Un nouveau cas d’extension de la protection fonctionnelle : le cas des anciens interprètes afghans
Le juge des référés du Conseil d’État vient d’inclure, par une ordonnance du 14 décembre, dans le champ de la protection fonctionnelle les anciens auxiliaires de l’armée française en Afghanistan et vient de consacrer la possibilité d’obtenir un visa long séjour dans ce cadre.
CE, 14 déc. 2018, no 424847
Dans le cadre des opérations «Enduring Freedom » lancée et menée par les États-Unis à la suite des attentats du 11 septembre 2001 et de la Force internationale d’assistance à la sécurité sous commandement de l’OTAN, la France fait appel à quelque 800 auxiliaires afghans recrutés par contrat aux côtés de ses forces armées engagées en Afghanistan1.
Le retrait de l’armée française dans ce pays décidé en 2012 posa alors la question du sort de ces personnels civils de recrutement local (PCRL). Les risques très importants de représailles en raison de leur collaboration avec l’armée française par les populations locales et notamment les talibans, qui les considèrent comme des traitres, a justifié la mise en place d’un dispositif particulier d’aide, de soutien et d’accompagnement consistant notamment à l’attribution d’une prime de licenciement, d’une aide à la réinstallation en Afghanistan pour les PCRL faisant l’objet d’une menace et la délivrance d’un visa et la possibilité d’une aide à la réinstallation hors Afghanistan pour les PCRL faisant l’objet d’une menace immédiate, avérée et urgente présentant un profil sociologique de personne intégrable ou assimilable en France.
Sur cette base, entre 2012 et 2015, 173 dossiers sur 530 demandes de visa ont donné lieu à une décision favorable.
Une première série de contentieux s’est figée devant la juridiction administrative autour des refus de visa opposés à ces interprètes. Sur ce point et en se plaçant sur la police des étrangers, le Conseil d’État a rejeté le bénéficie d’un droit pour les PCRL à être accueilli en France afin d’y préférer une approche casuistique2. Le juge administratif décida alors de vérifier que l’appréciation opérée par l’Administration qui a été faite de la demande de visa n’est pas manifestement commis une erreur flagrante entachant d’illégalité le refus d’octroyer un visa. Justement, le Conseil d’État avait eu l’occasion dans cette affaire de préciser que cette erreur portait sur « les conséquences du refus de visa » et notamment l’atteinte à la vie des interprètes afghans.
Si, dans ces espèces, le Conseil d’État s’était placé sur le terrain de la police des étrangers, il n’avait pas eu à connaitre de cette affaire sous le prisme de la protection fonctionnelle.
C’est tout l’apport de l’affaire jugée le 14 décembre dans le cadre d’un référé liberté. Un ancien interprète afghan avait demandé aux autorités françaises le bénéfice de la protection fonctionnelle sur le fondement de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droit et obligations des fonctionnaires en arguant du risque d’atteinte à leur vie en raison de leur activité passée de collaboration avec l’armée française. Loin de n’être qu’hypothétique, cette crainte s’avérait bien réelle comme en attestent les faits suivants dont la réalité n’a été aucunement discutée devant le juge : ledit demandeur, après diverses menaces de mort répétées, avait été blessé par balles puis visé par un attentant en 2017 dans son village, l’obligeant alors à la suite de nouvelles menaces de mort, à fuir son village et à déménager à trois reprises pour finalement se réfugier à Kaboul où il se trouve séparé de sa famille. Face au silence de l’Administration malgré ses diverses demandes de délivrance de visa long séjour dans le cadre du dispositif de réinstallation et une décision de rejet par une décision notifiée le 29 mai 2016, il décida de saisir le juge des référés du tribunal administratif de Paris sur le fondement de l’article L. 521-2 du Code de la justice administrative à la suite d’une demande formée en 2017 restée sans réponse afin que celui-ci enjoigne les autorités françaises de mettre en œuvre toute mesure de nature à assurer sa sécurité et celle de sa famille. Plus précisément, il leur demandait de financer un logement dans un quartier sécurisé de Kaboul ainsi que de leur délivrer un visa ou un titre de séjour en France.
