Quel budget pour la première année du quinquennat Macron ?
Le premier budget du quinquennat marque une rupture avec les choix des précédents gouvernements dans la mesure où il vient baisser simultanément les dépenses publiques et les prélèvements obligatoires. Il combine baisses d’impôts et réduction du déficit, tout en allégeant la fiscalité du capital dans le but de « libérer la capacité de croissance des entreprises françaises ».
Le budget de l’État pour 20181 prévoit près de 7 milliards d’impôts en moins cumulés pour les entreprises et les ménages. Selon le ministre de l’Économie et des Finances, Bruno Le Maire, « cette baisse des impôts doit libérer des capacités de croissance dans notre pays. Elle doit permettre de rendre à l’économie productive l’argent dont elle a besoin pour se développer »2.
Pour ramener le déficit public en-dessous du seuil de 3 % du produit intérieur brut (PIB), le budget de l’État pour 2018 prévoit de réduire les dépenses publiques qui sont les plus élevées des pays de l’OCDE. Cette baisse de la dépense publique doit permettre à la France de sortir de la procédure pour déficit public excessif dont elle fait l’objet depuis 2009 et d’entrer dans le volet préventif du pacte de stabilité et de croissance.
Dans sa décision n° 2017-758 DC du 28 décembre 2017, le Conseil constitutionnel a validé les principales mesures fiscales du budget 2018 : la transformation de l’impôt sur la fortune en impôt sur la seule fortune immobilière, la réforme de la taxe d’habitation ou encore l’introduction d’un prélèvement forfaitaire unique de 30 % sur les revenus de l’épargne. Il a écarté les griefs relatifs à la sincérité du budget 2018. Il a jugé que les hypothèses économiques et les prévisions de recettes et de charges sur lesquelles est fondée la loi de finances ne sont pas « entachées d’une intention de fausser les grandes lignes de l’équilibre qu’elle détermine ».
I – Les grandes orientations du budget 2018
Le premier budget du quinquennat comporte des mesures de nature à provoquer, selon le Premier ministre Édouard Philippe, « un effet de souffle fiscal en faveur de l’investissement, de l’emploi et de la croissance ».
Le Haut conseil des finances publiques (HCFP) a relevé que « les objectifs de maîtrise de la dépense pour 2018 sont plus exigeants que ceux des années précédentes », jugeant « raisonnable » le scénario macroéconomique du projet de loi de finances (prévisions de croissance, d’inflation, d’emploi et de masse salariale). Il a constaté qu’un effort visant à « une budgétisation plus réaliste » a été effectué sur le budget de l’État. Il a également repris à son compte les critiques adressées à la France par la Commission européenne sur la lenteur de la réduction du déficit structurel3.
Selon la Commission, la réduction du déficit public français reste trop fragile. Le projet de plan budgétaire pour 2018 que lui a soumis Paris présente un risque de non-conformité avec les exigences du pacte de stabilité et de croissance. La France fait partie des six pays épinglés le 22 novembre 2017 par la Commission au terme de son évaluation des projets de budget nationaux.
A – Les principales hypothèses et mesures du budget 2018
Le budget de l’État pour 2018 s’appuie sur une prévision de croissance de 1,7 % pour l’année 2018.
Il prévoit la stabilisation de la dette publique à 96,8 % du PIB. Il prévoit également une baisse des prélèvements obligatoires (7 Md €) ainsi qu’une réduction du déficit public qui passera de 2,9 % du PIB en 2017 à 2,8 % en 20184, et cela conformément aux engagements européens de la France. Le gouvernement souhaite que Paris, qui n’a pas affiché un déficit inférieur à 3,0 % du PIB depuis 2007, puisse sortir de la procédure de déficit excessif dès 2018. Le 25 février 2015, la Commission européenne avait accordé à la France un nouveau délai pour ramener son déficit public sous la barre des 3 % de son PIB comme l’impose le pacte de stabilité et de croissance.
