L’Exit tax, un dispositif durable dans le paysage fiscal français

Publié le 13/09/2021

L’Exit tax, un dispositif qui vise principalement les entrepreneurs qui seraient tentés de vendre leur entreprise une fois installés à l’étranger pour bénéficier de conditions fiscales plus favorables, permet à Bercy d’imposer les candidats à l’exil sur l’impôt sur le revenu et de recolleter les prélèvements sociaux sur leurs plus-values latentes.

Les contribuables qui transfèrent leur domicile fiscal hors de France, sont imposable, sous certaines conditions, à l’impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux au titre de leurs plus-values latentes, de leurs créances trouvant leur origine dans une clause de complément de prix et de leurs plus-values de cession ou d’échange placées sous un régime de report d’imposition.

L’Exit tax « cible les contribuables qui seraient tenter de s’exiler afin de vendre leurs sociétés ou leurs participations sans acquitter d’impôt sur la plus-value » a résumé la parlementaire Mireille Jouve dans le cadre d’une question ministérielle posée au gouvernement le 21 juin 2018 (RM Jouve, JO Sénat du 22 juin 2018, question n°0394G). Sont concernés par cette Exit tax les contribuables qui ont été résidents fiscaux français pendant au moins six ans au cours des dix années précédant le transfert de leurs domicile à l’étranger et dans la mesure où ils détiennent des droits sociaux, titres ou droits atteignant une valeur globale d’au moins 800 000 euros ou représentant au moins 50 % des bénéfices sociaux d’une société. Ce seuil a été augmenté dans le cadre de l’article 42 de la loi de finances rectificative pour 2013 et s’applique pour les transferts de domicile hors de France intervenant à compter du 1er janvier 2014. Ce dispositif vise également les titres de sociétés à prépondérance immobilière soumis à l’impôt sur les sociétés au jour du transfert de domicile fiscal du contribuable. Ces contribuables peuvent bénéficier d’un sursis de paiement. En outre, un dégrèvement est prévu dans certaines situations. Ces règles actuelles s’appliquent aux transferts de domicile fiscal hors de France intervenant à compter du 1er janvier 2019. Les aménagements qui ont été apportés à ce dispositif sont sans effets rétroactifs pour les contribuables ayant transféré leur domicile fiscal antérieurement à cette date.

Un dispositif revivifié

Le dispositif d’Exit tax a été introduit pour la première fois en droit français en 1998. Le transfert de domicile fiscal hors de France donnait alors lieu à l’imposition des plus-values en report d’imposition et des plus-values latentes afférentes à des participations supérieures à 25 %. Cette mesure a été abrogée par la loi de finances pour 2005 en raison de son incompatibilité avec le droit communautaire. Le 11 mars 2004, la CJUE, dans le cadre d’une question préjudicielle posée par le Conseil d’État, a en effet jugé que le principe communautaire de la liberté d’établissement s’opposait à ce qu’un État membre institue, à des fins de prévention d’un risque d’évasion fiscale, un mécanisme d’imposition des plus-values non encore réalisées, tel que celui prévu à l’article 167 bis du Code général des impôts, en cas de transfert du domicile fiscal d’un contribuable hors de cet État (CJUE, 11 mars 2004, Aff. C-9/02, Lasteyrie du Saillant). L’Exit tax a été réintroduite en 2011 dans le cadre de l’article 48 de la première loi de finances rectificative pour 2011 (L. n° 2011-900 du 29 juillet 2011). L’article 167 bis du Code général des impôts, qui régit ce dispositif prévoit que le transfert de domicile fiscal hors de France entraîne l’imposition immédiate à l’impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux des plus-values latentes sur droits sociaux, valeurs, titres ou droits, sous conditions tenant à l’importance des participations détenues, des créances trouvant leur origine dans une clause de complément de prix et de certaines plus-values en report d’imposition. Dans le cadre de la loi de finances pour 2019 (L. n° 2018-1317 du 28 décembre 2018), ce dispositif a été largement remanié afin d’adresser un message plus positif aux entrepreneurs selon le souhait de l’actuel président de la République.