Le juge des référés rejeta sa demande au motif qu’« eu égard à l’indépendance des législations, la décision refusant de lui accorder la protection fonctionnelle était sans lien avec l’examen de la possibilité de lui octroyer un visa ou un titre de séjour en France et que l’exécution de cette décision ne pouvait, dès lors, être regardée comme portant, par elle-même, une atteinte grave et manifestement immédiate à la sauvegarde d’une liberté fondamentale ».
Cette ordonnance fut annulée par le Conseil d’État qui jugea que le tribunal administratif de Paris aurait dû indiquer, indépendamment de la question de la délivrance d’un visa long séjour, ce qui s’oppose à ce que soit assurée la sécurité immédiate de l’intéressé ainsi que celle de sa famille. Cela conduisit le Conseil d’État à régler l’affaire sur le fond : après avoir indiqué que le contrat unissant le requérant et l’autorité française était un contrat de droit public impliquant en conséquence la compétence de la juridiction administrative pour connaître de la question de l’octroi du bénéfice de la protection fonctionnelle et celle de l’octroi ou non du visa. Ensuite, au regard des circonstances de l’espèce, la haute juridiction fit bénéficier le requérant de la protection fonctionnelle puisque « la carence des autorités publiques françaises est de nature à exposer [l’ex-interprète], de manière caractérisée, à un risque pour sa vie et à des traitements inhumains ou dégradants, portant ainsi une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale ». En suivit l’injonction de mettre à l’abri dans un délai de 8 jours l’ancien interprète afghan de l’armée française et de réexaminer dans un délai de deux mois sa demande de visa.
On le voit, le cœur du problème portait sur une double question sur laquelle le Conseil d’État a apporté une réponse favorable au requérant : celle de savoir si les PCRL entraient dans le périmètre de la protection fonctionnelle (I) et celle de savoir si les PCRL pouvaient se voir délivrer un visa au titre de la protection fonctionnelle (II).
I – L’inclusion des interprètes afghans dans le champ de la protection fonctionnelle
Pour déterminer si les PCRL pouvaient bénéficier du droit à la protection, encore fallait-il déterminer la nature de la relation entre eux et le ministre des Armées. Rappelons que les jurisprudences du 19 novembre 1999 du Conseil d’État3 et du 22 octobre 2001 du tribunal des conflits4 avaient précisé ce cadre juridique. Il en résulte en effet qu’en l’absence de dispositions législatives ou réglementaires contraires, les contrats conclus par les services de l’État à l’étranger pour le recrutement sur place des personnels non statutaires sont régis par la loi choisie par les parties, selon un choix exprès qui doit résulter de façon certaine des stipulations du contrat. En l’absence d’un tel choix, ces contrats sont régis par la loi du pays où ils sont exécutés. Le juge administratif pourrait aussi demeurer compétent dans le cadre d’une demande de protection fonctionnelle s’il venait à reconnaître que la décision de refus d’octroyer la protection fonctionnelle constitue un acte administratif détachable de la relation contractuelle de droit privé5.
En l’espèce, le juge administratif relève que « si le contrat conclu pour une durée d’un an entre le ministre de la Défense et M. A. le 10 août 2011 ne précise pas le droit qui lui est applicable en se bornant à renvoyer à « l’arrangement technique militaire entre la FIAS et l’administration intérimaire d’Afghanistan, ratifié le 2 janvier 2002 et amendé par les lettres du 22 novembre 2004″, il ressort de l’article 10 du contrat conclu pour la même durée le 10 août 2010 que les parties ont entendu placer celui-ci dans le cadre exclusif d’un rapport de droit français et de la compétence des juridictions administratives françaises. Dès lors, la juridiction administrative est compétente pour connaître de ses conclusions tendant à ce qu’il soit enjoint à l’État de lui accorder la protection fonctionnelle au titre de ce contrat ».
