Loi de finances pour 2024 : les mesures concernant les particuliers
Barème de l’impôt sur le revenu, location saisonnière, quasi-usufruit issu de la donation d’une somme d’argent, pacte Dutreil, reprise d’une entreprise par ses salariés, investissement dans les PME, investissements locatifs défiscalisés, etc. : le point sur les mesures adoptées par la loi de finances pour 2024.
Comme chaque année, la loi de finances apporte son lot de réforme et d’ajustement. Adoptée par la procédure de l’article 49, al. 3 de la Constitution, la loi de Finances pour 2024 contient quelques surprises (L. n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 JORF n° 0303 du 30 décembre 2023).
Généralités
Le barème de l’IR est indexé sur l’inflation
La loi de finances pour 2024 relève les tranches de revenus du barème de l’impôt sur le revenu de 4,8 %. Le barème d’imposition des revenus 2023 est donc le suivant (CGI, art. 197) :
– Jusqu’à 11 294 euros : 0 %
– De 11 294 euros à 28 797 euros : 11 %
– De 28 798 euros à 82 341 euros : 30 %
– De 82 342 euros à 177 106 euros : 41 %
– Supérieure à 177 106 euros : 45 %
Par ailleurs, le prélèvement à la source (PAS) de l’impôt sur le revenu est aménagé pour les couples soumis à imposition commune (art. 19). À partir du 1er septembre 2025, le taux du PAS sera, par défaut, le taux individualisé. Les couples pourront toujours choisir de se voir appliquer chacun le taux du foyer fiscal.
Réductions d’impôts pour dons : trois changements
Les dons relevant du fameux amendement Coluche (ceux effectués au profit d’organismes d’aide alimentaire, logement et/ou soins médicaux ou dentaires) voient leur coup de pouce fiscal prolongé. En effet, ces dons aux personnes les plus démunies ouvrent droit à une réduction égale à 75 % des sommes versées. En principe, les versements sont pris en compte dans la limite de 552 euros. Pour les années 2022 et 2023, ce plafond avait été porté à 1 000 euros. La loi de finances vient de prolonger pour trois ans ce plafond dérogatoire (CGI, art. 200-1 ter).
Par ailleurs, l’autre dispositif de prise en compte des dons concerne les dons effectués au profit d’organismes d’intérêt général. Ces dons donnent droit à une réduction d’impôt sur le revenu égale à 66 % de leur montant les sommes prises dans la limite de 20 % du revenu imposable (CGI, art. 200). Ce dispositif s’ouvre aux dons aux organismes qui agissent en faveur de l’égalité entre les femmes et les hommes. Le dispositif équivalent concernant les entreprises est également modifié en ce sens (CGI, art. 238 bis).
Enfin, l’article 30 porte le taux de la réduction d’impôt sur le revenu de 66 % à 75 % pour les dons effectués au profit de la Fondation du patrimoine et destinés à conserver ou à restaurer le patrimoine immobilier religieux.
Crédit d’impôt autonomie
La loi proroge de deux ans le crédit d’impôt en faveur des contribuables engageant des dépenses d’installation ou de remplacement de certains équipements en faveur des personnes âgées ou handicapées (CGI, art. 200 quater A). Ce crédit d’impôt autonomie s’élève à 25 % des dépenses engagées dans la limite de 5 000 euros pour une personne seule, 10 000 euros pour un couple soumis à imposition commune. À partir de 2024, le crédit d’impôt est placé sous conditions de ressources : il est réservé aux personnes percevant des revenus intermédiaires. Il est également recentré sur les équipements permettant l’adaptation des logements au handicap et à la perte d’autonomie, donc aux foyers comptant une personne en situation de handicap ou de perte d’autonomie.
Contrat de rente-survie
La loi de finances ouvre le champ de la réduction d’impôt liée à la souscription d’un contrat de rente survie (CGI, art. 199 septies). Cette réduction d’impôt sur le revenu s’élève à 25 % des primes versées dans la limite de 1 525 euros, montant majoré de 300 euros par enfant à charge. Le contrat de rente-survie est un contrat d’assurance-vie souscrit pour garantir le versement de revenus à une personne souffrant d’un handicap, au décès de la personne ayant souscrit le contrat. Il peut s’agir d’un enfant ou de tout autre parent en ligne directe (ascendant ou descendant), d’un parent en ligne collatérale jusqu’au troisième degré ou d’une personne vivant sous le toit du souscripteur du contrat et à sa charge. La loi ouvre la faculté de souscrire un contrat de rente-survie en faveur des descendants qu’ils soient mineurs ou, désormais majeurs. La condition de minorité est supprimée.