Déclaration et suivi de l’Exit tax

Dans la cadre du transfert de son domicile fiscal hors de France, le contribuable doit tout d’abord souscrire une déclaration n°2074-ETD afin de déclarer les plus-values latentes, les créances trouvant leur origine dans une clause de complément de prix ainsi que les plus-values en report d’imposition qu’il détient à la date du transfert de son domicile fiscal hors de France. Au titre des années suivant celle du transfert du domicile fiscal hors de France, il doit souscrire la déclaration n°2074-ETS qui permet d’assurer le suivi de ses impositions. À cette déclaration correspondent plusieurs imprimés en fonction de la date à laquelle le contribuable a transféré son domicile fiscal hors de France. Il s’agit de la déclaration n° 2074-ETS1 pour les contribuables qui ont transféré leur domicile fiscal hors de France en 2011 ou 2012, la déclaration n° 2074-ETS2 pour les contribuables qui ont transféré leur domicile fiscal hors de France en 2013, la déclaration n° 2074-ETS3 pour ceux qui ont transféré leur domicile fiscal hors de France depuis 2014. Ceux qui ont transféré leur domicile fiscal hors de France en 2018 sont concerné par la déclaration 2074-ETS3. Ces déclarations doivent être souscrites dans les mêmes délais que la déclaration de revenus. Les contribuables qui bénéficient du sursis de paiement total, de droit ou sur option, doivent déposer une déclaration 2074-ETSL, dans la mesure où aucun événement mettant fin au sursis de paiement ou entraînant un dégrèvement n’est intervenu en 2018. En outre, le contribuable doit reporter à la case 8TN de la déclaration 2042C le montant global des droits en sursis de paiement. Si, une fois établi à l’étranger, le contribuable transfère de nouveau son domicile fiscal dans un pays différent, ce nouveau transfert peut avoir des conséquences sur l’imposition. Aussi, dans les deux mois qui suivent ce changement de domicile fiscal, il est nécessaire d’en informer sur papier libre le service des impôts des particuliers non-résidents, rattaché à la Direction des impôts des non-résidents (DINR).

L’Exit tax, un dispositif durable dans le paysage fiscal français
kotoyamagami / AdobeStock

Sursis d’imposition

Les contribuables transférant leur domicile hors de France peuvent bénéficier d’un sursis de paiement des impositions établies à ce titre. Ce sursis est soit automatique, soit accordé sur demande faite via le formulaire n° 2074 ETD accompagné d’une proposition de garantie. Le sursis sur demande qui concernait les contribuables transférant leur domicile dans un État tiers à l’Espace économique européen ne s’applique plus, depuis 2019, qu’à ceux transférant leur domicile dans un État considéré comme non coopératif (ETNC) ou dans un État ou territoire hors de l’Union européenne n’ayant pas conclu avec la France des conventions d’assistance à la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales et d’assistance au recouvrement (L. n° 2018-1317 du 28 décembre 2018). Pour les transferts réalisés à compter du 22 novembre 2019, la demande doit être déposée au plus tard 90 jours avant ce transfert. En cas de transferts successifs dans un État éligible au sursis de droit, puis dans État éligible au sursis sur option, une demande peut être faite à la suite de ce deuxième transfert. Elle doit être faite au moins 90 jours avant celui-ci.

Dégrèvement

Le délai à l’expiration duquel les contribuables peuvent obtenir le dégrèvement de l’Exit tax en sursis de paiement, sauf cession, rachat-annulation des titres ou liquidation de la société intervenant dans l’intervalle a été raccourci. Il est désormais de deux ans pour les contribuables dont la valeur des titres dans le champ de l’Exit tax est inférieure à 2 570 000 euros. Il est de cinq ans pour contribuables dont la valeur des titres dans le champ de l’Exit tax est supérieure à 2 570 000 euros. Pour les transferts de domicile fiscal intervenus entre le 3 mars 2011 et le 31 décembre 2013, le délai de conservation des titres permettant d’obtenir un dégrèvement de la fraction de l’Exit tax portant sur l’impôt sur le revenu est de huit ans. À l’issue de ce délai, la fraction de l’Exit tax portant sur les prélèvements sociaux reste due.

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