Rien ici ne faisait obstacle à l’application du droit français, relève le Conseil d’État, ce qui lui permet de se confronter à la question du champ d’application de la protection fonctionnelle. On peut toutefois s’interroger au sujet de la solution à appliquer dans l’hypothèse où le contrat n’est pas versé au dossier contentieux – ce qui peut se comprendre en raison des circonstances particulières liées à l’état de guerre – ou dans la situation où seule une partie du contrat est à la disposition du juge. Faudrait-il retenir l’application du droit local, solution qui semblerait s’imposer au regard des jurisprudences précitées qui font du droit local le droit applicable en principe dans le silence du contrat, ou le droit le plus favorable à l’agent ? Cette seconde solution fondée devrait prévaloir en raison des considérations humanitaires et sécuritaires. En l’absence de preuve démontrant la volonté des parties de soumettre leur relation au droit local, il doit être présumé la volonté de l’État français d’appliquer le droit le plus protecteur aux agents qu’il expose à certains risques connus et réels.
Quoi qu’il en soit, cette question ne se posa pas en l’espèce. Fallait-il alors déduire de l’existence de cette relation contractuelle, ici de droit public, le bénéfice de la protection fonctionnelle ? Au-delà, question à laquelle le Conseil d’État ne pouvait répondre, le droit à la protection aurait-il valu dans l’hypothèse où la relation contractuelle aurait été de droit privé mais soumis au droit français ?
On sait, à ce titre, que la tendance actuelle de la jurisprudence est d’étendre largement le bénéfice de ce droit à la protection6. Le champ du droit à la protection fonctionnelle n’a eu de cesse de s’étendre sous une double impulsion législative et jurisprudentielle contribuant à forger une « conception large du devoir de protection que le statut a mis à la charge de l’Administration »7. Loin d’être en recul, l’histoire de la protection fonctionnelle est en effet « celle de son extension et du raffinement progressif de son régime juridique »8. L’arrêt commenté est l’occasion de le rappeler en jugeant que les auxiliaires de l’armée française en Afghanistan en bénéficient. Solution tout à fait compréhensible dès lors qu’une relation contractuelle de droit public les unit à l’État français. Cette solution est au-delà remarquable car elle permet de s’interroger sur la possibilité d’octroyer une telle protection à des agents employés sous un régime de droit privé et à ceux employés par l’Administration mais soumis à un droit étranger.
Si initialement, seuls pouvaient prétendre à une telle protection prévue à l’article 11 de la loi du 13 juillet 1983 les fonctionnaires, un mouvement législatif, dont la loi Déontologie du 20 avril 2016 constitue la dernière avancée9, a conduit à une extension considérable de son périmètre organique. Parallèlement, la jurisprudence administrative a elle aussi œuvré activement à ce phénomène d’extension. La protection fonctionnelle continue de faire l’objet d’un principe général du droit dégagé à propos du volet civil de la protection concernant un agent contractuel10 et étendu en 2011 au volet pénal à propos d’un président de chambre consulaire11. Ce principe a permis à la haute juridiction de reconnaitre que le collaborateur occasionnel du service public puisse bénéficier du droit à la protection12 ou encore juger que dans le silence de l’article 11 de l’ordonnance du 22 décembre 1958, le volet pénal de la protection fonctionnelle devait être applicable aux magistrats de l’ordre judiciaire13. Plus récemment, la haute juridiction est venue reconnaître le bénéfice de ce droit à un agent public pour des faits survenus à une date à laquelle il participait à un mouvement de grève14 ou encore à un praticien hospitalier dont l’article 11 de la loi du 13 juillet 1983 ne leur a été rendu applicable que par la loi Déontologie de 2016, inapplicable dans cette affaire, car postérieure aux faits15. Il était alors prévisible qu’après avoir relevé que le contrat liant l’ex-interprète afghan et l’autorité française était régi par le droit français et implicitement de droit public en raison de la compétence de la juridiction administrative, la haute juridiction juge les auxiliaires de l’armée française exigibles au bénéficie de cette protection.