Les dépenses publiques baisseront également en volume en 2018, elles passeront de 54,7 % à 54 % du PIB, soit une diminution de 0,7 point.
Le budget 2018 marque un retour à des suppressions nettes d’emplois (1600 postes dans la fonction publique d’État)5.
Si certaines des 31 missions du budget général de l’État comme l’armée et la sécurité (police, gendarmerie et sécurité civile) affichent des crédits en augmentation, d’autres affichent des budgets stables ou en baisse. Les baisses de crédit les plus importantes concernent les missions « cohésion des territoires » et « travail et emploi » :
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Les aides publiques au logement versées aux locataires des HLM baisseront de 1,5 milliard sur trois ans, dont 800 millions dès 2018. Le Conseil constitutionnel a jugé conforme à la Constitution l’article 126 de la loi de finances qui réforme les aides au logement et les règles de fixation des loyers dans le parc locatif social.
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La réduction des crédits de la mission « travail et emploi » est notamment liée à la baisse du nombre des contrats aidés, lesquels sont jugés « coûteux » et « inefficaces » dans la lutte contre le chômage par le gouvernement. Seulement 200 000 contrats aidés, uniquement dans le secteur non-marchand, seront financés en 2018.
Le budget 2018 s’inscrit dans le cadre la trajectoire des finances publiques retenue par le gouvernement. On soulignera que la loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 formule quatre objectifs : la baisse de la dépense publique de plus de 3 points de PIB ; la réduction du déficit public de 2 points de PIB ; la réduction de la dette publique de 5 points de PIB et la baisse des prélèvements obligatoires d’un point de PIB.
Enfin, la contribution de la France au budget de l’UE, qui prend la forme d’un prélèvement annuel sur les recettes de l’État autorisé en loi de finances, s’élève pour 2018 à 20,2 milliards d’euros après 18,7 milliards en 2017 (art. 56). L’augmentation conséquente de la contribution française au budget de l’UE s’explique en particulier par « la montée en charge, très tardive, de la politique de cohésion (européenne) », selon le rapporteur pour avis, le député UDI Maurice Leroy.
B – Les avis du Haut conseil des finances publiques et de la Commission européenne
Le HCFP, qui est chargé d’apprécier le réalisme des prévisions macroéconomiques du gouvernement et de vérifier la cohérence de la trajectoire de retour à l’équilibre des finances publiques avec les engagements européens de la France, a rendu public, le 24 septembre 2017, son avis sur le projet de loi de finances pour 20186.
Cet organisme indépendant du Parlement et du gouvernement a jugé que ce dernier est « prudent » et « raisonnable » dans ses prévisions économiques.
Selon le HCFP, la prévision de croissance (1,7 %) retenue par le gouvernement, qui est proche de celles des organisations internationales (FMI, OMC, OCDE) est « raisonnable » pour 2018. Mais il estime que ce dernier est « optimiste » quand il considère que l’appareil productif français sera en mesure de répondre à la progression du commerce mondial. Selon le HCFP, « les performances récentes des exportateurs français témoignent (…) des difficultés persistantes de l’appareil productif à bénéficier pleinement de la progression soutenue du commerce mondial ».
En outre, le HCFP considère que les prévisions d’emploi et de masse salariale du gouvernement pour 2018 sont prudentes et que la prévision d’inflation pour 2018 (1,1 %) est raisonnable.
Par ailleurs, le HCFP juge faible le rythme de réduction du déficit public structurel, c’est-à-dire le déficit calculé hors effets de la conjoncture. Il constate que l’ajustement structurel prévu pour 2018 n’est pas conforme aux dispositions de l’article 5 du règlement européen n° 1466/97 qui prévoient un ajustement supérieur à 0, 5 point de PIB.
