TJ de Nanterre : « Une semaine après, j’ai fait un malaise. Un mois après, j’étais au chômage »

Publié le 13/09/2024
TJ de Nanterre : « Une semaine après, j’ai fait un malaise. Un mois après, j’étais au chômage »
Daylight Photo/AdobeStock

Condamné pour blessures involontaires, un homme a fait opposition à une ordonnance pénale, mais ne s’est pas présenté devant le juge. Seule la victime est revenue à la barre et a pu raconter l’impact de cet accident sur son quotidien.

L’homme qui conteste le jugement est absent, mais pas la victime. Adel* a fait le déplacement pour assister à l’audience. Il s’assied donc devant son conseil et face à une chaise vide dans la 11e chambre correctionnelle du tribunal judiciaire de Nanterre.

En juillet 2022, Adel se présente au commissariat d’Antony pour porter plainte contre X. Quelques jours plus tôt, alors qu’il traversait au passage piéton pour se rendre à son travail, il est percuté par un conducteur. Ce dernier est descendu du véhicule, lui a proposé de l’aide et l’a emmené aux urgences. Suite à l’accident, Adel a reçu 10 jours d’ITT. Entendu au commissariat, le conducteur, Monsieur H., a reconnu les faits et a affirmé qu’il avait freiné en voyant une ombre passer et qu’il ne roulait pas vite.

« J’étais en état de choc, il m’a emmené aux urgences »

Adel se présente à la barre. Son visage porte la fatigue d’une personne qui dort peu et mal. Sa version est sensiblement différente de celle de l’homme qui l’a renversé. « Je traversais au passage piéton, se souvient-il, c’est le deuxième de cette rue en ligne droite. Je vois la voiture au loin, je me suis dit qu’il allait faire acte de ma présence et donc freiner. » Le jeune homme est formel, il n’a pas entendu ou senti de freinage. « J’ai été percuté, j’ai roulé sur le pare-brise, je me suis relevé aussitôt. Je suis allé le voir. Il me semblait que c’était intentionnel d’où mon agressivité au départ, mais je me suis calmé très vite et j’ai commencé à avoir mal. J’étais en état de choc, il m’a emmené aux urgences. » Une autre personne était présente dans la voiture mais n’a rien dit, se souvient Adel, qui a trouvé ça « étrange » sur le moment.

L’impact que cet accident a priori sans gravité a eu sur sa vie se résume en une phrase : « Une semaine après, j’ai fait un malaise. Un mois après, j’étais au chômage. » Des problèmes de sommeil et une dépression ont empêché ce graphiste de profession de poursuivre une vie normale. Deux ans après l’accident, il évoque aussi des douleurs physiques, au coude, aux doigts, et un suivi chez un kinésithérapeute.

La personnalité de Monsieur H., qui n’avait pas de casier judiciaire, a déjà été abordée lors de l’audience qui l’a condamnée à 500 euros d’amende. « Pas la peine de s’attarder sur la culpabilité, les faits sont reconnus, bien que minorés », souligne l’avocat de la partie civile. Si Adel a reçu 10 jours d’ITT quelques semaines après les faits, son conseil demande une expertise sur son préjudice actuel, au vu du choc post-traumatique exprimé à la barre. Il réclame 5 000 euros au titre du préjudice physique et 5 000 euros au titre du préjudice moral, ainsi que 3 000 euros au titre de provisions.

La procureure ne manque pas de s’étonner de cette opposition sur ordonnance pénale formulée par Monsieur H., qui n’a même pas pris la peine de se présenter à cette nouvelle audience. À quoi bon ?

Au délibéré, le juge annule les effets de l’ordonnance, déclare coupable Monsieur H., et confirme la peine de 500 euros d’amende à laquelle il avait été précédemment condamné. Il prononce le versement de 3 000 euros à titre de provisions pour Adel et la demande d’une expertise pour évaluer l’indemnisation du préjudice de la victime.

*Le prénom a été modifié.

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