Chronique de droit international privé

Publié le 03/08/2018

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I – La loi régissant l’opposabilité de la cession de créance en droit européen

Rapports de la Commission européenne et proposition de règlement. Deux rapports de la Commission européenne ont attiré l’attention sur les incertitudes entourant la cession de créance en droit international, et, en particulier, son opposabilité aux tiers1. Ces rapports viennent d’être suivis d’une proposition de règlement de la Commission européenne du 12 mars 2018 sur la loi applicable à l’opposabilité de la cession de créance2.

Utilité de la cession de créance. Dans les relations internes comme internationales, la transmission conventionnelle de la créance est une opération économiquement utile pour réaliser des paiements ou, surtout, fournir des garanties. Ainsi, l’affacturage, la cession à titre de garantie, ou la titrisation reposent sur une telle opération. Selon la BCE, dans le seul domaine de la directive Collateral3, plus de 300 milliards d’euros par an de créances privées sont remis en garantie4. Pour se protéger contre le risque de défaillance d’un acteur, la sécurité juridique de ces garanties est essentielle. Les incertitudes entourant l’opposabilité de l’opération aux tiers sont de nature à freiner le développement du marché unique des capitaux5.

Analyse en droit interne. En droit interne, la transmission conventionnelle de la créance peut prendre différentes formes juridiques. Certaines relèvent des dispositions générales du Code civil. Tel est notamment le cas de la cession de créance ou encore de la subrogation consentie par le créancier. D’autres relèvent de dispositions spécifiques. Tel est par exemple le cas de la cession de créances professionnelles régie par le Code monétaire et financier. En réalité, au-delà des qualifications juridiques, seul le formalisme diffère selon la technique de transmission utilisée alors que les règles fond ne changent pas.

Dans tous les cas, la transmission conventionnelle de la créance implique une atteinte à l’effet relatif des conventions : la cession modifie le lien d’obligation entre le cédant et le débiteur en imposant, sans le consentement de ce dernier, un nouveau créancier, le cessionnaire. Cette dérogation à l’effet relatif des conventions se justifie dans la mesure où ce changement de créancier n’augmente pas les engagements du débiteur cédé. La situation du débiteur cédé peut donc être diversement appréciée. Il est un tiers à l’opération. Mais, à la différence des autres tiers, la transmission de la créance modifie le lien d’obligation qui le lie au cédant.

L’opposabilité aux tiers du transfert de propriété de la créance soulève une difficulté particulière. En effet, la créance est un bien meuble incorporel. Contrairement aux meubles corporels, il n’existe pas de possession d’une créance confortant le titre du possesseur. Contrairement à d’autres meubles incorporels, aucune publication ne permet de matérialiser la créance. L’opposabilité se définit comme « la qualité reconnue à un élément de l’ordre juridique par laquelle il rayonne indirectement hors de son cercle d’activité directe »6. En admettant que par principe, tous les éléments de l’ordre juridique sont opposables, la cession de créance serait opposable sans aucune formalité. Toutefois, l’apparence permet dans un second de temps de protéger ceux qui ignoraient légitimement le transfert de la créance. Tel est en particulier le cas du débiteur cédé qui n’a pas été informé de la cession et qui s’acquitte de sa dette entre les mains du cédant.

Les lacunes du règlement Rome I. Le règlement Rome I7 harmonise partiellement les règles de conflit de lois en matière de cession de créance8. Les rapports entre le cédant et le cessionnaire sont régis par la loi du contrat de cession9. Par ailleurs, la loi qui régit la créance cédée détermine le caractère cessible de celle-ci, les rapports entre le cessionnaire et le débiteur, les conditions d’opposabilité de la cession au débiteur et le caractère libératoire de la prestation faite par le débiteur10.

L’opposabilité aux tiers, et en particulier aux créanciers du cédant, n’est pas envisagée par le projet de règlement11. Cette lacune s’expliquerait par les réticences des juristes anglais à l’égard de la solution proposée par la Commission12. Elle est particulièrement préjudiciable lorsque la cession est utilisée à titre de garantie13.

Une étude du British Institute of International and Comparative Law montre que les conditions d’opposabilité au débiteur cédé, les modalités d’information, mais aussi la loi applicable à ces questions diffèrent significativement à l’intérieur de l’Europe14.

Les lacunes de l’harmonisation sectorielle (la directive Collateral). L’harmonisation sectorielle n’a pas non plus remédié aux lacunes du règlement Rome I. Ainsi la directive Collateral15 prévoit que lorsque des créances privées sont constituées en garantie financière, les États membres n’exigent pas que la création, la validité, la conclusion, la priorité, l’opposabilité ou l’admissibilité à titre de preuve de cette garantie financière soient subordonnées à l’accomplissement d’un acte formel, tel que l’enregistrement ou la notification au débiteur de la créance privée constituée en garantie16.

Cette harmonisation reste limitée puisque les États membres peuvent exiger l’accomplissement d’un acte formel, tel que l’enregistrement ou la notification, à des fins de conclusion, de priorité, d’opposabilité ou d’admissibilité à titre de preuve à l’égard du débiteur et de tiers17.

Rapports et communication de la Commission européenne. Dans le cadre du règlement Rome I, le rapport présenté en 2016 par la Commission européenne estime que parmi tous les critères de rattachement, ceux qui méritent d’être envisagés sont : la loi du contrat de cession, la loi du pays dans lequel le cédant a sa résidence habituelle et la loi régissant la créance cédée. La Commission présente les avantages sans pour autant exprimer sa préférence, réservant sa position jusqu’à la réalisation d’une consultation et d’une analyse d’impact. Toutefois, elle observe d’ores et déjà qu’un critère de rattachement unique risque de ne pas convenir à tous les types d’opérations de cession et ce même si une réglementation sectorielle pose nécessairement des problèmes de délimitation.

Le rapport concernant la directive Collateral18 rappelle que la Commission fera des propositions sur les conflits de lois en matière de cession de créance. Elle n’exclut pas non plus une harmonisation des questions de droit matériel, par exemple des actes formels exigés notamment pour l’opposabilité à l’égard du débiteur ou de tiers, lors de la cession de créances privées à des fins de garantie.

Surtout, la nécessité de clarifier les règles de conflit en matière de cession de créance a été clairement affirmée à l’occasion de la communication de la Commission européenne sur l’union des marchés des capitaux19.

Le principe posé par le projet de règlement : l’opposabilité de la cession de créance au tiers est régie par la loi du pays où le cédant a sa résidence. Sans surprise, à la suite de cette communication et de ces rapports, la proposition de règlement pose comme principe que l’opposabilité d’une cession de créance est régie par la loi du pays où le cédant a sa résidence.

Ce principe correspond à celui qui avait été envisagé à l’occasion du projet de règlement Rome I20. Le même principe est affirmé par la Convention des Nations unies sur la cession de créance dans le commerce international, élaborée en 2001 mais qui n’est toujours pas entrée en vigueur21. Il peut également se prévaloir du guide législatif de la CNUDCI sur les opérations garanties22.

Dans son rapport, la Commission européenne avait relevé que ce critère de rattachement renforce la sécurité juridique pour les créanciers et, dans le cas de conflits entre cessionnaires successifs de la même créance, apporte une solution prévisible pour le résoudre23. Par ailleurs, la loi du pays dans lequel le cédant a sa résidence habituelle peut facilement être déterminée et correspond le plus souvent à celui où sera ouverte la procédure d’insolvabilité à l’égard du cédant.

En revanche, ce critère de rattachement peut engendrer des coûts supplémentaires et accroître la complexité de l’opération. Il a pour conséquence l’application de trois lois différentes : la loi du contrat de cession pour les rapports entre le cédant et le cessionnaire, la loi qui régit la créance cédée pour les rapports entre le cessionnaire et le débiteur, et enfin la loi du pays dans lequel le cédant a sa résidence habituelle pour les aspects touchant aux tiers.

Appréciation. Il faut se féliciter du choix de la Commission : l’opposabilité de la cession concerne avant tout les ayants-droit, créanciers du cédant, et également sa procédure d’insolvabilité. La loi du pays où le cédant à sa résidence renforce la sécurité et la prévisibilité. La loi désignée par ce rattachement est connue de tous ceux qui peuvent se prévaloir de droits sur la créance cédée24.

Néanmoins et sans remettre en cause le choix proposé par la Commission, il convient d’avoir conscience du fait que distinguer l’opposabilité de la cession de créance à l’égard du débiteur et à l’égard des autres tiers est artificiel. Le débiteur cédé est un tiers. Il n’existe donc pas a priori de raisons de soumettre l’opposabilité de la cession au débiteur à une autre loi que celle régissant son opposabilité aux autres tiers. La doctrine française, bien que divisée, semble avoir été favorable à ce que l’opposabilité de la cession au débiteur cédé et aux autres tiers soit régie par la même loi25. Cependant, cette opinion pourrait s’expliquer surtout par le fait que le Code civil, avant sa réforme, subordonnait l’opposabilité de la cession au débiteur cédé comme aux autres tiers à une signification faite au cédé26. À la suite de la réforme, la cession est opposable aux autres tiers indépendamment de l’information du débiteur cédé27.

Certes, le débiteur est dans une situation spécifique puisqu’il doit exécuter l’obligation modifiée par la cession entre les mains du cessionnaire. Il doit en conséquence être protégé si, n’ayant pas été informé de la cession il s’acquitte de sa dette entre les mains du cédant. Mais ici la théorie de l’apparence suffit à le protéger. Le paiement est libératoire s’il est fait au créancier apparent28. Il n’est donc pas nécessaire de lier l’opposabilité de la cession à sa connaissance effective par le cédé. Néanmoins, sur ces questions, le règlement Rome I s’est déjà prononcé et l’objectif de la proposition de règlement est seulement de combler les lacunes sur la question de l’opposabilité de la cession aux autres tiers.

Première exception du projet de règlement : l’opposabilité de la cession de créance issue d’un crédit d’un compte instrument financier est régie par la loi de la créance cédée. La première exception au principe présenté appelle peu de commentaires. Le projet de règlement prévoit que la loi applicable à la créance cédée régit l’opposabilité de la cession lorsque celle-ci porte sur des « espèces portées au crédit d’un compte auprès d’un établissement de crédit » ou encore des « créances découlant d’un instrument financier »29. Sur la forme, le terme « de créance de somme d’argent correspondant au solde créditeur d’un compte » aurait été préférable à celui d’« espèces portées au crédit d’un compte », les espèces étant des meubles corporels et non des créances. Sur le fond, l’exception n’appelle pas de réserve : la loi du « marché », et donc a priori de la créance cédée, est la mieux à même de régir les créances découlant en particulier d’un instrument financier30.

Seconde exception du projet de règlement : l’opposabilité de la cession de créance en vue d’une titrisation peut être régie par la loi de la créance cédée. Une seconde exception est prévue dans les termes suivants : « Le cédant et le cessionnaire peuvent choisir la loi applicable à la créance cédée comme loi applicable à l’opposabilité d’une cession de créance en vue d’une titrisation. Le choix de la loi est effectué expressément dans le contrat de cession ou par convention séparée. La validité matérielle et formelle de l’acte en vertu duquel le choix de la loi est effectué est régie par la loi choisie ».

Cette exception est, au plus haut point, surprenante. Soumettre l’opposabilité de la cession à la loi applicable à la créance cédée n’est pas en tant que tel contestable. En revanche, permettre aux parties à un contrat de choisir la loi qui s’applique dans leurs rapports avec des tiers est une atteinte caractérisée à l’effet relatif des conventions qui ne s’explique pas d’un point de vue juridique. D’ailleurs les raisons avancées par la Commission européenne ne sont pas juridiques mais pratiques. Selon les considérants du projet de règlement, il conviendrait de prévoir une certaine souplesse dans la détermination de la loi applicable à l’opposabilité des cessions de créance dans le cadre d’une titrisation, afin de prendre en compte les besoins de tous les titriseurs et de faciliter l’extension du marché de la titrisation transfrontière aux petits opérateurs.

La dangerosité d’une telle entorse à l’effet relatif des conventions peut seulement être nuancée par le fait que le cédant relevant de cette dérogation est un établissement de crédit à l’origine de la titrisation. Les autres tiers qui seront concernés par cette dérogation seront donc essentiellement d’autres créanciers professionnels. La situation a donc peu de chances d’émouvoir le Parlement européen. Il n’en demeure pas moins que l’atteinte à l’effet relatif des conventions qui résulte implicitement, mais nécessairement, de cette option ne peut être justifiée par la volonté de favoriser un secteur d’activité. L’effet relatif des conventions n’est certes pas un principe absolu. Mais ni l’étude d’impact ni les considérants du projet de règlement ne fournissent une justification satisfaisante et laissent au contraire penser qu’un principe juridique pourtant essentiel dans tous les États européens a été écarté sans même avoir été identifié.

