Tout savoir (ou presque) sur la pension alimentaire
Comme de nombreux parents, vous êtes peut-être concernés par la pension alimentaire, que vous la versiez ou la receviez pour l’éducation de votre enfant commun. Car les deux parents doivent contribuer à l’entretien et à l’éducation de leur enfant à proportion de leurs ressources respectives.
Selon l’article 371-2 du Code civil : « Chacun des parents contribue à l’entretien et à l’éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l’autre parent, ainsi que des besoins de l’enfant. Cette obligation ne cesse de plein droit ni lorsque l’autorité parentale ou son exercice est retiré, ni lorsque l’enfant est majeur ».
Qui est concerné par la pension alimentaire ?
L’obligation de contribuer aux frais d’entretien et d’éducation des enfants est attachée à l’autorité parentale. Elle n’est pas liée aux modes de conjugalité, c’est-à-dire que tous les parents sont concernés, qu’ils aient été mariés, pacsés ou simplement en concubinage. Lorsque les parents ont été mariés, elle peut donc avoir été fixée par le jugement ou la convention amiable prononçant le divorce. C’est au juge aux affaires familiales (JAF) à qui il revient de trancher les conflits entre les parents. Dans les faits, une grande proportion d’enfants vit chez un seul de ses parents. Parmi les enfants divorcés, les trois quarts d’entre eux sont déclarés à charge exclusive par leur mère la première année de séparation. Ils sont 15 % en résidence alternée et 9 % à la charge exclusive de leur père (Les conditions de vie des enfants après le divorce, Insee Première, n° 1536, février 2015).
Comment est fixée la pension alimentaire ?
Les sommes versées pour les besoins de l’enfant relèvent de « la contribution à l’entretien et l’éducation de l’enfant », elle doit donc couvrir ces frais qui correspondent aux dépenses de la vie quotidienne. Entrent dans cette catégorie les frais de logement, d’alimentation, d’habillement, de la vie scolaire et des transports. Cette liste s’apprécie strictement. En effet, des frais qui peuvent paraître naturellement entrer dans le périmètre de la pension alimentaire n’en font pas partie. Par exemple, les frais attachés aux activités sportives ou artistiques de l’enfant, les frais médicaux non couverts par l’Assurance maladie, les frais de scolarité privée de voyage scolaire, ni même les frais de garde d’enfant ou de crèche et pour les plus grands l’argent de poche. Évidemment, si les parents sont d’accord, ils peuvent intégrer ces postes de frais supplémentaires dans la pension. D’ailleurs, il arrive que le juge se fonde sur les dispositions déjà mises en place par les parents. Mais si un parent s’oppose à l’intégration des frais supplémentaires dans la pension alimentaire, le juge ne prendra en compte que les dépenses de la vie quotidienne.
Est-ce qu’une pension alimentaire peut être versée en cas de résidence alternée ?
En principe, la pension alimentaire n’est pas obligatoire en cas de résidence alternée car les parents sont supposés se partager équitablement la charge de l’enfant. Toutefois, si les parents n’ont pas le même niveau de revenus dès la séparation ou au fil du temps, le JAF peut décider de prononcer une pension alimentaire au profit du parent qui a les ressources les moins élevées.
Quelles sont les ressources des parents prises en compte ?
Les parents contribuent à l’entretien et à l’éducation des enfants à proportion de leurs ressources respectives, et en fonction des besoins de l’enfant. Les ressources prises en compte sont les revenus du travail (traitements et salaires, revenus des professions indépendantes), les revenus de remplacement (allocations-chômage, prestations de l’Assurance-maladie, pensions de retraite), les prestations sociales et les revenus générés par le capital.
Quelle est la valeur des barèmes de la justice ?
Les tables de référence publiées par le ministère de la Justice en fonction des revenus du débiteur, du nombre d’enfant et du mode de résidence ne sont qu’indicatives (https://www.justice.fr/simulateurs/pensions-alimentaire/bareme). Les parents peuvent donc les écarter, d’autant que la Cour de cassation les a jugés inadaptés (Cass. 1re civ., 23 oct. 2023, n° 12-25301).
Comment réviser le montant de la pension alimentaire ?
Le montant de la pension alimentaire n’est pas figé. Il peut être révisé si le parent débiteur ne peut plus la payer, si son montant ne suffit pas au parent créancier ou encore si les besoins de l’enfant évoluent. Ainsi, chaque parent peut en demander la révision en présence d’un élément nouveau ayant une incidence sur les revenus ou les charges d’un parent. La demande de révision de la pension alimentaire doit être faite auprès du JAF du tribunal du domicile des enfants, via le formulaire Cerfa n° 11530.
Le remariage d’un parent entraîne-t-il une révision de la pension alimentaire ?
