Chronique de droit de l’énergie (Juin 2016-Juin 2017)

Publié le 19/12/2017

La présente chronique, qui couvre la période allant de juin 2016 à juin 2017, dresse un panorama de l’actualité législative et réglementaire, ainsi que de la jurisprudence, judiciaire et administrative, concernant les sources du droit de l’énergie, les énergies renouvelables et l’énergie nucléaire.

Éditorial

Les sources du droit de l’énergie sont tout d’abord à l’honneur, à commencer par les sources européennes. La construction du droit européen de l’énergie se poursuit à un rythme très dense, comme en atteste le « paquet énergie propre » présenté par la Commission européenne en novembre 2016, d’une ampleur considérable.

Quant aux sources nationales du droit de l’énergie, la traduction juridique du processus de transition énergétique initiée par la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte a connu de nombreuses avancées. À l’heure où la plupart des textes d’application de cette loi sont désormais publiés1, la programmation pluriannuelle de l’énergie, qui a vocation à traduire concrètement les objectifs de la politique énergétique française, a elle-même été (enfin) adoptée. D’autres éléments d’actualité témoignent de l’évolution des sources du droit de l’énergie, comme le démontrent par exemple l’importance grandissante de la « soft law » en ce domaine et le contrôle juridictionnel dont elle fait aujourd’hui l’objet.

Concernant les énergies renouvelables, outre la jurisprudence judiciaire et administrative, plusieurs textes essentiels ont été adoptés. On retiendra notamment l’adoption de nouvelles dispositions relatives à l’intégration des énergies renouvelables au marché de l’électricité et au système électrique, aux procédures de mise en concurrence, ainsi que l’adoption d’un cadre juridique pour le développement de l’autoconsommation et des réseaux fermés de distribution. Quant à l’énergie nucléaire, le régime spécial d’indemnisation des victimes d’essais nucléaires a de nouveau fait l’objet d’une importante actualité, principalement marquée par la réforme opérée à l’occasion de l’adoption de la loi relative à l’égalité réelle outre-mer en février 2017.

I – Les sources du droit de l’énergie

A – Sources européennes

« Une énergie propre pour tous les Européens » : communication de la Commission européenne du 30 novembre 2016, COM (2016) 860 final. Le paquet « énergie propre », également appelé « Winter Package », a été présenté par la Commission européenne par une communication du 30 novembre 2016. Ce paquet législatif, qui se compose désormais de 11 propositions de textes2, vise à compléter le cadre d’action de l’Union en matière d’énergie et de climat à l’horizon 2030. Partant du postulat que l’atteinte des engagements ambitieux pris par l’Union européenne, en particulier dans le cadre de l’accord de Paris, dépend, « dans une large mesure, de la réussite de la transition vers un système d’énergie propre » et que cette transition doit profiter à tous les Européens, la Commission vise, par le train de mesures qu’elle propose, « à accélérer, modifier et consolider la transition de l’économie de l’UE vers une énergie propre et, ce faisant, à créer de l’emploi et à générer de la croissance dans de nouveaux secteurs économiques et de nouveaux modèles d’entreprise ». Pour ce faire, les trois grands objectifs poursuivis par le paquet « énergie propre » sont de privilégier l’efficacité énergétique, de parvenir au premier rang mondial dans le domaine des énergies renouvelables et d’adopter des mesures équitables pour le consommateur.

L’ampleur de ces propositions est telle qu’il est impossible d’en faire une présentation exhaustive dans les limites de cette chronique. Il n’est en effet guère d’aspects du droit de l’Union européenne dans le domaine de l’énergie qui ne soient concernés par les innombrables réformes envisagées par la Commission européenne. Nous nous contenterons dès lors d’en présenter quelques éléments-phares.

Concernant l’efficacité énergétique, la Commission propose de fixer un objectif contraignant à l’échelle de l’UE de 30 % d’ici 2030. Les objectifs nationaux des États membres ne sont pas contraignants mais leurs contributions indicatives nationales seront notifiées dans les plans nationaux intégrés en matière d’énergie et de climat prévus par la proposition de règlement relatif à la gouvernance de l’Union de l’énergie3. En vue d’atteindre cet objectif, la Commission propose principalement de réviser les directives existantes sur l’efficacité énergétique4 et sur la performance énergétique des bâtiments5. Elle propose de prolonger au-delà de 2020 les obligations en matière d’économies d’énergie énoncées par l’article 7 de la directive relative à l’efficacité énergétique, qui exigent des fournisseurs et distributeurs qu’ils économisent 1,5 % d’énergie chaque année, les États membres pouvant néanmoins satisfaire à cette obligation grâce à des mesures de substitution ayant des effets équivalents, comme des mécanismes de soutien en matière d’efficacité énergétique. Les propositions visent également à simplifier et clarifier la manière dont les économies d’énergie doivent être calculées. Quant aux bâtiments, rappelant qu’ils sont à l’origine de 40 % de la consommation totale d’énergie et constatant que la performance énergétique des bâtiments souffre pour l’heure d’un manque d’investissements, la Commission propose de renforcer le cadre juridique en la matière. En effet, « au rythme actuel de rénovation des bâtiments, soit 1 % par an, il faudrait un siècle pour moderniser le parc immobilier »6. La proposition de directive encourage notamment le recours aux TIC et autres technologies modernes, comme les systèmes d’automatisation des bâtiments et les infrastructures de recharge pour véhicules électriques, en vue de parvenir à un fonctionnement efficace des bâtiments. Quant à l’efficacité énergétique des produits, l’écoconception et l’étiquetage énergétique devront être ciblés sur les produits présentant le plus grand potentiel en termes d’économies d’énergie et d’économie circulaire.

Concernant les énergies renouvelables, la proposition de refonte de la directive actuellement en vigueur, alliée aux propositions concernant le marché de l’électricité, comporte de nombreuses innovations7. L’objectif de 27 % concernant la part des énergies renouvelables dans la consommation énergétique de l’UE à l’horizon 2030 est confirmé, et la Commission entend assurer que l’UE est en mesure d’atteindre cet objectif grâce à l’amélioration du cadre juridique, les projections actuelles donnant des résultats inférieurs à l’objectif fixé. Cet objectif, contraignant au niveau de l’UE, ne se traduira pas par des objectifs contraignants au niveau national, mais les États membres devront ici aussi faire connaître leurs contributions nationales dans le cadre des plans nationaux intégrés en matière d’énergie et de climat. Afin d’éviter toute régression, les États membres ne pourront cependant, à partir de 2021, aller en deçà des objectifs nationaux pour 2020.

La Commission propose de modifier les règles régissant le marché afin de faciliter le déploiement des énergies renouvelables, gérer l’intermittence et assurer la sécurité de l’approvisionnement en électricité. Il s’agit notamment d’adopter des règles appropriées concernant les échanges à court terme et de poursuivre l’évolution en faveur de l’intégration sur le marché de l’électricité produite à partir de sources renouvelables, en limitant les subventions au strict nécessaire tout en veillant, lorsque ces subventions existent, à réduire au minimum les distorsions sur le marché. Une attention particulière est également portée à la stabilité du soutien financier, les États devant veiller « à ce que la révision du niveau et des conditions de l’aide accordée aux projets en matière d’énergies renouvelables n’ait des incidences négatives sur les droits conférés ni sur la gestion économique des projets soutenus »8, ce qui ne va pas sans rappeler les conséquences fâcheuses qu’avaient eues, en France, les modifications à répétition du mécanisme de l’obligation d’achat dans la filière solaire photovoltaïque. La Commission entend également simplifier les procédures d’octroi de permis en matière d’énergies renouvelables, modifier les règles relatives au système des garanties d’origine et renforcer le rôle des consommateurs. Ainsi, à l’image du droit national qui a récemment adopté les premiers textes spécifiquement dédiés à l’autoconsommation9, la Commission consacre et encourage le recours à l’autoconsommation et prévoit de nouvelles dispositions relatives aux « communautés d’énergie », que l’on peut à certains égards rapprocher de la notion d’autoconsommation collective consacrée en droit français, introduisant ainsi de nouveaux concepts au droit européen de l’énergie.

Plus généralement, le consommateur est au cœur du paquet « énergie propre », de sorte qu’il devient, plus encore que par le passé, le centre de gravité des textes relatifs au marché de l’électricité10. Il s’agit avant tout de réformer ce marché afin de « donner au consommateur les moyens d’être davantage maître de ses choix en matière d’énergie ». Il en résulte, outre la consécration de l’autoconsommation précédemment citée, des mesures supplémentaires d’information du consommateur sur sa consommation et les coûts de l’énergie, grâce, notamment, à des dispositions relatives au déploiement des compteurs intelligents, au droit d’obtenir un « contrat d’électricité à tarification dynamique »11 tout en étant informé des opportunités et des risques associés à un tel contrat, aux règles de présentation des factures et à la suppression des frais de résiliation en vue de faciliter le changement de fournisseur. La Commission encourage également le développement de comparateurs en ligne certifiés afin de permettre aux consommateurs de comparer plus aisément les offres des fournisseurs. De nouvelles mesures sont enfin envisagées en vue de lutter contre la précarité énergétique et de protéger les consommateurs les plus vulnérables.

B – Sources nationales

1 – Adoption de la programmation pluriannuelle de l’énergie

D. n° 2016-1442 du 27 oct. 2016, relatif à la programmation pluriannuelle de l’énergie12. Très attendue, la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), qui a pu être qualifiée « d’Arlésienne de la transition énergétique »13, a finalement été adoptée par décret le 27 octobre 2016. Rappelons que la PPE remplace l’ancienne programmation pluriannuelle des investissements qui avait été mise en place par la loi du 13 juillet 200514. Désormais, l’article L. 141-1 du Code de l’énergie, issu de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte15, prévoit que la programmation pluriannuelle de l’énergie « établit les priorités d’action des pouvoirs publics pour la gestion de l’ensemble des formes d’énergie sur le territoire métropolitain continental, afin d’atteindre les objectifs définis aux articles L. 100-1, L. 100-2 et L. 100-4 du présent code », autrement dit les objectifs généraux de la politique énergétique française. Complément essentiel de ces textes législatifs en termes de politique énergétique, la PPE présente également un rôle majeur dans le jeu de nombreux mécanismes juridiques. Ainsi, par exemple et sans aucune exhaustivité, une procédure de mise en concurrence (appel d’offres ou dialogue concurrentiel16) peut être lancée lorsque les capacités de production ne répondent pas aux objectifs de la PPE17 ; l’obligation de conclure un contrat d’achat ou un contrat de complément de rémunération peut être suspendue si elle ne répond plus aux objectifs de la PPE18

Adoptée par décret, la PPE se compose, outre les dispositions du décret, de documents consultables sur le site internet du ministère de la Transition écologique et solidaire, à la lecture desquels le décret renvoie19 (ce qui interroge sur l’exacte nature juridique de la PPE). Les différents volets de la PPE sont listés par l’article L. 141-2 du Code de l’énergie (lesquels ne figurent pas tous dans le décret lui-même) et, conformément aux dispositions de l’article L. 141-3 du Code de l’énergie, la PPE doit présenter, pour chaque volet, des options hautes et basses, afin de prendre en compte les incertitudes techniques et économiques. Bien que l’article L. 141-3 prévoie que la PPE couvre deux périodes successives de 5 ans, la PPE adoptée par le décret du 27 octobre 2016 couvre deux périodes de 3 (2016-2018) et 5 ans (2018-2023).

Le décret fixe tout d’abord les objectifs de réduction de la consommation d’énergie primaire fossile par rapport à 2012 (pour le gaz naturel : – 8,4 % en 2018 et – 15,8 % en 2023 ; pour le pétrole : – 15,6 % en 2018 et – 23,4 % en 2023 ; pour le charbon : – 27,6 % en 2018 et – 37 % en 2023), ainsi que l’objectif de réduction de la consommation finale d’énergie par rapport à 2012 (- 7 % en 2018 et – 12,6 % en 2023).