Frédéric LEPLAT

II – Opposabilité d’une clause de compétence au destinataire réel dans un transport maritime

Cass. com., 27 sept. 2017, n° 15-25927, Hélium. L’opposabilité d’une clause de compétence au destinataire d’un connaissement est une question ancienne et récurrente. Si les solutions semblent désormais bien établies, l’arrêt rendu par la Cour de cassation le 27 septembre 2017 vient les préciser en présence d’un destinataire réel. Dans cette affaire, un commissionnaire de transport s’était vu confier l’organisation d’un transport de résidus d’hélium entre l’Argentine et la France. Il avait fait appel à un transporteur maritime allemand, lequel avait émis un connaissement mentionnant une société du même groupe que le vendeur en qualité de notity31 et une autre société comme destinataire. À destination, des avaries avaient été constatées et une autre société, prétendant être le destinataire réel des marchandises avait assigné le transporteur maritime en responsabilité. Ce dernier avait alors invoqué le bénéfice d’une clause de compétence stipulée dans son connaissement au profit du tribunal de Hambourg. La cour d’appel avait rejeté cette exception de compétence. La Cour de cassation rejette également le pourvoi formé contre l’arrêt au motif que la clause de compétence n’était pas opposable au destinataire réel des marchandises lequel, non mentionné sur le connaissement, ne pouvait être devenu un tiers porteur de ce connaissement, ce dernier ayant été émis à personne dénommée.

Cet arrêt affirme pour la première fois l’inopposabilité de la clause de compétence au destinataire réel (I). Une telle solution n’est pas sans susciter des interrogations (II).

I. L’inopposabilité de la clause de compétence au destinataire réel

La singularité de la situation du destinataire dans un contrat de transport maritime a conduit à s’interroger sur l’opposabilité des clauses d’un connaissement32. En effet, s’il est aujourd’hui admis que le destinataire est une partie au contrat, il n’adhère à ce contrat qu’en cours d’exécution et, de ce fait, n’est pas présent lors de sa formation. Comment admettre que les clauses d’un connaissement lui soient opposables ? La question est d’autant plus délicate pour la clause de juridiction33 qu’à la différence d’autres modes de transport34, les textes35 ne mentionnent aucune règle en la matière.

Les solutions sont aujourd’hui fixées36 depuis l’arrêt dit Mascareignes37, dans lequel la Cour de cassation a intégré les solutions posées par la Cour de justice de l’Union européenne dans sa jurisprudence Coreck38. Elle a ainsi précisé qu’« une clause attributive de juridiction qui a été convenue entre un transporteur et un chargeur et qui a été insérée dans un connaissement produit ses effets à l’égard du tiers porteur du connaissement, pour autant que, en acquérant ce dernier, il ait succédé aux droits et obligations du chargeur en vertu du droit national applicable. Si tel n’est pas le cas, il convient de vérifier son consentement à ladite clause au regard des exigences de l’article 17 [de la Convention de Bruxelles] »39.

Aujourd’hui, la clause de compétence sera tout d’abord opposable au destinataire si ce dernier est considéré comme le successeur du chargeur selon la loi applicable au connaissement. Le droit français retenant une conception tripartite du contrat de transport de marchandises, le destinataire n’est pas le successeur du chargeur. Les clauses acceptées par ce dernier ne sont donc pas ipso facto opposables au destinataire. Néanmoins, cette solution n’est pas partagée par tous les droits nationaux40. Cette précision explique que dans l’arrêt commenté, le transporteur maritime soutenait dans son pourvoi qu’il appartenait aux juges du fond de rechercher si, selon la loi allemande applicable en l’espèce, le destinataire était automatiquement lié par la clause de juridiction. Cette argumentation ne va pas prospérer puisque le destinataire réel n’était pas partie au contrat.

Ensuite, si le destinataire n’est pas l’ayant-droit du chargeur, la clause lui est opposable s’il y a consenti conformément aux conditions posées par le règlement européen, à savoir, soit une acceptation écrite ou orale avec confirmation écrite, soit une clause conforme aux habitudes entre les parties, soit enfin, une clause conclue « sous une forme qui soit conforme à un usage dont les parties avaient connaissance ou étaient censées avoir connaissance et qui est largement connu et régulièrement observé dans ce type de commerce par les parties à des contrats du même type dans la branche commerciale considérée »41. Si les deux premières hypothèses ne trouvent guère à s’appliquer en droit maritime – le destinataire n’ayant habituellement pas de relation avec le transporteur –, en ce qui concerne la dernière, la Cour de cassation a admis qu’un usage existait dans le transport maritime puisque les transporteurs attribuent souvent compétence aux juridictions du lieu de leur siège social42.

En l’espèce, pour rejeter l’exception d’incompétence, la Cour de cassation a rappelé qu’étaient en cause les rapports entre le transporteur et le destinataire réel, lequel n’apparaissait nullement sur le connaissement. La solution peut alors sembler parfaitement logique : le destinataire réel ne figurant pas sur le document prouvant le contrat de transport, il ne pouvait en principe se voir reconnaître la qualité de partie. Restait néanmoins à déterminer s’il avait pu acquérir cette qualité par l’effet du connaissement.

Le connaissement maritime occupe une fonction originale, absente dans les autres modes de transport : il est un titre représentatif des marchandises. Détenir le connaissement revient à posséder la marchandise, permettant de faciliter la circulation de la marchandise transportée. Cette circulation se réalisera différemment selon le type de connaissement : par endossement pour un connaissement à ordre ou par simple tradition manuelle pour un connaissement au porteur. Enfin, le connaissement à personne dénommée n’est, lui, pas destiné à circuler, sauf par une cession de créance relevant du droit commun.

En l’espèce, le connaissement émis étant à personne dénommée, il n’avait pas circulé et le destinataire réel n’avait donc pas acquis la qualité de tiers porteur du connaissement. L’arrêt peut alors s’expliquer par le simple fondement de l’effet relatif. Le destinataire réel étant un tiers au contrat, il n’a pas pu devenir partie à une quelconque clause contractuelle43. Dans ces conditions, il n’était pas nécessaire de s’interroger sur les conditions d’opposabilité d’une clause de compétence énoncées par le règlement européen. Ce raisonnement en apparence évident n’est cependant pas sans soulever des interrogations.

II. Les incertitudes quant à la place du destinataire réel

Le destinataire réel se voit en effet octroyer une place singulière. En droit maritime, son absence sur le connaissement ne lui fait pas perdre son droit d’action contre le transporteur. La jurisprudence, refusant toute conception formaliste du connaissement, admet qu’une personne non mentionnée sur ce titre puisse néanmoins avoir qualité et intérêt à agir44 contre le transporteur. Il en est ainsi en particulier du destinataire réel45 : il agira contre le transporteur maritime s’il démontre ses intérêt et qualité à agir mais il ne se verra pas opposer la clause de juridiction en sa qualité de tiers au contrat.

Cependant, l’application stricte de l’effet relatif des contrats devrait conduire à déclarer inopposable au destinataire réel toute clause du connaissement. Cette solution ne serait pas sans difficultés. Ainsi, en présence d’un connaissement stipulant une clause Paramount, laquelle a pour effet de soustraire un transport maritime à une législation au profit de l’application de la Convention de Bruxelles, cette clause sera-t-elle inopposable au destinataire réel en raison de sa qualité de tiers au contrat ? Si le destinataire réel est un tiers porteur du connaissement, la clause Paramount pourra lui être opposable46. Cependant si, comme en l’espèce, le destinataire réel demeure un tiers au contrat, la clause, à l’instar de toute clause du connaissement, ne lui sera pas opposable. Cela reviendrait finalement à admettre que la responsabilité du transporteur maritime qui avait intégré une clause Paramount acceptée par le chargeur puisse être soumise à des règles différentes selon que l’action sera introduite par le chargeur, le destinataire du connaissement ou le destinataire réel. Une telle solution serait largement critiquable.

Il est vrai que l’arrêt commenté ne s’est prononcé que sur l’opposabilité de la clause de compétence et non sur d’autres clauses47. La décision pourrait simplement marquer une réticence de la chambre commerciale48 à appliquer largement les clauses de compétence. Pour autant, au-delà des précisions apportées sur l’opposabilité d’une clause de juridiction, l’arrêt amène à s’interroger sur le statut du destinataire réel, notion inconnue des textes. S’il est facile de le définir comme le destinataire non mentionné au connaissement et non porteur de ce dernier mais à qui les marchandises sont effectivement destinées, pour autant son régime juridique demeure incertain.

Julie HA NGOC

III – La renonciation à l’immunité d’exécution diplomatique

Cass. 1re civ., 10 janv. 2018, n° 16-22494, Commisimpex. Le contentieux Commisimpex (du nom du créancier concerné en l’espèce) a donné lieu à lui seul à deux revirements de jurisprudence, fait suffisamment rare pour être souligné. Désavouée par le législateur, faisant suite à un premier revirement abandonnant l’exigence de spécialité en matière de renonciation à l’immunité d’exécution dont bénéficient les missions diplomatiques des États49, la Cour de cassation revient, dans l’arrêt rapporté du 10 janvier 2018, à la jurisprudence confortée par la loi Sapin 250.

La société Commisimpex a exécuté des travaux de marchés publics pour le compte de la République du Congo. Non payé, le créancier a obtenu de la République du Congo une lettre d’engagement aux termes de laquelle l’État en cause renonçait à toute immunité de juridiction et d’exécution. La République du Congo a été condamnée dans le cadre d’un arbitrage international à payer diverses sommes au créancier. Se fondant sur la sentence arbitrale, la société Commisimpex a fait pratiquer en France une saisie-attribution de comptes bancaires de missions diplomatiques de la République du Congo. Suivant la position énoncée par la Cour de cassation dans les arrêts NML Capital I et NML Capital II51, la cour d’appel de Versailles a confirmé la mainlevée de la saisie dans un arrêt du 15 novembre 201252.

La renonciation à l’immunité d’exécution n’était pas spéciale, faute de préciser les biens ou la catégorie de biens pour lesquels l’État renonçait à son immunité. Les juges du fond ont considéré, par conséquent, que la renonciation était inopérante. La censure de leur décision par un arrêt du 13 mai 2015 fut pour le moins inattendue. Selon la haute juridiction, « le droit international coutumier n’exige pas une renonciation autre qu’expresse »53.

Statuant sur renvoi après cassation, la cour d’appel de Paris, dans un arrêt du 30 juin 2016, a déclaré valable et régulière la saisie pratiquée par le créancier54. Sur pourvoi de la République du Congo, la Cour de cassation, dans l’arrêt commenté, a annulé sans renvoi la décision de la cour d’appel de Paris55. Elle a confirmé le jugement du tribunal de grande instance de Nanterre rendu en 2011 ordonnant la mainlevée de la saisie. La valse-hésitation est patente. Le retour à la solution initiale, après des années de contentieux, s’explique par l’intervention du législateur lequel a remis en cause la solution jurisprudentielle de 2015. Prenant acte de ce désaveu, la Cour de cassation étend le régime de l’immunité d’exécution découlant de la loi Sapin 2 aux mesures d’exécution mises en œuvre antérieurement à son entrée en vigueur (I). Néanmoins, la conventionnalité de la solution jurisprudentielle comme du dispositif législatif est discutable (II).

I. Le régime de l’immunité d’exécution diplomatique

Avant la loi Sapin 2, le régime de l’immunité d’exécution, qui se situe aux frontières du juridique et du politique, avait, pour l’essentiel, une origine prétorienne. Le principe de l’immunité d’exécution a été posé par l’arrêt Eurodif rendu par la Cour de cassation le 14 mars 198456. La courtoisie internationale et le respect de la souveraineté des États justifient cette pratique. L’immunité n’est toutefois pas absolue, l’État qui en bénéficie pouvant y renoncer. Reste à déterminer si la clause contractuelle par laquelle un État renonce à toutes immunités est efficace57. La position de la haute juridiction sur ce point a considérablement varié ces dernières années, oscillant entre durcissement et infléchissement du régime des immunités d’exécution octroyées aux missions diplomatiques des États.

L’autonomie du régime des immunités d’exécution diplomatique par rapport à celui applicable à l’immunité d’exécution de l’État ayant accrédité lesdites missions a été initialement reconnue par la Cour de cassation dans le premier arrêt rendu le 28 septembre 2011 dans l’affaire NML Capital I. La haute juridiction a ainsi exigé une renonciation expresse et spéciale. Elle a précisé l’étendue de l’immunité, celle-ci s’appliquant aux avoirs déposés sur les comptes bancaires des ambassades ou missions diplomatiques. Les arrêts du 28 mars 2013 rendus dans l’affaire NML Capital II ont fourni l’occasion à la Cour de cassation de définir l’exigence de spécialité impliquant de mentionner « les biens ou les catégories de biens pour lesquels la renonciation est consentie ». Ces conditions strictes rendaient en pratique quasiment impossible l’obtention d’une renonciation à l’immunité.