Le HCFP estime que les prévisions faites en matière de recettes sont prudentes. S’agissant des objectifs de maîtrise de la dépense pour 2018, il souligne que « des risques significatifs existent sur la réalisation des économies prévues dans le champ des administrations publiques ».
Enfin, le 22 novembre 2017, la Commission européenne a estimé que les prévisions budgétaires de la France pour 2018 présentaient « un risque de non-conformité » avec les règles européennes. Elle a constaté « un écart important » entre le projet de budget qui lui a été présenté par Paris et « la trajectoire d’ajustement requise » pour atteindre l’objectif d’assainissement des finances publiques. Elle a souligné que le niveau de la dette française (96,9 % du PIB en 2018) dépasse largement le seuil des 60,0 % qui est prévu par les traités. Elle s’inquiète également du déficit « structurel » de la France, lequel déficit devrait, selon elle, s’accroître de 0,4 point de PIB en 20187.
Si la Commission européenne juge probable que la France sortira de la procédure européenne de déficit excessif en 2018, « la marge de sécurité (pour le déficit public de la France) est faible, il faut tenir les objectifs » a expliqué le commissaire européen aux Affaires économiques, Pierre Moscovici.
II – Les principales dispositions fiscales de la loi de finances pour 2018
Le budget 2018, qui intègre l’essentiel des mesures phares du programme présenté par Emmanuel Macron lors de la campagne présidentielle de 2017, contient plusieurs modifications importantes en matière d’imposition. Il comporte notamment des allègements fiscaux en faveur des ménages et des entreprises. Il a été présenté comme « le budget des transformations profondes et du pouvoir d’achat pour les Français » par le ministre de l’Action et des Comptes publics, Gérald Darmanin8.
A – Les mesures fiscales intéressant les particuliers
L’article 5 de la loi de finances instaure, à compter des impositions de 2018, un nouveau dégrèvement qui, s’ajoutant aux exonérations existantes, permettra à environ 80 % des foyers d’être dispensés du paiement de la taxe d’habitation au titre de leur résidence principale d’ici 2020. Cette réforme sera conduite de manière progressive sur 3 ans. Elle débutera par une première baisse de 30 % en 2018 pour tous les ménages concernés, puis de 65 % en 2019 et 100 % en 2020. Le coût de la réforme a été évalué à 3 milliards d’euros en 2018, 6,6 milliards d’euros en 2019 et 10,1 milliards d’euros en 2020 :
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L’exonération de la taxe d’habitation sera valable jusqu’à 30 000 euros de revenus annuels (soit 27 000 euros de revenu fiscal de référence, RFR) pour un célibataire, et 48 000 euros de revenus (43 000 euros de RFR) pour un couple sans enfant. Pour un couple avec un enfant, le plafond d’exonération sera de 54 000 euros (49 000 euros de RFR).
Le gouvernement a fait valoir que la suppression de cet « impôt injuste » permettra « une hausse du pouvoir d’achat ». Le ministre des Comptes publics, Gérald Darmanin, a affirmé qu’elle « rendra dix milliards de pouvoir d’achat à nos concitoyens ».
En revanche, la gauche a fait valoir qu’il s’agit d’une « fausse bonne idée » qui va « creuser les inégalités territoriales ». De nombreux parlementaires Républicains (LR) ont dénoncé quant à eux « une mise sous tutelle » par l’État des communes et intercommunalités dont les recettes proviennent à 36 % de la taxe d’habitation. Ils redoutent que la compensation « intégrale » promise par l’État ne soit pas pérenne.
Les députés ont obtenu que le gouvernement remette chaque année au Parlement un rapport d’évaluation sur l’application de la compensation totale par l’État du dégrèvement de la taxe d’habitation pour les communes. Ce rapport établira également un bilan sur l’autonomie financière des collectivités territoriales.
