Activité de l’AGRASC : un cercle vertueux

Publié le 27/04/2023

Activité de l’AGRASC : un cercle vertueux

L’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis affiche un bilan impressionnant (AGRASC). Son activité continue à s’accroître afin de répondre à sa mission : s’assurer que nul ne tire profit de son délit.

Le 24 janvier dernier, Éric Dupond-Moretti, garde des Sceaux, ministre de la Justice a dressé le bilan de l’activité de l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (AGRASC). L’AGRASC a été créée dans le cadre de la loi n° 2010-768 du 9 juillet 2010, avec pour objectif de faciliter la saisie et la confiscation en matière pénale notamment en cas de fraude fiscale et douanière. Le fonctionnement de l’Agence a été précisé par le décret n° 2011-134 du 1er février 2011 et elle a commencé ses activités le 4 février 2011. Établissement public administratif placé sous la double tutelle du garde des Sceaux, ministre de la Justice et du ministre des Comptes publics, l’Agence centralise de très nombreuses saisies et s’assure tant de la bonne gestion de ces biens que, une fois ces biens confisqués par une décision définitive, du versement du produit de leur vente au budget général de l’État.

De nouvelles antennes régionales pour l’AGRASC

Le ministre de la Justice, a fait de la saisie et de la confiscation des avoirs criminels un axe fort de sa politique. La nouvelle circulaire de politique pénale générale du 20 septembre 2022 donne d’ailleurs pour instruction aux magistrats du ministère public, de développer les saisies et confiscations pénales. Les missions de l’AGRASC sont donc appelées à se développer. Le président du conseil d’administration et le directeur général de l’AGRASC sont des magistrats de l’ordre judiciaire, le secrétaire général est issu du ministère des Finances. Outre la direction, l’Agence est composée d’un secrétariat général, du pôle opérationnel, du pôle de gestion, du pôle juridique et d’une agence comptable. Elle est constituée d’agents fonctionnaires ou contractuels, principalement issus du ministère de la Justice, des ministères économiques et financiers et du ministère de l’Intérieur. Les moyens humains de l’AGRASC ont récemment été augmentés de manière très importante, a rappelé Éric Dupond-Moretti. En effet, les effectifs de l’Agence sont passés de 45 agents en 2020 à 83 agents en 2023. Le développement de l’AGRASC passe également par la création d’antennes régionales aux missions identiques à celles du siège central, chargées de renforcer la proximité avec les services enquêteurs et judiciaires, par le biais notamment de formations spécialisées ou d’échanges réguliers dans leur ressort de compétence. Après avoir ouvert en mars 2021 des antennes à Marseille et à Lyon, l’AGRASC a ouvert en avril 2022 deux nouvelles antennes régionales à Rennes et Lille pour faciliter la saisie et la gestion des avoirs issus de la criminalité organisée. Avec 27 344 686 euros pour Marseille et 14 416 477 euros pour Lyon de montant total exécuté et versé, les antennes de Lyon et de Marseille obtiennent déjà en 2022 des résultats très élevés. Les agences régionales de Bordeaux, Nancy et Fort de France seront, quant à elles, opérationnelles en avril 2023. « L’AGRASC est le bras armé de l’État pour aller chercher réparation auprès des délinquants en les tapant au portefeuille. Son efficacité n’est plus à démontrer et les agences régionales que nous allons ouvrir dans les territoires de Bordeaux, Nancy et Fort de France vont permettre d’intensifier encore cette dynamique en renforçant davantage le travail commun et la proximité avec les services enquêteurs et judiciaires des plus importantes juridictions », a souligné Éric Dupond-Moretti.