L’assouplissement intervenu en 2015, par l’un des arrêts Commisimpex supprimant l’exigence de spécialité et, par voie de conséquence, le caractère autonome du régime applicable en la matière, avait été approuvé de façon quasi unanime par la doctrine. Mais ce revirement n’a eu qu’une portée limitée dans le temps. Estimant que le revirement fragilisait les relations diplomatiques de la France, le législateur, en 2016, a codifié aux articles L. 111-1-1 et suivants du Code des procédures civiles d’exécution le droit commun des immunités d’exécution bénéficiant aux États, d’une part, et aux missions diplomatiques, d’autre part.

Pour ces dernières, l’article L. 111-1-2 du Code des procédures civiles d’exécution restaure l’autonomie du régime qui leur est applicable en imposant une renonciation expresse et spéciale. La solution des arrêts NML Capital I et II de 2011 et 2013 est donc consacrée. Ce texte vise à empêcher que le fonctionnement des missions diplomatiques ne soit paralysé par les saisies des créanciers des États accréditaires. Le risque issu de l’arrêt Commisimpex de 2015 d’exposer ces États à l’action des fonds spéculatifs dits « vautours », souligné par les rares critiques doctrinales58, n’a pas été sous-estimé par le législateur59.

Les articles L. 111-1-1 et suivants du Code des procédures civiles d’exécution ne régissent que les mesures conservatoires et mesures d’exécution pratiquées après l’entrée en vigueur de la loi Sapin 2. Pour éviter que les mesures mises en œuvre avant l’entrée en vigueur de cette loi soient soumises à un autre régime, la haute juridiction aligne sa position sur celle du législateur en invoquant « l’impérieuse nécessité, dans un domaine touchant à la souveraineté des États et à la préservation de leurs représentations diplomatiques, de traiter de manière identique des situations similaires ». Elle qualifie l’arrêt Commisimpex rendu en 2015 de « doctrine isolée », laquelle avait pourtant été saluée par la majeure partie des commentateurs. Selon la Cour, « l’objectif de cohérence et de sécurité juridique impose de revenir à la jurisprudence confortée par la loi nouvelle ». Cette même sécurité juridique ne consacre toutefois aucun droit acquis à une jurisprudence figée60. Le revirement permet de donner un effet rétroactif à la solution consacrée par le législateur essentiellement fondée sur des considérations d’opportunité politique. Les arguments juridiques, tirés de textes internationaux, invoqués pour motiver l’exigence de spécialité ainsi retenue ne résistent pas à l’analyse.

II. L’examen de la conventionnalité de la solution

Le droit international coutumier est, à chaque fois, invoqué lorsqu’il s’agit de préciser le régime de l’immunité d’exécution dont bénéficient les missions diplomatiques. Le contenu des règles du droit international coutumier en la matière reste flou. Ces règles se dégagent d’une pratique internationale constante et uniforme. Une telle pratique fait défaut s’agissant de l’immunité en cause ainsi que le confirment les errements jurisprudentiels rencontrés en ce domaine et précédemment décrits dans la première partie de ces développements. Les pratiques étatiques sont très diverses, certains États se contentant d’une renonciation expresse formulée en termes généraux61.

Les sources des règles du droit international coutumier appelées au soutien de l’exigence de spécialité de la renonciation se voient conférer un contenu qu’elles n’ont pas. L’article 19 de la Convention des Nations unies du 2 décembre 2004 sur les immunités juridictionnelles des États et de leurs biens, ratifiée par la France mais non entrée en vigueur62, dispose qu’un État doit avoir expressément consenti aux mesures de contrainte telles que des saisies. Il ne fait nullement mention d’une exigence de spécialité. Dans les arrêts NML Capital II du 28 mars 2013, cette convention internationale est mentionnée comme reflétant le droit international coutumier. La Cour européenne des droits de l’Homme estime également que cette convention « s’applique au titre du droit international coutumier »63.

En revanche, la Cour internationale de justice a préféré ne pas se prononcer sur la nature coutumière de l’article 19 de la Convention des Nations unies, ce texte ayant « donné lieu à de longues et difficiles discussions »64. Écartant la méthode téléologique qu’elle utilise habituellement pour éclairer le sens de la convention, la Cour internationale de justice ne s’est pas référée au rapport préparatoire de la Commission du droit international de 1991. Aux termes de ce rapport, lequel n’a pas de valeur contraignante, « une renonciation générale ou une renonciation concernant tous les biens situés sur le territoire de l’État du for, qui ne mentionnerait aucune des catégories spécifiques, ne suffirait pas à autoriser des mesures de contrainte »65. Cette règle n’a cependant pas été consacrée par la version définitive de la convention.

La référence à la convention de 2004 a d’ailleurs été supplantée par celle faite à la Convention de Vienne du 18 avril 1961 sur les relations diplomatiques dont les articles 22 et 25 sont visés par la Cour de cassation dans l’arrêt commenté. Pourtant, là encore, bien que ce texte ait été invoqué lors des travaux préparatoires de la loi Sapin 2, il ne pose pas d’exigence de spécialité en matière de renonciation. Son article 25 impose aux États d’accorder aux missions diplomatiques toutes facilités pour l’accomplissement de leur mission. Son article 22 interdit toute mesure d’exécution sur les locaux des missions, leur ameublement ou autres objets qui s’y trouvent et leurs moyens de transport. Cette disposition ne mentionne pas les comptes bancaires de ces missions ayant fait l’objet d’une saisie dans l’affaire Commisimpex. La portée du texte est donc considérablement élargie par une interprétation non respectueuse de la lettre même de celui-ci66. La solution législative comme celle jurisprudentielle sont en contradiction avec les engagements internationaux de la France.

Quoi qu’il en soit, si le régime de renonciation à l’immunité d’exécution bénéficiant aux missions diplomatiques est désormais clairement fixé, le contentieux Commisimpex qui en est à l’origine est loin d’être clos. Le créancier concerné a également procédé à la saisie de créances fiscales dues à l’État congolais laquelle est également contestée, faute d’une renonciation spéciale67. À suivre…

Carine BRIÈRE

IV – Condamnation au déréférencement mondial : gare à l’action en dénégation susceptible d’être intentée par le moteur de recherche

Cour du district nord de Californie, division de San Jose, 2 nov. 2017, Google LLC v/ Equustek Solutions Inc. et a.68. Voici une décision américaine qui pourrait influencer la Cour de justice de l’Union européenne récemment appelée à se prononcer sur la portée territoriale du droit au déréférencement. En l’espèce, la cour du district nord de Californie a accueilli la requête en injonction préliminaire formulée par la société Google Inc. afin de dénier, de manière préventive, tout caractère exécutoire aux États-Unis à une décision de la Cour suprême du Canada la condamnant à supprimer, sur toutes les extensions géographiques du nom de domaine de son moteur de recherche, des liens renvoyant à des sites de vente de produits contrefaits. Le contexte de l’affaire mérite d’être rappelé. La société Equustek Solutions est une entreprise de la Colombie-Britannique qui fabrique du matériel technologique. En 2011, elle a intenté devant les juridictions locales une action en contrefaçon contre l’un de ses distributeurs, la société Datalink. Malgré les ordonnances judiciaires interdisant à la défenderesse l’utilisation des éléments de propriété intellectuelle de la demanderesse, la société Datalink a quitté le territoire de la Colombie-Britannique et a continué à vendre les produits litigieux, partout dans le monde, via des sites web. Sur la base d’une ordonnance judiciaire interdisant à la société Datalink d’exercer ses activités de distribution sur internet, la société Equustek Solutions a sollicité de la société Google la suppression, dans la liste de résultats apparaissant sur son moteur de recherche, de tous les liens renvoyant aux sites web de la société Datalink. La société Google a procédé à la suppression de 345 pages web liées à Datalink. Toutefois, elle n’a pas supprimé la totalité des liens et a cantonné le déréférencement aux recherches effectuées depuis son moteur de recherche canadien. La mesure s’est donc rapidement révélée inefficace puisque Datalink a déplacé les contenus litigieux vers les pages toujours accessibles depuis les autres extensions géographiques du nom de domaine du moteur de recherche (notamment google.com).

C’est dans ce contexte qu’Equustek Solutions a obtenu des juridictions de la Colombie-Britannique une injonction interlocutoire interdisant à Google d’afficher, dans ses résultats de recherche, les liens renvoyant aux sites web de Datalink partout dans le monde, autrement dit, sur l’ensemble des extensions géographiques du nom de domaine de son moteur de recherche (.com ; .fr ; .ru ; .de, etc.). Saisie par la société Google, la Cour suprême du Canada a confirmé cette injonction par arrêt du 28 juin 201769. Ce faisant, les juges suprêmes canadiens ont majoritairement accepté de conférer une portée mondiale au droit au déréférencement octroyé à la société Equustek Solutions à l’encontre de la société exploitant le moteur de recherche le plus utilisé dans le monde. Néanmoins, devant les juges américains, la société Google, qui critiquait précisément cette portée territoriale par une action que l’on peut qualifier de dénégatoire, a obtenu gain de cause. En effet, les juges américains ont dénié, par anticipation, toute force exécutoire sur le sol américain à la décision canadienne, aux motifs qu’elle « éliminerait l’immunité prévue à la section 230 pour les fournisseurs de services qui établissent des liens avec des sites web tiers. En forçant ainsi les intermédiaires à supprimer les liens vers des contenus de tiers, la décision canadienne sape les objectifs politiques de la section 230 du Communication Decency Act et menace la liberté d’expression sur internet »70.

Cette décision, qui intervient au moment même où la Cour de justice de l’Union européenne est saisie pour se prononcer sur la portée territoriale à conférer au droit au déréférencement, est particulièrement intéressante71 dans la mesure où elle permet de douter de l’efficacité, sur le sol américain, d’une décision européenne condamnant une société américaine à un déréférencement mondial. Bien que la décision américaine ne concerne pas exactement le droit au déréférencement tel qu’on le connaît dans l’Union européenne, cette décision pose néanmoins une solution qui, si elle se généralisait, aboutirait à la condamnation pure et simple du droit au déréférencement sur le sol américain. En Europe, le droit au déréférencement est né du célèbre arrêt Google Spain72 avant d’être consacré par le règlement général sur la protection des données personnelles73, qui remplace la directive de 1995 depuis le 25 mai 201874. Ce droit permet à une personne physique75 de solliciter de l’exploitant d’un moteur de recherche, en sa qualité de responsable de traitement automatisé de données personnelles, la suppression de liens la concernant. Le droit en cause dans la décision commentée n’était donc pas exactement de même nature dès lors qu’il intervenait, non pas au profit d’une personne physique pour la protection de sa vie privée, mais au bénéfice d’une société commerciale pour la protection de ses droits de propriété intellectuelle. Toutefois, il est certain que les enseignements à tirer de cette décision valent également, a fortiori, pour le droit au déréférencement en matière de données personnelles.

Précisons qu’en l’espèce, l’illicéité des liens litigieux était caractérisée. Et malgré cela, les juges américains ont jugé que la décision de la Cour suprême du Canada niait l’immunité reconnue aux intermédiaires sur internet par la section 230 du Communication Decency Act76 et portait atteinte à la liberté d’expression sur le réseau internet. La section 230 précitée77 instaure une immunité au profit des fournisseurs de services sur internet permettant aux usagers l’accès à des contenus hébergés par des sites tiers. Elle interdit notamment que ces intermédiaires soient traités de la même manière que les éditeurs de contenus78 ou qu’ils soient contraints de prendre des mesures pour restreindre l’accès aux contenus de sites tiers79.

L’immunité ainsi reconnue aux fournisseurs d’accès aux sites tiers tels qu’un moteur de recherche est donc très étendue et elle ne fait aucune différence selon que le contenu en cause présente un caractère illicite ou non. En l’occurrence, non seulement les sites auxquels renvoyaient les liens litigieux étaient illicites, mais surtout, le préjudice causé à la société commerciale était manifeste puisque les ventes de produits contrefaits se poursuivaient grâce au service d’intermédiation offert par la société Google. C’est d’ailleurs précisément ce rôle déterminant du moteur de recherche dans la réalisation du préjudice qui avait été retenu par la juridiction canadienne pour exiger un déréférencement mondial80. En particulier, le juge Fenlon avait souligné que « Google contrôle entre 70 et 75 pour 100 des recherches mondiales dans internet, et que la capacité de Datalink de vendre son produit contrefait dépend, en grande partie, du fait que les clients sont capables de trouver ses sites Web grâce au moteur de recherche de Google »81. Au contraire, la juridiction américaine n’en a absolument pas tenu compte pour juger qu’aucune obligation ne pouvait – ni ne devait – être mise à la charge de la société Google, sauf à ruiner l’immunité accordée aux intermédiaires sur internet au nom de la liberté d’expression.