Il fixe ensuite les objectifs de développement de la production d’électricité d’origine renouvelable en France métropolitaine continentale, en distinguant l’énergie éolienne terrestre, l’énergie radiative du soleil, l’hydroélectricité, l’éolien posé en mer, les énergies marines, la géothermie électrique, le bois-énergie et la méthanisation, le tout à deux échéances, au 31 décembre 2018 et au 31 décembre 2023, avec, pour cette dernière, une option basse et une option haute. Est également prévu un calendrier des procédures de mise en concurrence pour les énergies renouvelables électriques, qui n’est cependant qu’indicatif. Le décret prévoit également que « des appels d’offres expérimentaux de soutien à l’autoconsommation/autoproduction seront lancés d’ici le 31 décembre 2016 », ce qui a effectivement été fait20. Sont ensuite prévus les objectifs de développement de chaleur et de froid renouvelables et de récupération, selon la même méthode, ainsi que les objectifs d’injection de biométhane dans le réseau de gaz, l’objectif de développement de l’électromobilité à l’horizon 2023, les objectifs de développement des carburants d’origine renouvelable et des capacités d’effacement électrique. Il y a cependant peu d’innovations dès lors que la plupart des objectifs chiffrés, en particulier ceux concernant la production d’électricité d’origine renouvelable et la production de chaleur et de froid renouvelables, sont identiques à ceux qui avaient précédemment été posés dans le cadre de l’ancienne PPE21.

S’agissant de l’évolution des capacités de production, deux points méritent cependant d’être relevés. D’une part, l’article 10 du décret prévoit qu’ « aucune nouvelle installation de production d’électricité à partir de charbon non équipée de système de captage, stockage ou valorisation du dioxyde de carbone ne sera autorisée en métropole continentale ». D’autre part, l’article 12 prévoit qu’EDF devra, dans un délai de 6 mois à compter de la publication du décret, établir un « plan stratégique compatible avec les orientations de la programmation pluriannuelle de l’énergie qui fixe l’objectif de réduire la part du nucléaire à 50 % de la production d’électricité à l’horizon 2025 ».

On relèvera enfin que la PPE a vocation à être régulièrement révisée et qu’un décret du 11 août 2016 est venu préciser, en application de l’article L. 141-6 du Code de l’énergie, les conditions et modalités de la révision simplifiée ainsi que les modalités d’évaluation périodique des objectifs déterminés par la PPE22.

2 – La « soft law » en droit de l’énergie : les effets juridiques des délibérations de la Commission de régulation de l’énergie

CE, 13 juill. 2016, n° 388150, Sté GDF Suez23. La décision sous commentaire s’inscrit dans la lignée des jurisprudences Fairvista et Numéricable24, relatives aux effets juridiques des actes de droit souple émanant des autorités de régulation. Elle présente le double intérêt d’apporter, d’une part, d’utiles précisions quant aux modalités des recours contre les actes de droit souple, en particulier quant au délai de recours, et, d’autre part, de constituer le premier cas d’annulation, ce qui est d’autant plus intéressant dans le cadre de cette chronique que cet acte concernait directement le secteur de l’énergie.

On rappellera qu’à l’occasion de ses décisions Fairvista et Numéricable rendues le 21 mars 2016, le Conseil d’État a ouvert assez largement la possibilité d’engager un recours pour excès de pouvoir contre certains actes de droit souple, tels que des avis, recommandations, mises en garde et prises de position adoptés par les autorités de régulation dans l’exercice des missions dont elles sont investies. Il a tout d’abord rappelé que cela était possible lorsque ces actes revêtent le caractère de dispositions générales et impératives ou lorsqu’ils énoncent des prescriptions individuelles dont les autorités de régulation pourraient ultérieurement censurer la méconnaissance25. Surtout, il a ajouté qu’un tel recours pouvait également être « introduit par un requérant justifiant d’un intérêt direct et certain à leur annulation, lorsqu’ils sont de nature à produire des effets notables, notamment de nature économique, ou ont pour objet d’influer de manière significative sur les comportements des personnes auxquelles ils s’adressent ». La première décision concernait une mise en garde publiée par l’Autorité des marchés financiers ; la seconde visait une prise de position de l’Autorité de la concurrence. Dans ces deux affaires, tout en admettant la recevabilité des recours, le Conseil d’État les avait rejetés au fond. L’arrêt commenté porte cette fois-ci sur une délibération de la Commission de régulation de l’énergie (CRE).

Plus précisément, le litige concernait l’application des dispositions relatives au contrat unique portant sur la fourniture et la distribution d’électricité, et en particulier les relations entre le fournisseur et le gestionnaire du réseau de distribution. Les sociétés Poweo Direct Énergie et ERDF (devenue Enedis) avaient soumis à la CRE un projet d’accord quant à la prise en charge des frais de gestion des clients ayant souscrit un contrat unique. Il prévoyait qu’ERDF verserait à la société Poweo Direct Énergie une rémunération au titre des frais de gestion de ses clients tant qu’elle compterait moins de 1 750 000 clients. La CRE avait estimé dans sa « délibération portant communication relative à la gestion de clients en contrat unique » que le « dispositif contractuel transitoire » convenu entre les deux parties respectait les principes généraux du droit de la concurrence et les dispositions du Code de l’énergie. Elle avait également précisé qu’un tel accord « pourrait être conclu avec d’autres opérateurs (fournisseurs, nouveaux entrants) placés dans une situation comparable à la société Poweo Direct Énergie au regard de leurs coûts de gestion de clientèle et de leur base de clients énergie », c’est-à-dire les opérateurs dont le nombre de clients ayant souscrit un contrat unique est inférieur à 1 750 000. La société GDF Suez (devenue Engie), dépassant ce seuil, a alors demandé l’annulation pour excès de pouvoir de cette délibération, ainsi que de la délibération ultérieure par laquelle la CRE avait rejeté le recours gracieux qu’elle avait présenté et visant au retrait de la première délibération.

C’est dans ces circonstances que le Conseil d’État a été appelé à apporter d’utiles précisions sur les modalités des recours pour excès de pouvoir contre les actes de droit souple émanant des autorités de régulation. Pour cela, il a tout d’abord admis que la demande d’annulation de la délibération de la CRE qui lui était soumise répondait bien aux conditions de recevabilité précédemment posées par les arrêts Fairvista et Numéricable, à savoir un recours introduit par un requérant justifiant d’un intérêt direct et certain à l’annulation d’un avis, recommandation, mise en garde ou prise de position adopté par une autorité de régulation dans l’exercice des missions dont elle est investie, lorsque cet acte est « de nature à produire des effets notables, notamment de nature économique, ou (a) pour objet d’influer de manière significative sur les comportements des personnes auxquelles ils s’adressent ». En effet, la délibération de la CRE avait bien été émise par une autorité de régulation dans le cadre de sa mission définie par le Code de l’énergie, et l’acte litigieux, « qui, selon ses termes mêmes, se présente comme une “communication”, s’adresse aux opérateurs des marchés de l’électricité. Il a été publié sur le site internet de cette autorité et y est depuis lors resté accessible ». Surtout, « en approuvant la conclusion par les fournisseurs d’électricité et les gestionnaires de réseaux de distribution de contrats tels que celui que les sociétés ERDF et Poweo Direct Énergie s’apprêtaient à conclure, et en limitant une telle possibilité à certains fournisseurs seulement, il a notamment pour objet d’influer de manière significative sur les comportements de ces opérateurs. En outre, (…) l’acte attaqué est de nature à produire des effets notables, de nature économique, sur les relations concurrentielles entre les fournisseurs d’électricité, ainsi que sur le tarif d’utilisation des réseaux supportés par leurs utilisateurs ». Quant à l’intérêt direct et certain à agir de la société GDF Suez, il n’était guère douteux, dès lors, que le nombre de ses clients bénéficiant d’un contrat unique était supérieur au seuil qui avait été retenu dans la délibération contestée.

Le Conseil d’État a ensuite précisé, et c’est l’apport principal de l’arrêt, plusieurs points concernant le délai de recours. Le Conseil d’État a fait le choix d’appliquer aux actes de soft law la règle générale prévue par l’article R. 421-1 du Code de justice administrative, en vertu de laquelle le recours doit être formé « dans les 2 mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée ». Mais il restait alors à préciser ce point de départ, les actes de droit souple ne faisant l’objet d’aucune publication au Journal officiel. Sans grande surprise, c’est la mise en ligne de l’acte sur le site internet de l’autorité de régulation qui fait courir le délai de recours26. Le Conseil d’État entoure cependant cette affirmation d’une foule de précautions, cette solution étant conditionnée par diverses voies : elle ne vaut qu’en « l’absence de dispositions législatives ou réglementaires prévoyant un autre mode de publication » ; elle est prudemment cantonnée à « un acte de la nature de celui que conteste la société GDF Suez »27, ce qui n’est pas parfaitement éclairant ; elle ne vaut qu’à « l’égard des professionnels du secteur dont elle assure la régulation » ; la mise en ligne doit en outre être faite « dans l’espace consacré à la publication des actes de l’autorité », ce qui est judicieux si l’on entend espérer que cette forme de publication puisse être vue.

En l’espèce, ce délai de 2 mois courant à partir de la mise en ligne de la délibération était dépassé lorsque la société GDF Suez avait intenté son recours. Cependant, le Conseil d’État offre une échappatoire à ceux dont la demande serait tardive. Ainsi, « lorsque le justiciable n’a pas contesté cet acte dans ce délai, il lui reste loisible, s’il s’y croit fondé, de demander son abrogation à l’autorité qui l’a adopté et, le cas échéant, de contester devant le juge de l’excès de pouvoir le refus que l’autorité oppose à cette demande ». C’est précisément la précaution que la société GDF Suez avait prise en sollicitant auprès de la CRE le « retrait » de sa délibération, recours que cette dernière avait rejeté. Si le Conseil d’État requalifie ce recours en demande d’abrogation, il aura en l’espèce constitué la planche de salut de la société GDF Suez puisque le Conseil d’État a estimé qu’elle était recevable à demander l’annulation de la délibération de la CRE par laquelle celle-ci avait rejeté sa demande d’abrogation et a jugé cette demande bien fondée, la CRE ayant méconnu les dispositions de l’article L. 121-92 du Code de la consommation28.

Assurément, cette jurisprudence relative aux effets juridiques des actes de droit souple émanant des autorités de régulation sera appelée à se développer à l’avenir et à faire l’objet d’autres précisions. Elle devra être suivie de près tant elle est susceptible d’avoir un impact important pour le secteur de l’énergie, qu’il s’agisse des actes de la Commission de régulation de l’énergie ou d’autres autorités telles que l’Autorité de la concurrence.

3 – Précisions réglementaires et jurisprudentielles sur la médiation dans le secteur de l’énergie

D. n° 2017-1113, 27 juin 2017, relatif au processus de la médiation dans le secteur de l’énergie29 ; Cass. 1re civ., 9 juin 2017, n° 16-12457, PB. De nouvelles dispositions réglementaires ont été adoptées au sujet du processus de médiation qui peut être engagé devant le médiateur national de l’énergie (MNE), afin de coordonner la procédure de médiation du Code de l’énergie avec les dispositions du Code de la consommation. On rappellera en effet que la médiation devant le médiateur national de l’énergie concerne essentiellement les litiges entre consommateurs et professionnels. L’article L. 122-1 du Code de l’énergie prévoit que « le médiateur national de l’énergie est chargé de recommander des solutions aux litiges entre les personnes physiques ou morales et les entreprises du secteur de l’énergie et de participer à l’information des consommateurs d’énergie sur leurs droits », tout en précisant qu’il « ne peut être saisi que de litiges nés de l’exécution des contrats conclus par un consommateur non professionnel ou par un consommateur professionnel appartenant à la catégorie des microentreprises ». Cette médiation faisant ainsi figure de processus spécial de médiation dans le domaine de la consommation, elle s’accomplit « dans les conditions prévues au titre Ier du livre VI du Code de la consommation »30 consacré à la médiation, sous réserve des dispositions spéciales du Code de l’énergie.

