne ne l’avait vu comme cela depuis combien de temps ? Peut-être du temps de la grand-mère de la grand-mère de Grand-mère ? Philippine fournit un effort pour imaginer cette époque lointaine. Difficile. Elle en oublie Rhapsodie qui en profite pour courir après une poule égarée, toujours la même, celle qu’on appelle Madeleine.

Oncle Édouard, qui raconte toujours des histoires, va peut-être cette fois l’emmener voir de près le colombier, « sa tour ». « D’accord, mais à plusieurs conditions. Vous venez tous, tu vas chercher ton frère, ta sœur et tes cousins, et vous vous tiendrez la main. Nul d’entre vous pénétrera à l’intérieur. Vous pourrez seulement regarder à travers la porte. Compris ? ». Oui, oui. L’équipe emmitouflée dans les anoraks, vestes, bonnet sur la tête, les mains dans les gants, de grosses chaussures aux pieds, se prépare à l’expédition, tandis que des flocons commencent enfin à fleurir du ciel au sol. Philippine, la première, pousse la grosse grille et s’engage sur le chemin. Le pigeonnier – « Le colombier ! », corrige Raphaël – est à deux pas, encadré par des haies et des ronces. Qu’importe, on fait le tour et Ô stupéfaction, le mur du quatrième côté, marqué par les ruines d’un four à pain, est percé par un large trou. Tout est désolation à l’intérieur. Une poutre brisée est à demi effondrée sur le sol ; mais les enfants distinguent bien tous les nichoirs qui occupent la surface intérieure.

La neige tombe plus dru, les enfants frissonnent. Mais que voient-ils à travers les flocons ? Une nuée d’oiseaux au plumage blanc qui se précipitent à l’intérieur de l’édifice dans un froufrou d’ailes. Une douce musique les accompagne, comme un chant. Le colombier a repris vie. Depuis, il a été restauré et chaque année à Noël, Philippine y accueille les colombes qu’elle chérit de plus en plus.

X