Quand on sait que le droit au déréférencement en matière de données à caractère personnel bénéficie à toute personne physique même lorsque les liens en cause renvoient à des contenus licites, on peut craindre que l’immunité accordée aux intermédiaires s’oppose encore plus fortement à son application aux États-Unis. D’ailleurs, non seulement le droit au déréférencement n’a pas d’équivalent là-bas mais il a même été considéré comme « la plus grande menace pour la liberté d’expression sur internet de la prochaine décennie »82. Si la solution commentée venait à être confirmée en appel et à se généraliser sur l’ensemble du territoire américain, il est douteux qu’une décision interne condamnant une société américaine exploitant un moteur de recherche à déréférencer mondialement certains liens puisse recevoir application outre-Atlantique. Sans doute faudrait-il que la décision européenne limite ses effets au territoire de l’Union. Au soutien de cette proposition, on peut rappeler l’affaire LICRA c/ Yahoo !. Alors que le tribunal de grande instance de Paris avait ordonné, en référé, à la plate-forme américaine de supprimer l’accès aux sites permettant la vente d’objets nazis, un tribunal californien avait jugé la décision française inopposable à la société américaine pour contrariété au premier amendement de la Constitution des États-Unis83 dont on sait qu’il érige la liberté d’expression au rang de valeur constitutionnelle essentielle. En appel84, les juges américains s’étaient montrés plus nuancés en estimant que malgré la contrariété avec le premier amendement, il y avait lieu d’avoir égard à la portée territoriale de la décision à exécuter, et notamment au fait que la protection conférée par le premier amendement ne s’étend qu’aux utilisateurs américains de la plate-forme. Autrement dit, si les effets d’une décision étrangère sont cantonnés à un territoire étranger – la France voire l’Union européenne – un tribunal américain pourrait être plus enclin à accorder l’exequatur malgré la contrariété de la décision avec le premier amendement85 ou avec la section 230 du Communication Decency Act.

En matière de droit au déréférencement, c’est donc efficacité du droit contre efficacité de la décision qui lui confère une portée mondiale. Si un déréférencement mondial est seul à même de garantir à l’intéressé une protection efficace de ses droits, cette solution risque de se retourner contre lui au moment de l’exécution à l’étranger de la décision. Où l’on voit les limites du droit régional de l’internet et la nécessité de construire, en cette matière, un droit global. Outil a-territorial86, le réseau internet et les activités qu’il génère débordent largement le cadre territorial traditionnel de la règle de droit et la lex electronica a naturellement « vocation à s’appliquer sur l’ensemble du territoire planétaire »87.

Aurore HYDE

V – L’action collective de l’utilisateur d’un compte Facebook privé

CJUE, 25 janv. 2018, n° C-498/16, Maximilian Schrems c/ Facebook Ireland Limited. Le combat mené contre Facebook, par l’étudiant en droit Maximilian Schrems, au nom de la protection des données personnelles, ne s’est pas arrêté avec l’invalidation du Safe Harbor88. Dans l’affaire à l’origine de l’arrêt de la Cour de justice du 25 janvier 201889, M. Schrems a par ailleurs intenté une action devant les juridictions autrichiennes de son domicile contre la filiale irlandaise de ce géant du Web, visant à faire constater plusieurs violations – en lien avec son compte Facebook – de dispositions, en matière de protection des données, des droits autrichien et irlandais ainsi que du droit de l’Union90. À cet effet, il a invoqué non seulement ses droits propres mais également les droits similaires que lui ont cédé sept autres utilisateurs de Facebook, domiciliés en Autriche, en Allemagne et en Inde. 75 000 autres consommateurs se sont en outre d’ores et déjà déclarés prêts à suivre cette voie. La compétence des juridictions autrichiennes, contestée par la société irlandaise sur le fondement du règlement Bruxelles I91 – texte de référence avant le 25 mai 2018, date d’application du nouveau règlement général sur la protection des données92 – soulevait deux difficultés. M. Schrems pouvait-il être qualifié de « consommateur » au sens de l’article 15 du règlement Bruxelles I, alors qu’après avoir utilisé son compte Facebook à des fins privées, il avait ouvert une page Facebook, créée généralement à des fins commerciales ou professionnelles93 ? À supposer que cette qualité lui soit concédée, pouvait-il agir, devant le tribunal de son domicile, en tant que cessionnaire des droits des autres consommateurs ?

Confirmant son approche pragmatique de la notion de consommateur, la Cour de justice décide que l’utilisateur d’un compte Facebook privé ne perd pas sa qualité de « consommateur » du seul fait de la publicisation de sa bataille contre Facebook (I). Elle ajoute qu’il bénéficie à ce titre d’un for de protection pour faire valoir ses prétentions personnelles mais non les droits cédés par d’autres consommateurs (II). Ce refus de consacrer une action collective intervient deux mois à peine avant le scandale Cambridge Analytica94 démontrant pourtant, s’il en était besoin, l’intérêt d’une action collective dans le domaine de la protection des données personnelles.

I. L’approche pragmatique de la notion de consommateur

Les articles 15 et 16 du règlement Bruxelles I réservent le jeu d’un forum actoris au « consommateur », défini comme une personne contractant « pour un usage pouvant être considéré comme étranger à son activité professionnelle ». Sans surprise, l’arrêt Schrems rappelle que la notion de « consommateur » doit être interprétée de façon autonome, « en se référant principalement au système et aux objectifs [du] règlement » (pt 28), et restrictive, les règles protectrices du consommateur dérogeant à la compétence naturelle du for du défendeur (pt 27). Par conséquent, l’application desdites règles est limitée à ce qui est strictement nécessaire pour « protéger le consommateur en tant que partie au contrat réputée économiquement plus faible et juridiquement moins expérimentée que son cocontractant » (pt 44). Cette faiblesse découle de « la position de cette personne dans un contrat déterminé, en rapport avec la nature et la finalité de celui-ci, et non pas à la situation subjective de cette même personne » (pt 29). Le statut de consommateur n’est donc pas défini par des critères abstraits ; il dépend des circonstances objectives particulières dans lesquelles le contrat litigieux est conclu, sans égard pour les connaissances personnelles et l’expertise de la personne concernée (pt 39). Partant, le fait que M. Schrems soit spécialisé en droit des technologies de l’information et en droit de la protection des données personnelles, objet de sa thèse de doctorat, ne constitue pas en soi un obstacle à ce que la qualité de consommateur lui soit reconnue. Seule importe la finalité de son contrat.

Or, de ce point de vue, deux facteurs de complication sont susceptibles d’intervenir, qui résultent de l’évolution dans le temps de son usage de Facebook. De fait, M. Schrems, après avoir utilisé pendant trois ans le réseau social Facebook à des fins exclusivement privées, a ouvert une page Facebook, ce que le tribunal de première instance a assimilé à une utilisation de Facebook à des fins professionnelles. Cette page contient en effet des informations sur les actions judiciaires que le requérant introduit contre Facebook, sur les conférences – dont certaines sont rémunérées – qu’il donne, sur ses participations à des débats et ses interventions dans les médias ainsi que sur les livres qu’il publie. Elle lui a aussi permis de lancer des appels aux dons et d’inciter les autres consommateurs à lui céder leurs droits. Le premier intérêt de l’arrêt de la Cour de justice est de juger qu’il doit être tenu compte de l’évolution de l’usage qui est fait des services d’un réseau social numérique. En d’autres termes, la qualité de consommateur peut se perdre lorsque l’usage initialement non professionnel de ces services acquiert par la suite un caractère essentiellement professionnel (pts 37 et 38). Cette approche dynamique de la notion de consommateur, qui privilégie le moment de l’introduction de l’action en justice sur celui de la conclusion du contrat, est surprenante au regard de la prévisibilité juridique et des attentes légitimes des parties. Elle se comprend à la lumière de l’impératif d’interprétation stricte de la notion de consommateur et de l’objectif de protection poursuivi par les règles de compétence dérogatoires : la protection perd sa raison d’être si celui qui agit, un temps consommateur, est à présent un professionnel.

Encore faut-il, pour que le contrat de consommation soit disqualifié en un contrat ordinaire, que le changement de finalité de ce contrat puisse être établi. La Cour de justice, et c’est le second intérêt de l’arrêt commenté, étend la jurisprudence Gruber95 relative à un contrat de vente conclu pour un usage mixte, c’est-à-dire « se rapportant en partie à [une] activité professionnelle et n’étant donc qu’en partie seulement étranger à celle-ci », à un contrat portant sur des prestations de services. Dans l’un et l’autre cas, les dispositions protectrices ne peuvent jouer que si « le lien dudit contrat avec l’activité professionnelle de l’intéressé [n’a] qu’un rôle négligeable dans le contexte de l’opération pour laquelle ce contrat a été conclu considérée dans sa globalité » (pt 32). En l’espèce, la cour décide que l’« utilisateur d’un compte Facebook privé ne perd pas la qualité de “consommateur” (…) lorsqu’il publie des livres, donne des conférences, exploite des sites internet, collecte des dons et se fait céder les droits de nombreux consommateurs afin de faire valoir ces droits en justice » (motifs). La part de l’activité professionnelle au vu de l’utilité attendue du contrat fait l’objet d’une appréciation très pragmatique, la Cour de justice se gardant bien de formuler des directives générales à ce propos.

La qualité de consommateur de M. Schrems étant admise, la juridiction de son domicile est compétente pour statuer sur les droits issus de son propre contrat. Elle est en revanche incompétente pour les droits cédés par les autres consommateurs.

II. L’exclusion du for de protection du consommateur pour les droits cédés

Deux raisons principales justifient le rejet d’une action collective devant le for de protection du consommateur. D’une part, le jeu des règles protectrices implique nécessairement l’existence d’un contrat entre le consommateur et le professionnel. L’exigence, en réalité, se dédouble. Elle joue d’abord au stade de la délimitation du champ d’application matériel de ces règles. À la différence de l’article 5, § 1, du règlement Bruxelles I concernant la « matière contractuelle », expression susceptible d’englober des tiers à la relation contractuelle, l’article 15 requiert explicitement la conclusion effective d’un « contrat » entre un consommateur et un professionnel96. Cette condition se prolonge ensuite sur le terrain procédural. Tant le libellé de l’article 16 que le souci de protéger la partie économiquement faible commandent que les parties au litige soient les mêmes que les parties au contrat de consommation. Autrement dit, « le consommateur n’est protégé qu’en tant qu’il est personnellement demandeur ou défendeur dans une procédure » (pt 44). Le for du consommateur apparaît de la sorte comme un for de protection individuelle ; il ne saurait servir de support à une action collective. La solution inverse autoriserait l’ensemble des consommateurs à regrouper leurs actions devant l’une quelconque des juridictions du domicile de l’un d’eux, ce qui serait contraire à la prévisibilité juridique à laquelle aspire le règlement. Par ailleurs, l’exclusion d’un recours collectif devant le for du consommateur ne doit pas être comprise comme interdisant à une association de consommateurs d’agir en justice. Simplement, celle-ci n’étant pas partie au contrat de consommation, les dispositions protectrices doivent être écartées au profit des règles de compétence propres à la matière délictuelle ou quasi délictuelle97.

D’autre part, et de façon plus générale, l’exclusion du for du consommateur pour les droits cédés s’explique par le fait qu’« une cession de créances ne saurait, en elle-même, avoir d’incidence sur la détermination de la juridiction compétente » (pt 47). Le principe, qui n’avait jusqu’alors été affirmé que dans des relations d’affaires mettant en cause les règles relatives à la compétence délictuelle98, conduit, dans l’hypothèse d’un rachat, par une société de recouvrement, de créances indemnitaires d’entreprises victimes d’une entente, à ne retenir que la localisation initiale du fait dommageable pour chaque créance, indépendamment de la cession ou du regroupement dont elle a ensuite fait l’objet99. Transposé au contrat de consommation, il justifie que seul le domicile du consommateur initial soit pris en considération, à l’exclusion du domicile du consommateur cessionnaire100. Ce refus de créer un for spécial pour le consommateur cessionnaire ne doit pas, selon nous, être confondu avec la possibilité, admise par la Cour de justice en matière d’assurances, de transférer à un tiers un for spécial existant – en l’occurrence le forum actoris101 – dès lors, à tout le moins, que ce tiers mérite d’être protégé. Un employeur, subrogé dans les droits à réparation de son employé, peut ainsi, en tant que partie faible dans ses rapports avec l’assureur, attraire ce dernier devant la juridiction de son propre domicile102, tandis qu’un cessionnaire professionnel de créances d’indemnités d’assurance ne peut pas bénéficier de cette règle103.