Néanmoins, cette affaire invite à se projeter et à imaginer quelle aurait pu être la solution dans la configuration d’un contrat de droit – français – privé ou soumis au droit local. Ces dispositions ont vocation à s’appliquer à tous les agents publics, notamment contractuels puisque ladite protection est due en raison des fonctions exercées. En effet, ce droit à la protection est avant tout prévu « dans l’intérêt du service et pour en assurer, dans toute la mesure du possible, le bon fonctionnement et la continuité du service »16. La logique fondamentale de ce droit repose principalement sur la nécessité pour l’Administration d’assurer le bon fonctionnement du service auquel toute agression, toute attaque, tout procès ou encore toute diffamation contre un de ses agents, sont de nature à porter atteinte et d’éviter que son image ne soit ternie. C’est parce que l’agent participe à cette fonction particulière de service public qu’il est nécessaire que l’Administration lui apporte son secours.
Sur ce fondement, on peut alors se questionner sur le point de savoir si le droit à la protection fonctionnelle devait être accordé à des agents employés par l’Administration sous un régime de droit privé, voire, à des agents employés par un contrat soumis au droit étranger. Cette question n’a en effet pas été à ce jour encore tranchée par la jurisprudence administrative17, et l’affaire commentée n’a été d’aucun secours puisque la relation a été jugée de droit public.
Le rapporteur public Guillaume Odinet18 précise à ce titre que le Conseil d’État a exclu l’application générale de règles relevant de la loi du 13 juillet 1983 ou de principes généraux du droit applicable aux agents contractuels soumis à un régime de droit local19. L’inapplicabilité du droit français fait dans ce cas entièrement obstacle à l’application de l’article 11 de la loi du 13 juillet 1983 sauf à considérer que la conclusion d’un contrat de droit étranger, en s’inspirant de la jurisprudence Société Fosmas LNG et de la notion de « règle impérative de droit public »20, constituait tout de même une relation soumise au droit administratif où le droit à la protection pouvait s’y épanouir. Or, rien n’indique qu’un tel raisonnement puisse être tenu. Toutefois, cette solution pourrait avoir un effet pervers en conduisant l’État français à favoriser systématiquement la conclusion de contrat de droit local dans ces situations de conflits armés afin d’éviter à devoir mettre en œuvre sa protection. La question qu’il faut se poser est alors de savoir si en vertu des risques pris consciemment par ces auxiliaires issus des populations locales pour leur vie et celles des membres de leur famille, et de l’aide considérable qu’ils ont apportées à l’armée française, une telle solution est admissible ? N’est-il pas plutôt nécessaire d’imposer une protection maximale et homogène à l’ensemble de ces auxiliaires qui demeurent malgré l’application du droit local, des agents de l’État français ?
Quant aux agents de droit privé français de l’Administration, si les données du problème restent principalement les mêmes, un argument supplémentaire milite en faveur de leur intégration dans le périmètre de la protection fonctionnelle, l’obstacle du droit local ne pouvant ici jouer : en effet, c’est la spécificité des fonctions de puissance publique qui justifie que ceux qui les exercent soient protégés. De ce fait, l’agent, qu’il soit de droit privé ou de droit public, représente dans cette hypothèse l’Administration et exerce une fonction de puissance publique, en l’espèce liée aux opérations militaires à l’étranger. Menacer, insulter ou agresser un agent de droit privé ou même de droit local employé par l’Administration, revient à l’atteindre elle-même ainsi que la fonction de puissance publique exercée par l’agent. De la sorte, la protection fonctionnelle doit être susceptible de bénéficier à des agents ne relevant pas d’un régime de droit public, soit, car soumis au droit privé français soit, car soumis au droit local. Par ailleurs, la cour administrative d’appel de Marseille a octroyé la protection fonctionnelle sur le fondement du principe général du droit aux agents de la Banque de France malgré leur soumission aux dispositions du Code du travail compatibles avec les missions de service public dont cet établissement à la charge – relevant de la compétence du juge administratif en raison de l’article L. 144-3 du Code monétaire et financier21.