Le nouvel article R. 122-1 du Code de l’énergie, pris pour l’application de l’article L. 122-1 dudit code, remplace les anciens articles R. 122-1 à R. 122-331, et renvoie, pour une large part, aux dispositions du Code de la consommation. Ce renvoi aux articles R. 612-1 à R. 612-5 du Code de la consommation conduit, notamment, à appliquer à la médiation dans le secteur de l’énergie les règles générales telles que la gratuité de la médiation pour le consommateur ou la possibilité de se faire représenter par un avocat ou assister par toute personne de son choix, les règles relatives à la notification de sa saisine par le médiateur, à la communication des pièces, l’obligation pour le médiateur de délivrer certaines informations lorsqu’il fait connaître la solution qu’il propose (comme l’information sur les effets d’une acceptation de cette solution par exemple), ainsi que le délai laissé au médiateur pour se prononcer. Ce délai est fixé à 90 jours à compter de la date de la notification par le médiateur de sa saisine, le médiateur pouvant néanmoins prolonger ce délai à tout moment « en cas de litige complexe » en en avisant les parties32. Sur ce dernier point, le renvoi aux dispositions du Code de la consommation conduit à un véritable changement puisque, jusque-là, le Code de l’énergie prévoyait que le médiateur disposait d’un délai de 2 mois pour se prononcer33.

Pour le reste, ce sont les dispositions spéciales du Code de l’énergie qui s’appliquent. Ainsi, l’article R. 122-1 du Code de l’énergie, dans sa rédaction issue du décret du 27 juin 2017, prévoit notamment que le délai au terme duquel le consommateur peut saisir le médiateur national de l’énergie est fixé à 2 mois à compter de la date de la réclamation écrite faite auprès de l’entreprise concernée. On relèvera que si l’ancienne rédaction de l’article R. 122-1 prévoyait déjà un délai de 2 mois, celui-ci courait à compter de la réception de la réclamation du consommateur par l’entreprise, et non à compter de la date de la réclamation. De plus, le médiateur national de l’énergie doit mentionner, dans la notification de sa saisine prévue par le Code de la consommation, que la prescription des actions en matière civile et pénale est suspendue. Le même texte précise que dans l’hypothèse où le litige n’entrerait pas dans son champ de compétence, le médiateur doit en informer le consommateur et lui indiquer, le cas échéant, l’autorité administrative à laquelle il transmet sa saisine, et ce, dans le délai prévu par l’article L. 612-2 du Code de la consommation, soit 3 semaines à compter de la réception du dossier par le médiateur. Ce délai était, par le passé, d’1 mois34. Le nouvel article R. 122-1 du Code de l’énergie rappelle en outre le délai prévu par l’article R. 612-5 du Code de la consommation, laissant au médiateur 90 jours pour formuler sa recommandation, délai qui peut cependant être prolongé.

Parallèlement à cette actualité réglementaire, ce sont les dispositions législatives elles-mêmes, et plus particulièrement les dispositions relatives à la prescription fixées par l’article L. 122-1 du Code de l’énergie, qui ont été stigmatisées par la jurisprudence judiciaire, la Cour de cassation les ayant jugées contraires à l’article 6, § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales dans un arrêt du 9 juin 2017.

En l’espèce, un consommateur avait contesté le montant d’une facture et saisi le médiateur national de l’énergie, lequel a formulé ses recommandations près de 7 mois plus tard. Le consommateur a ensuite saisi la justice, aux fins d’obtenir l’exécution de ces recommandations. Cependant, à cette occasion, la société cocontractante a demandé reconventionnellement la condamnation du consommateur au paiement d’une certaine somme au titre de la facture litigieuse. Les juges du fond ont déclaré cette demande reconventionnelle prescrite, en application des dispositions de l’article L. 122-1 du Code de l’énergie. En effet, ce texte prévoit certes la suspension de la prescription des actions civiles et pénales en cas de saisine du médiateur national de l’énergie, mais cantonne cette suspension au délai imparti au médiateur pour se prononcer35, qui était à l’époque de 2 mois. Or, la Cour de cassation a exercé sa censure sur un moyen relevé d’office tiré de la violation de l’article 6, § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales. En effet, selon la Cour de cassation, en appliquant les dispositions de l’article L. 122-1 du Code de l’énergie, alors « qu’une telle limitation de la suspension du délai de prescription est de nature à priver les parties de leur droit d’accès au juge en les empêchant d’entamer une procédure judiciaire ou arbitrale concernant le litige qui les oppose, du fait de l’expiration des délais de prescription pendant le processus de médiation, qui est susceptible d’excéder le délai imparti au MNE pour formuler une recommandation, la cour d’appel a violé (Conv. EDH, art. 6, § 1) ».

De fait, en l’espèce, le médiateur avait mis près de 7 mois pour formuler ses recommandations, de sorte que, si l’on appliquait à la lettre l’article L. 122-1 du Code de l’énergie comme la cour d’appel l’avait fait, la prescription avait repris son cours depuis plusieurs mois lors de l’achèvement du processus de médiation. C’est ce que stigmatise la Cour de cassation en relevant ce hiatus entre le délai imparti au médiateur par les textes pour se prononcer, et la durée réelle du processus de médiation, qui peut s’avérer bien supérieure. Il est alors possible, selon les circonstances de l’espèce, que le délai de prescription expire alors même que le processus de médiation n’est pas encore achevé, ce que l’on peut effectivement considérer comme contraire au droit d’accès au juge protégé par l’article 6, § 1 CEDH. La Cour de cassation avait déjà démontré qu’elle veillait à ce que les règles relatives à la prescription soient conformes aux exigences de ce texte, ce qu’elle confirme donc aujourd’hui on ne peut plus clairement36.

Au demeurant, les textes propres à la médiation invitaient aussi à la prudence. L’article 8 de la directive n° 2008/52/CE du 21 mai 200837 impose en effet aux États membres de veiller à ce que les parties qui choisissent de recourir à la médiation pour tenter de résoudre leur litige ne soient pas empêchées par la suite d’entamer une procédure judiciaire ou une procédure d’arbitrage concernant ce litige du fait de l’expiration des délais de prescription pendant le processus de médiation.

On relèvera simplement pour conclure que si les dispositions de l’article L. 122-1 du Code de l’énergie relatives à la prescription sont pour l’heure inchangées et prévoient donc toujours que la durée de la suspension du cours de la prescription est alignée sur le délai laissé au médiateur pour se prononcer et non sur la durée réelle du processus de médiation, les modifications réglementaires précédemment étudiées peuvent être de nature à rendre l’hypothèse d’une expiration des délais de prescription durant le cours du processus de médiation plus rare, le délai laissé au médiateur national de l’énergie ayant été étendu. Ce délai est désormais de 90 jours, délai qui peut être prolongé en cas de litige complexe, alors que les textes réglementaires antérieurs prévoyaient un délai de 2 mois sans possibilité de prolongation.

II – Droit des énergies renouvelables

A – Nouvelles dispositions relatives à l’intégration des énergies renouvelables au marché de l’électricité et au système électrique, ainsi qu’aux procédures de mise en concurrence

Ordonnance n° 2016-1059 du 3 août 2016 relative à la production d’électricité à partir d’énergies renouvelables38 ; Décret n° 2016-1129 du 17 août 2016 relatif à la procédure de dialogue concurrentiel pour les installations de production d’électricité39. La loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte avait habilité le gouvernement à adopter par voie d’ordonnance diverses mesures relevant du domaine de la loi. Dans le domaine des énergies renouvelables, il s’agissait en particulier de modifier les dispositions applicables aux installations de production d’électricité à partir de sources renouvelables afin d’assurer leur meilleure intégration au marché de l’électricité ; de modifier les dispositions applicables aux installations de production d’électricité raccordées à un réseau public de distribution, notamment les installations de production d’électricité à partir de sources renouvelables, en prévoyant les dispositions techniques nécessaires à leur meilleure intégration au système électrique ; de mettre en cohérence les textes du Code de l’énergie relatifs à la procédure d’appel d’offres avec les dispositions de la loi relative à la transition énergétique relatives à la programmation pluriannuelle de l’énergie et de redéfinir les critères applicables à ces appels d’offres ; et de permettre l’organisation et la conclusion de procédures de mise en concurrence destinées à l’expérimentation et au déploiement de technologies innovantes40. Tel est l’objet de l’ordonnance du 3 août 2016, ratifiée par une loi du 24 février 201741, que d’adopter ces mesures.

L’ordonnance se subdivise en trois titres. Le premier concerne l’intégration au marché de l’électricité et l’obligation d’achat. L’ordonnance supprime le plafond qui réservait aux installations de moins de 12 MW le bénéfice de l’obligation d’achat ou du complément de rémunération pour les filières telles que le solaire, la biomasse ou le biogaz. Des plafonds pourront cependant être fixés par décret ou à l’occasion d’appels d’offres. L’ordonnance supprime également la possibilité pour les installations hydroélectriques ayant déjà bénéficié d’un contrat d’achat de bénéficier d’un renouvellement de ce contrat. Comme le précise le rapport remis au président de la République, le maintien de ce dispositif n’apparaît « plus nécessaire puisque les installations concernées par ces contrats ont quasiment toutes pu obtenir un second contrat de 15 ans entre 2012 et aujourd’hui » et « sont désormais couvertes par l’article L. 314-19 du Code de l’énergie qui permet aux installations ayant déjà bénéficié d’un contrat d’achat de bénéficier d’un contrat de complément de rémunération »42.

Par ailleurs, l’article 3 de l’ordonnance retouche largement la rédaction de l’article L. 314-4 du Code de l’énergie relatif aux conditions d’achat de l’électricité produite par les installations sous obligation d’achat. Les conditions d’achat doivent prendre en compte, notamment, les frais de contrôle, les investissements et les charges d’exploitation d’installations performantes représentatives de chaque filière, et la compatibilité de l’installation bénéficiant de l’obligation d’achat avec les objectifs de la politique énergétique française. De plus, il est précisé que « les conditions d’achat ne peuvent conduire à ce que la rémunération totale des capitaux immobilisés, résultant du cumul de toutes les recettes de l’installation et des aides financières ou fiscales octroyées au titre de celle-ci, excède une rémunération raisonnable des capitaux, compte tenu des risques inhérents à son exploitation ». Par conséquent, le bénéfice de l’obligation d’achat peut « être subordonné à la renonciation, par le producteur, à certaines de ces aides financières ou fiscales ». Les conditions d’achat doivent en outre faire l’objet d’une révision périodique, afin de tenir compte de l’évolution des conditions économiques de fonctionnement des installations performantes représentatives des filières concernées. Les dispositions relatives à la cession du contrat d’achat sont également retouchées. Il est désormais possible, pour le producteur qui en fait la demande, de céder à tout moment le contrat à un organisme agréé, peu important que le contrat ait été conclu en « guichet ouvert » ou à la suite d’un appel d’offres43.

Le titre II de l’ordonnance est consacré à la « procédure de mise en concurrence », qui regroupe désormais, d’une part, l’appel d’offres, et, d’autre part, la procédure de dialogue concurrentiel. L’ordonnance crée notamment deux nouveaux articles, les articles L. 311-10-1 et L. 311-10-2 du Code de l’énergie. Après avoir indiqué que la procédure de mise en concurrence doit être conduite dans le respect des principes de transparence et d’égalité de traitement des candidats, le premier de ces textes précise les critères sur lesquels l’autorité administrative se fonde pour sélectionner les candidats. Outre le critère du prix, « dont la pondération représente plus de la moitié de celle de l’ensemble des critères »44, l’autorité peut se fonder sur d’autres critères objectifs, non discriminatoires et liés à l’objet de la procédure de mise en concurrence, tels que la qualité de l’offre, les performances en matière de protection de l’environnement, l’efficacité énergétique et le caractère innovant du projet, sa rentabilité, la sécurité d’approvisionnement ou encore le recours aux investissements participatifs. Le nouvel article L. 311-10-2 du Code de l’énergie précise quant à lui que les dépenses supportées par l’État pour réaliser les études préalables en vue de déterminer les sites d’implantation sur lesquels portent les procédures de mise en concurrence peuvent faire l’objet, en tout ou partie, d’un remboursement par les candidats retenus, selon des modalités précisées dans le cahier des charges.

