Tribunal de Pontoise : « Ce n’est pas juste une baffe, ce sont des violences physiques »

Publié le 21/12/2022

Un homme de 28 ans est jugé à Pontoise pour des violences commises contre sa compagne, en présence de sa fille de 12 ans et de leur bébé de 2 mois. Il comparaît libre et confiant, sa compagne le soutenant, face à des magistrats manifestement ulcérés par la situation.

Tribunal de Pontoise : « Ce n’est pas juste une baffe, ce sont des violences physiques »
Palais de justice de Pontoise (Photo : ©J. Mucchielli)

Debout à la barre, Kennedy, 28 ans, écoute plutôt détendu la présidente du tribunal correctionnel de Pontoise instruire son procès pour des violences sans ITT (incapacité temporaire totale de travail) commises à l’encontre de sa compagne, Katy, présente à l’audience.

Le 24 novembre dernier au soir, Kennedy est au domicile de sa compagne, à Sarcelles, où il vit avec leur enfant d’un mois et demi depuis sa sortie de prison en septembre 2021. Katy tient d’une amie que Kennedy l’aurait trompé avec Hillary. Elle a appelé sa rivale, fouillé le portable de Kennedy et exige désormais des explications de la part de son compagnon. La dispute dérape. Kennedy prétend lui avoir attrapé les mains et avoir repoussé l’assaut de Katy, qui aujourd’hui le défend, mais qui le soir des faits a dit aux policiers qu’il l’avait frappée, puis l’avait traînée par les cheveux avant de quitter l’appartement avec leur bébé trop légèrement vêtu (un simple body) pour la saison. Il est ensuite revenu pour prendre une couverture, avant de repartir traîner dans le quartier. Une version confirmée par la fille aînée de Katy, 12 ans, qui a assisté à la scène de violence.

C’est elle qui a appelé la police, laquelle a dépêché une patrouille. Les policiers n’ont pas tourné longtemps avant de tomber sur Kennedy marchant avec son bébé dans les bras.

En entendant le récit des faits, Kennedy ne peut réprimer un sourire, comme si on lui rappelait un bon moment.

« C’est bien, ça vous fait rire, j’espère que vous rirez jusqu’au bout », s’agace la présidente, dont cinq dossiers sur les sept du jour portent sur des faits de violences conjugales.

« — Bon, alors, pourquoi vous êtes parti avec l’enfant ?

— En fait, je le tenais dans mes bras dès le début », se justifie-t-il, ce qui n’explique pas pourquoi il est parti avec lui, mais le tribunal n’en saura pas plus.

« C’est loin d’être une relation apaisée »

La présidente s’intéresse à la relation conflictuelle entre ces deux-là. Le couple se dispute souvent du fait de l’infidélité de Kennedy et de la jalousie éruptive de Katy, et ce n’est pas la première fois que Katy se plaint de violences. Déjà, en septembre 2021, mais aussi le 12 août 2022, elle avait déposé des mains courantes pour le même motif.

« — C’est loin d’être une relation apaisée. Qu’est-ce que vous en pensez ?

— C’est pas bien.

— C’est toute votre réflexion ?

— Je peux rien dire de plus.

— Ce n’est pas normal de se comporter ainsi avec deux enfants à la maison. En plus, c’est redondant dans votre fonctionnement de couple. »

La présidente n’avait pas prévu d’entendre Katy, mais celle-ci a insisté.

« C’est compliqué la vie quand même à votre domicile, n’est-ce pas ? Votre souhait, c’est de reprendre la vie commune ? »

Katy fait oui de la tête.

« Jusqu’aux prochains faits de violences ? » La présidente est ulcérée, le procureur aussi.

« C’est normal dans une vie de couple de se prendre des gifles par son conjoint ? Ce n’est pas normal qu’une gamine de 12 ans appelle la police car elle a peur de voir son beau-père frapper sa mère. C’est le genre de situation dans laquelle je verrais très bien le juge des enfants », menace-t-il en filigrane.

Katy commence à défendre Kennedy, insiste sur sa bonne volonté, mais la présidente l’interrompt : « On n’a pas envie que ça recommence dans huit jours, monsieur dans le box et madame avec un coquard ». Le procureur renchérit : « Vos choix vous appartiennent, nous, on ne peut rien faire pour vous », et Katy se rassoit.

« Vivre d’amour et d’eau fraîche et de tartes dans la gueule »

Le réquisitoire est sur le même ton : « Vous ne vous en rendez peut-être pas compte, mais aux termes de la loi, vous êtes déjà allé trop loin. Le sujet, ce n’est pas juste une baffe, ce sont des violences physiques et psychologiques réitérées. Si jamais on vous revoit, et on vous reverra, ce sera mandat de dépôt pour vous, si ce n’est pas aujourd’hui ». Pour l’heure, il requiert 8 mois de prison, sans mandat de dépôt.

L’avocat hausse le ton : « Pourquoi s’embête-t-on à bloquer du temps d’audience pour ça ! Ces deux-là doivent aller voir un thérapeute de couple, car un jour il y aura une baffe plus forte que l’autre. Vivre d’amour et d’eau fraîche et de tartes dans la gueule, ce n’est pas une manière de vivre en couple ! » La conclusion est abrupte.

Kennedy attend sa peine dans le hall, où Katy et leur bébé patientent également. Enfin, il regagne le prétoire. L’incompréhension se lit sur son visage quand le tribunal le condamne à 8 mois de prison avec mandat de dépôt, et envoie donc Kennedy directement en prison.

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