Le Conseil constitutionnel a validé la réforme de la taxe d’habitation qui, selon les sénateurs et députés de l’opposition, allait notamment à l’encontre du principe d’égalité devant les charges publiques et du principe l’autonomie financière des collectivités territoriales. Il a jugé que le législateur s’était « fondé, en retenant comme critère d’éligibilité au nouveau dégrèvement un plafond de revenu en fonction du quotient familial, sur un critère objectif et rationnel, en rapport avec l’objet de la loi ». Il a aussi relevé que le dégrèvement contesté, qui est « entièrement pris en charge par l’État », n’affectera pas l’assiette de la taxe d’habitation et ne remettra pas en cause « son caractère local ».
Le Conseil a toutefois indiqué qu’il pourra être amené à « réexaminer ces questions en fonction notamment de la façon dont sera traitée la situation des contribuables restant assujettis à la taxe d’habitation dans le cadre d’une réforme annoncée de la fiscalité locale ».
Il a aussi précisé que si « en raison de l’évolution des circonstances, (…) la part des ressources propres dans l’ensemble des ressources des communes devenait inférieure au seuil minimal de ressources propres déterminé par l’article L.O. 1114-3 du Code général des collectivités territoriales », il faudrait alors prendre « les mesures appropriées pour rétablir le degré d’autonomie financière des communes au niveau imposé par le législateur organique ».
L’article 28 instaure un taux de prélèvement forfaitaire unique (PFU) de 30 % sur les revenus du capital (intérêts, dividendes, plus-values de cession) qui se décompose en un taux forfaitaire d’impôt sur le revenu (IR) de 12,8 %, auquel s’ajoutent les prélèvements sociaux au taux global de 17,2 % à la suite de la hausse du taux de la contribution sociale généralisée (CSG) prévue par la loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017 de financement de la sécurité sociale pour 2018.
Selon le gouvernement, cette réforme permettra « une fiscalité de l’épargne plus neutre, plus en ligne avec les niveaux de prélèvement pratiqués par nos principaux partenaires européens. Elle contribuera à la réorientation de l’épargne vers le financement des entreprises, tout en gagnant en simplicité et en attractivité ».
Le PFU ne concernera pas les livrets d’épargne populaire (Livret A, LDD, épargne salariale). Les plans d’épargne en actions (PEA) et les contrats d’assurance-vie de moins de 150 000 euros détenus depuis plus de huit ans échapperont également au PFU. En revanche, les plans épargne logement (PEL) souscrits à partir de janvier 2018 y seront soumis.
Le PFU sera optionnel. Les contribuables auront toujours la possibilité de choisir l’imposition au barème de l’impôt sur le revenu si cela est plus avantageux pour eux.
Un comité de suivi placé auprès du Premier ministre sera chargé de veiller « au suivi de la mise en œuvre et de l’évaluation des réformes fiscales favorisant la réorientation de l’épargne vers les investissements productifs ». « Avant le dépôt du projet de loi de finances pour 2020, il (établira) un rapport public exposant l’état des évaluations réalisées » (art. 28).
Le Conseil constitutionnel a écarté les griefs tirés de la méconnaissance des principes d’égalité devant la loi et devant les charges publiques. Il a relevé que le législateur a pu, sans méconnaître la Constitution, opérer « une différence de traitement entre, d’une part, les revenus du capital désormais soumis au nouveau prélèvement proportionnel et, d’autre part, les autres catégories de revenus demeurant soumis au barème progressif de l’impôt sur le revenu ». Selon le Conseil, la « flat tax » sur les revenus du capital ne remettra pas en cause le caractère progressif du montant de l’imposition globale du revenu des personnes physiques.
L’article 31 de la loi de finances supprime l’impôt sur la fortune (ISF) et crée un impôt sur la fortune immobilière (IFI), assis sur la valeur du patrimoine immobilier. Cette transformation de l’ISF en IFI a été globalement jugée conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel9.