Une fois la question du champ de la protection fonctionnelle réglée, il restait au Conseil d’État à déterminer si elle pouvait conduire à la délivrance d’un visa long séjour.
II – La possibilité de délivrer un visa long séjour au titre de la protection fonctionnelle
La protection fonctionnelle peut conduire à une obligation de délivrer un visa à un agent public. Voilà ce que vient dans un second temps confirmer le Conseil d’État. Rien n’aurait en effet pu conduire le juge administratif à juger autrement. Ce droit à la protection, une fois reconnu au bénéfice de l’agent en cause, impose à l’employeur public de le protéger contre toutes menaces, voies de fait, insultes ou violence dont il est l’objet en raison de sa fonction. En conséquence, cela implique que tous les moyens nécessaires à éviter de telles attaques doivent être mis en œuvre par lui. La jurisprudence administrative considère en ce sens que les moyens de protection doivent être appropriés, c’est-à-dire efficaces et de nature à éviter ou faire cesser les faits ayant justifiés l’octroi de la protection22. Si ces mesures de protection se rapportent le plus souvent à la prise en charge de frais d’avocat, à un changement de service ou à la surveillance du domicile ou encore à un rapatriement, rien n’exclut d’autres moyens plus radicaux tels que l’octroi d’un visa.
En effet, dans l’hypothèse où le seul moyen d’assurer la protection qui lui est due en raison de la nature des menaces et des attaques dont il fait l’objet à l’étranger est de lui délivrer un visa, il doit être imposé à l’État de le lui fournir. Pour le dire autrement, si le bénéfice de ce document constitue un moyen de protection approprié – voire le seul – pour faire cesser les attaques dont l’agent est victime, alors il doit en bénéficier.
Justement, en l’espèce, il ne faisait aucun doute que le niveau de menace pesant sur les PCRL en Afghanistan justifiait l’octroi de ce document – diverses menaces de mort répétées, blessure par balles, cible d’un attentant en 2017 dans son village, nouvelles menaces de mort l’ayant conduit à fuir son village avec sa famille et à se réfugier à Kaboul. Rien d’ailleurs ne permet de douter de l’absence de lien entre sa qualité d’ancien auxiliaire de l’armée française et ces attentats et menaces. Il existe ainsi un risque très probable et bien réel qu’il soit soumis (ainsi que sa famille) à des tortures, des traitements inhumains ou dégradants voire d’être exécuté s’il continue à vivre dans son pays en raison du lien qu’il avait établi avec l’État français. C’est très précisément ce que juge le Conseil d’État dans cette affaire. Les mesures demandées par le requérant sont incontestablement de nature à éviter qu’une atteinte à ses droits protégés par les articles 2 et 3 de la convention EDH se produise. Sa sécurité sera assurée à terme sur le territoire français par l’octroi du visa. Le refus qui lui a été opposé constitue par conséquent une atteinte à ces deux libertés fondamentales. À ce titre, doit être précisé que l’atteinte à une liberté fondamentale ne doit pas être appréciée à l’aune du simple refus de protection fonctionnelle, celle-ci n’étant en tout état de cause pas une liberté fondamentale, mais dans le cadre des conséquences concrètes qu’entraînent son refus et à travers les mesures qu’il demande au titre de cette protection23.
Notons simplement que l’intérêt principal, voire exclusif, d’une appréciation de l’octroi ou non du visa au titre du régime de la protection fonctionnelle plutôt qu’au titre du droit commun des visas est la nature du contrôle du juge de l’excès de pouvoir puisqu’il exerce un contrôle normal dans le premier cas24, un contrôle de l’erreur manifeste d’appréciation dans le second25.