La nouvelle procédure de dialogue concurrentiel a été précisée par le décret du 17 août 2016, qui définit avant tout les procédures de mise en concurrence désormais prévues par le Code de l’énergie. Ainsi, le nouvel article R. 311-12 du Code de l’énergie prévoit désormais que les procédures de mise en concurrence auxquelles le ministre chargé de l’Énergie peut recourir sont, d’une part, la procédure d’appel d’offres, « par laquelle le ministre chargé de l’Énergie choisit l’offre économiquement la plus avantageuse sans négociation sur la base de critères objectifs préalablement portés à la connaissance des candidats », et, d’autre part, la procédure de mise en concurrence avec dialogue concurrentiel, « par laquelle le ministre chargé de l’Énergie dialogue avec les candidats admis à participer à la procédure en vue de définir ou développer les solutions de nature à répondre à ses besoins et sur la base desquelles ces candidats sont invités à remettre une offre ».

Les nouveaux articles R. 311-25-1 et suivants détaillent cette dernière procédure. Le ministre chargé de l’Énergie doit élaborer un document de consultation, soumis à l’avis de la Commission de régulation de l’énergie, qui décrit les modalités de la procédure de dialogue concurrentiel. Les dossiers de candidature sont transmis par voie électronique à la Commission de régulation de l’énergie, laquelle examine les capacités techniques et financières des candidats au regard des modalités d’évaluation définies dans le document de consultation. Elle transmet ensuite au ministre chargé de l’Énergie la liste des candidatures qu’elle propose de sélectionner. Le ministre désigne les candidats sélectionnés et les invite à participer au dialogue concurrentiel, à l’issue duquel le ministre établit un cahier des charges. Ce dernier est transmis à la Commission de régulation de l’énergie pour avis et notifié aux candidats ayant participé au dialogue. Ils sont alors invités à transmettre leur offre selon les modalités prévues dans le cadre de la procédure d’appel d’offres.

Enfin, le titre III de l’ordonnance vise à améliorer l’intégration des énergies renouvelables au système électrique. Pour ce faire, l’ordonnance s’efforce de favoriser une meilleure coordination des gestionnaires de réseaux de transport et de distribution. Ainsi, elle oblige les producteurs (dépassant un certain seuil) raccordés à un réseau public de distribution à transmettre leur programme de fonctionnement prévisionnel à leur gestionnaire de réseau, et les gestionnaires de réseau de distribution à transmettre ces programmes d’appel, agrégés, à RTE.

B – Le régime juridique de l’autoconsommation se précise

Ord. n° 2016-1019, 27 juill. 2016, relative à l’autoconsommation d’électricité45 ; D. n° 2017-676, 28 avr. 2017, relatif à l’autoconsommation d’électricité et modifiant les articles D. 314-15 et D. 314-23 à D. 314-25 du Code de l’énergie46. À l’heure où la Commission européenne propose, dans le cadre du paquet « énergie propre » étudié précédemment dans cette chronique, de créer un cadre juridique européen pour l’autoconsommation47, le droit français a adopté son propre corpus juridique en la matière. Si la pratique de l’autoconsommation est en plein développement48, il n’y avait en effet jusque-là aucun texte spécifiquement dédié. Faisant suite aux dispositions de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte49, le gouvernement a donc adopté par voie d’ordonnance les premières règles en la matière50, qui ont été complétées par décret.

Sont ainsi créés au sein du Code de l’énergie deux nouveaux chapitres dédiés à l’autoconsommation, l’un dans la partie législative51, l’autre dans la partie réglementaire52. Ces nouveaux textes posent tout d’abord les définitions des deux types d’autoconsommation, individuelle et collective. Ainsi, « une opération d’autoconsommation individuelle est le fait pour un producteur, dit autoproducteur, de consommer lui-même et sur un même site tout ou partie de l’électricité produite par son installation. La part de l’électricité qui est consommée l’est soit instantanément, soit après une période de stockage »53. La qualification d’opération d’autoconsommation collective doit, quant à elle, être retenue « lorsque la fourniture d’électricité est effectuée entre un ou plusieurs producteurs et un ou plusieurs consommateurs finals liés entre eux au sein d’une personne morale et dont les points de soutirage et d’injection sont situés en aval d’un même poste public de transformation d’électricité de moyenne et basse tension »54.

Les participants à une opération d’autoconsommation collective doivent donc s’unir au sein d’une structure dotée de la personnalité morale, dont aucune liste n’a été livrée afin de laisser une certaine liberté dans la constitution des montages nécessaires à ces opérations. Il pourra par exemple s’agir d’une association ou d’une coopérative. De plus, les points de soutirage et d’injection doivent être situés en aval d’un même poste public de transformation d’électricité de moyenne et basse tension, afin de garantir une certaine proximité. Ces opérations d’autoconsommation collective peuvent par exemple être appropriées, comme l’indique le rapport remis au président de la République, pour « des projets d’approvisionnement de logements collectifs ou de centres commerciaux par une installation solaire implantée sur site »55.

On relèvera également qu’eu égard aux difficultés que pourrait susciter la qualification de « fourniture » d’électricité retenue par le nouvel article L. 315-2 du Code de l’énergie, les obligations pesant sur les fournisseurs d’électricité étant lourdes, le même texte, dans sa rédaction issue de la loi de ratification56, prend soin de préciser que les dispositions relatives au dispositif de contribution des fournisseurs à la sécurité d’approvisionnement en électricité, au tarif spécial « produit de première nécessité », ainsi que les dispositions du Code de la consommation relatives aux contrats de fourniture d’électricité, ne s’appliquent pas aux utilisateurs participant à une opération d’autoconsommation collective.

La question des tarifs d’utilisation des réseaux publics de distribution d’électricité est ensuite abordée. En dépit de l’avis contraire exprimé par la Commission de régulation de l’énergie57, l’ordonnance a fait le choix de prévoir l’établissement de tarifs d’utilisation spécifiques, lorsque la puissance installée est inférieure à 100 kilowatts58.

Par ailleurs, en cas d’opération d’autoconsommation collective, la personne morale créée à cet effet doit faire connaître au gestionnaire du réseau public de distribution compétent la répartition de la production autoconsommée entre les consommateurs finals concernés. Une certaine liberté est donc laissée aux personnes participant à l’opération d’autoconsommation dans la détermination de cette clé de répartition59, les dispositions réglementaires prévoyant néanmoins une méthode de répartition de la consommation applicable par défaut60. De plus, comme cela sera certainement fréquent, si un consommateur participant à une telle opération fait appel à un fournisseur pour compléter son alimentation en électricité, le gestionnaire du réseau public de distribution doit établir la consommation d’électricité relevant de ce fournisseur en prenant en compte la répartition indiquée par la personne morale et le comportement de chaque consommateur final concerné61. Les modalités précises ont été définies par le décret du 28 avril 201762.

L’hypothèse d’un excédent de production, non consommé et injecté sur le réseau, est également envisagée, en vue de faciliter la réalisation des projets d’autoconsommation de petite taille. Ainsi, les injections sur le réseau public de distribution effectuées à l’occasion d’une opération d’autoconsommation à partir d’une installation de production d’électricité dont la puissance installée ne dépasse pas 3 kilowatts – ce qui correspond à une installation d’autoconsommation domestique – et qui excèdent la consommation associée à cette opération d’autoconsommation peuvent être, à défaut d’être vendues à un tiers, cédées à titre gratuit au gestionnaire de réseau au gestionnaire du réseau public de distribution. Ces injections sont alors affectées aux pertes techniques de ce réseau63.

Les opérations d’autoconsommation font l’objet d’une obligation de déclaration, préalablement à la mise en service, auprès du gestionnaire du réseau public compétent64. Les modalités de traitement des demandes d’autoconsommation collective par les gestionnaires de réseaux publics de distribution devront, conformément aux dispositions réglementaires du Code de l’énergie, être précisées par la documentation technique de référence des gestionnaires de réseaux publics de distribution65. De même, la documentation technique de référence des gestionnaires de réseaux devra prévoir un modèle de contrat à conclure avec la personne morale créée pour les besoins de l’opération d’autoconsommation collective. Ce modèle de contrat devra respecter les exigences posées par l’article D. 315-9 du Code de l’énergie.

C – Consécration des réseaux fermés de distribution

Ord. n° 2016-1725, 15 déc. 2016, relative aux réseaux fermés de distribution66. En parallèle de l’adoption des premiers textes relatifs à l’autoconsommation, les réseaux fermés de distribution ont eux-mêmes reçu leur consécration textuelle. Le droit de l’Union européenne invitait à cette évolution du droit interne. En effet, la directive n° 2009/72/CE du 13 juillet 2009 concernant les règles communes pour le marché intérieur de l’électricité, offre aux États membres la possibilité de consacrer lesdits réseaux et de poser des règles spécifiques à leur égard67. Dans le sillage de ce texte, le Parlement a donc, à l’occasion de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, habilité le gouvernement à adopter par voie d’ordonnance les dispositions propres à ajouter au titre IV du livre III du Code de l’énergie un chapitre IV consacré aux réseaux fermés de distribution68. Tel est l’objet de l’ordonnance du 15 décembre 2016. La consécration conjuguée de l’autoconsommation collective par l’ordonnance du 27 juillet 2016 précédemment étudiée et des réseaux fermés de distribution quelques mois plus tard offre bien sûr d’importantes perspectives.

L’ordonnance s’est d’abord attachée à définir les réseaux fermés de distribution, en reprenant pour cela les éléments essentiels de définition livrés par la directive européenne69. Ainsi, « un réseau fermé de distribution est un réseau de distribution qui achemine de l’électricité à l’intérieur d’un site géographiquement limité et qui alimente un ou plusieurs consommateurs non résidentiels exerçant des activités de nature industrielle, commerciale ou de partages de services »70. Pour recevoir une telle qualification, le réseau doit néanmoins remplir l’une ou l’autre des conditions suivantes : soit l’intégration dans ce réseau des opérations ou du processus de production des utilisateurs est justifiée par des raisons spécifiques ayant trait à leur technique ou à leur sécurité ; soit ce réseau distribue de l’électricité essentiellement au propriétaire ou au gestionnaire de réseau ou à des entreprises qui leur sont liées au sens de l’article L. 233-3 du Code de commerce.

Cependant, si les réseaux fermés de distribution n’ont en principe vocation qu’à alimenter des consommateurs non résidentiels, une exception a été retenue, permettant d’admettre qu’un réseau fermé distribue, « à titre accessoire, de l’électricité à des clients résidentiels s’ils sont employés par le propriétaire du réseau ou associés à lui de façon similaire et résident dans la zone desservie par le réseau »71.

Une fois les réseaux fermés de distribution définis, l’ordonnance s’est attachée à préciser leur régime. L’exploitation d’un tel réseau est confiée à un gestionnaire, désigné par le propriétaire du réseau (et qui peut être ce dernier). Conformément au nouvel article L. 344-5 du Code de l’énergie, le gestionnaire du réseau est notamment tenu :

« 1° D’assurer la conception et la construction des ouvrages du réseau fermé de distribution d’électricité en s’abstenant de toute discrimination entre les utilisateurs de son réseau ;

2° D’exploiter lui-même ce réseau fermé de distribution d’électricité et d’en assurer l’entretien, la maintenance et la sécurité ;

3° De veiller, à tout instant, à l’équilibre des flux d’électricité, à l’efficacité, à la sécurité et à la sûreté du réseau qu’il exploite et d’assurer la couverture des pertes d’électricité et le maintien d’une capacité de réserve sur son réseau ;

4° De fournir aux utilisateurs du réseau qu’il exploite les informations nécessaires à un accès efficace, sous réserve des informations commercialement sensibles ;

5° De mettre en œuvre des actions d’efficacité énergétique et de favoriser l’insertion des énergies renouvelables sur le réseau qu’il exploite ;

6° D’exercer, le cas échéant, les activités de comptage pour les utilisateurs raccordés au réseau qu’il exploite, sauf lorsque les utilisateurs du réseau fermé de distribution interviennent sur les marchés de l’électricité ou participent à des mécanismes qui nécessitent une contractualisation avec les gestionnaires des réseaux publics ».

