Vente de la résidence secondaire : avez-vous droit à l’exonération ?
Les propriétaires qui vendent leur résidence secondaire pour acquérir, dans les deux ans, leur résidence principale peuvent bénéficier de l’exonération de la plus-value. Si ce dispositif est entouré de conditions strictes, la justice vient d’atténuer la valeur des conditions de forme. L’exonération peut désormais être demandée par voie de réclamation.
Si les particuliers connaissent le dispositif d’exonération de la vente de la résidence principale, peu sont informés de l’existence d’une exonération possible sur le produit de la vente de leur résidence secondaire (article 150 U-II-1° bis du Code général des impôts).
Une incitation à détenir sa résidence principale
Depuis les cessions réalisées à compter du 1er février 2012, lorsque le logement vendu ne constitue pas la résidence principale, le vendeur peut bénéficier d’une exonération de la plus-value. Deux conditions sont toutefois requises. En premier lieu, le cédant doit remployer tout, ou partie du prix de cession, dans un délai de 24 mois à compter de la cession, à l’acquisition ou la construction d’un logement qu’il affecte à son habitation principale (logement ancien, neuf, en VEFA). En second lieu, l’exonération est subordonnée à la condition que le cédant n’ait pas été directement, ou par personne interposée, propriétaire de sa résidence principale au cours des 4 années précédant la cession.
L’exonération est limitée à la fraction du prix effectivement remployé dans l’acquisition de la future résidence principale. Enfin, si le cédant ne respecte pas cette condition de remploi dans le délai de 24 mois, l’exonération est remise en cause.
Le calendrier des opérations
Par mesure de tempérament, l’administration fiscale admet que la résidence principale puisse être achetée avant que la vente de la résidence secondaire, notamment par l’utilisation d’un prêt-relais. Elle pose toutefois des conditions. Le logement doit avoir été mis en vente avant l’acquisition de l’habitation principale. Ensuite, sa vente doit intervenir dans un délai normal après l’acquisition du logement affecté à la résidence principale.
Enfin, le prix de cession du logement doit effectivement être remployé à l’acquisition ou construction de la résidence principale. « L’affectation effective du prix de cession est justifiée notamment, par exemple, par le remboursement anticipé de l’emprunt contracté pour l’acquisition ou la construction de la résidence principale ou en remboursement d’un prêt relais », indique l’administration (BOI-RFPI-PVI-10-40-30).
Viager, dépendances, SCI : le champ de l’exonération
L’exonération de la plus-value est susceptible de s’appliquer aux dépendances du logement. Ces dépendances « immédiates et nécessaires » sont celles qui forment avec lui un tout indissociable; comme les garages et chambres de bonnes. Elles doivent être cédées en même temps que le logement, peu importe qu’elles le soient auprès d’acquéreurs distincts du logement.
En revanche, elle ne peut pas s’appliquer aux terrains à bâti, ni aux locaux à usage professionnel, industriel ou commercial ou artisanal. En cas de cession de locaux à usage mixte, seule la fraction de la plus-value afférente à la partie privative peut bénéficier de l’exonération. Elle ne s’applique pas non plus aux cessions de parts de sociétés ou de groupements de toute nature à prépondérance immobilière (groupement foncier agricole, fiducie, etc.).
Aussi, elle s’applique à la vente de logements détenus en pleine propriété, ou dont la propriété est démembrée (usufruit et nue-propriété). En revanche, la résidence principale achetée ou construite doit être détenue en pleine propriété.
En outre, elle s’applique également au logement détenu à travers une société transparente, du type SCI immobilière (SCI) soumise à l’impôt sur le revenu. C’est l’associé personne physique d’une société qui peut bénéficier à titre personnel du dispositif. Le dispositif peut s’appliquer si logement acquis est détenu de façon indirecte.