Borne de recharge de véhicule électrique
La loi retouche au crédit d’impôt pour l’équipement en systèmes de charge pour véhicule électrique dans les logements habitation principale ou résidence secondaire exclusive) (CGI, art. 200 quater C). Le crédit d’impôt est égal à 75 % des dépenses, dans la limite de 300 euros par système de charge. La loi porte ce plafond à 500 euros pour les dépenses payées à compter du 1er janvier 2024 et recentre le dispositif sur les seules bornes de recharges électriques pilotables.
Immobilier
Location saisonnière
La loi de finances pour 2024 réforme la fiscalité des revenus issus de la location de meublés de tourisme, dits aussi locations saisonnières ou « niche Airbnb ». Désormais, toutes ces locations sont soumises aux mêmes conditions d’application du micro-BIC : plafond de chiffres d’affaires à 15 000 euros et abattement représentatif des charges à 30 %, avec un abattement supplémentaire de 21 % pour les meublés de tourisme classé hors zone tendue à condition que l’ensemble des recettes ne dépassent pas 15 000 euros (CGI, art. 50-0). Toutefois, cette réforme adoptée dans des conditions « hasardeuses », pourrait ne pas être appliquée.
Prolongation de certains investissements locatifs
La loi de finances prolonge le dispositif Malraux jusqu’au 31 décembre 2024 (CGI, art. 199 tervicies, I), ainsi que le dispositif Denormandie jusqu’au 31 décembre 2026 (CGI, art. 199 novovicies) tout en alignant le taux de la réduction d’impôt au titre de la souscription de parts de SCPI sur celui applicable aux contribuables qui acquièrent directement un logement.
Plus-value immobilière
La loi proroge également jusqu’au 31 décembre 2025 les abattements exceptionnels sur les plus-values de cessions de terrains à bâtir et d’immeubles en reconstruction en faveur de la production directe ou indirecte de logements sociaux (CGI, art. 150 U, II, 7° et 8°).
IFI et la détention des biens par une société
L’article 27 met fin à un avantage en matière d’IFI en cas de détention indirecte des biens à travers une société. Désormais, les dettes contractées par la société détentrice des biens entrant dans le champ de l’IFI et qui ne sont pas afférentes à ces actifs imposables ne sont plus prises en compte pour la valorisation des parts et actions de structure détentrice de patrimoine immobilier taxable à l’IFI, à l’instar des règles d’évaluation valorisation en cas de détention en direct .
Épargne
PEAC et PER
La loi de finances précise le régime fiscal du Plan épargne avenir climat (PEAC) créé par la loi Industrie verte (Loi n° 2023-973 du 23 octobre 2023, JORF n° 0247 du 24 octobre 2023). Destiné principalement au financement de la transition écologique des entreprises, le PEAC est une enveloppe d’investissement à long terme réservée aux personnes mineures. Il est alimenté pendant toute la minorité de son titulaire, et les fonds sont bloqués jusqu’à sa majorité, sauf deux cas de déblocage exceptionnel : l’invalidité du titulaire et le décès de l’un de ses parents. Les revenus et les plus-values générés par le plan sont exonérés d’impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux. Parallèlement, la loi met fin, depuis le 1er janvier 2024, à la possibilité pour les mineurs d’ouvrir un plan d’épargne retraite (PER) individuel. Pour les détenteurs mineurs, aucun versement ne peut plus être effectué.
Réduction d’impôt pour investissement au capital des entreprises
La loi de finances prolonge de deux ans, soit jusqu’au 31 décembre 2025, le taux majoré de 25 % de la réduction d’impôt sur le revenu (dite aussi IR-PME ou réduction « Madelin ») pour la souscription au capital des PME et des entreprises solidaires d’utilité sociale et des foncières solidaires (CGI, art. 199 terdecies-0 AA). En principe, le taux de droit commun s’élève à 18 %.