Cependant, des obligations trop lourdes à la charge des gestionnaires de réseaux fermés de distribution pourraient parfois être disproportionnées et donc être de nature à compromettre le développement de tels réseaux. La directive européenne concernant les règles communes pour le marché intérieur de l’électricité faisait état de cette crainte et indiquait, dès lors, qu’il « devrait être possible d’exempter le gestionnaire de réseau de distribution d’obligations qui pourraient constituer une charge administrative injustifiée en raison de la nature particulière des relations entre le gestionnaire et les utilisateurs du réseau. Les sites industriels, commerciaux ou de partage de services, tels que les gares ferroviaires, aéroports, hôpitaux, grands terrains de camping avec équipements intégrés, ou installations de l’industrie chimique, peuvent avoir des réseaux fermés de distribution en raison de la nature particulière de leurs opérations »72. Ainsi, le gestionnaire d’un réseau fermé de distribution peut demander à la Commission de régulation de l’énergie d’être exempté de l’obligation d’assurer la couverture des pertes d’électricité et le maintien d’une capacité de réserve, ainsi que de l’obligation de faire approuver par la Commission de régulation de l’énergie les tarifs des redevances d’utilisation du réseau fermé de distribution préalablement à leur entrée en vigueur73.

Par ailleurs, « les réseaux fermés de distribution doivent satisfaire aux mêmes conditions techniques et de sécurité que celles applicables en matière de transport et de distribution d’électricité »74, et l’exploitation d’un réseau fermé de distribution d’électricité est subordonnée à la délivrance d’une autorisation administrative, dans les conditions fixées par l’article L. 344-7 du Code de l’énergie. L’autorisation peut être refusée pour des motifs d’intérêt général liés au bon fonctionnement et à la sûreté du système électrique. Si l’autorisation est accordée, elle fixe la durée pour laquelle elle est délivrée, qui ne peut dépasser 20 ans mais peut être renouvelée. Le fait de construire ou d’exploiter un réseau fermé de distribution d’électricité sans être titulaire de l’autorisation administrative requise est passible de sanctions pénales (1 an d’emprisonnement et 150 000 € d’amende75).

D – Incompétence du juge judiciaire pour ordonner l’enlèvement d’éoliennes soumises au régime des ICPE

Cass. 1re civ., 25 janv. 2017, n° 15-2552676. La Cour de cassation a été appelée à préciser l’étendue des pouvoirs du juge judiciaire saisi, sur le fondement de la théorie des troubles anormaux de voisinage, d’une demande d’enlèvement d’éoliennes. En l’espèce, après réalisation d’une étude d’impact, d’une enquête publique et l’obtention d’un permis de construire, une société avait fait édifier deux parcs éoliens constitués chacun de 5 aérogénérateurs d’une hauteur supérieure à 50 mètres. Le propriétaire d’un château situé à proximité, se plaignant de nuisances visuelles, sonores et esthétiques ainsi que de la dépréciation de son bien immobilier, saisit alors la juridiction civile sur le fondement des troubles anormaux de voisinage en vue d’obtenir, non seulement le versement de dommages et intérêts, mais encore l’enlèvement des éoliennes. Son action fut couronnée de succès en première instance mais la cour d’appel de Montpellier infirma la décision des premiers juges en relevant d’office l’incompétence des juridictions judiciaires pour ordonner le démontage et l’enlèvement des éoliennes. La Cour de cassation l’a approuvée, en rappelant de manière particulièrement claire l’étendue des pouvoirs du juge judiciaire en présence d’une installation relevant du régime des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE), appliqué ici aux éoliennes terrestres.

En effet, dès lors que ces dernières sont soumises au régime des ICPE, « les tribunaux judiciaires ont compétence pour se prononcer tant sur les dommages et intérêts à allouer aux tiers lésés par le voisinage d’une telle installation classée que sur les mesures propres à faire cesser le préjudice que cette installation pourrait causer dans l’avenir », mais c’est à la « condition que ces mesures ne contrarient pas les prescriptions édictées par l’Administration en vertu des pouvoirs de police spéciale qu’elle détient ». La Cour de cassation reprend ainsi les enseignements du tribunal des conflits77 et sa propre jurisprudence, désormais classique dans le domaine des ICPE78. On sait en effet que le principe de la séparation des autorités administratives et judiciaires s’oppose à ce que le juge judiciaire substitue sa propre appréciation à celle que l’autorité administrative a portée sur les dangers et inconvénients que peuvent présenter ces installations pour les intérêts protégés par l’article L. 511-1 du Code de l’environnement, autrement dit soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l’agriculture, soit pour la protection de la nature, de l’environnement et des paysages, soit pour l’utilisation rationnelle de l’énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique. La Cour de cassation a donc approuvé la cour d’appel d’avoir relevé d’office l’incompétence de la juridiction judiciaire pour ordonner l’enlèvement des éoliennes litigieuses, afin d’éviter toute immixtion du juge judiciaire dans l’exercice de la police administrative spéciale des ICPE.

Ce n’est pas dire que le juge judiciaire soit dénué de tout pouvoir. Il demeure compétent, peu important que l’installation ait été régulièrement autorisée, pour statuer sur les troubles anormaux de voisinage résultant de l’exploitation d’éoliennes terrestres (comme tout autre ICPE) et pour ordonner, le cas échéant, soit une réparation par équivalent par la voie de dommages et intérêts, soit des mesures de cessation du trouble. Simplement, ces dernières sont limitées, le juge judiciaire ne pouvant, en particulier, ordonner l’enlèvement de ces installations, afin de ne pas contrarier les pouvoirs de l’Administration.

E – Nullité du contrat d’installation de panneaux photovoltaïques lorsque l’aide aux énergies renouvelables érigée en condition suspensive est impossible

Cass. 1re civ., 28 sept. 2016, n° 15-1814879. Les contrats d’installation de panneaux photovoltaïques et les contrats de crédit qui les accompagnent donnent lieu à un contentieux très abondant lorsque, comme il est malheureusement fréquent, l’opération n’est pas menée à bien, l’entrepreneur n’achevant pas les travaux. Il s’expose alors à la résolution du contrat principal pour cause d’inexécution, emportant dans son sillage la résolution de plein droit du contrat de crédit. Cette chronique a régulièrement l’occasion d’en faire état80.

Mais ces contrats sont aussi de plus en plus souvent présentés devant les prétoires, alors même qu’aucune défaillance dans l’exécution du contrat n’est à reprocher à l’entrepreneur, car les contrats d’installation de panneaux photovoltaïques, tout comme d’éoliennes domestiques d’ailleurs, ont bien souvent pour caractéristique de vanter d’une manière ou d’une autre des perspectives d’économies, voire de profit, exagérées. Les juges n’hésitent pas, alors, à exploiter toutes les ressources du droit commun des contrats pour sanctionner cet optimisme aussi excessif que trompeur. C’est ainsi, par exemple, que la Cour de cassation a pu admettre la résolution pour inexécution d’un contrat de vente et d’installation d’éolienne domestique au motif que l’installation présentait une rentabilité insuffisante par rapport à ce qui avait été annoncé, notamment dans les documents publicitaires de l’entreprise81. Se situant, cette fois-ci, sur le terrain de la validité du contrat, et non plus de son exécution, c’est la manière dont les avantages fiscaux et les aides aux énergies renouvelables étaient présentés dans un contrat d’installation de panneaux photovoltaïques qui a conduit la Cour de cassation à admettre la nullité du contrat.

En l’espèce, un particulier avait conclu un contrat d’installation de panneaux photovoltaïques ainsi qu’un contrat de crédit pour financer l’opération. Il a cependant sollicité l’annulation de ces deux contrats, une fois constaté que l’aide financière aux énergies renouvelables présentée comme devant être versée par le conseil général était en réalité d’un montant inférieur à ce qu’indiquait le bon de commande. Les juges du fond ont rejeté la demande, mais la Cour de cassation a exercé sa censure sous le visa de l’article 1172 du Code civil, qui, dans sa rédaction antérieure à la réforme du droit des contrats opérée par l’ordonnance du 10 février 201682, prévoit que toute condition d’une chose impossible est nulle, et rend nulle la convention qui en dépend. Dès lors, en rejetant la demande de nullité, « alors qu’elle avait relevé que l’aide aux énergies renouvelables, érigée en condition suspensive par les parties, ne pouvait légalement atteindre le montant mentionné dans le contrat d’installation, en sorte que l’accomplissement de cette condition, qui avait déterminé le consentement de M. X, était impossible », la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l’article 1172 du Code civil.

La Cour de cassation a donc tiré toutes les conséquences de la qualification de condition suspensive, en rappelant la nullité à laquelle s’expose, non seulement la condition elle-même, mais encore le contrat en son entier, lorsque l’événement érigé en condition est impossible (le contrat de crédit finançant l’opération devant lui-même, en conséquence, être déclaré nul). Or, c’est bien cette qualification qui est ici retenue, alors même que ce qui était impossible n’était pas le principe du versement d’une subvention par le conseil général, mais le montant de ladite subvention. Ériger en condition suspensive le versement d’une aide de 1 000 €, alors qu’elle ne peut en réalité être que de 800 €, constitue bien une condition dont la réalisation est impossible, exposant l’entier contrat à la nullité.

Une fois de plus, les rédacteurs des contrats d’installation de panneaux photovoltaïques sont donc appelés à la prudence et à ne pas vanter des avantages financiers impossibles à obtenir. La solution est ici d’autant plus notable que le moyen tiré de la violation de l’article 1172 du Code civil a été soulevé d’office par la Cour de cassation, ce qui démontre en outre que les promesses chimériques peuvent, sur le terrain de la validité du contrat, être saisies par d’autres moyens que les seuls vices du consentement tels que le dol. La possibilité de maintenir cette solution sur le fondement des dispositions relatives à la condition comporte néanmoins une part d’incertitude, car les prévisions de l’ancien article 1172 n’ont pas été intégralement reprises à l’occasion de la réforme du droit des contrats. Les dispositions nouvelles relatives aux obligations conditionnelles83 n’évoquent plus la notion de condition impossible, se contentant de se référer à la condition illicite. Une condition impossible est néanmoins, par hypothèse, une condition qui devra défaillir, et les nouvelles dispositions prévoient toujours qu’en cas de défaillance de la condition suspensive, l’obligation est réputée n’avoir jamais existé84.

III – Droit nucléaire

A – Nouvelles dispositions relatives à l’indemnisation des victimes des essais nucléaires : le renforcement de la présomption de causalité grâce à la disparition de la notion de risque négligeable

L. n° 2017-256, 28 févr. 2017, de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique, art. 11385. Les précédentes livraisons de cette chronique ont déjà attesté de l’importance du contentieux qui s’est développé depuis quelques années au sujet de l’indemnisation des victimes des essais nucléaires français. La période couverte par la présente livraison a, de nouveau, été riche en rebondissements en la matière.

