Insolite : quand la justice parodie Astérix

Publié le 02/11/2023

Si vous n’avez pas encore pu vous procurer le dernier tome des aventures d’Astérix, alors le jugement rendu par le Tribunal correctionnel de Bruxelles le 15 mai 2019 vous permettra de patienter !

Insolite : quand la justice parodie Astérix
Asterix chess set. Chess set at Gokyay Foundation Chess Museum. Ankara, Turkey – September 21, 2023.

Ordralfabétix et Cétautomatix au tribunal correctionnel

L’affaire débute lorsqu’une cliente de supermarché décida d’en frapper une autre avec une daurade. Pour quelle raison ? Tout simplement car la victime, dont le caddie était rempli, a tenté de tricher en passant à la caisse rapide « moins de 10 articles ». La dispute qui s’est ensuivie se solda par un coup de daurade surgelée au visage ! Laissons le magistrat Bruxellois Jean Coumans nous raconter cette brouille Gauloise dans son jugement :

« En 50 avant Jésus-Christ, toute la Gaule est occupée par les Romains. Toute ? Non ! Un village peuplé d’irréductibles Gaulois résiste toujours et encore à l’envahisseur. Cela vous rappelle-t-il quelque chose. ? Venant comme un running gag dans les aventures d’Astérix, une scène de dispute entre le poissonnier du village, Ordralfabétix, qui prétend que son poisson est frais, et d’autres, qui le taquinent sur le sujet, tels Cétautomatix, le forgeron, ou encore Agecanonix, le doyen du village. Nous sommes aujourd’hui en l’an de (dis) grâce 2019 et rien n’a changé.

 La force publique d’un village (Drogenbos) majoritairement francophone en territoire flamand intervient dans une poissonnerie pour une cliente qui resquille en tentant de faire passer vingt articles à la caisse expresse. La prévenue prend alors un poisson dans son caddy et en frappe la cliente d’un coup de daurade à la volée. Son avocat expose à ce propos que, dès lors qu’il s’agit d’un poisson plat, celui-ci ne peut causer une incapacité de travail, le coup de poisson plat pouvant être assimilé à une gifle donnée du plat de la main.

 Merci à [la prévenue] qui, par cette action qui lui a valu une comparution devant son praetor, a offert un si énorme fou rire. Ce fou rire inextinguible s’est emparé de toute la salle et même de M. le procureur du Roi, habituellement plein de sérieux dans l’exercice si difficile de requérir pour de telles vétilles. Merci aux talents de comédien de son avocat, qui a entretenu ce fou rire, au bonheur de tous, en mimant le geste accompli par son irascible cliente.

 Dire qu’il m’a fallu 17 années d’études et 32 ans de pratique judiciaire pour connaître ce moment. Pour son coup de daurade, la prévenue bénéficiera de la peine la plus légère, à laquelle le représentant du parquet ne s’est d’ailleurs pas opposé entre deux crises de rire. C’est bien la moindre des choses que le tribunal puisse lui offrir au regard du spectacle comique dont elle nous a régalé ».

Un jugement rendu en bande dessinée

Avant de nous quitter, citons également le jugement plus méconnu, mais encore plus original en matière d’hommage à la bande dessinée rendu par James M. Burns en 1986. Officiant en Oregon, ce magistrat américain doit juger un père et son fils poursuivis pour braconnage d’espèce protégée après le signalement zélé d’un garde champêtre. Les deux suspects ont en effet attrapé avec un grand filet, lors d’une sortie familiale, des… papillons !

Estimant la procédure abusive et non méritée, le juge laissa repartir sans suite les braconniers du dimanche en incluant, dans son jugement[1], une bande dessinée qu’il avait lu dans la presse parce qu’elle dénonce la surrèglementation des parcs naturels américains…

Insolite : quand la justice parodie Astérix

Ayant même contacté l’auteur et le journal pour obtenir l’autorisation de l’inclure dans son jugement, il ajouta une ligne au dessin initial, en faisant ainsi le premier jugement présenté sous forme de bande dessinée… Bonsoir !

 

[1] U.S. District Court, D. Oregon 628 F. supp. 1234 (1986).

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