Par ailleurs, la loi créée des conditions spécifiques pour l’application de la réduction d’impôt IR-PME à l’investissement (en direct ou par l’intermédiaire d’une holding) au capital des jeunes entreprises innovantes (JEI), jeunes entreprises innovantes de croissance (JEIC) et jeunes entreprises innovantes de rupture (JEIR). Pour les JEI, les souscriptions réalisées en 2024 ouvrent droit à une réduction de 30 % dans la limite de 75 000 euros de versements pour un contribuable célibataire, 150 000 euros pour un couple marié ou pacsé.
Pour les JEIC, les souscriptions réalisées entre 2025 et 2028 ouvrent également droit à une réduction de 30 %, dans les mêmes limites de 75 000 euros et de 150 000 euros de versements.
Pour les JEIR, les souscriptions réalisées entre 2025 et 2028 ouvrent droit à une réduction de 50 % dans la limite de 50 000 euros de versements pour un contribuable célibataire et de 100 000 euros pour un couple marié ou pacsé. La loi précise que le total de ces deux nouvelles réductions d’impôt ne pourra pas donner lieu à une réduction d’impôt globale supérieure à 50 000 euros pour la période allant 2024 et 2028. Par ailleurs, la loi proroge pour trois ans le dispositif de réduction d’impôt pour les Sofica, soit jusqu’au 31 décembre 2026 (CGI, art. 199 unvicies).
Transmission
Abattement en cas de reprise d’entreprise par ses salariés
La loi de finances pour 2024 favorise la reprise d’entreprise par ses salariés en relevant l’abattement applicable en cas de donation ou en cas de vente d’entreprise en pleine propriété. Il passe de 300 000 euros à 500 000 euros. Cet abattement s’applique aux cessions aux salariés et aux membres du cercle familial proche du cédant, à savoir le conjoint, le partenaire de pacs, les ascendants, les descendants en ligne directe, les frères et sœurs (CGI, art. 732 ter). Il s’applique également aux donations effectuées au profit des salariés (CGI, art. 790 A). Dans les deux cas, les repreneurs doivent s’engager à poursuivre leur activité professionnelle dans l’entreprise pendant cinq ans.
Pacte Dutreil et location meublée
La loi clôt le débat sur l’éligibilité de la location de locaux meublés et d’établissements commerciaux ou industriels équipés à l’exonération partielle. Les articles 787 B et 787 C du CGI modifiés par la loi de finances les excluent expressément « n’est pas considérée comme une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale l’exercice par une société d’une activité de gestion de son propre patrimoine mobilier ou immobilier ». Ils définissent les activités commerciales par renvoi aux articles 34 et 35 du CGI. Ces précisions s’appliquent aux transmissions intervenues à compter du 17 octobre 2023.
En outre, la loi donne une base légale à l’éligibilité au pacte Dutreil des holdings aux activités mixtes en officialisant les positions de l’administration fiscale et des récentes jurisprudences de la Cour de cassation et du Conseil d’État. Le CGI énonce désormais qu’« Est néanmoins considérée comme exerçant une activité commerciale la société qui, outre la gestion d’un portefeuille de participations, a pour activité principale la participation active à la conduite de la politique de son groupe constitué de sociétés contrôlées directement ou indirectement, exerçant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale, et auxquelles elle rend, le cas échéant et à titre purement interne, des services spécifiques, administratifs, juridiques, comptables, financiers et immobiliers ».
Donation de sommes d’argent avec réserve de quasi-usufruit
La loi de finances pour 2024 remet en cause la déductibilité de la dette de restitution née d’une donation d’une somme d’argent avec réserve d’usufruit, de la succession de l’usufruitier. La dette de restitution naît lorsque, suite à une donation de la nue-propriété d’une somme d’argent. Au terme du démembrement (décès du donateur usufruitier), si celui-ci a consommé l’argent, le nu-propriétaire détient une créance de restitution sur la succession de l’usufruitier. Jusqu’à présent cette dette de restitution était prise en compte dans le passif de la succession. L’article 774 bis nouveau du CGI (CGI, art. 774 bis nouveau)prévoit désormais une liquidation des droits de mutation par décès sur la valeur de cette dette de restitution, dus par le nu-propriétaire et calculés d’après le degré de parenté existant entre ce dernier et l’usufruitier. En revanche, la loi maintient expressément la déductibilité de la dette de restitution contractée sur le prix de cession d’un bien dont le défunt s’était réservé l’usufruit, « sous réserve qu’il soit justifié que ces dettes n’ont pas été contractées dans un objectif principalement fiscal ».
Référence : AJU012d3