On rappellera que, par la loi n° 2010-2 du 5 janvier 2010 relative à la reconnaissance et à l’indemnisation des victimes des essais nucléaires français, le législateur a créé un régime spécial d’indemnisation, en vue de faciliter la réparation des préjudices subis par les personnes ayant développé certaines pathologies, des cancers essentiellement, suite à leur exposition aux rayonnements ionisants à l’occasion des essais nucléaires. Les demandes des victimes se heurtaient en effet jusque-là à d’importantes difficultés. Le cœur du problème tenait à la démonstration du lien de causalité entre les essais nucléaires et la maladie du demandeur. En effet, s’il est scientifiquement établi que l’exposition aux rayonnements ionisants augmente le risque de développer certains cancers, il n’existe en revanche aucun moyen biologique ou médical d’établir, dans chaque cas particulier, que le cancer développé par le demandeur a bien été causé par cette exposition plutôt que par toute autre cause possible (facteurs génétiques ou comportementaux, comme le tabagisme par exemple, exposition à d’autres substances toxiques…), le cancer étant une maladie multi-factorielle, « sans signature ».

C’est pourquoi la loi du 5 janvier 2010 est venue établir une présomption de causalité, bénéficiant à tout demandeur justifiant, d’une part, avoir résidé ou séjourné dans l’une des zones et aux dates précisées par la loi et, d’autre part, avoir développé l’une des maladies dont la liste a été fixée par décret86. Les demandes d’indemnisation, originairement transmises au ministre de la Défense statuant après recommandation du comité d’indemnisation des victimes des essais nucléaires (CIVEN), relèvent désormais du pouvoir décisionnel de ce dernier87.

Néanmoins, les espoirs créés par l’adoption de la loi du 5 janvier 2010 ont rapidement été déçus. En effet, un nombre infime de demandes s’est soldé par une issue positive, la loi offrant au CIVEN la possibilité de renverser la présomption légale de causalité, selon des modalités particulières. L’article 4, V, de la loi prévoyait que le comité devait examiner si les conditions de l’indemnisation étaient réunies, tout en précisant que si elles l’étaient, le demandeur bénéficiait alors « d’une présomption de causalité, à moins qu’au regard de la nature de la maladie et des conditions de son exposition, le risque attribuable aux essais nucléaires puisse être considéré comme négligeable ». Or, la plupart du temps, le CIVEN a considéré que le risque attribuable aux essais était négligeable. Pour ce faire, le CIVEN calculait une probabilité de causalité, à l’aide d’un logiciel s’appuyant sur différentes données, statistiques pour certaines, personnelles au demandeur pour d’autres (âge, sexe, type de cancer, dose d’irradiation…)88. Un seuil avait été retenu par le CIVEN : dès lors que la probabilité de causalité ainsi calculée était inférieure à 1 %, le risque attribuable aux essais nucléaires était considéré comme négligeable, la présomption de causalité était renversée et aucune indemnisation n’était donc proposée au demandeur89. D’après les premiers chiffres qui avaient été diffusés par le CIVEN, au 1er octobre 2015, plus de 98 % des demandes s’étaient heurtées à cette méthode et avaient essuyé un rejet, faute de dépasser ce seuil de 1 %90.

C’est pourquoi un contentieux massif s’est progressivement développé devant les juridictions administratives, contestant les décisions de rejet. Le Conseil d’État lui-même a eu l’occasion de préciser certains points importants concernant le renversement de la présomption de causalité91, qui ont permis d’augmenter le nombre d’indemnisations finalement obtenues92. Tout en admettant la légalité de la méthode utilisée par le CIVEN pour évaluer le risque attribuable aux essais nucléaires, le Conseil d’État a en effet posé quelques limites. Il a tout d’abord précisé les critères permettant d’évaluer ce risque, en indiquant que le comité « peut notamment prendre en compte le délai de latence de la maladie, le sexe du demandeur, son âge à la date du diagnostic, sa localisation géographique au moment des tirs, les fonctions qu’il exerçait effectivement, ses conditions d’affectation, ainsi que, le cas échéant, les missions de son unité au moment des tirs ». Surtout, le Conseil d’État s’est penché sur l’usage des données dosimétriques, déterminantes dans la méthode de calcul utilisée. Certes, « le calcul de la dose reçue de rayonnements ionisants constitue l’un des éléments sur lequel l’autorité chargée d’examiner la demande peut se fonder afin d’évaluer le risque attribuable aux essais nucléaires ». Mais le Conseil d’État a néanmoins conclu qu’il appartient à l’autorité en charge d’examiner la demande « de vérifier, avant d’utiliser ces résultats, que les mesures de surveillance de la contamination interne et externe ont, chacune, été suffisantes au regard des conditions concrètes d’exposition de l’intéressé ; qu’en l’absence de mesures de surveillance de la contamination interne ou externe et en l’absence de données relatives au cas des personnes se trouvant dans une situation comparable à celle du demandeur du point de vue du lieu et de la date de séjour, il appartient à cette même autorité de vérifier si, au regard des conditions concrètes d’exposition de l’intéressé précisées ci-dessus, de telles mesures auraient été nécessaires ; que si tel est le cas, l’Administration ne peut être regardée comme rapportant la preuve de ce que le risque attribuable aux essais nucléaires doit être regardé comme négligeable et la présomption de causalité ne peut être renversée ». Une importante limite était ainsi apportée à la pratique menée jusque-là par le CIVEN, de nature à rendre les décisions à venir plus contrastées.

Cette évolution, bienvenue, restait cependant limitée. Dans ces conditions, à l’occasion d’un déplacement en Polynésie française en février 2016, le président Hollande avait annoncé une révision du décret d’application de la loi du 5 janvier 201093, en vue de préciser la notion de risque négligeable. C’est finalement à l’occasion des débats parlementaires relatifs à la loi de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer qu’un amendement relatif à l’indemnisation des victimes des essais nucléaires a été présenté par le gouvernement (amendement n° 239). Celui-ci prévoyait une évolution mesurée du système. Il proposait en effet de compléter l’article 4, V, de la loi du 5 janvier 2010, en précisant le seuil en dessous duquel le CIVEN pouvait considérer le risque attribuable aux essais nucléaires comme négligeable. Autrement dit, n’était proposée qu’une réforme à la marge, le CIVEN demeurant libre de déterminer la méthode à appliquer pour apprécier ce risque. Il était simplement proposé qu’un seuil, plus bas que celui retenu jusque-là par le CIVEN et fixé à 0,3 %, soit légalement fixé. L’amendement proposait également d’intégrer dans le même texte les principaux enseignements de la jurisprudence du Conseil d’État rappelée précédemment.

Après discussion, c’est finalement une réforme plus drastique qui a été adoptée, consistant à supprimer purement et simplement la notion de risque négligeable. Ainsi, l’article 4, V, alinéa 1er, se contente désormais de prévoir que si les conditions de l’indemnisation sont réunies, le demandeur bénéficie d’une présomption de causalité, les termes « à moins qu’au regard de la nature de la maladie et des conditions de son exposition le risque attribuable aux essais nucléaires puisse être considéré comme négligeable » étant supprimés. La réforme est donc plus profonde que ce qui avait été originairement proposé. Et l’on peut s’en féliciter. Comme il a été rappelé, la notion de risque négligeable constituait jusque-là le point d’achoppement du régime d’indemnisation des victimes des essais nucléaires. On pourrait bien sûr gloser sur la baisse du seuil à 0,3 % qui avait été proposée par le gouvernement. Sans doute cet abaissement aurait-il permis à quelques demandeurs d’obtenir une indemnisation qui leur aurait été fermée sans cela. Sans doute le chiffre proposé avait-il été retenu à la lumière des affaires jusque-là présentées et semblait-il de nature à faire évoluer le nombre d’indemnisations proposées par le CIVEN. Mais il ne s’agit toutefois que d’un chiffre. Or, la jurisprudence antérieure a montré que le calcul de probabilité pouvait être défaillant et qu’une décision de rejet du CIVEN fondée sur une probabilité égale à 0 % pouvait tout de même mériter d’être annulée94. Par conséquent, dès lors que l’objectif est d’améliorer sensiblement le sort des demandeurs en la matière, la disparition pure et simple de la notion de risque négligeable constitue certainement une solution plus sûre.

Le législateur a, de plus, fait le choix d’une application large des dispositions nouvelles. En effet, l’article 113, II, de la loi du 28 février 2017 précise, s’agissant des demandes qui ont fait l’objet d’une décision de rejet par le ministre de la Défense ou le CIVEN avant l’entrée en vigueur de cette loi, que le CIVEN « réexamine la demande s’il estime que l’entrée en vigueur de la présente loi est susceptible de justifier l’abrogation de la précédente décision ». Le demandeur ou ses ayants-droit peuvent également présenter une nouvelle demande d’indemnisation, dans les 12 mois de l’entrée en vigueur de la loi. On relèvera que la rédaction finalement adoptée est plus favorable aux victimes que celle qui avait à l’origine été proposée par le gouvernement, laquelle excluait le réexamen des décisions de rejet ayant donné lieu à une décision juridictionnelle irrévocable avant l’entrée en vigueur de la loi nouvelle. Cette précision a été supprimée, en vue d’assurer une égalité de traitement entre les victimes, peu important que leur cas ait ou non fait l’objet d’une décision de rejet confirmée par le juge avant l’entrée en vigueur de la loi du 28 février 2017.

Enfin, l’article 113, III, de la loi du 28 février 2017 prévoit qu’une « commission composée pour moitié de parlementaires et pour moitié de personnalités qualifiées propose, dans un délai de 12 mois à compter de la promulgation de la présente loi, les mesures destinées à réserver l’indemnisation aux personnes dont la maladie est causée par les essais nucléaires. Elle formule des recommandations à l’attention du gouvernement ». Autant dire que le chapitre n’est pas clos et que le régime d’indemnisation des victimes des essais nucléaires pourrait connaître de nouvelles évolutions dans un avenir proche. D’ores et déjà, comme nous allons le voir dans la suite de cette chronique, les dispositions nouvelles suscitent d’importantes questions, auxquelles le Conseil d’État a été amené à apporter quelques éléments de réponse.

B – Applicabilité immédiate des dispositions nouvelles relatives à l’indemnisation des victimes des essais nucléaires et régime de la présomption de causalité

CE, 28 juin 2017, n° 40977795. Si l’on peut, par principe, se féliciter de la réforme opérée par la loi du 28 février 2017, celle-ci soulève néanmoins d’importantes questions auxquelles les juridictions administratives ont été immédiatement confrontées, tant sur le fond que sur l’application dans le temps des dispositions nouvelles et l’office exact du juge. À telle enseigne que la cour administrative d’appel de Bordeaux a saisi pour avis le Conseil d’État, en lui posant pas moins de 6 questions, auxquelles le Conseil d’État a répondu le 28 juin 2017.

Sur le fond, la question majeure tient au régime désormais applicable à la présomption de causalité. Il s’agit de savoir si, du fait de la disparition de la notion de risque négligeable, jusque-là susceptible de renverser la présomption légale, cette dernière doit ou non être considérée comme une présomption irréfragable. Si certains arguments pouvaient plaider en ce sens, rien ne permettait cependant de l’affirmer avec certitude96 et le Conseil d’État l’a rapidement démenti. Selon le Conseil d’État, en supprimant la notion de risque négligeable, le législateur a « entendu que, dès lors qu’un demandeur satisfait aux conditions de temps, de lieu et de pathologie prévues par l’article 2 de la loi du 5 janvier 2010 modifiée, il bénéficie de la présomption de causalité entre l’exposition aux rayonnements ionisants due aux essais nucléaires français et la survenance de sa maladie. Cette présomption ne peut être renversée que si l’Administration établit que la pathologie de l’intéressé résulte exclusivement d’une cause étrangère à l’exposition aux rayonnements ionisants due aux essais nucléaires, en particulier parce qu’il n’a subi aucune exposition à de tels rayonnements ». Il a ajouté que « les dispositions du III de l’article 113 de la loi du 28 février 2017, qui se bornent à instituer une commission chargée de proposer au gouvernement des mesures destinées à réserver l’indemnisation aux personnes dont la maladie est causée par les essais nucléaires, sont, en tout état de cause, dépourvues d’incidence sur cette présomption de causalité ». La présomption légale de causalité demeure donc bien une présomption réfragable, que le CIVEN pourra continuer à renverser. Un tel renversement sera cependant bien plus difficile que par le passé. La notion de « risque négligeable » permettait de renverser la présomption en établissant que la causalité était très improbable. L’avis du Conseil d’État nous enseigne que la présomption ne pourra désormais être renversée qu’en établissant que la causalité est impossible, ce qui est très différent. L’objet de la preuve à apporter est en effet bien, selon le Conseil d’État, le fait que la pathologie trouve sa source exclusive dans une cause étrangère à l’exposition aux rayonnements ionisants due aux essais nucléaires. Il donne en outre un exemple en indiquant que cela peut résulter de la démonstration d’une absence de toute exposition à ces rayonnements. Restera, bien sûr, à savoir selon quels moyens une telle preuve pourra être apportée, ce qui soulèvera notamment la question de la place susceptible d’être accordée aux présomptions du fait de l’homme, qui requièrent la présence d’indices graves, précis et concordants, pour renverser la présomption légale.

