Tribunal de Meaux : Six émeutiers du 30 juin contraints de rembourser les dégradations
Quatre mois jour pour jour après qu’ils ont commis des violences et vols au centre commercial La Verrière, dans le quartier de Beauval à Meaux (Seine-et-Marne), six majeurs ont comparu devant le tribunal hier. Tous ont été condamnés. Ils vont dédommager la mairie, les particuliers, les propriétaires des magasins pillés.
Dans la nuit du jeudi 29 au vendredi 30 juin 2023, une centaine de jeunes Seine-et-Marnais avaient pris d’assaut le centre commercial du quartier de Beauval. Ils agissaient dans le cadre des violences urbaines enflammant la France après la mort de Nahel à Nanterre (Hauts-de-Seine), mardi 27 juin.
Au cours de ces attaques perpétrées sur l’ensemble du territoire contre des policiers, gendarmes, pompiers, contre 2 500 immeubles, dont 105 mairies et 168 écoles, 12 000 véhicules avaient été incendiés, 24 000 feux déclenchés sur la voie publique. Depuis, quelque 3 000 émeutiers ont été interpellés – le plus jeune avait 11 ans – et la plupart ont été sanctionnés.
Jeudi dernier, la Première ministre Elisabeth Borne a présenté aux maires des 500 communes ciblées les réponses judiciaires, répressives autant que préventives, qu’envisage son gouvernement. Ces graves événements, auxquels ont pris part les six prévenus jugés lundi devant la chambre des comparutions immédiates du tribunal de Meaux, s’étaient déroulés du 27 juin au 7 juillet et ont fait l’objet d’un rapport des Inspections générales de la Justice et de l’Administration sur les motivations et profils des casseurs.
« Le méticuleux travail des policiers de Meaux »
Arrêtés le 20 septembre au terme d’une longue enquête de police, Bradley, Allan, Mukubay, Ebuta, Jordan et Amara ont tenté de s’exonérer des faits, du moins dans leur globalité, bien que confondus par la vidéosurveillance. Un seul a pris ses responsabilités. Âgés de 18 à 31 ans, ils ont été reconnus coupables des infractions visées à la prévention, à l’exception d’Amara et de Mukubay, partiellement relaxés, en l’espèce du délit de vol aggravé.
Initialement audiencé le 22 septembre à l’issue de leur garde à vue (notre article du 25 ici), leur procès avait été reporté en raison de l’épaisseur d’un dossier complexe et de la contestation des faits par certains comparants. Il fallait s’accorder du temps pour bien l’appréhender, avait estimé à raison la présidente Isabelle Verissimo. Il avait alors fallu statuer sur le sort des six majeurs d’ici à leur procès – les trois mineurs de la bande ont comparu devant le juge des enfants. Si Mukubay et Bradley avaient été placés sous contrôle judiciaire, Ebuta, Allan, Jordan et Amara avaient été incarcérés.
Les voici donc qui répondent enfin des actes reprochés : participation à un groupement formé en vue de préparer des violences contre les personnes ou des destructions/dégradations de biens, vols par effraction aggravés en récidive (Ebuta ne répond « que » de vol en réunion), destruction de biens d’autrui par moyens dangereux pour les personnes » (Jordan et Allan, ce dernier en récidive). Ils espèrent encore convaincre les magistrats que « le méticuleux travail des policiers de Meaux », salué en ces termes par Jean-Baptiste Bladier, procureur de la République, ne les concerne pas ; en gros, il y aurait méprise ou exagération.
Au regard des images captées par les caméras et les indices relevés, dont leurs empreintes génétiques, les explications – « j’y suis allé pour voir » – n’ont pas emporté l’adhésion de la parquetière, Alice Lelong. Elle a requis cinq à dix-huit mois de prison, assortis pour les uns d’un mandat de dépôt, pour les autres d’une détention à domicile sous surveillance électronique (DDSE).
Le montant des dégâts dépasse les 500 000 euros
Auparavant, avaient été exposés les dégâts subis par 22 plaignants. Parmi eux des particuliers, commerçants (Darty, Aldi, Leclerc, salon de coiffure, boulangerie, opticien, spa), le Crédit Agricole, la Poste, le lycée Jean Vilar, le logeur Meaux Habitat et la mairie dont le poste de police a été brûlé. Le montant des préjudices est si faramineux, plus de 500 000 euros selon les devis provisoires, que le tribunal a renvoyé plusieurs dossiers à l’audience sur intérêts civils du 8 octobre 2024.
En attendant, les six émeutiers reconnus coupables devront tout de même verser 29 863 euros de provision à douze parties civiles. Quant aux peines, elles sont peu ou prou conformes aux réquisitions :
*Mukubay, huit mois de sursis simple ;
*Amara, cinq mois ferme avec mandat de dépôt ;
*Ebuta, sept mois en DDSE ;
*Bradley, huit mois dont moitié en détention à domicile ;
*Jordan, dix-huit mois dont dix avec sursis probatoire de deux ans et diverses obligations, la DDSE pour la partie ferme ;
*Allan, trois ans dont deux avec sursis probatoire jusqu’en 2025, une DDSE pour la partie ferme, obligation de soins, de travail, de réparer les dommages, interdiction de fréquenter ses cinq amis.
Seul Mukubay est sorti libre du palais de justice. Ses cinq comparses ont regagné la prison où ils patienteront une petite semaine jusqu’à la pose de leur bracelet électronique.
Référence : AJU399164