Des résultats en hausse

« Les résultats de cette politique volontariste sont aux rendez-vous, avec une augmentation spectaculaire des saisies et confiscations depuis deux ans », se satisfait le garde des Sceaux. En effet, les saisies s’élèvent à un montant de 771 millions d’euros en 2022, un niveau jamais atteint depuis la création de l’AGRASC, en progression de 6,3 % par rapport à l’année 2021, déjà exceptionnelle et de 30 % par rapport à 2020. Les confiscations, quant à elles, s’élèvent à 171 millions d’euros, soit une hausse de +13,9 % par rapport à 2021 et de +100 % par rapport à 2020. Comme pour les saisies il est constaté une augmentation linéaire des confiscations depuis la création de l’AGRASC mais avec une forte accélération en 2021 qui se confirme et s’accentue en 2022 d’autant plus notable que ces deux années n’ont pas connues d’opérations exceptionnelles. Le ratio saisies/confiscations est en augmentation à 35,2 %. Pour l’Agence, l’objectif à atteindre dans les années à venir serait un ratio de 50 %. En effet, pour l’Agence « il est sain que les juridictions saisissent le plus largement possible pour donner l’assiette et la latitude la plus grande aux juridictions, au stade de la confiscation, précise l’Agence. La confiscation étant une peine, le juge devant apprécier sa nécessité, sa proportionnalité au regard de la gravité des faits et de la personnalité des auteurs d’infractions, il est logique qu’il ne confisque pas l’intégralité des biens qui ont été saisis ». Résiduelles les premières années de l’AGRASC, les confiscations immobilières sont désormais prononcées en routine par les juridictions et sont appelées à se maintenir à un haut niveau ces prochaines années aux alentours de 200 immeubles par an. Le nombre de ventes immobilières et confiscations en valeur exécutées a augmenté de 31 % . « S’agissant des meubles, les résultats sont également très bons avec 4 211 meubles vendus (de la Lamborghini au grand cru, en passant par le robot ménager) pour un montant de 15,6 millions d’euros en 2022 », commente le ministre. Numéraire, comptes bancaires, biens immobiliers, ou des biens plus atypiques comme les œuvres d’art, des bateaux, des voitures de luxe, comme des grands crus, des montres, des chaussures Louboutin, voire un troupeau de bovins dans le Jura… : les biens confisqués par l’AGRASC, sont en effet d’une grande variété. Les biens saisis peuvent être vendus avant jugement, soit parce qu’ils ne sont plus utiles à la manifestation de la vérité ou parce qu’ils sont susceptibles de se dévaluer. Ils peuvent être vendus au stade de la confiscation, lorsqu’un tribunal a condamné leur propriétaire. Malgré une augmentation très importante, en volume, des restitutions en 2022 (103 millions d’€) le ratio saisies/restitutions reste stable aux alentours de 20 % démontrant une appropriation satisfaisante du dispositif par les parquetiers et les juges d’instruction. Il est à noter que 12,2 millions des restitutions ont été versées aux créanciers publics. Enfin, à l’international, des partages de biens confisqués ont été conclus par l’AGRASC avec ses homologues étrangers, pour un montant de 16 millions d’euros, soit une augmentation de 181 %.

