Holding animatrice : le juge analyse les faits qualifiants

Publié le 11/05/2023

Réseau professionnel

Dans un arrêt du 5 septembre 2022 rendu dans le cadre de l’affaire Finaréa, la cour d’appel de Paris examine les éléments factuels permettant de retenir la qualité de holding animatrice apportés par le contribuable, celle-ci ne se présumant pas.

Déterminante en matière fiscale, la notion de holding animatrice n’est pas définie par la loi. Les juges s’appuient sur un faisceau d’indices pour conclure ou non au caractère animateur de la société holding de groupe. Ces indices doivent être fournis de façon étayée par le contribuable qui s’en prévaut pour bénéficier d’un régime fiscal de faveur.

L’affaire Finaréa, les suites

L’arrêt du 5 septembre 2022 de la cour d’appel de Paris (CA Paris, 5 sept. 2022, n° 21/08463) illustre l’appréciation par le juge des éléments factuels qui conduisent à retenir l’animation de la holding. Cet arrêt s’inscrit dans le cadre du contentieux Finaréa qui a remis en cause la revendication, par un millier de contribuables, du bénéfice de l’ancienne réduction ISF-PME via une holding (CGI, art. 885-0 V bis abrogé). Pour mémoire, les contribuables qui souscrivaient au capital d’une PME, en direct ou via une holding, avaient droit à une réduction d’impôt de solidarité (ISF) sur la fortune (ISF) à hauteur de 75 % des versements effectuées, sous réserve du respect de certaines conditions, les souscriptions au capital de PME, notamment de holdings animatrices. L’avantage fiscal ne pouvait pas dépasser 50 000 euros.

L’éligibilité des holdings animatrices n’était pas prévue par la loi, mais par la doctrine administrative qui assimilait les holdings animatrices à des sociétés opérationnelles à condition qu’elles « participent activement à la conduite de la politique de leur groupe et au contrôle de leurs filiales ; et rendent le cas échéant et à titre purement interne, des services spécifiques, administratifs, juridiques, comptables, financiers et immobiliers » (BOI-7-S-3-08 n° 26 du 11 avril 2008).

Après 10 années de procédure, la Cour de cassation avait remis en cause les réductions d’ISF-PME au motif que les holdings ne participaient pas activement à la conduite du groupe Finaréa et au contrôle des sociétés opérationnelles (Cass. com., 3 mars 2021, n° 20-11839).

L’animation ne se présume pas

Dans l’affaire de septembre, un contribuable avait souscrit à deux augmentations de capital successives réalisées au sein de la société Finaréa Demeter. Le 15 juin 2009 et le 26 mai 2010, il avait réalisé, à chaque échéance, un apport de 20 000 euros et avait bénéficié de la réduction ISF-PME à raison de ces deux souscriptions. De son côté, la holding avait investi au capital de ces deux sociétés, à hauteur de 34 % dans la première et 45 % dans la seconde. Elle avait délivré deux attestations en date du 31 juillet 2009 et du 2 juin 2010 certifiant du rôle d’animation de la société holding. L’administration fiscale avait remis en cause le bénéfice de la réduction ISF-PME au motif que la holding n’animait pas son groupe. Le tribunal judiciaire de Paris l’avait suivi dans un jugement du 29 janvier 2021.

L’animation à l’épreuve des faits

La cour d’appel de Paris a également conclu que la société holding n’est pas animatrice de son groupe. Pour aboutir à cette conclusion, elle a examiné tous les éléments soumis par le contribuable, sur qui repose la charge de la preuve de l’animation. Celui-ci affirmait qu’aucune décision stratégique ne peut être prise par les filiales sans l’accord de la holding Finaréa et tout soutien au développement d’une filiale est conditionné au respect du cadre imposé. Il invoquait que la holding avait imposé aux fondateurs de PME un modèle de statuts types, la transformation des PME en SAS, un contrat d’animation détaillant les prestations fournies, un acte d’actionnaire type. Pour l’administration, le contribuable évoque la structuration mise en place par la holding mais ne produisait pas les éléments justifiant que celle-ci détermine la politique commerciale ou stratégique de la société opérationnelle et en assure l’animation.

À propos de la première société cible des investissements, les juges du fond relèvent plusieurs éléments « à charge » : les statuts ont été signés après l’attestation délivrée par la holding, le contrat d’animation n’est pas daté, le rapport de gestion ne précise pas le rôle de pilotage de la holding.

À propos de la seconde société cible des investissements, les juges du fond relèvent que le contrat d’animation n’était étayé d’aucune réalisation concrète, que le rapport de gestion mentionne les conditions de réalisation d’un investissement sans convaincre du rôle d’animation, que les procès-verbaux de direction ne relèvent pas d’initiatives de pilotage de ses participants, mais ne font état que d’une simple « participation » et « de pourparlers avec les actionnaires ».

Formaliser le rôle de la holding

Cet arrêt donne une grille de lecture au contribuable qui doit formaliser précisément le rôle de la holding, en démontrer que celle-ci exerce une influence sur le fonctionnement de ses filiales. La signature d’une convention d’animation ne suffit pas en elle-même, à démontrer l’effectivité de l’animation.

Certes, plusieurs éléments peuvent le supposer, comme le fait pour la holding de disposer des moyens humains et matériels affectés à l’animation, la circonstance qu’existe une communauté de dirigeants entre la holding et les filiales ou encore le fait que les sociétés soient contrôlées à 100 %. Mais au-delà des indices, la documentation interne aux sociétés fournie par le contribuable (rapports de gestion, attestations, mails, correspondances, procès-verbaux d’assemblée générale et de conseil d’administration ou encore pacte d’actionnaires) doit prouver que la société holding a les moyens d’animer ses filiales et que la politique d’animation est concrètement mise en œuvre par celles-ci, et ce, sur toutes les années couvertes par le bénéfice du régime fiscal de faveur.

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