Le rejet, par la Cour de justice, d’un recours collectif contre Facebook, devant le for du consommateur, est donc cohérent au regard de sa jurisprudence antérieure. D’aucuns ont pu regretter la solution. Toutefois, en l’absence de dispositions consacrant un tel recours dans le règlement Bruxelles I, il n’appartient pas à la Cour de justice de créer de toutes pièces une action collective en faveur des consommateurs104. Le législateur européen, au demeurant, semble avoir entendu le message : le 11 avril dernier, la Commission européenne a annoncé la mise en place d’une action collective européenne, qui viendra s’ajouter – lorsqu’elles existent – aux actions nationales prévues par le règlement général sur la protection des données105. L’intérêt d’une telle action dépassera d’ailleurs largement la seule protection des données personnelles. Elle permettra notamment de tirer toutes les leçons du Dieselgate, qui a affecté plusieurs millions de consommateurs. À suivre…

Valérie PARISOT

VI – Adoption par le conjoint du parent de l’enfant issu d’une délocalisation procréative : l’appréciation des conditions par les juges du fond

CA Paris, 30 janv. 2018, pôle 1, ch. 1 et CA Versailles, 15 févr. 2018, nos 17/05285 et 17/05286. Début 2018, la cour d’appel de Paris et la cour d’appel de Versailles ont eu à se prononcer sur des demandes d’adoption, par le conjoint de leur parent, d’enfants conçus dans le cadre de délocalisations procréatives.

Lorsque la Cour de cassation a été confrontée pour la première fois à la question de l’adoption à la suite du recours à une procréation interdite en France, il s’agissait alors d’une gestation pour autrui (GPA) et elle avait considéré qu’elle était face à un détournement excluant l’adoption106.

Plus de 20 ans après, confrontée de nouveau à la question mais cette fois dans le cadre d’une demande d’avis à propos des enfants conçus à l’étranger par insémination artificielle avec tiers donneur anonyme, elle a considéré que cette délocalisation procréative « ne fait pas obstacle au prononcé de l’adoption, par l’épouse de la mère, de l’enfant né de cette procréation, dès lors que les conditions légales de l’adoption sont réunies et qu’elle est conforme à l’intérêt de l’enfant »107.

Quelques années plus tard, dans deux arrêts du 5 juillet 2017108, à propos d’enfants issus de GPA à l’étranger, après avoir refusé la transcription de la filiation maternelle d’intention, la Cour de cassation a ajouté que « l’adoption permet, si les conditions légales en sont réunies et si elle est conforme à l’intérêt de l’enfant, de créer un lien de filiation entre les enfants et l’épouse de leur père »109 et, dans un autre arrêt du même jour, elle a énoncé : « Le recours à la gestation pour autrui à l’étranger ne fait pas, en lui-même, obstacle au prononcé de l’adoption, par l’époux du père, de l’enfant né de cette procréation, si les conditions légales de l’adoption sont réunies et si elle est conforme à l’intérêt de l’enfant »110.

Ainsi, selon la jurisprudence de la Cour de cassation, l’adoption est envisageable à la suite d’une GPA ou d’une insémination avec tiers donneur anonyme à l’étranger.

Les arrêts rendus début 2018 par les cours d’appel de Paris et de Versailles illustrent les difficultés d’appréciation des conditions légales et de l’intérêt de l’enfant dans ces cas de figure.

La cour d’appel de Paris111 a infirmé le jugement d’adoption plénière d’un enfant issu d’une GPA à l’étranger par le conjoint de son père, qui est de nationalité française. Elle a considéré que, compte tenu des « effets définitifs » attachés à l’adoption plénière, l’intérêt de l’enfant ne pouvait s’apprécier « qu’au vu d’éléments biographiques suffisants » et que, en l’espèce, rien ne permettait d’appréhender les modalités selon lesquelles la « mère » aurait renoncé à l’établissement de la filiation et consenti à l’adoption par le mari du père dans des conditions rendant « impossibles à l’avenir, et de manière complète et irrévocable, tout établissement légal d’un lien de filiation maternelle et toute relation ».

La cour d’appel de Versailles112 a prononcé l’adoption plénière d’enfants issus d’un projet parental commun, vraisemblablement d’une insémination avec tiers donneur à l’étranger, par la conjointe de leur mère. Elle a précisé que « l’éventualité d’une volonté de reconnaissance future de l’enfant par un père biologique est purement hypothétique et n’est étayée par aucun élément concret ; qu’elle ne peut donc être prise en compte pour contredire l’absence de mention d’un père sur l’acte de naissance de l’enfant ».

Dans ces décisions, l’intérêt de l’enfant a été apprécié différemment par rapport à la personne ayant permis sa procréation grâce à un apport biologique selon que celle-ci a participé par un apport de gamètes masculins ou en assurant la gestation. Une telle distinction entre GPA et insémination avec tiers donneur est contestable mais cohérente au regard des conceptions dominantes en droit interne (I). Quel que soit le procédé, le contrôle du consentement du tiers n’est pas prévu en droit international privé (II).

I. Une distinction entre gestatrice et géniteur contestable mais cohérente au regard des conceptions dominantes en droit interne

En droit interne, le donneur de gamètes n’est jamais considéré comme un parent. L’article 311-19 du Code civil le souligne en énonçant que, en cas de PMA avec tiers donneur, « aucun lien de filiation ne peut être établi entre l’auteur du don et l’enfant issu de la procréation ». À l’inverse, l’accouchement est un fondement essentiel de la maternité : l’action en recherche de maternité repose sur la preuve de l’accouchement113 et l’action en contestation nécessite de démontrer que la mère n’a pas accouché de l’enfant114. Ce lien entre filiation maternelle et accouchement est si fort que la Cour de cassation considère, s’agissant de la désignation de la mère dans l’acte de naissance, que la condition de conformité à la réalité posée à l’article 47 du Code civil pour procéder à la transcription renvoie à la « réalité de l’accouchement »115.

Plus généralement, les différences de fondements entre la paternité et la maternité ainsi que la place centrale de l’accouchement ont déjà pu être soulignées et critiquées sous le prisme du genre116. Elles répondent à un présupposé d’attachement à la progéniture différent chez les femmes et chez les hommes qui témoigne et renforce des stéréotypes de genre associés à la maternité et à la paternité. Il faut souligner ici que la cour d’appel de Paris ne s’est pas fondée sur une règle de droit qui exigerait un contrôle spécifique du consentement à l’adoption de la femme qui a accouché de l’enfant à l’étranger mais sur l’intérêt de l’enfant pour justifier sa décision. Elle a donc considéré qu’il était dans l’intérêt de l’enfant de veiller particulièrement au respect de la volonté de la femme qui a accouché ; le géniteur n’a pas bénéficié des mêmes égards dans la décision de la cour d’appel de Versailles. Il en ressort qu’aux yeux des juges, la place de la gestatrice est différente de celle du géniteur au regard de l’intérêt de l’enfant. Ce réflexe consistant à porter une attention particulière à la gestatrice reflète les conceptions sous-jacentes du droit français de la filiation. Mais dans le cadre des délocalisations procréatives, faire ainsi jouer un rôle central à la gestatrice ne s’impose pas.

II. L’absence d’exigence d’un contrôle en droit international privé

Dans les décisions commentées, les actes de naissance ne font pas apparaître le tiers ayant participé biologiquement à la procréation117. Les décisions ne font pas non plus ressortir l’existence d’un quelconque lien de filiation à leur égard. Selon les règles de droit international privé, la filiation dépend de la loi nationale de la mère au jour de la naissance de l’enfant et, si elle n’est pas connue, de la loi nationale de l’enfant ; d’autres règles peuvent s’appliquer en cas de possession d’état ou de reconnaissance118. Dans l’arrêt de la cour d’appel de Paris, en l’absence de mention de la mère dans l’acte de naissance, de reconnaissance et de possession d’état, et compte tenu de la nationalité des différents protagonistes, c’est vraisemblablement la loi française qui s’applique119. En application de cette loi, la femme qui a accouché n’est pas ici la mère : elle ne figure pas dans l’acte de naissance120, elle n’a pas reconnu l’enfant et aucune possession d’état n’existe à son égard. Dans les affaires portées devant la cour d’appel de Versailles, la mère est française ; en l’absence de présomption de paternité, de reconnaissance et de possession d’état, le géniteur n’est pas le père. La loi française était également applicable aux demandes d’adoption en cause121 (les adoptants ainsi que les adoptés étant vraisemblablement ici de nationalité française).

Dès lors, le consentement des tiers ayant participé à la procréation, qu’il s’agisse du géniteur comme de la gestatrice, n’avait pas à être vérifié : il ressort de l’article 348-1 du Code civil que « lorsque la filiation d’un enfant n’est établie qu’à l’égard d’un de ses auteurs, celui-ci donne le consentement à l’adoption ».

Afin de protéger les enfants et les adultes à l’origine de la décision de les rendre adoptables dans la sphère internationale, le législateur a énoncé une règle matérielle en matière d’adoption internationale à l’article 370-3, alinéa 3 du Code civil. Selon ce texte, « Quelle que soit la loi applicable, l’adoption requiert le consentement du représentant légal de l’enfant. Le consentement doit être libre, obtenu sans aucune contrepartie, après la naissance de l’enfant et éclairé sur les conséquences de l’adoption, en particulier, s’il est donné en vue d’une adoption plénière, sur le caractère complet et irrévocable de la rupture du lien de filiation préexistant ». L’article 370-3 pose ainsi des exigences en matière de consentement donné à l’adoption par le représentant légal. Il ne prévoit cependant aucun contrôle quant à la renonciation à être représentant légal de l’enfant. La cour d’appel de Paris se place sur le terrain de l’intérêt de l’enfant pour exercer tout de même un contrôle de cet ordre en exigeant des éléments permettant de se convaincre des intentions véritables de la femme qui a accouché. La cour d’appel de Versailles considère quant à elle qu’il n’existe pas d’éléments concrets permettant de prendre en compte une éventuelle volonté future du géniteur pour contredire son absence dans l’acte de naissance.

Ce contrôle de la volonté du « participant biologique » à la procréation à l’étranger dans des conditions qui l’aurait rendue impossible en France n’est pas expressément prévu par les textes. Il ne faut pas s’en étonner dans la mesure où les délocalisations procréatives ne sont pas un phénomène réglementé et où l’adoption subséquente n’a été admise qu’en raison de la nécessité de respecter les droits des enfants qui en sont issus. Opérer un tel contrôle lors de la procédure d’adoption sous couvert de vérification de l’intérêt de l’enfant peut tout de même apparaître légitime. Il procède de la même préoccupation que l’article 370-3, alinéa 3 du Code civil. Il perdrait toutefois sa légitimité et reviendrait à remettre en cause la solution de la Cour de cassation du 5 juillet 2017 s’il devait toujours conduire à conclure qu’une gestatrice n’a pas pu renoncer à être mère et qu’un géniteur n’a pas pu vouloir être père.

Amélie DIONISI-PEYRUSSE

VII – Le changement volontaire de loi applicable au régime matrimonial conditionné par une volonté non équivoque

Cass. 1re civ., 13 déc. 2017, n° 16-27216. L’arrêt commenté, rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation le 13 décembre 2017, éclaire la pratique notariale sur les conditions du changement de loi applicable au régime matrimonial et rappelle que la présence d’un élément d’extranéité implique de s’interroger sur la loi applicable au régime matrimonial dès lors que l’acte conclu est de nature à modifier le patrimoine d’un époux. En l’espèce, un couple de nationalité étrangère122 s’était marié, sans contrat de mariage, en 1982 en Algérie, pays dans lequel il a vécu jusqu’en 1995, date de son installation en France. En 1996, l’épouse a acquis seule un immeuble situé en Algérie. Puis en 2000, le couple a acquis un terrain situé en France, sur lequel une maison a été construite. À la date de cette dernière acquisition, les deux époux avaient acquis la nationalité française. L’acte notarié d’acquisition du terrain en date du 15 septembre 2000 contient une formule selon laquelle les époux sont « soumis au régime de la communauté, selon le droit français ». Une formule similaire se retrouve dans un acte de donation entre les époux, établi par le même notaire, le 7 septembre 2001. Lors du divorce, un désaccord est survenu entre les époux concernant leur régime matrimonial. La Cour de cassation approuve les juges du fond lorsqu’ils considèrent que la loi applicable au régime matrimonial est celle du premier domicile commun (I). En revanche, elle censure l’admission du changement de loi applicable (II).