Lorsqu’un parent se remet en couple, cette nouvelle situation n’entraîne pas automatiquement la révision de la pension alimentaire. En principe, les revenus de son nouveau conjoint, partenaire de pacs ou concubin ne sont donc pas pris en compte dans les ressources des parents. Toutefois, la nouvelle union peut conduire un parent à diminuer ses frais. Cela peut être le cas par exemple s’il partage son loyer et divers frais avec son nouveau compagnon. Le juge peut alors en tenir compte.
Que faire en cas de désaccord entre les parents ?
Les désaccords entre parents sont légion. Lorsque le conflit porte sur le montant de la pension, le parent créancier peut se tourner vers le JAF, avec ou sans avocat. Les parents vont alors chacun constituer un dossier contenant les justificatifs de leurs revenus respectifs, des charges qu’ils assument et des dépenses engagées pour l’enfant, factures à l’appui.
Peut-on recourir à un médiateur familial ?
Alternative au recours au juge dans le règlement de litiges, la médiation familiale peut représenter une voie contentieuse intéressante pour régler un différend sur la pension alimentaire. La médiation s’adresse aux couples mariés ou non, séparés, divorcés, ou en instance de divorce, aux familles recomposées et pacsées. Si un accord est trouvé, il s’impose aux parents comme n’importe quel contrat. Il est possible de le faire homologuer par un juge afin de lui donner force exécutoire. Si, en revanche, aucun accord n’est trouvé, ou seulement partiellement, les parents devront se tourner vers le juge pour qu’il tranche le litige.
Comment faire respecter le versement de la pension alimentaire ?
Pour faire respecter le versement de la pension alimentaire, encore faut-il que celle-ci revête un caractère exécutoire. C’est le cas lorsque la pension a été fixée par une ordonnance du JAF. Quand elle a été fixée conventionnellement par les parents, ceux-ci doivent se tourner vers le juge pour obtenir son homologation ou formalisant leur accord par acte notarié. Enfin, l’Agence de recouvrement des impayés de pension alimentaire (Aripa), un organisme rattaché à la Caisse des Allocations Familiales (CAF), est habilitée à délivrer un titre exécutoire. Ensuite, une fois munis d’un titre exécutoire, les parents peuvent demander à l’Aripa de jouer les intermédiaires financiers. L’Aripa se charge de prélever la pension alimentaire sur le compte bancaire du parent débiteur et de la verser au parent créancier. Pour limiter les situations d’impayés, l’Aripa a le pouvoir d’engager des procédures amiables ou forcées et récupérer jusqu’à deux années d’impayés, d’autant que la pension alimentaire est une créance prioritaire sur toutes les autres dettes du débiteur. D’ailleurs, ce mécanisme d’intermédiation est automatique depuis le 1er janvier 2023, dès lors que la pension a fait l’objet d’une ordonnance du JAF, d’une convention homologuée ou d’un titre exécutoire délivré par la CAF à compter cette date. Les parents peuvent ensemble y renoncer, sauf en cas de violence conjugale.
Quelles démarches effectuer pour bénéficier de l’intermédiation automatique ?
Les parents n’ont aucune démarche à effectuer. Le titre exécutoire est transmis à l’Aripa par le greffe du tribunal, l’avocat du parent créancier ou le notaire. L’intermédiation est mise en place par l’Aripa dans un délai moyen de deux mois après la réception du dossier.
Est-ce que l’Aripa peut verser la pension alimentaire directement à l’enfant majeur ?
Aujourd’hui, la loi ne le permet pas. Toutefois, cette hypothèse est prévue par la proposition de loi n° 2128 visant à garantir le versement des pensions alimentaires aux enfants majeurs, adoptée en première lecture le 14 mars 2024 par l’Assemblée nationale.
Est-ce que l’intermédiation financière de l’Aripa est applicable si le débiteur vit à l’étranger ?
Dans ce cas, l’intermédiation financière automatique de l’Aripa n’est pas applicable. Toutefois, l’Aripa peut être saisie par le parent créancier pour obtenir le recouvrement des impayés de pension alimentaire. Le succès de la procédure dépend de l’existence de conventions européennes ou bilatérales avec le pays de résidence du parent débiteur.
Que risque le parent qui ne verse pas la pension alimentaire ?
Le non-versement de la pension alimentaire constitue un délit d’abandon de famille. L’article 227-3 du Code pénal punit le parent qui demeure plus de deux mois sans s’acquitter intégralement de cette obligation de deux ans d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende.
Que faire si l’impayé subsiste ?
En cas d’impayé, le parent créancier peut demander à bénéficier de l’allocation de soutien familial de 195,85 euros par mois et par enfant. Cette allocation fonctionne comme une avance sur la pension alimentaire dont l’Aripa est chargée du recouvrement.
Référence : AJU013m6