Plan épargne retraite : attention à l’IFI !

Publié le 02/06/2023
Plan épargne retraite : attention à l’IFI !
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Dans une réponse ministérielle du 9 février dernier, Bercy indique que durant la phase d’épargne, les PER assurantiels sont imposables à l’IFI à raison des parts ou actions de sociétés ou unités de compte éligibles dès lors que le contrat est rachetable.

L’épargne financière est belle et bien en dehors du scope de l’impôt sur la fortune (IFI). Mais attention : lorsque cette épargne financière est composée de sous-jacents immobiliers, cette fraction du patrimoine n’échappe à l’IFI. Une réponse ministérielle vient de préciser l’application de l’IFI aux parts d’unités de comptes représentant des actifs immobiliers détenus à travers des plans d’épargne retraite (PER) (Rép. min. à QE n° 04979, JO Sénat Q. 9 févr. 2023, p. 974).

Le plan d’épargne retraite

Mis en place par la loi Pacte de 2019, le plan d’épargne retraite (PER) constitue l’instrument d’épargne retraite universel. Il est composé de trois compartiments : le compartiment des versements obligatoires de l’employeur (PER obligatoire ou Pero), celui destiné à recevoir les versements issus de l’épargne salariale (PER collectif ou Pereco), et celui des versements volontaires par leur titulaire (PER individuel ou Perin). Le PER peut prendre deux formes : compte-titre ou assurance.

Le sort des unités de comptes immobilières

L’épargne versée dans le PER est investie sur différents supports financiers, choisis par l’épargnant. Selon son appétence au risque et son horizon de placement, le titulaire du plan définit une stratégie d’investissement, comme à travers son contrat d’assurance-vie.

Le titulaire du PER peut ainsi investir dans des fonds en euros, à travers lesquels il bénéficie d’une garantie en capital, totale ou partielle. En contrepartie, sa rémunération est limitée. Le PER peut également être investi en unités de comptes (UC), ce qui vise tous les supports d’investissements autres que les fonds en euros. Il peut s’agir des fonds d’investissement (OPCVM, Sicav ou FCP), des fonds immobiliers (SCPI, OPCI ou SCI), des fonds indiciels cotés en bourse (trackers), des produits structurés ou des fonds à formules et de titres vifs (actions). L’offre permet à l’épargnant de diversifier ses investissements, en choisissant des actifs décorrélés les uns des autres. La diversification peut être sectorielle en choisissant des secteurs économiques qui évoluent différemment, géographiquement…

La pierre-papier compte donc parmi les actifs immobiliers auquel l’épargnant peut souscrire : parts de société civiles immobilières (SCI), de société civile de placement immobilier (SCPI), d’organisme de placement collectif immobilier (OPCI). En achetant de la pierre papier, l’investisseur n’en détient pas moins, indirectement, des actifs immobiliers qui entrent dans le champ de l’impôt sur la fortune immobilière. Pour mémoire, l’IFI porte sur le patrimoine immobilier net supérieur à 1,3 million d’euros au 1er janvier de l’année d’imposition.

Le spectre de l’IFI

Les PER sont donc concernés par l’IFI à deux titres. Les UC détenus à travers des PER comptes-titres entrent dans le scope de l’article 965 du Code général des impôts (CGI) selon lequel l’assiette de l’impôt sur la fortune immobilière est constituée par la valeur nette au 1er janvier de l’année :

1° De l’ensemble des biens et droits immobiliers appartenant aux personnes mentionnées à l’article 964 ainsi qu’à leurs enfants mineurs, lorsqu’elles ont l’administration légale des biens de ceux-ci ;

2° Des parts ou actions des sociétés et organismes établis en France ou hors de France appartenant aux personnes mentionnées au 1° du présent article, à hauteur de la fraction de leur valeur représentative de biens ou droits immobiliers détenus directement ou indirectement par la société ou l’organisme.

Les UC détenus à travers des PER assurantiels sont, quant à eux, concernés par l’article 972 du CGI selon lequel « la valeur de rachat des contrats d’assurance rachetables et des bons ou contrats de capitalisation exprimés en unités de compte mentionnées au deuxième alinéa de l’article L. 131-1 du Code des assurances est inclus dans le patrimoine du souscripteur à hauteur de la fraction de leur valeur représentative des unités de compte constituées des actifs mentionnés à l’article 965 appréciée dans les conditions prévues au même article 965 et à l’article 972 bis ».