I. Détermination de la loi initialement applicable au régime matrimonial

Le mariage ayant été célébré avant le 1er septembre 1992, date d’entrée en vigueur de la convention de La Haye du 14 mars 1978 sur la loi applicable aux régimes matrimoniaux, la loi applicable est désignée par la règle de conflit de source interne qui consacre l’autonomie de la volonté. Si les époux n’ont pas expressément choisi la loi applicable, il convient de déterminer la loi tacitement désignée123. Le premier domicile commun des époux, dès lors qu’il est stable et effectif, constitue alors un critère prépondérant puisque c’est à ce lieu que les époux sont présumés avoir voulu fixer le centre de leurs intérêts patrimoniaux. En l’espèce, à défaut de choix de loi, la loi algérienne – dont le régime légal est celui de la séparation de biens – est applicable en tant que loi du premier domicile commun.

La présomption en faveur du premier domicile commun peut être renversée par tout élément de preuve pertinent124, même si la Cour de cassation a renforcé la force de la présomption. En effet, si elle indiquait autrefois que la loi applicable à défaut de choix exprès était « notamment »125 déterminée en considération du premier domicile commun, elle affirme désormais qu’elle est « principalement »126 déterminée en fonction de ce critère. Ainsi, si la Cour de cassation peut tenir compte des critères de rattachement concomitants au mariage – tels que la nationalité des époux au moment du mariage ou encore le lieu de célébration du mariage – pour écarter la présomption, elle ne prend désormais en considération les circonstances postérieures au mariage que si elles éclairent la volonté des époux quant à la localisation de leurs intérêts pécuniaires au moment du mariage127. En l’espèce, les seuls éléments qui seraient de nature à écarter la présomption sont les déclarations communes des époux dans deux actes juridiques postérieurs au mariage dans lesquels ils déclarent être soumis au régime français de la communauté d’acquêts. Dans la mesure où la situation ne présentait absolument aucun lien avec la France au moment du mariage, il est impossible de considérer que les déclarations contenues dans les actes conclus dix-huit ans après la célébration du mariage permettent d’écarter la loi algérienne.

Dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt commenté, le renversement de la présomption n’était d’ailleurs pas allégué. Seul était invoqué le changement de loi applicable au régime matrimonial au profit de la loi française.

II. Changement de loi applicable au régime matrimonial

Le changement de nationalité et de domicile entre la célébration du mariage et le divorce était-il de nature à entraîner un changement de loi applicable au régime matrimonial ? La convention de La Haye de 1978 prévoit des cas de mutabilité automatique de la loi applicable mais les règles de source interne, applicables en l’espèce, posent un principe de permanence de la loi applicable. Ainsi, peu importe que le régime matrimonial soit maintenu sous l’empire de la loi d’un État avec lequel les époux ont perdu tout lien. La solution classique de la permanence de la loi du premier domicile commun128 est réaffirmée en l’espèce129.

Les époux mariés avant le 1er septembre 1992 peuvent-ils malgré tout volontairement modifier la loi applicable à leur régime matrimonial ? Tous les couples mariés, quelle que soit la date du mariage et quelle que soit la loi applicable à leur régime matrimonial, peuvent modifier la loi applicable en application de l’article 6 de la convention de La Haye de 1978.

Le changement de loi en application de cet article 6 est soumis à des conditions de validité au fond, les époux ne pouvant choisir que la loi nationale de l’un des époux au moment du choix ou la loi de l’État de la résidence habituelle de l’un des époux au moment du choix130. En l’espèce, l’article 6 permettait donc aux époux de modifier la loi applicable à leur mariage au profit de la loi française.

Mais le changement de loi en application de l’article 6 est également soumis à des conditions de validité formelle. En vertu de l’article 11, au visa duquel l’arrêt commenté a été rendu, « la désignation de la loi applicable doit faire l’objet d’une stipulation expresse ou résulter indubitablement des dispositions d’un contrat de mariage ». En outre, selon l’article 13, « la désignation expresse de la loi applicable doit revêtir la forme prescrite pour les contrats de mariage, soit par la loi interne désignée, soit par la loi interne du lieu où intervient cette désignation ». En l’espèce, l’article 13 désigne la loi française puisque les actes qui contiendraient la clause de changement de loi ont été rédigés en France et qu’ils « désigneraient » la loi française. Par conséquent, dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt commenté, le changement de loi implique une désignation expresse de la loi applicable au régime matrimonial rédigée par acte notarié. La condition de l’article 13, relative à l’acte notarié, est satisfaite puisque la donation entre époux et l’acquisition du terrain ont été conclues par acte notarié. En revanche, la Cour de cassation considère que la condition de l’article 11 relative à la stipulation expresse fait défaut : la « déclaration, mentionnée dans des actes notariés poursuivant un autre objet, ne traduisait pas la volonté non équivoque des époux de soumettre leur régime matrimonial à une loi interne autre que celle le régissant jusqu’alors et ne pouvait constituer une stipulation expresse portant désignation de la loi applicable ». Autrement dit, l’existence d’un acte notarié ne suffit pas car il ne permet pas de s’assurer que le notaire a informé les époux du fait qu’ils opéraient un changement de régime matrimonial et des conséquences de ce changement.

Il est donc conseillé au notaire de rédiger un acte autonome de changement de loi applicable au régime matrimonial. Si la clause opérant un tel changement est insérée dans un acte poursuivant un autre objet – vente, donation, etc. –, elle devra alors exprimer la volonté non équivoque des époux. Par exemple : « Jusqu’alors soumis au régime légal algérien de la séparation de biens, les époux souhaitent désormais être soumis au régime légal français de la communauté d’acquêts » ; ou encore : « Les époux déclarent modifier la loi applicable à leur régime matrimonial au profit de la loi française ».

Rendue sur le fondement de la convention de La Haye de 1978, la solution devra être étendue au règlement n° 2016/1103 du 24 juin 2016 sur la loi applicable aux régimes matrimoniaux131 dont l’article 22 permet aux époux de désigner ou de modifier la loi applicable. Le règlement exige simplement un acte écrit, daté et signé des deux époux132. Mais le considérant n° 46 précise que, dans le but d’assurer la sécurité juridique, « aucun changement de la loi applicable au régime matrimonial ne devrait intervenir sans demande expresse des parties ». Le considérant n° 47 insiste sur le fait que les époux doivent être « conscients des conséquences de leur choix », ce qui implique évidemment qu’ils soient conscients d’opérer un changement de loi applicable ! C’est effectivement la prévisibilité, pour les époux, de la loi applicable à leur régime matrimonial qui est en jeu, dans la mesure où l’article 1397-4 du Code civil prévoit des mesures de publicité pour que le changement de loi soit opposable aux tiers. Pour que la solution ait un sens, encore faut-il que les époux connaissent la loi initialement applicable à leur régime matrimonial, ce qui, à défaut de choix exprès, n’est pas évident.

Néanmoins, il n’est pas nécessaire de connaître la loi jusqu’alors applicable pour opérer un changement de loi ; ce qui permet aussi d’utiliser l’article 6 pour lever le doute sur la loi applicable au régime matrimonial, la loi désignée étant d’application rétroactive.

Conclusion : Afin d’assurer la prévisibilité de la loi applicable au régime matrimonial, il est conseillé aux époux de désigner cette loi avant le mariage ou au moment du mariage. Le conseil vaut même si la situation est purement interne au moment de la célébration du mariage. Cette désignation leur permettra d’éviter la mutabilité automatique prévue par la convention de La Haye de 1978 – si le mariage est célébré avant le 29 janvier 2019 – ou par un système de droit international privé étranger qui viendrait à régir la situation en cas de conflit mobile. Évidemment, si tous les éléments de la situation sont liés à un seul pays, seule la loi de ce pays pourra être désignée.

À défaut de choix exprès de la loi applicable, lors de la conclusion d’un acte juridique ayant une incidence sur le régime matrimonial des époux, il est conseillé aux époux de s’assurer de la loi applicable à leur régime. En cas d’incertitude, les époux mariés avant le 29 janvier 2019 peuvent utiliser l’article 6 de la convention de La Haye de 1978 afin de désigner la loi applicable au cours du mariage ; sachant qu’à défaut de précision contraire, cette loi est d’application rétroactive. Ainsi, l’article 6 permet tout à la fois de lever l’incertitude quant à la loi applicable et de changer de loi applicable. L’article 22 du règlement remplira les mêmes fonctions uniquement si les époux précisent que la loi choisie au cours du mariage est d’application rétroactive. En effet, à défaut de convention contraire, le changement de loi applicable au régime matrimonial au cours du mariage n’aura d’effet que pour l’avenir, laissant en suspens la détermination de la loi applicable avant le changement de loi.