La question de l’application dans le temps des dispositions nouvelles et de l’office du juge saisi des recours contre les décisions de rejet émises par le CIVEN (ou le ministre de la Défense) méritait également quelques éclairages. En réponse aux questions posées par la cour administrative d’appel de Bordeaux, le Conseil d’État a tout d’abord indiqué que les dispositions nouvelles étaient d’application immédiate et qu’elles s’appliquaient bien aux instances en cours à la date d’entrée en vigueur de la loi nouvelle, à savoir le lendemain de sa publication au Journal officiel (soit le 2 mars 2017).

Restait alors à savoir quel serait l’office exact du juge et comment devraient exactement se répartir les rôles entre le CIVEN et le juge administratif, question importante eu égard au nombre de dossiers vraisemblablement appelés à être réexaminés à l’aune des dispositions nouvelles. Le Conseil d’État devait ainsi répondre à la question de savoir si le juge pouvait « se borner à renvoyer la victime devant le comité d’indemnisation des victimes des essais nucléaires pour la fixation du montant de son indemnisation ». À l’appui des dispositions de l’article 113, II, de la loi du 28 février 2017 précédemment étudiées, le Conseil d’État a posé une distinction en fonction de la date et de l’objet de la décision contestée devant les juridictions administratives. Ce texte prévoit que lorsqu’une demande d’indemnisation a fait l’objet d’une décision de rejet par le ministre de la Défense ou le CIVEN avant l’entrée en vigueur de la loi du 28 février 2017, le CIVEN réexamine la demande s’il estime que l’entrée en vigueur de cette loi est susceptible de justifier l’abrogation de la précédente décision, et que le demandeur ou ses ayants-droit peuvent eux-mêmes lui présenter une nouvelle demande d’indemnisation. Selon le Conseil d’État, puisque le législateur a confié au CIVEN le soin de réexaminer ces demandes, il en résulte que le législateur a entendu que, lorsque le juge statue sur une décision antérieure à l’entrée en vigueur de la loi nouvelle, « il se borne, s’il juge (…) qu’elle est illégale, à l’annuler et à renvoyer au CIVEN le soin de réexaminer la demande ». En revanche, « il appartient au juge du plein contentieux, saisi d’un litige relatif à une décision intervenue après réexamen d’une ancienne demande d’indemnisation ou en réponse à une demande postérieure à l’entrée en vigueur de la loi du 28 février 2017, de statuer en faisant application des dispositions de la loi du 5 janvier 2010 dans leur rédaction issue de la loi du 28 février 2017 et, s’il juge illégale la décision contestée, de fixer le montant de l’indemnité due au demandeur, sous réserve que ce dernier ait présenté des conclusions indemnitaires chiffrées, le cas échéant, après que le juge l’a invité à régulariser sa demande sur ce point ». Ainsi, tout en clarifiant l’application dans le temps des règles nouvelles, vraisemblablement appelées à modifier sensiblement le résultat de nombreuses demandes du fait de la disparition de la notion de risque négligeable, le Conseil d’État se situe dans la continuité de sa jurisprudence antérieure relative à l’office du juge, telle qu’il l’avait exposée quelques mois plus tôt et sur laquelle nous reviendrons dans la suite de cette chronique.

C – Indemnisation des victimes des essais nucléaires : un dispositif de solidarité nationale relevant du plein contentieux

CE, 17 oct. 2016, n° 40037597. Saisi pour avis par la cour administrative d’appel de Paris, le Conseil d’État a été appelé à se prononcer sur la nature du régime d’indemnisation institué par la loi du 5 janvier 2010 et sur la nature du contentieux relatif à la mise en œuvre de ce régime. Les solutions, émises avant la réforme législative opérée par la loi du 28 février 2017 relative à l’égalité réelle outre-mer étudiée précédemment dans la présente chronique, conservent aujourd’hui toute leur valeur.

Sur le premier point, il s’agissait de déterminer si l’État indemnise les victimes des essais nucléaires en tant que personne responsable du dommage ou au titre de la solidarité nationale. L’hésitation était permise et on pouvait même penser, bien que le terme « responsabilité » ne soit à aucun moment employé dans la loi du 5 janvier 2010, qu’il s’agissait d’un régime spécial de responsabilité. Tel n’a cependant pas été l’avis du Conseil d’État, qui a considéré « qu’en confiant au CIVEN la mission d’indemniser, selon une procédure amiable exclusive de toute recherche de responsabilité, les dommages subis par les victimes de ces essais, le législateur a institué un dispositif assurant l’indemnisation des victimes concernées au titre de la solidarité nationale ». L’enjeu de cette qualification était important puisqu’elle conditionnait notamment la possibilité pour les tiers payeurs ayant versé des prestations aux victimes d’exercer leurs recours subrogatoires devant le CIVEN. Les dispositions de l’article L. 376-1 du Code de la sécurité sociale (de même que les dispositions spécifiques applicables en Polynésie française) évoquent en effet les recours du tiers payeur contre « l’auteur (ou le tiers) responsable » du dommage. Dès lors, l’indemnisation incombant au CIVEN ayant « pour objet d’assurer, au titre de la solidarité nationale, la réparation du dommage subi par les victimes des essais nucléaires français, et non de reconnaître que l’État, représenté par le CIVEN, aurait la qualité d’ “auteur responsable” ou de “tiers responsable” des dommages, les recours des tiers payeurs ayant versé des prestations à la victime d’un dommage corporel (…) ne peuvent être exercés devant le CIVEN sur le fondement de la loi du 5 janvier 2010 ».

Sur le second point, le Conseil d’État a précisé que le contentieux relatif à la mise en œuvre de ce régime spécial d’indemnisation relève « exclusivement du plein contentieux ». La précision est d’autant plus importante que, curieusement, l’essentiel du contentieux s’était jusque-là situé sur le terrain du recours pour excès de pouvoir, alors que l’objectif est pourtant bien d’obtenir une indemnisation98. Par conséquent, le juge administratif se contentait, lorsque cela était justifié, d’annuler la décision de rejet rendue par le CIVEN (ou le ministre de la Défense). Tout au plus enjoignait-il parfois au CIVEN de procéder à une offre d’indemnisation. La majorité des offres d’indemnisation émises par le CIVEN ces derniers mois l’ont d’ailleurs été sur injonction des juridictions administratives99. Le Conseil d’État remet ainsi un peu d’ordre et permet de rendre à ce contentieux sa vraie nature, dès lors qu’il relève « exclusivement » du plein contentieux. Il permet surtout au juge administratif d’exercer la plénitude de ses pouvoirs dans ce contentieux indemnitaire, et de fixer lui-même, le cas échéant, le montant de l’indemnisation due100, réduisant ainsi la durée des procédures.

