Les Bretons du palais : vous reprendrez bien un peu de Kouign-amann ?
Une poignée de jeunes avocats a décidé de ranimer l’association des Bretons du palais. Ils ont de grandes ambitions. Rencontre.
On le sait, les avocats aiment se réunir, et pas seulement pour parler de droit. L’annuaire des associations du palais donne le tournis, il y en a pour tous les goûts, depuis les Corses jusqu’aux Tintinophiles, en passant par les Biérologues, sans oublier le prestigieux Palais littéraire et artistique. Il y avait bien aussi une association des Bretons du palais, mais elle sommeillait.
En 1948, des magistrats et avocats bretons aiment se retrouver au café Dreyer
« L’histoire raconte qu’elle fut créée en 1948 de manière informelle par des magistrats et des avocats Bretons pour parler de la justice. Ils se réunissaient au café Dreyer, lequel a disparu, on suppose qu’il se situait dans le 14e arrondissement, près de Montparnasse » raconte Julien Brochot, ancien membre du conseil de l’ordre, membre du Conseil national des barreaux, et nouveau secrétaire général de l’association. Au début des années 2010, Geneviève Augendre, une des grandes figures féminines du barreau décide, avec le vice-bâtonnier Jean-Yves Le Borgne et l’avocat international Jean-Yves Toullec d’institutionnaliser le dîner, en créant le « Club des Bretons du palais ». Chaque année, ses membres se réunissent pour partager leur passion, parvenant même à faire venir Alan Stivell, figure de la musique bretonne et celtique. Puis surviennent le décès de Geneviève Augendre et la crise sanitaire. L’association s’endort.
Jean-Yves Le borgne : « allez-y, je vous laisse les clefs! «
« En 2019, quand j’étais candidat au conseil de l’ordre, j’ai participé au dîner, raconte Julien Brochot, qui se présente comme un breton de sang mêlé. J’y croise Tristan Vieules-Augendre, petit-neveu de Geneviève Augendre. On s’entend bien. Et puis on se rencontre de nouveau à l’enterrement de sa grand-tante et l’idée naît de recueillir et développer son héritage en relançant l’association ». Avec l’ancienne présidente de l’UJA Olivia Roche et Anne-Sophie Laguens, secrétaire de la conférence et fondatrice du Barreau des rues, ils vont voir Jean-Yves Le Borgne pour évoquer leur projet. « Allez-y, je vous laisse les clefs » leur lance-t-il avec enthousiasme. « Il nous a fait confiance, on s’est sentis soutenus ». Ils nomment Jean-Yves Le borgne président d’honneur de ce qui s’appellera « les Bretons du palais », dessinent un logo, et montent un site. Tristan Vieules-Augendre est président, Olivia Roche, vice-présidente, Anne-Sophie Laguens trésorière.
Droit, justice et Bretagne
Fin juin tout est prêt, il ne reste plus qu’à communiquer pour attirer les adhérents. Mais qui peut prétendre venir parler d’embruns, de biniou, et partager l’amour immodéré du beurre en cuisine ? « Il faut appartenir à une profession proche du droit et de la justice, ce qui inclut les chroniqueurs judiciaires, les policiers ou encore les politiques qui s’intéressent à nos matières et, bien entendu, aimer la Bretagne » répond Julien Brochot.
L’ambition ? Organiser des rencontres, des soirées mais aussi des colloques, le premier aura lieu en fin d’année en Bretagne. Car l’idée est de bâtir un pont entre Paris et le pays de Breizh. « Naturellement, nous serons présents à Tréguier pour la Saint Yves » précise l’avocat. Chaque année, le 3e dimanche de mai, les gens de robe se réunissent en effet dans la petite ville médiévale de Tréguier (Côtes d’Armor) pour célébrer le grand Pardon de St Yves (Yves Helory de Kermartin), prêtre et avocat breton (vers 1253-1303) devenu le saint patron des professions de justice et l’un des saints les plus aimés de Bretagne avec Sainte Anne. À cette occasion, le barreau de Saint-Brieuc organise depuis trois décennies un colloque sur un sujet d’actualité du droit et de la justice le samedi qui précède la cérémonie. Très prisé pour la qualité de ses débats et le sens de l’accueil du barreau, l’événement attire des juristes de la France entière.
Entendra-t-on bientôt les couloirs du palais résonner au son du biniou, cette tonitruante cornemuse bretonne qui fait trembler les murs ? En tout cas on pourra sans doute y déguster le légendaire Kouign-amann. « Je fais celui de Douarnenez, assure Julien Brochot photo à l’appui, c’est assez simple : de la pâte à pain, du sucre et surtout une motte de beurre ».
Il paraît qu’en breton, bonne chance se dit « chanz vat » !
Contact : [email protected]
Site : Les bretons du Palais
Adhésion : de 5 à 30 euros selon l’ancienneté professionnelle.
Référence : AJU453090