Johanna GUILLAUMÉ

Notes de bas de pages

  • 1.
    Rapport de la Commission au Parlement européen, au Conseil et au Comité économique et social européen sur la question de l’opposabilité d’une cession ou subrogation aux tiers, ainsi que du rang de la créance faisant l’objet de ladite cession ou subrogation par rapport aux droits détenus par d’autres personnes, COM(2016) 626 final. – Rapport de la Commission au Conseil et au Parlement européen sur l’adéquation de l’article 3, paragraphe 1, de la directive n° 2002/47/CE concernant les contrats de garantie financière (« rapport sur la DCGF »), COM(2016) 430 final.
  • 2.
    Commission européenne, proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil sur la loi applicable à l’opposabilité des cessions de créances, COM(2018) 96 final.
  • 3.
    Dir. n° 2002/47/CE du PE et du Cons., 6 juin 2002, concernant les contrats de garantie financière modifiée par la directive n° 2009/44/CE du PE et du Cons., 6 mai 2009, modifiant la directive n° 98/26/CE concernant le caractère définitif du règlement dans les systèmes de paiement et de règlement des opérations sur titres et la directive n° 2002/47/CE concernant les contrats de garantie financière, en ce qui concerne les systèmes liés et les créances privées.
  • 4.
    Rapp. préc., COM(2016) 430 final.
  • 5.
    Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions, Un plan d’action pour la mise en place d’une union des marchés des capitaux, COM(2015) 468 final.
  • 6.
    Duclos J., L’opposabilité (Essai d’une théorie générale), Martin D.(préf.), 1984, LGDJ, n° 2-1, p. 22.
  • 7.
    Règl. (CE) n° 593/2008 du PE et du Cons., 17 juin 2008, sur la loi applicable aux obligations contractuelles (Rome I).
  • 8.
    Sur les règles de conflit de lois en matière de cession de créance v. nota. d’Avout L., « La loi applicable à la cession de créance ou de contrat après l’ordonnance du 10 février 2016. Premières analyses de droit des conflits de lois en perspective française », D. 2017, p. 457 ; Jobard-Bachellier M.-N., Rép. internat. Dalloz, v° Opérations sur créances ; Pardoel D., Les conflits de lois en matière de cession de créance, Lagarde P. (préf.), 1997, LGDJ ; Ruet L., Les créances en droit international privé, Thèse, Paris II, 1989 ; Sinay-Cytermann A., JCl. Droit international, fasc. 554 , « Régime des obligations ».
  • 9.
    Art. 14, § 1 du règlement Rome I.
  • 10.
    Art. 14, § 2 du règlement Rome I.
  • 11.
    L’article 27 du règlement Rome I prévoit une clause de réexamen sur la « question de l’opposabilité d’une cession ou subrogation aux tiers, ainsi que du rang de la créance faisant l’objet de ladite cession ou subrogation par rapport aux droits détenus par d’autres personnes ».
  • 12.
    D’Avout L., préc.
  • 13.
    L’article 14, § 3 du règlement Rome I précise que l’article 14 s’applique aux « transferts de créances purs et simples ou à titre de garantie, ainsi que les nantissements ou autres sûretés sur les créances ».
  • 14.
    British Institute of International and Comparative Law, Study on the question of effectiveness of an assignment or subrogation of a claim against third parties and the priority of the assigned or subrogated claim over a right of another person, 2014.
  • 15.
    Dir. préc.
  • 16.
    Dir. n° 2002/47/CE préc., art. 3, § 1, modifiée par la directive n° 2009/44/CE, préc.
  • 17.
    Dir. n° 2002/47/CE préc., art. 3, § 1, modifiée par la directive n° 2009/44/CE, préc. Le considérant (23) rappelle que « la présente directive n’affecte pas le droit des États membres à imposer des règles visant à garantir l’opposabilité des contrats de garantie financière à l’égard de tiers en ce qui concerne les créances privées ».
  • 18.
    Rapp. préc., COM(2016) 430 final.
  • 19.
    Selon la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions, intitulée Un plan d’action pour la mise en place d’une union des marchés des capitaux, « les différences de traitement national de l’opposabilité des cessions de créances font qu’il est compliqué d’utiliser ces instruments en tant que sûreté transfrontière et que le risque des investissements sous forme de prêt est difficile à apprécier pour les investisseurs. Cette insécurité juridique fait obstacle à des opérations financières importantes sur le plan économique, comme les opérations de titrisation, qui nécessitent une solide gestion des sûretés » (COM(2015) 468 final).
  • 20.
    V. Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil sur la loi applicable aux obligations contractuelles (Rome I), COM/2005/0650 final, art. 13, § 3 : « La loi du pays dans lequel le cédant ou le subrogeant a sa résidence habituelle au moment de la cession ou du transfert régit l’opposabilité de la cession ou de la subrogation aux tiers ».
  • 21.
    Article 22. Loi applicable aux droits concurrents : « À l’exception des questions qui sont réglées dans d’autres dispositions de la présente Convention et sous réserve des articles 23 et 24, la loi de l’État dans lequel est situé le cédant régit la priorité du droit d’un cessionnaire sur la créance cédée par rapport au droit d’un réclamant concurrent ».
  • 22.
    Guide législatif de la CNUDCI sur les opérations garanties, 2007, p. 411, concernant la loi applicable à la constitution, l’opposabilité et la priorité d’une sûreté réelle mobilière sur un bien meuble incorporel. La règle générale est la loi du lieu de situation du constituant. Toutefois certains États contournent la difficulté qu’il y a à appliquer la lex rei sitae aux créances en utilisant la loi qui régit la créance elle-même (par exemple la loi qui régit le contrat donnant naissance à la créance). Ce faisant, ces États ont principalement à l’esprit les opérations des marchés des capitaux et des opérations similaires.
  • 23.
    Rapport de la Commission préc., COM(2016) 626 final.
  • 24.
    D’Avout L., préc.
  • 25.
    Jobard-Bachellier M.-N., préc., nos 57 et s.
  • 26.
    C. civ., art. 1690 anc.
  • 27.
    Sur la conséquence de la réforme du Code civil, v. d’Avout L., préc.
  • 28.
    C. civ., art. 1342-3 : « Le paiement fait de bonne foi à un créancier apparent est valable ».
  • 29.
    Article 4, § 2 du projet de règlement.
  • 30.
    Selon la Commission : « Pour préserver la stabilité et le bon fonctionnement des marchés financiers, ainsi que pour répondre aux attentes des participants au marché, [il est essentiel] de soumettre l’opposabilité des cessions de créances découlant d’instruments financiers à la loi de la créance cédée plutôt qu’à la loi de la résidence habituelle du cédant ».
  • 31.
    Le notify est la personne qui doit être informée de l’arrivée à destination des marchandises.
  • 32.
    La jurisprudence distingue en principe selon que la clause appartient ou non à l’économie du contrat. Dans l’affirmative, elle est opposable, dans la négative, le consentement spécial doit être démontré, v. Cass. com., 16 janv. 1996, n° 94-13653, navire Monte Cervantès : DMF 1996, p. 627-632, note Delebecque P. ; RTD civ. 1996, p. 902. obs. Mestre J.
  • 33.
    V. Cachard O., « La force obligatoire vis-à-vis du destinataire des clauses relatives à la compétence internationale stipulées dans les connaissements, plaidoyer pour un renouveau des considérations maritimistes », in Vers de nouveaux équilibres entre ordres juridiques, Liber Amicorum Hélène Gaudemet-Tallon, 2008, Dalloz, p. 189-208 ; ou encore, Scapel C., « La bataille de la compétence dans le contentieux maritime », DMF 2017, n° 788, p. 99.
  • 34.
    En droit aérien, au contraire, l’article 20 de la Convention de Montréal n’autorise que les clauses d’arbitrage et non les clauses de juridiction.
  • 35.
    Le Code des transports ne traite pas des clauses de compétence, pas plus que la Convention de Bruxelles du 25 août 1924. Certes, les Règles de Rotterdam posent au contraire des solutions mais elles ne sont pas entrées en vigueur. Ainsi, leur article 66 autorise les parties à convenir d’un « accord exclusif d’élection de for » qui est valable mais à plusieurs conditions. Il faut en effet que le tribunal désigné corresponde à un tribunal compétent selon les Règles de Rotterdam, que la clause soit contenue dans le document de transport, que la personne à qui elle est opposée en ait été avisée et enfin que la loi du tribunal saisi reconnaisse que cette personne peut être liée par la clause de compétence.
  • 36.
    À tout le moins lorsqu’est en cause le champ d’application du règlement Bruxelles I/ I bis, à savoir lorsque la clause attribue compétence au tribunal d’un État membre de l’Union européenne.
  • 37.
    Cass. com., 16 déc. 2008, n° 08-10460 : Bull. civ. IV, n° 283 ; DMF 2009, p. 124, obs. Delebecque P. ; D. 2009, p. 1565, note Jault-Seseke F.
  • 38.
    CJCE, 9 nov. 2000, n° C-387/98, Coreck : DMF 2001, p. 187-194, obs. Delebecque P. ; Rev. crit. DIP 2001, p. 359-375, note Bernard-Fertier F.
  • 39.
    Ce texte est devenu l’article 23 du règlement Bruxelles I, puis l’article 25 du règlement Bruxelles I bis.
  • 40.
    Le droit anglais par exemple appréhende le destinataire comme le successeur du chargeur, v. CA Rouen, 10 sept. 2009, n° 08/03137 : DMF 2010, p. 35, obs. Sana Chaillé de Néré S.
  • 41.
    V. article 23 du règlement Bruxelles I ou article 25 du règlement Bruxelles I bis.
  • 42.
    V. Cass. com., 12 mars 2013, n° 10-24465 : DMF 2013, p. 712, obs. Renard J.-L. ; D. 2013, p. 1603, note Paulin C. ; affirmant « qu’il est d’usage que les transporteurs maritimes incluent dans les connaissements une clause attributive de juridiction au profit des tribunaux dans le ressort desquels se trouve leur siège social » – Cass. com., 19 nov. 2013, n° 12-24668, D.
  • 43.
    Pour une analyse identique, v. CA Paris, 17 oct. 2017, n° 17/03770 : DMF 2018, n° 799.
  • 44.
    V. Cass. ass. plén., 22 déc. 1989, n° 88-10979, Mercandia II : DMF 1990, p. 29-36, note Bonassies P. ; JCP G 1990, II 21503, note Delebecque P.
  • 45.
    V. Cass. com., 7 juill. 1992, n° 90-14151, navire Renée Delmas : DMF 1992, p. 672-676, obs. Bonassies P.
  • 46.
    Cette clause sera probablement jugée hors de l’économie du contrat et soumise au consentement spécial, v. en ce sens, CA Paris, 12 sept. 2002, n° 99/23525, navire Catharina : DMF 2003, p. 665, note Tassel Y. ; DMF 2004, hors-série, « Le droit positif en 2003 », n° 77, obs. Delebecque P. – CA Aix-en-Provence, 10 janv. 2001, n° 97/02326, navire An He : DMF 2001, p. 313, obs. Tassel Y. ; DMF 2004, hors-série, « Le droit positif en 2003 », n° 77, p. 70, obs. Delebecque P. – plus récemment, v. CA Aix-en-Provence, 6 sept. 2007, n° 05/23770 : Rev. Scapel, 2007, p. 124.
  • 47.
    V. en ce sens, Delebecque P., obs. sous Cass. com., 27 sept. 2017, n° 15-25927 : DMF 2017, n° 797.
  • 48.
    Avant l’arrêt Mascareignes, la chambre commerciale de la Cour de cassation, à la différence de la chambre civile, soumettait déjà l’opposabilité de la clause de compétence au consentement spécial du destinataire, v. Cass. com., 29 nov. 1994, n° 92-19987 : navires Harmony et Nagasaki : DMF 1995, p. 209-217, obs. Bonassies P. – Cass. com., 8 déc. 1998, n° 96-17913 : Rev. crit. DIP 1999, p. 536-546, note Pataut É.
  • 49.
    Cass. 1re civ., 13 mai 2015, n° 13-17751 : Rev. crit. DIP 2015, p. 652, note Muir Watt H. ; JDI 2016, comm. 4, note El Sawah S. et Leboulanger P. ; D. 2015, p. 1936, note Bollée S. ; RDC 2013, p. 1485, note Laazouzi M.
  • 50.
    L. n° 2016-1691, 9 déc. 2016, loi relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique : JO, 10 déc. 2016, texte n° 2.
  • 51.
    Cass. 1re civ., 28 sept. 2011, n° 09-72057, NML Capital I : Rev. crit. DIP 2012, p. 124, note Gaudemet-Tallon H. – Cass. 1re civ., 28 mars 2013, nos 11-10450, 10-25938 et 11-13323, (3 arrêts), NML Capital II : JDI 2013, comm. 10, note Cuniberti G. ; Rev. crit. DIP 2013, p. 671, note Muir Watt H.
  • 52.
    CA Versailles, 15 nov. 2012, n° 11/09073.
  • 53.
    Cass. 1re civ., 13 mai 2015, n° 13-17751.
  • 54.
    CA Paris, 30 juin 2016, n° 15/13352.
  • 55.
    Cass. 1re civ., 10 janv. 2018, n° 16-22494 : JCP 2018, 294, avis Ancel N. ; JCP 2018, 295, note Laazouzi M. ; D. 2018, p. 541, note Haftel B.
  • 56.
    Cass. 1re civ., 14 mars 1984, n° 82-12462 : Ancel B. et Lequette Y., Les grands arrêts de la jurisprudence française de droit international privé, 5e éd., 2006, Dalloz, n° 65.
  • 57.
    La nullité de ce type de clause a été préconisée, v., Kohen M.-G., « La portée et la validité des clauses contractuelles exorbitantes de renonciation à l’immunité des États », in Mélanges en l’honneur de J.-M. Jacquet, 2013, LexisNexis, p. 201.
  • 58.
    V. Muir Watt H., note sous Cass. 1re civ., 13 mai 2015, n° 13-17751, p. 654.
  • 59.
    L’article 60 de la loi Sapin 2 crée par ailleurs un régime spécial d’immunité d’exécution non codifié, dérogatoire au droit commun, pour éviter les saisies de biens d’un État étranger bénéficiaire de l’aide publique lorsque le créancier est un fonds « vautour ».
  • 60.