Le barème de l’IFI est identique à celui de l’ISF. Il s’agit d’un barème progressif à six tranches avec des taux d’imposition qui s’échelonnent de 0,50 % à 1,50 %. L’abattement de 30 % sur la résidence principale est maintenu. Le seuil d’assujettissement à l’IFI reste fixé à 1,3 millions d’euros.
Le dispositif ISF-PME, un régime de défiscalisation en faveur de l’investissement dans les PME créé en 2007 dans le cadre de la loi TEPA (Travail emploi pouvoir d’achat), est quant à lui supprimé. Afin de compenser cette suppression, le législateur a décidé de renforcer la réduction d’impôt sur le revenu (IR) dite « Madelin » accordée au titre des souscriptions en numéraire au capital des PME (« IR PME »)10. Le taux de l’IR-PME sera relevé en 2018 de 18 % à 25 % (art. 74).
Contrairement à l’ISF, l’IFI ne concernera plus les valeurs mobilières (actions, obligations…), ce qui a suscité de vives critiques des parlementaires de gauche, lesquels ont qualifié le budget 2018 de « budget pour les riches ».
Bruno Le Maire a présenté l’ISF comme un « impôt injuste et inefficace » car « les plus gros patrimoines français ne (le) paient pas (…) et arrivent par optimisation fiscale à y échapper »11. Cet impôt a été aussi critiqué pour son rôle dans l’exil fiscal. Le Premier ministre a insisté sur le fait qu’il a « réduit la matière taxable en France » au cours des quinze dernières années.
La majorité a défendu cette réforme destinée, selon le député Joël Giraud (LRM), rapporteur du budget, « à orienter l’épargne des gros patrimoines vers le financement des entreprises ». Mais certains économistes comme Mathieu Plane ont estimé que la transformation de l’ISF n’est pas de nature à garantir « l’amélioration du financement de l’économie », en particulier vers les projets innovants ou plus risqués12.
L’Assemblée nationale a adopté des amendements du rapporteur du budget alourdissant l’imposition de certains biens mobiliers de luxe qui ne seront pas compris dans l’assiette de l’IFI : augmentation du barème du droit annuel de francisation et de navigation (DAFN) et du droit de passeport applicables aux grands navires de plaisance (art. 33), augmentation d’un point du taux de la taxe forfaitaire sur la cession des objets précieux qui passera de 10 à 11 % (art. 30), et instauration d’une taxe additionnelle à la taxe sur les certificats d’immatriculation des véhicules de tourisme, autres que les véhicules de collection, disposant d’une puissance fiscale supérieure ou égale à 36 chevaux (art. 34).
Le remplacement de l’ISF par l’IFI, qui devrait entraîner un manque à gagner de près de 3,2 milliards d’euros pour l’État, fera l’objet d’une « mission de suivi et d’évaluation visant à mesurer ses impacts économiques et sociaux ». « Une attention particulière (sera) portée aux effets de la mesure en terme d’investissement dans les entreprises et de répartition des richesses » (art. 31).
D’autre part, comme cela avait été annoncé lors de la présentation de la stratégie « logement » du gouvernement, le 20 septembre 2017, deux dispositifs fiscaux pour les particuliers sont prolongés mais uniquement dans les zones dites « tendues » où la demande de logement est forte. Le dispositif du prêt à taux zéro (PTZ), qui constitue un outil important de soutien à l’accession à la propriété des ménages à revenus modestes et intermédiaires, est prolongé pour quatre années supplémentaires, soit jusqu’au 31 décembre 2021 (art. 83). Le « dispositif Pinel » de soutien fiscal en faveur de l’investissement locatif intermédiaire est également prorogé pour quatre années (art. 68).
On observera que la période d’application du crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE), qui cherche à favoriser la rénovation énergétique des logements, est une nouvelle fois prolongée d’une année, soit jusqu’au 31 décembre 2018. L’article 79 de la loi de finances vient également recentrer le CITE sur les dépenses jugées les plus pertinentes. Certains équipements (chaudières fonctionnant au fioul les moins performantes, portes d’entrée) seront exclus du champ d’application du CITE, lequel sera transformé en prime en 2019.