Focus sur les crypto-actifs et les nouvelles formes de blanchiment

310 dossiers des crypto-actifs ont été saisis, soit une augmentation de 319 % des saisies de ces biens atypiques. Dès 2014, l’Agence s’est vue confier la gestion de bitcoins et depuis 2020, de l’ensemble des cryptomonnaies. Ce sont des biens meubles saisissables dans le cadre d’une enquête préliminaire ou de flagrance par le juge des libertés et de la détention, sur requête du parquet, dans le cadre d’une information judiciaire par le juge d’instruction, et confiscables, à titre de peine complémentaire par la juridiction de jugement. Le nombre de saisie d’actifs numériques est en constante augmentation. En raison de la volatilité élevée du cours des actifs numériques rendant les éventuelles restitutions sujettes à de fortes appréciations ou dépréciations, l’Agence recommande aux magistrats de privilégier la vente avant jugement de ces biens. La cryptomonnaie est un nouveau vecteur de blanchiment qui fait l’objet d’une attention particulière de l’AGRASC qui fournit les wallets (supports matériels ou immatériels qui permettent de stocker, envoyer et recevoir des cryptomonnaies) aux juridictions et aux enquêteurs. Les crypto-actifs sont en effet soupçonnés d’être un des instruments facilitant la cyber criminalité. Pour la cellule de renseignements financiers français, TRACFIN, les crypto-actifs présentent des risques élevés avérés en matière de fraude et de blanchiment de capitaux : utilisation de crypto-actifs garantissant l’anonymat et la non-traçabilité, paiements de stupéfiants, opérations de financement d’actions terroristes, blanchiment de fraude fiscale, exercice illégal de la profession d’intermédiaire en opérations de banque et de services de paiement, escroqueries (manipulations de cours, sites frauduleux d’investissements en bitcoins), cyberattaques et ransomwares payables en crypto-actifs, commerce de produits illicites sur le darkweb, etc.

Confiscation de biens immobilier et affectation à but social

Les produits des confiscations sont versés au budget général de l’État, à la MILDECA, pour le fonds de prévention en matière de stupéfiants, à des associations de prévention du proxénétisme et de la traite des êtres humains, par l’intermédiaire de la Direction générale de la cohésion sociale, aux victimes parties civiles qui remplissent les conditions pour être indemnisées sur l’assiette des biens confisqués, à la Direction générale de la police nationale pour financer la protection des repentis et des collaborateurs de justice, aux juridictions et services d’enquête luttant contre la criminalité et la délinquance organisées. Depuis le 4 août 2021, un mécanisme de restitution des biens dits mal acquis aux populations spoliées a été introduit dans la législation nationale. Il prévoit désormais la possibilité d’affecter le produit de ces biens au financement de l’action de coopération et de développement au profit des populations des pays concernés. En outre, la loi du 8 avril 2021 offre désormais une alternative à la vente d’un immeuble confisqué et au versement de son produit au budget de l’État, par son affectation au profit d’une structure d’intérêt général. L’intervention du ministre a eu lieu dans le cadre de son déplacement à Coudekerque-Branche, pour la remise d’un bien immobilier à l’association « Habitat et Humanisme ». Il s’agit du premier immeuble confisqué par la justice, en l’espèce par le tribunal de Dunkerque, à faire l’objet d’une affectation à but social. « Ce dispositif s’inspire du modèle italien, dont nous avons beaucoup à apprendre dans la lutte contre la criminalité organisée », a souligné le ministre. « Quel plus bel exemple de solidarité, d’efficacité de l’État et d’application ingénieuse de la loi, que de priver un marchand de sommeil de l’instrument de son infraction en confisquant son immeuble, puis en l’affectant, par l’intermédiaire de l’AGRASC dont c’est la mission, à la foncière solidaire « Habitat et Humanisme » dans le cadre d’un bail à titre gratuit de longue durée ? », a poursuivi le garde des Sceaux. Le conseil d’administration de l’AGRASC a voté deux autres projets d’affectation qui sont en cours de finalisation, une maison confisquée à un condamné pour fraude aux prestations sociales affectée à une association de contrôle judiciaire pour y éloigner des conjoints violents, dans la commune Le Moule en Guadeloupe et un appartement confisqué à une personne condamnée pour escroquerie, affecté à l’association ADAGES, pour y accueillir des réfugiés Ukrainiens, à La Grande Motte dans l’Hérault. 665 immeubles ont été saisis sur le territoire national a précisé le ministre, ce qui « ouvre de belles perspectives pour l’affectation sociale ». Dans le même esprit, l’AGRASC a affecté en 2022 plus de 3 000 biens aux services de police, de gendarmerie, des douanes et désormais aux services judiciaires. En 2022, trois véhicules automobiles ont ainsi été attribués, pour la première fois, aux tribunaux de Cayenne, de Tours et de Fort de France.

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