Enfin, l’application de l’exonération de la plus-value au viager impose de distinguer le bouquet et la rente. Puisque le prix de cession doit être remployé dans l’acquisition de la résidence principale dans un certain délai, il faut pouvoir déterminer au jour de la cession la somme sur laquelle porte le remploi. Le prix de cession ne doit pas être affecté par un aléa. Or le versement de la rente est aléatoire, puisqu’il dépend de la durée de vie du cédant. Par conséquent, l’administration indique que « dans le cadre d’une vente en viager d’un immeuble, le remploi ne peut porter que sur le bouquet ».
Une exonération sur demande
Ce dispositif a donc pour but d’inciter les Français à être propriétaires de leur logement.
Il ne peut d’ailleurs être utilisé qu’une fois, au titre de la cession de son choix réalisée depuis le 1er février 2012.
En outre, il ne s’applique pas de plein droit : le vendeur doit en faire la demande auprès de l’administration fiscale. Pour se faire, l’acte de vente doit mentionner de nombreux éléments dont la liste est dressée par l’article 41 duovicies-0 H de l’annexe III au CGI. il s’agit de l’identité du bénéficiaire de l’exonération, des droits du bénéficiaire sur le prix de cession, de la fraction du prix de cession correspondant à ses droits, que le bénéficiaire destine au remploi à l’acquisition ou la construction d’un logement affecté à sa résidence principale et du montant de la plus-value exonérée.
L’exonération peut désormais être obtenue au cours d’une réclamation
Fait nouveau, l’exonération peut être mise en œuvre par voie de réclamation, c’est-à-dire après la déclaration, par courrier demandant à l’administration de revoir le calcul ou le montant de l’impôt. C’est ce qu’il ressort d’un récent arrêt de la cour administrative d’appel de Marseille (6 octobre 2022, n°20MA02805). Jusqu’à présent, la justice refusait ce droit aux contribuables.
L’affaire jugée par la cour de Marseille permet de mieux comprendre la situation dans laquelle il est possible de demander le bénéfice de l’exonération. Madame D. avait vendu par acte notarié du 27 avril 2012 un bien immobilier lui appartenant dans le Var, pour un prix de 80 000 euros, acte publié le 15 mai 2012. Par acte du 16 juillet 2013, elle avait acquis avec Monsieur C. un bien immobilier dans les Alpes-de-Haute-Provence, pour un prix de 150 000 euros payé comptant. Son acte de vente précisait que la cession entrait dans le champ d’application des plus-values immobilières et comportait en annexe la déclaration modèle 2048 IMM. Elle avait donc payé l’impôt sur la plus-value de 7 764 euros. En mars 2014, elle a introduit une réclamation contentieuse pour demander le bénéfice du dispositif de l’exonération de la plus-value pour la cession d’un logement autre que la résidence principale, et la restitution de l’impôt payé. En juillet 2014, l’administration fiscale a rejeté cette réclamation, au motif que l’acte de cession ne répondait pas aux conditions de forme de la demande prévues par le Code général des impôts. Madame D. avait alors demandé au tribunal administratif de Toulon d’annuler la décision de l’administration fiscale, ce que le tribunal a refusé de lui accorder par un jugement du 5 juin 2020.
En revanche, la cour administrative d’appel de Marseille a fait droit à sa demande. Elle indique tout d’abord que le texte du code n’existait pas au moment de la vente du bien. Surtout, elle indique que les commentaires administratifs ne font pas obstacle à ce qu’un particulier, qui n’a pas fait valoir son droit à l’exonération de la plus-value de cession lors de la vente, et n’avait donc pas fait mentionner dans l’acte de cession par le notaire les informations exigées par la doctrine administrative puisse demander la restitution de l’impôt payé dans le délai de réclamation prévu par le code.
Ce qui compte, c’est que les conditions posées par la loi soient réunies : le remploi du prix de cession dans le délai de 24 mois dans l’acquisition de la résidence principale.
Référence : AJU006w0