Par ailleurs, la loi de finances pour 2018 prévoit une revalorisation du montant de la prime d’activité, dont le montant sera accru de 80 euros entre 2018 et 2021 (art. 172). La prime d’activité, qui est née en 2016 de la fusion entre la prime pour l’emploi et le RSA activité, augmentera de 20 euros par mois à partir d’octobre 2018.
Enfin, le gouvernement a souhaité augmenter la fiscalité du diesel pour l’aligner sur celle de l’essence d’ici 2021. Le budget pour 2018 prévoit une augmentation de la taxe intérieure sur la consommation de produits énergétiques (TICPE) de 2,6 centimes par litre de gazole chaque année pendant quatre ans (art. 16).
B – Les mesures fiscales intéressant les entreprises
La baisse du taux de l’impôt sur les sociétés (IS), qui constitue un élément essentiel des décisions d’investissement des entreprises, a été amorcée par la loi de finances pour 2017. Mais la réforme adoptée en 2016 ne permet pas, selon le gouvernement, de rompre avec la position singulière de l’IS français dans l’Union européenne. La loi de finances pour 2018 comporte une nouvelle trajectoire de baisse du taux de l’IS qui sera réduit de 33,33 % à 25 % d’ici 2022 (art. 84). Il s’agit de ramener progressivement pour l’ensemble des entreprises le taux normal de l’IS au niveau de la moyenne européenne.
La nouvelle trajectoire conservera la mise en place d’un taux de 28 %, en 2018, pour l’ensemble des entreprises réalisant moins de 500 000 euros de bénéfices.
Dans son rapport de 2016 « Adapter l’impôt sur les sociétés à une économie ouverte », le Conseil des prélèvements obligatoires a souligné que la baisse du taux normal d’IS constitue « un enjeu d’attractivité pour notre territoire et de compétitivité pour nos entreprises ».
Elle diminuera de 11 milliards d’euros la charge fiscale pesant sur les entreprises d’ici à 2022.
L’article 86 de la loi de finances baisse d’un point le taux du CICE (crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi) qui passera de 7 à 6 % pour les salaires versés en 2018. Ce dispositif, qui a été instauré par la dernière loi de finances rectificative pour 2012, sera remplacé par un allégement de cotisations patronales à compter du 1er janvier 2019.
Afin de « simplifier la vie des petites entreprises »13, l’article 22 de la loi de finances augmente les plafonds de chiffre d’affaires pour être éligible au régime de la micro-entreprise. Ils passeront à 170 000 euros pour les activités de ventes et à 70 000 euros pour les activités de prestations de services et les activités non-commerciales.
D’autre part, l’article 97 de la loi de finances prévoit que les entreprises réalisant un très faible chiffre d’affaires (inférieur ou égal à 5 000 €) seront exonérées de cotisation foncière des entreprises (CFE) à compter de 201914.
L’article 39 de la loi de finances maintient l’assiette actuelle de la taxe sur les transactions financières (TTF) en abrogeant l’article 62 de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017 qui prévoyait de l’élargir aux transactions infrajournalières, à compter du 1er janvier 2018. Le ministre des Finances Bruno Le Maire a justifié la suppression de l’élargissement de la TTF aux opérations dites « intraday » par la nécessité de « protéger l’attractivité de la place de Paris et compte tenu du coût que cela entraînerait pour nos entreprises ». De plus, dans un référé du 19 juin 2017, la Cour des comptes avait expliqué que l’extension de l’assiette de la TTF se heurtait à d’importantes difficultés de mise en œuvre.
Afin de favoriser notamment le recrutement de cadres étrangers à fort potentiel par les entreprises, la tranche marginale supérieure de la taxe sur les salaires de 20 % portant sur les rémunérations supérieures à 152 279 euros est aussi supprimée (art. 90).