    Cass. 1re civ., 21 mars 2000, n° 95-11982 : D. 2000, note Atias C.
  • 61.
    V. à ce sujet, El Sawah S. et Vinuales J.-E., note sous tribunal international du droit de la mer, 15 déc. 2012 : JDI 2013, comm. 9, p. 857, spéc. p. 879.
  • 62.
    Cette convention n’est pas entrée en vigueur faute d’un nombre suffisant de ratifications.
  • 63.
    CEDH, 29 juin 2011, n° 34869/05, Sabeh El Leil.
  • 64.
    CIJ, 3 févr. 2012, Allemagne c/ Italie : Rec. 2012, p. 99, § 117.
  • 65.
    Projet d’articles sur les immunités juridictionnelles des États et de leurs biens et commentaires y relatifs, Annuaire CDI 1991, vol. 2, p. 61.
  • 66.
    Comp. CE, avis consultatif, 30 mars 2016, sur le projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, pts 27 et s.
  • 67.
    TGI Paris, JEX, 9 mai 2017, n° 17/80647, cité par Morel-Maroger J., « Jurisprudence du tribunal de grande instance de Paris », JCP G 2017, doctr. 748.
  • 68.
    US – District Court – Northern district of California – San Jose Division – November 02, 2017, case 5 :17-cv-04207-EJD.
  • 69.
    CS Canada, 28 juin 2017, n° 2017 CSC 34, Google Inc. c/ Equustek Solutions Inc., accessible sur https://scc-csc.lexum.com/scc-csc/scc-csc/fr/item/16701/index.do.
  • 70.
    « The Canadian order would eliminate Section 230 immunity for service providers that link to third-party websites. By forcing intermediaries to remove links to third party material, the Canadian order undermines the policy goals of Section 230 and threatens free speech on the global internet », statement.
  • 71.
    Demande de décision présentée à la CJUE (n° C-507/17) par renvoi préjudiciel du Conseil d’État le 21 août 2017 après la décision CE, 10e/9e ch. réunies, 19 juill. 2017, n° 399922, Google Inc. ; pour un commentaire de cette décision : Hyde A.-A., « Quelle portée territoriale pour le droit au déréférencement ? », in Le territoire, Camguilhem B. et Pessina-Dassonville S. (dir.), 2018 (à paraître), PURH.
  • 72.
    CJUE, 13 mai 2014, n° C-131/12, Google Spain SL et Google Inc. c/ Agencia Española de Protección de Datos (AEPD) et Mario Costeja González : JCP G 2014, p. 768 et s., note Marino L. ; D. 2014, p. 1476, note Benabou V.-L. et Rochfeld J. ; ibid., p. 1481, note Martial-Braz N. et Rochfeld J. ; ibid., p. 2317, obs. Larrieu J., Le Stanc C. et Tréfigny P.
  • 73.
    Règl. (UE) n° 2016/679 du PE et du Cons., 27 avr. 2016, relatif à la protection des personnes physiques et du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données et abrogeant la directive n° 95/46/CE, art. 17 : Droit à l’effacement (« droit à l’oubli »).
  • 74.
    Date d’entrée en vigueur du règlement.
  • 75.
    Arrêt Google Spain préc., pt 66 ainsi que la jurisprudence citée.
  • 76.
    Ce texte, voté par le Congrès le 1er février 1997, a été ajouté au Telecommunications Act de 1996 (47 U.S.C) dont il constitue le titre V.
  • 77.
    Elle est intitulée : « Protection for Private Blocking and screening of offensive material ».
  • 78.
    Section 230, c., § 1.
  • 79.
    Section 230, c, § 2, B.
  • 80.
    CS Canada, 28 juin 2017, arrêt préc., p. 9.
  • 81.
    Opinions citées dans l’arrêt précité, [18].
  • 82.
    Rosen J., The right to be forgotten, 64 Stan. Law Rev., February 2012 : https://www.standfordlawreview.org/online/privacy-paradox-the-right-to-be-forgotten/.
  • 83.
    Yahoo Inc. v. La ligue contre le racisme et l’antisémitisme & l’Union des étudiants juifs de France, U.S. District Court, N.D. California, San Jose Division, June 7, 2001 – 145 F. Supp. 2d 1168 (N.D. 2001) : http://law.justia.com/cases/federal/district-courts/FSupp2/145/1168/2421483/.
  • 84.
    Yahoo Inc. v/ La ligue contre le racisme et l’antisémitisme & l’Union des étudiants juifs de France, U.S. Court of Appeals for the Ninth Circuit, January 12, 2006 – 433 F.3d 1199 (9th Cir. 2006) : https://www.tjsl.edu/slomansonb/5.2 %20Yahoo %20US.pdf.
  • 85.
    Ambrose M.-L., Speaking of Forgetting : Analysis of Possible Non-EU Responses to the Right to Be Forgotten and Speech Exception, TPRC Conferences, TPRC 41 : The 41st Research Conference on Communication, Information and Internet Policy, Telecommunications Policy 38 (8), 800-811, March 2013 : http://ssrn.com/abstract=2238602.
  • 86.
    Certains ont même tenté de faire du Cyberespace un territoire autonome : v. Déclaration d’indépendance du cyberespace publiée le 9 février 1996 sur le site de l’ONG Electronic Frontier Foundation par J.-P. Barlow.
  • 87.
    Delmas-Marty M., Le relatif et l’universel : les forces imaginantes du droit, 2004, Seuil, p. 26.
  • 88.
    CJUE, gde ch., 6 oct. 2015, n° C-362/14, Schrems. Le dispositif du Safe Harbor permettait le transfert de données de l’Union européenne vers les États-Unis, sur la base d’un système d’autocertification. Il est remplacé depuis le 1er août 2016 par un nouvel accord dénommé Privacy Shield.
  • 89.
    CJUE, 25 janv. 2018, n° C-498/16, Schrems : Europe 2018-3, comm. 125, obs. Idot L ; Procédures 2018-3, comm. 80, obs. Nourissat C. ; Dalloz actualité 5 févr. 2018, obs. Mélin F. ; Comm. com. électr. 2018-3, comm. 19, obs. Loiseau G. ; AJ Contrat 2018, p. 124, note Pironon V.
  • 90.
    Dir. n° 95/46/CE, 24 oct. 1995, relative aux données personnelles, remplacée depuis le 25 mai 2018 par le règlement (UE) n° 2016/679, 27 avr. 2016 (RGPD). Facebook a adopté dès le 18 avril 2018 une série de mesures afin de se mettre en conformité avec le RGPD.
  • 91.
    La solution aurait été identique dans le cadre du règlement Bruxelles I bis, les articles 15 et 16 analysés au texte étant remplacés respectivement par les articles 17 et 18.
  • 92.
    Les règles de compétence générales posées par le règlement Bruxelles I bis s’effacent désormais devant les règles de compétence plus spécifiques du nouveau règlement (RGPD, cons. 147).
  • 93.
    La ligne de partage ainsi tracée entre le compte Facebook et la page Facebook n’est pas toujours aussi nette, l’un et l’autre pouvant être utilisés à des fins commerciales ou privées. La question de savoir si le compte Facebook et la page Facebook relèvent d’une seule et même relation contractuelle ou s’ils font l’objet de deux contrats distincts n’est pas tranchée par la Cour de justice, qui renvoie sur ce point à l’appréciation des juridictions nationales (pts 35 et 36).
  • 94.
    L’affaire a révélé l’exploitation, à des fins électorales, des données personnelles de 87 millions d’utilisateurs Facebook, sans que leur consentement ait été sollicité à cet effet.
  • 95.
    CJCE, 20 janv. 2005, n° C-464/01, Gruber, pt 39.
  • 96.
    V. en ce sens, après quelques errements jurisprudentiels, CJUE, 28 janv. 2015, n° C-375/13, Kolassa, et nos observations sous cet arrêt, LPA 31 août 2015, p. 9-10.
  • 97.
    V., sur le fondement de la Convention de Bruxelles, CJCE, 1er oct. 2002, n° C-167/00, Henkel, pts 32-33 ; comp., pour la loi applicable, CJUE, 28 juill. 2016, n° C-191/15, Amazon, pt 39. Le RGPD prévoit la possibilité pour les particuliers – qu’ils aient ou non la qualité de consommateurs – de mandater des associations afin d’agir contre le responsable du traitement des données personnelles ou contre un sous-traitant. Ces associations peuvent également agir sans mandat si les États membres le prévoient (art. 80). Ces recours collectifs – qui prennent en France la forme soit d’une action en représentation conjointe, soit de l’action de groupe spécialement créée pour la protection des données personnelles par la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle – peuvent être exercés devant les juridictions de l’État membre où le responsable du traitement ou le sous-traitant dispose d’un établissement ou devant celles où la personne concernée a sa résidence habituelle (art. 79) : v. Danis-Fatôme A., « Quelles actions judiciaires en cas de violation du RGPD ? », Comm. com. électr. 2018-4, dossier 18, spéc. p. 5-7.
  • 98.
    CJUE, 18 juill. 2013, n° C-147/12, ÖFAB, pts 58-59 ; CJUE, 21 mai 2015, n° C-352/13, CDC Hydrogen Peroxide, pt 35 ; Comp., sans référence au principe énoncé au texte, CJCE, 19 janv. 1993, n° C-89/91, Shearson Lehman Hutton, s’opposant à ce qu’une société, cessionnaire des droits d’un consommateur, puisse se prévaloir des règles protectrices.
  • 99.
    CJUE, 21 mai 2015, CDC Hydrogen Peroxide, préc., pt 36.
  • 100.
    V. en ce sens Pironon V., note préc.
  • 101.
    Le forum actoris résulte de la combinaison, en droit des assurances, des articles 9, § 1, b) et 11, § 2, du règlement Bruxelles I, devenus les articles 11, § 1, b) et 13, § 2, du règlement Bruxelles I bis.
  • 102.
    CJUE, 20 juill. 2017, n° C-340/16, KABEG.
  • 103.
    CJUE, 31 janv. 2018, n° C-106/17, Pawel Hofsoe.
  • 104.
    V. en ce sens Bobek M., Avocat général, conclusions sous l’arrêt commenté, pt 123.
  • 105.
    V. supra note 97. À ce jour, seuls cinq États membres ont organisé, selon des modalités diverses, de telles actions.
  • 106.
    Cass. ass. plén., 31 mai 1991, n° 90-20105 : D. 1991, p. 417, rapp. Chartier Y. ; ibid. p. 318, obs. Aubert J.-L., note Thouvenin D. ; ibid. 1992, p. 59, obs. Dekeuwer-Défossez F. ; RFDA 1991, p. 395, étude Long M. ; Rev. crit. DIP 1991, p. 711, note Labrusse-Riou C. ; RTD civ. 1991, p. 517, obs. Huet-Weiller D. ; ibid. 1992, p. 88, obs. Mestre J. ; ibid., p. 489, étude Gobert M.
  • 107.
    Cass., avis, 22 sept. 2014, nos 14-70006 et 14-70007 : AJ fam. 2014, p. 555, obs. Chénedé F. ; D. 2014, p. 1876, obs. Dionisi-Peyrusse A., p. 2031, note Leroyer A.-M., et D. 2015, p. 21, point de vue Fulchiron H.
  • 108.
    Cass. 1re civ., 5 juill. 2017, nos 15-28597, 16-16901 et 16-16455 : D. 2017, p. 1737, note Fulchiron H., et p. 1727, obs. Gouttenoire A. ; AJ fam. 2017, p. 482, obs. Dionisi-Peyrusse A., et p. 375, point de vue Chénedé F.
  • 109.
    Cass. 1re civ., 5 juill. 2017, nos 15-28597 et 16-16901.
  • 110.
    Cass. 1re civ., 5 juill. 2017, n° 16-16455.
  • 111.
    CA Paris, 30 janv. 2018 : D. 2018, p. 294 ; AJ fam 2018, p. 171, note Le Gouvello A.
  • 112.
    CA Versailles, 15 févr. 2018, nos 17/05285 et 17/05286.
  • 113.
    C. civ., art. 325.
  • 114.
    C. civ., art. 332, al. 1.
  • 115.
    Arrêts préc. Cass. 1re civ., 5 juill. 2017, nos 15-28597 et 16-16901.
  • 116.
    Dionisi-Peyrusse A. et Pichard M., « Les fondements de la filiation sous le prisme du genre », in Dionisi-Peyrusse A. et Mauger-Vielpeau L. (dir.), Les fondements de la filiation, 2017, Varenne-LGDJ-Lextenso, p. 169 ; « Le genre dans le droit de la filiation (à propos du titre VII du livre premier du Code civil) », in Hennette-Vauchez S., Pichard M. et Roman D. (dir.), La loi et le genre. Études critiques de droit français, 2014, CNRS éd., p. 49.
  • 117.
    Dans le cas des inséminations, le géniteur n’apparaît pas et dans le cas de la GPA, la gestatrice n’apparaît pas.
  • 118.
    C. civ., art. 311-14 et s.
  • 119.
    En tant que loi personnelle de l’enfant, vraisemblablement français compte tenu de la nationalité de son père.
  • 120.
    C. civ., art. 311-25.
  • 121.
    C. civ., art. 370-3.
  • 122.
    Au moment du mariage, l’époux avait la nationalité marocaine. Quant à l’épouse, il semblerait qu’elle avait la nationalité marocaine.
  • 123.
    Cass. req., 4 juin 1935, Zelcer : Rev. crit. DIP 1936, p. 557, note Basdevant J. ; S. 1936, 1, p. 377, rapp. Pilon, note Niboyet J.-P. ; DP 1936, p. 17, note Savatier R. – Récemment, v. Cass. 1re civ., 23 nov. 2016, n° 15-24445 ; Cass. 1re civ., 24 sept. 2014, n° 13-17593.
  • 124.
    V. nota. Cass. 1re civ., 11 mai 2012, n° 11-20462 ; Cass. 1re civ., 22 nov. 2005, n° 03-12224 : JDI 2006, p. 970, note Barrière-Brousse I.
  • 125.
    Cass. req., 4 juin 1935, Zelcer, préc.
  • 126.
    V. not. Cass. 1re civ., 11 mai 2012, n° 11-20462 ; Cass. 1re civ., 26 sept. 2012, n° 11-20463 ; Cass. 1re civ., 22 oct. 2008, n° 07-16385 ; Cass. 1re civ., 17 oct. 2007, n° 06-18581.
  • 127.
    Cass. 1re civ., 2 déc. 1997, n° 95-20308 ; Cass. 1re civ., 30 janv. 2013, n° 12-15951 ; v. toutefois, Cass. 1re civ., 19 oct. 2016, n° 15-26767.
  • 128.
    Cass. 1re civ., 19 déc. 1973 : Rev. crit. DIP 1975, p. 247, note Wiederkehr G.
  • 129.
    On soulignera ici que le règlement (UE) n° 2016/1103 du 24 juin 2016 sur la loi applicable aux régimes matrimoniaux retient une solution identique, contrairement à la convention de La Haye de 1978 qui prévoit des cas de mutabilité automatique.
  • 130.
    Le cas échéant, les époux peuvent aussi choisir de soumettre les immeubles à la loi du lieu de leur situation.
  • 131.
    Le règlement sera applicable aux couples mariés à compter du 29 janvier 2019 et aux couples qui, mariés avant cette date, désigneront la loi applicable à leur régime matrimonial après cette date.
  • 132.
    Tout en réservant l’hypothèse où des formalités impératives supplémentaires seraient prévues par la loi de la résidence habituelle des époux, à condition qu’elle soit située dans un État membre.
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