En juillet 2022, le sénateur Claude Malhuret a interrogé le ministère de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique sur la question de savoir si durant la phase d’épargne, le PER, investi dans des parts ou actions de sociétés ou dans unités de compte éligibles à l’IFI (impôt sur la fortune immobilière), constitue un contrat non rachetable et partant qu’aucune valeur n’est imposable à l’IFI (Question écrite n° 01956, JO Sénat du 28 juillet 2022 – page 3950). L’auteur de la question estime en effet que, durant la phase d’épargne, le PER est un contrat par nature non rachetable, à l’exception des six hypothèses mentionnées par le I de l’article L. 224-4 du Code monétaire et financier (CMF), lesquelles concernent des accidents de la vie et l’acquisition de la résidence principale du souscripteur. Bercy distingue la prise en compte de ces actifs dans l’assiette de l’IFI durant la phase de constitution de l’épargne selon la forme du PER.

La situation du PER assurantiel

Les UC immobilières des PER prenant la forme d’un contrat d’assurance, sont imposables à l’IFI si le contrat revêt un caractère rachetable, conformément à l’article 972 du CGI. Le contrat est en principe rachetable à compter de la date des droits de l’assuré dans un régime obligatoire d’assurance-vieillesse ou d’atteinte de l’âge d’ouverture du droit à pension de retraite, c’est-à-dire 62 ans actuellement (CMF, art. L. 224-1). Avant cette échéance, le contrat est également considéré comme rachetable en cas de survenance d’un des évènements énumérés à l’article L. 224-4 du Code monétaire et financier. Il s’agit des fameux cas de déblocage anticipé prévus par la loi, à savoir :

– le décès du conjoint du titulaire ou de son partenaire lié par un pacte civil de solidarité (pacs) ;

– l’invalidité du titulaire, de ses enfants, de son conjoint ou de son partenaire lié par un pacs.

– la situation de surendettement du titulaire, au sens de l’article L. 711-1 du Code de la consommation ;

– l’expiration des droits à l’assurance chômage du titulaire, ou le fait pour le titulaire d’un plan qui a exercé des fonctions d’administrateur, de membre du directoire ou de membre du conseil de surveillance et n’a pas liquidé sa pension dans un régime obligatoire d’assurance vieillesse de ne pas être titulaire d’un contrat de travail ou d’un mandat social depuis deux ans au moins à compter du non-renouvellement de son mandat social ou de sa révocation ;

– la cessation d’activité non salariée du titulaire à la suite d’un jugement de liquidation judiciaire ou toute situation justifiant ce retrait ou ce rachat selon le président du tribunal de commerce auprès duquel est instituée une procédure de conciliation qui en effectue la demande avec l’accord du titulaire ;

– l’affectation des sommes épargnées à l’acquisition de la résidence principale.

Bercy indique que dans ces situations « le contrat est réputé rachetable et doit dès lors être compris dans le patrimoine imposable des redevables pour la fraction de sa valeur de rachat représentative d’actifs imposables (v. notamment § 140 du BOI-PAT-IFI-20-20-30-30) ». Surtout, la réponse ministérielle attire l’attention sur le fait que « la simple existence de l’événement permettant le déblocage suffit à donner au contrat un caractère rachetable ». Autrement dit, même si le titulaire du plan n’actionne pas le motif déblocage, il lui suffit d’être dans une telle situation de fait pour être redevable de l’IFI à raison des actifs immobiliers détenus à travers son PER, dès lors que le contrat revêt un caractère rachetable.

La situation du PER bancaire

Le régime fiscal des PER ouverts sous la forme de compte-titres est différent, puisqu’ils ne sont pas soumis à l’IFI à raison du caractère rachetable du contrat. Ils le sont dès lors qu’ils contiennent des actifs compris dans l’assiette de cet impôt. « En conséquence, un PER ouvert sous la forme d’un compte-titres est imposable à l’IFI dans la limite de la fraction de sa valeur correspondant à des actifs imposables », indique Bercy.

Par exception, l’article 972 bis du CGI exclut de l’assiette de l’IFI les droits détenus par sur certains organismes de placement collectif. Plusieurs conditions doivent être réunies :

– le redevable doit détenir, seul ou conjointement avec les autres membres du foyer fiscal, moins de 10 % des droits de l’organisme de placement collectif ;

– l’actif de l’organisme de placement collectif est composé, directement ou indirectement, à hauteur de moins de 20 % de biens ou droits immobiliers imposables ;

– l’organisme de placement collectif doit correspondre à l’un des organismes limitativement énumérés par l’article 972 bis du CGI (v. BOI-PAT-IFI-20-20-20-20).

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