Enfin, l’article 37 de la loi de finances supprime également la contribution additionnelle à l’impôt sur les sociétés (IS) de 3 % au titre des montants distribués qui avait été créée par la loi n° 2012-958 du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012. Il tire les conséquences de l’arrêt du 17 mai 2017 de la Cour de justice de l’Union européenne qui a jugé que cette contribution de 3 % sur les revenus distribués était contraire à l’article 4 de la directive n° 2011/96/UE du Conseil du 30 novembre 2011. Cette taxe sur les dividendes a été totalement invalidée par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2017-660 QPC du 6 octobre 201715.
Notes de bas de pages
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1.
La loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018 a été publiée au JO du 31 décembre 2017.
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2.
Déclaration faite devant la commission des finances de l’Assemblée nationale le 27 septembre 2017.
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3.
Avis n° HCFP-2017-6 relatif au deuxième projet de loi de finances rectificative pour l’année 2017 : JO, 16 nov. 2017.
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4.
Après l’invalidation par le Conseil constitutionnel de la taxe sur les dividendes (Cons. const., 6 oct. 2017, n° 2017-660 QPC), le gouvernement a été contraint de revoir sa trajectoire budgétaire. Il a indiqué que le déficit public atteindra 2,8 % du PIB en 2018 au lieu des 2,6 % prévus initialement. Il a été amené à faire adopter en urgence une loi de finances rectificative instaurant une contribution exceptionnelle des grandes entreprises pour compenser la moitié du coût de l’invalidation de la taxe sur les dividendes.
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5.
On notera également que l’article 115 de la loi de finances pour 2018 rétablit le jour de carence en cas d’arrêt maladie dans les trois fonctions publiques. Cette mesure qui était l’une des promesses de campagne d’Emmanuel Macron, permettra, selon le gouvernement, de lutter contre le « micro-absentéisme », lequel « désorganise les services, alourdit la charge de travail des collègues en poste et coûte environ 170 millions d’euros par an ».
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6.
Avis n° HCFP-2017-4, 24 sept. 2017 relatif aux projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour l’année 2018 : JO, 28 sept. 2017.
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7.
Selon le commissaire européen aux Affaires économiques, Pierre Moscovici, « La France a fait l’effort nécessaire pour revenir en dessous des 3 %. Mais si l’on en vient au critère du déficit structurel (…), force est de constater que l’effort est réduit dans l’appréciation française et qu’il est négatif dans l’appréciation européenne » : Le Figaro, 23 nov. 2017.
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8.
V. Le Monde, 27 sept. 2017.
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9.
Le Conseil a seulement censuré une disposition de l’article 31 qui traitait différemment les titulaires d’usufruits constitués en application de l’article 757 du Code civil selon la date de constitution de ces usufruits. Il a considéré que cette différence de traitement ne pouvait être justifiée « ni par une différence de situation ni par un motif d’intérêt général ».
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10.
Le dispositif « Madelin-PME » est prévu au CGI, art. 199, terdecies-0 A.
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11.
Déclaration faite le 20 octobre 2017 à l’Assemblée nationale.
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12.
V. Le Monde, 21 oct. 2017.
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13.
Avis, 1ère partie PLF 2018, AN, Commission des finances, 9 oct. 2017, p. 9.
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14.
On observera également que : L. n° 2017-1836, 30 déc. 2017, art. 9 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 instaure pour les créateurs et repreneurs d’entreprises une « année blanche » de cotisations sociales, au titre de leur première année d’activité, sous condition de ressources.
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15.
Pour compenser en partie le manque à gagner de 10 milliards d’euros dû à la censure de cette taxe, la loi n° 2017-1640, du 1er décembre 2017 de finances rectificative pour 2017 a instauré une contribution exceptionnelle à l’IS pour les sociétés réalisant un chiffre d’affaires supérieur à 1 milliard d’euros.