Au regard des circonstances de l’espèce, le Conseil d’État a été conduit à enjoindre l’État à réexaminer la situation personnelle du requérant dans un délai de deux mois. Il sera dès lors particulièrement difficile aux autorités françaises de refuser un tel visa eu égard aux risques de menaces qui pèsent sur la vie du requérant ayant conduit le Conseil d’État à cibler un risque pour sa vie ainsi qu’un risque de traitements inhumains et dégradants.
Notes de bas de pages
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1.
Meunier P. et Nauche P., AN, rapp. d’inf., 26 févr. 2012, n° 744.
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2.
CE, 16 oct. 2017, n° 408344 ; CE, 16 oct. 2017, n° 408374 : AJDA 2017, p. 2424, concl. Odinet G.
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3.
CE, sect., 19 nov. 1999, n° 183648, Tegos : Lebon, p. 356.
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4.
T. confl., 22 octobre 2001, n° 3236, Mme Issa et Mme Le Gouy c. Lycée Jean Mermoz à Dakar : Lebon, p. 751.
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5.
Mutatis mutandis CE, 10 janv. 2007, n° 270084, Syndicat national CGT du ministère des Affaires étrangères : Lebon, p. 5.
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6.
V. notre étude, « Le périmètre de la protection fonctionnelle des agents publics », Dr adm. 2018, p. 21, n° 11.
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7.
Maugüé C et Touvet L., « Chronique générale de jurisprudence administrative française », AJDA 1994, p. 374.
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8.
Melleray F., « De la modernisation des droits et obligations des fonctionnaires », AJDA 2016, p. 1439.
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9.
L. n° 2016-483, 20 avr. 2016, relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires.
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10.
CE, sect., 26 avr. 1963, Centre hospitalier de Besançon : Lebon, p. 243 ; S. 1963, p. 338.
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11.
CE, sect., 8 juin 2011, n° 312700, Farré : Lebon, p. 270, concl. Collin P. ; AJDA 2011, p. 1175 ; AJFP 2012, p. 87, note Crépin-Dehaene I. ; AJCT 2011, p. 571, obs. Krust D. ; JCP Adm. 2011, 2337, note D. Jean-Pierre.
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12.
CE, 13 janv. 2017, n° 386799 : Lebon, p. 1, concl. Crepey E. ; JCP A 2017, act. 74 ; AJDA 2017, p. 1075, note Froger C.
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13.
CE, 11 févr. 2015, n° 372359 : Lebon, p. 60 ; AJDA 2015, p. 944, concl. von Coester S. ; JCP A. 2015, p. 2112, note Jean-Pierre D. ; DA 2015, comm. 43, note Fort F.-X.
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14.
CE, 22 mai 2017, n° 396453, Commune de Sète : mentionnée au Recueil.
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15.
CE, 30 juin 2017, n° 396908 : Rousseau c/ Centre hospitalier de Longjumeau : mentionnée au Recueil.
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16.
Guyomar M., « La protection fonctionnelle », CFP 2012, p. 1.
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17.
V. Odinet G. concl. sous CE, 16 oct. 2017, nos 408374, 408748, 408750, 408786, M. S. et a. : AJDA 2017, p. 2424.
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18.
V. Odinet G. concl. sous CE, 16 oct. 2017, nos 408374, 408748, 408750, 408786, M. S. et a. : AJDA 2017, p. 2424.
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19.
CE, 30 mai 2007, n° 384830, Mme MO : Lebon T., p. 750.
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20.
CE, ass., 9 nov. 2016, n° 388806 : Lebon, p. 466.
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21.
CAA Versailles, 12 oct. 2017, n° 15VE02740, Gaudin M. : AJDA 2018, p. 57, concl. Mégret S.
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22.
CE, 25 juill. 2001, n° 210797, Fédération des syndicats généraux de l’éducation nationale et de la recherche publique : Lebon, p. 389.
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23.
Henrard O., concl. sous CE, 14 déc. 2018, n° 42487.
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24.
CE, sect., 13 févr. 1959, Sieur Bernadet : Lebon, p. 111.
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25.
V. not. CE, 16 oct. 2017, nos 408374, 408748, 408750, 408786, M. S. et a.