Notes de bas de pages

  • 1.
    Au 15 juillet 2017, l’échéancier de mise en application de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte ne fait plus apparaître que 4 décrets en attente d’adoption : https://www.legifrance.gouv.fr/affichLoiPubliee.do?idDocument=JORFDOLE000029310724&type=echeancier&typeLoi=&legislature=14.
  • 2.
    Il s’agit de créer ou de refondre les textes relatifs au marché de l’électricité, à l’efficacité énergétique et à l’écoconception, aux énergies renouvelables et à la gouvernance de l’Union de l’énergie.
  • 3.
    Proposition de règlement sur la gouvernance de l’Union de l’énergie, COM (2016) 759 final/2 – 2016/0375 (COD).
  • 4.
    Proposition de directive modifiant la directive n° 2012/27/UE relative à l’efficacité énergétique, COM (2016) 761 final – 2016/0376 (COD).
  • 5.
    Proposition de directive modifiant la directive n° 2010/31/UE sur la performance énergétique des bâtiments, COM (2016) 765 final – 2016/0381 (COD).
  • 6.
    Analyse d’impact concernant la modification de la directive sur la performance énergétique des bâtiments, SWD (2016) 414.
  • 7.
    Proposition de directive relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables (refonte), COM (2016) 767 final – 2016/0382 (COD).
  • 8.
    Proposition de dir. relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables, préc., art. 6.
  • 9.
    V. infra II, B.
  • 10.
    V. en particulier la proposition de directive concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité, COM (2016) 864 final/2 – 2016/0380 (COD).
  • 11.
    Défini par la proposition de directive sur le marché intérieur de l’électricité comme « un contrat de fourniture d’électricité conclu entre un fournisseur et un client final qui reflète le prix sur le marché au comptant, y compris sur le marché à un jour, calculé à des intervalles équivalant au moins à la définition temporelle des produits utilisés sur les marchés ».
  • 12.
    JO, 28 oct. 2016.
  • 13.
    AN, rapp. info. n° 4157 de la mission d’information commune sur l’application de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, déposé le 26 oct. 2016, p. 333.
  • 14.
    L. n° 2005-781, 13 juill. 2005, de programme fixant les orientations de la politique énergétique.
  • 15.
    L. n° 2015-992, 17 août 2015, relative à la transition énergétique pour la croissance verte, art. 176.
  • 16.
    Sur ces procédures, v. infra II, A).
  • 17.
    C. énergie, art. L. 311-10.
  • 18.
    C. énergie, art. L. 314-6 et C. énergie, art. L. 314-23.
  • 19.
    https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/programmations-pluriannuelles-lenergie-ppe.
  • 20.
    Sur l’autoconsommation, v. infra II, B.
  • 21.
    V. A., 24 avr. 2016, relatif aux objectifs de développement des énergies renouvelables (JO, 26 avr. 2016).
  • 22.
    D. n° 2016-1098, 11 août 2016, relatif aux modalités d’évaluation et de révision simplifiée de la programmation pluriannuelle de l’énergie (JO, 13 août 2016).
  • 23.
    Lebon, p. 384 ; AJDA 2016, p. 2119, note Mellerey F. ; JCP A 2016, 2252, note Le Bot O. ; Énergie - Env. -Infrastr. 2017, comm. 2, note Boda J.-S.
  • 24.
    CE, ass., 21 mars 2016, n° 390023, Sté NC Numéricable, et CE, ass., 21 mars 2016, n° 368082, Sté Fairvista International, publié au recueil Lebon ; AJDA 2016, p. 572 et 717, chron. Dutheillet de Lamothe L. et Odinet G. ; RFDA 2016, p. 497, concl. Von Coaster S., et p. 506, concl. Daumas V. ; D. 2016, p. 715, obs. De Montecler M.-C. ; Rev. sociétés 2016, p. 608, note Dexant O. ; RTD civ. 2016, p. 571, obs. Deumier P.
  • 25.
    En ce sens, CE, 11 oct. 2012, n° 346378, Sté ITM Entreprises et a., publié au recueil Lebon.
  • 26.
    Le Conseil d’État avait déjà eu l’occasion de retenir ce point de départ, pour des actes réglementaires (v. CE, 11 janv. 2006, n° 273665, Synd. nat. CGT-ANPE, mentionné aux tables du recueil Lebon), comme pour des actes individuels (v. CE, 25 nov. 2015, n° 383482, Sté Gibmedia, publié au recueil Lebon).
  • 27.
    La délibération litigieuse présentait une nature complexe, car elle correspondait tout à la fois à une prise de position de la CRE sur l’opération individuelle conclue entre les deux sociétés et à une communication ou une recommandation générale à l’adresse des opérateurs. Le Conseil d’État a bien relevé ce 2d caractère dans sa décision, en rappelant que la délibération litigieuse se présentait comme une « communication », s’adressant « aux opérateurs des marchés de l’électricité ».
  • 28.
    Aujourd’hui devenu C. consom., art. L. 224-8.
  • 29.
    JO, 29 juin 2017.
  • 30.
    C. énergie, art. L. 122-1.
  • 31.
    Ce qui conduit le Code de l’énergie à présenter désormais une curieuse numérotation, passant directement de l’article R. 122-1 à l’article R. 122-4.
  • 32.
    C. consom., art. R. 612-5.
  • 33.
    C. énergie, art. R. 122-3 anc.
  • 34.
    C. énergie, art. R. 122-2 anc.
  • 35.
    C. énergie, art. L. 122-1, al. 3 : le médiateur national de l’énergie « formule sa recommandation dans un délai fixé par voie réglementaire et motive sa réponse. Sa saisine suspend la prescription des actions en matière civile et pénale pendant ce délai ».
  • 36.
    V. not. Cass. ass. plén., 21 déc. 2006, n° 00-20493 : Bull. ass. plén., n° 15 ; D. 2007, p. 835, note Morvan P., JCP G 2007, II, 10040, note Dreyer E.
  • 37.
    Dir. n° 2008/52/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2008 sur certains aspects de la médiation en matière civile et commerciale, JOUE n° L 136, 24 mai 2008.
  • 38.
    JO, 5 août 2016 ; Énergie - Env. -Infrastr. 2016, comm. 81, obs. Sablière P.
  • 39.
    JO, 19 août 2016.
  • 40.
    L. n° 2015-992, 17 août 2015, relative à la transition énergétique pour la croissance verte, art. 119.
  • 41.
    L. n° 2017-227, 24 févr. 2017, ratifiant les ordonnances nos 2016-1019 du 27 juillet 2016 relative à l’autoconsommation d’électricité et 2016-1059 du 3 août 2016 relative à la production d’électricité à partir d’énergies renouvelables et visant à adapter certaines dispositions relatives aux réseaux d’électricité et de gaz et aux énergies renouvelables : JO, 25 févr. 2017.
  • 42.
    Rapport au président de la République relatif à l’ordonnance n° 2016-1059 du 3 août 2016 relative à la production d’électricité à partir d’énergies renouvelables : JO, 5 août 2016.
  • 43.
    Sur les modalités de cette cession et l’agrément des organismes, v. C. énergie, art. R. 314-52-1 et s., créés par le décret n° 2016-690 du 28 mai 2016 pris pour l’application de l’article L. 314-6-1 du Code de l’énergie.
  • 44.
    Cette précision a été ajoutée par l’article 4 de la loi n° 2017-227 du 24 février 2017, préc., ratifiant l’ordonnance n° 2016-1059 du 3 août 2016.
  • 45.
    JO, 28 juill. 2016.
  • 46.
    JO, 30 avr. 2017.
  • 47.
    V. supra I, A.
  • 48.
    V. not. ministère de l’Écologie, du développement durable et de l’énergie, rapport sur l’autoconsommation et l’autoproduction de l’électricité renouvelable, déc. 2014.
  • 49.
    L. n° 2015-992, 17 août 2015, relative à la transition énergétique pour la croissance verte, art. 119, 3°, habilitant le gouvernement à adopter par voie d’ordonnance les mesures relevant du domaine de la loi afin « de mettre en place les mesures nécessaires à un développement maîtrisé et sécurisé des installations destinées à consommer tout ou partie de leur production électrique, comportant notamment la définition du régime de l'autoproduction et de l'autoconsommation, les conditions d'assujettissement de ces installations au tarif d'utilisation des réseaux publics de distribution d'électricité et le recours à des expérimentations. Un régime spécifique est prévu pour les installations individuelles d'une puissance inférieure à 100 kilowatts ».
  • 50.
    L’ordonnance a été ratifiée par la loi L. n° 2017-227, 24 févr. 2017, préc.
  • 51.
    C. énergie, art. L. 315-1 et s.
  • 52.
    C. énergie, art. D. 315-1 et s.
  • 53.
    C. énergie, art. L. 315-1. La définition initialement prévue par l’ordonnance du 27 juillet 2016 a été largement retouchée par la loi de ratification précitée, art. 8.
  • 54.
    C. énergie, art. L. 315-2.
  • 55.
    Rapport au président de la République relatif à l’ordonnance n° 2016-1019 du 27 juillet 2016 relative à l’autoconsommation d’électricité : JO, 28 juill. 2016.
  • 56.
    L. n° 2017-227, 24 févr. 2017, préc., art. 9.
  • 57.
    Délibération de la CRE du 13 juillet 2016 portant avis sur le projet d’ordonnance relative à l’autoconsommation d’électricité.
  • 58.
    C. énergie, art. L. 315-3.
  • 59.
    Comme le relevait la CRE dans sa délibération du 13 avril 2017 portant avis sur le projet de décret relatif à l’autoconsommation d’électricité, il est pertinent d’offrir la possibilité aux utilisateurs liés par une opération d’autoconsommation « de convenir entre eux d’une répartition de la production autoconsommée pouvant se fonder sur des critères statiques extérieurs à la production d’énergie : par exemple par application d’une clé de répartition liée aux tantièmes d’une copropriété, ou par participation au financement d’une installation de production ou de stockage d’électricité, etc. ».
  • 60.
    La répartition s’effectue alors au prorata de la consommation des consommateurs finals participant à l’opération (C. énergie, art. D. 315-6, al. 2).
  • 61.
    C. énergie, art. L. 315-4.
  • 62.
    V. C. énergie, art. D. 315-3 et s.
  • 63.
    C. énergie, art. L. 315-5 et C. énergie, art. D. 315-10.
  • 64.
    C. énergie, art. L. 315-7.
  • 65.
    C. énergie, art. D. 315-8.
  • 66.
    JO, 16 déc. 2016.
  • 67.
    Dir. n° 2009/72/CE du PE et du Cons., 13 juill. 2009, concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité et abrogeant dir. n° 2003/54/CE, art. 28.
  • 68.
    L. n° 2015-992, 17 août 2015, relative à la transition énergétique pour la croissance verte, art. 167, 13°.
  • 69.
    Dir. n° 2009/72/CE, préc., art. 28.
  • 70.
    C. énergie, art. L. 344-1.
  • 71.
    C. énergie, art. L. 344-2.
  • 72.
    Dir. n° 2009/72/CE, préc., cons. 30.
  • 73.
    C. énergie, art. L. 344-10.
  • 74.
    C. énergie, art. L. 344-6.
  • 75.
    C. énergie, art. L. 344-12.
  • 76.
    Dr. env. 2017, p. 139, note Lanoy L.
  • 77.
    V. not. T. confl., 13 oct. 2014, n° 3964.
  • 78.
    V. par ex. Cass. 1re civ., 5 nov. 1963 : Bull. civ. I, n° 477 – Cass. 1re civ., 23 janv. 1996, n° 95-11055 : Bull. civ. I, n° 43.
  • 79.
    Contrats, conc. consom. 2016, comm. 248, obs. Leveneur L.
  • 80.
    V. « Chronique de droit de l’énergie (juin 2014-mai 2015) », LPA 19 oct. 2015, p. 10 ; « Chronique de droit de l’énergie (juin 2015-mai 2016) », LPA 23 nov. 2016, n° 120d4, p. 3.
  • 81.
    Cass. 1re civ., 6 avr. 2016, n° 15-16448 : LPA 23 nov. 2016, n° 120m1, p. 11, obs. Lamoureux M.
  • 82.
    Ord. n° 2016-131, 10 févr. 2016, portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations : JO, 11 févr. 2016.
  • 83.
    C. civ., art. 1304 et s.
  • 84.
    C. civ., art. 1304-6.
  • 85.
    JO, 1er mars 2017.
  • 86.
    D. n° 2014-1049, 15 sept. 2014, relatif à la reconnaissance et à l’indemnisation des victimes des essais nucléaires français : JO, 17 sept. 2014.
  • 87.
    Depuis la L. n° 2013-1168, 18 déc. 2013, relative à la programmation militaire pour les années 2014 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense et la sécurité nationale : JO, 19 déc. 2013.
  • 88.
    Pour une présentation plus détaillée de la méthodologie utilisée pour déterminer ce « risque négligeable », v. Lamoureux M., « Les probabilités négligeables de causalité. À propos de l’indemnisation des victimes d’essais nucléaires », Énergie - Env. -Infrastr. 2016, étude 7, et, plus généralement, Lamoureux M., « La causalité juridique à l’épreuve des algorithmes », JCP G 2016, étude 731.
  • 89.
    Étant rappelé que l’article 13 du décret n° 2014-1049 du 15 septembre 2014 relatif à la reconnaissance et à l’indemnisation des victimes des essais nucléaires français, laisse au CIVEN le soin de déterminer lui-même la méthode qu’il retient pour formuler ses décisions, en s’appuyant sur les méthodologies recommandées par l’Agence internationale de l’énergie atomique. À noter que ce décret n’a, à ce jour, pas été retouché et qu’il comporte désormais, à la lumière de la loi du 28 février 2017, des dispositions qui ne sont plus en concordance avec les dispositions légales, ce décret faisant toujours référence à la notion de « risque négligeable ».
  • 90.
    http://www.gouvernement.fr/le-civen-en-chiffres-au-1er-octobre-2015-2999.
  • 91.
    V. not. CE, 7 déc. 2015, n° 378325, Mme A., publié au recueil Lebon ; Énergie - Env. -Infrastr. 2016, comm. 10, note Moliner-Dubost M. ; JCP G 2016, 205, note Marchand J. ; LPA 23 nov. 2016, n° 120m2, p. 12, obs. Lamoureux M. ; v. aussi Lamoureux M., « Les probabilités négligeables de causalité. À propos de l’indemnisation des victimes d’essais nucléaires », op. cit.
  • 92.
    V. les chiffres diffusés par le CIVEN au 31 décembre 2016 (http://www.gouvernement.fr/le-civen-en-chiffres-au-31-decembre-2016), ainsi que le rapport annuel 2016 du CIVEN (http://www.gouvernement.fr/sites/default/files/contenu/piece-jointe/2017/04/rapport_annuel_dactivite_2016.pdf). Ce dernier démontre très bien les effets du contrôle juridictionnel, les deux tiers des offres d’indemnisation émises par le CIVEN entre 2015 et 2016 ayant été formulées sur injonction des juridictions administratives.
  • 93.
    D. n° 2014-1049, 15 sept. 2014, préc.
  • 94.
    V. par ex. CAA Bordeaux, 13 janv. 2015, n° 14BX00623.
  • 95.
    AJDA 2017, p. 1358.
  • 96.
    Sur cette question, v. Brechot F.-X., « L’indemnisation des victimes des essais nucléaires après la loi du 28 février 2017 », AJDA 2017, p. 874.
  • 97.
    Mentionné aux Tables du recueil Lebon ; AJDA 2017, p. 152, étude Stillmunkes H. ; LPA 13 janv. 2017, n° 122x9, p. 6, note Arbousset H.
  • 98.
    V. not. le recensement des décisions opéré par Stillmunkes H., rapporteur public près la première chambre du tribunal administratif de Lyon, in « Quel est l’office du juge dans l’indemnisation des victimes d’essais nucléaires ? », AJDA 2017, p. 152.
  • 99.
    V. les chiffres du rapport d’activité du CIVEN pour l’année 2016, préc.
  • 100.
    Sous réserve des attributions du CIVEN, telles que précisées par l’avis du Conseil d’État du 28 juin 2017 précédemment commenté.
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