Tribunal de Pontoise : « Je suis bien en prison là, je suis habitué »

Publié le 11/10/2022

Deux hommes sont jugés par le tribunal correctionnel de Pontoise, en renvoi de comparution immédiate. Ils sont mis en cause pour vol et tentative de vol avec effraction. L’un des prévenus est absent, il avait reconnu les faits, l’autre nie.  

Tribunal de Pontoise : « Je suis bien en prison là, je suis habitué »
Palais de justice de Pontoise (Photo : ©J. Mucchielli)

Dans le box : Walid, 20 ans, grosse barbe et bras croisés. À la question « reconnaissez-vous les faits ? », il répond par un « Non, non », tranchant, catégorique. A ses côtés : personne. Rayan, son complice de 19 ans, était sous contrôle judiciaire et n’a pas répondu à sa convocation le vendredi 7 octobre devant le tribunal correctionnel de Pontoise. Les deux hommes sont accusés  de vol et tentative de vol par ruse, effraction ou escalade, dans une pharmacie et dans un garage automobile, le 1er juin 2022.

Tout commence par la plainte d’une pharmacienne dont le local, situé à Chars, a été nuitamment visité par des individus cagoulés. La vidéosurveillance montre trois hommes en noir briser un carreau, puis forcer un rideau métallique et enfin une porte-fenêtre pour repartir avec un petit coffre-fort contenant des médicaments classés stupéfiants, des documents administratifs et de l’argent liquide. Préjudice : 3020 euros, sans compter les dégradations.

Les enquêteurs font le lien avec des faits survenus un peu plus tôt dans la nuit, vers 2h du matin, à Boissy-l’Aillerie. Trois hommes cagoulés ont commencé par tenter de s’introduire dans un garage avant de dégoter une échelle et d’entreprendre de passer par le premier étage. La vidéosurveillance montre un individu tenter d’ouvrir la fenêtre, en vain. Les trois hommes repartent bredouille.

Les policiers notent un détail intéressant : la dernière vidéo montre qu’ils circulent à bord d’une Peugeot 208. Ils ne peuvent pas voir la plaque, mais leurs recherches les mènent à une 208 flashée dans le secteur, juste après les faits de Boissy-l’Aillerie. Ils retracent son parcours : cette voiture déclenche des relais à Bezons et à Colombes, où vivent les deux prévenus, puis sur les lieux des délits. C’est un véhicule de location, qui a fait étape avec ses occupants dans un hôtel des Bouches-du-Rhône. Le numéro de téléphone fourni à l’hôtelier est celui de la mère de Rayan. Il est interpellé, et son téléphone exploité : il a déclenché des relais sur les lieux des délits, à la même heure. Rayan reconnaît les faits.

« Si j’y avais été, la fenêtre je l’aurais ouverte »

Parallèlement, un profil génétique est relevé sur un barreau de l’échelle érigée contre la façade du garage, un ADN répertorié au FNAEG : celui de Walid. La présidente, après ce résumé détaillé, lève les yeux vers ce dernier : « Est-ce que vous connaissez Rayan B. ?

— De quand on était petits seulement, mais on n’était pas amis. »

Quand il a été interpellé, Walid était en cavale. Un jour, profitant d’une sortie culturelle, il avait « pris la poudre d’escampette », dit la présidente. C’est au mois de juillet qu’il a été rattrapé.

« — Votre ADN sur l’échelle, vous l’expliquez comment ?

— Peut-être que j’ai prêté mes gants à quelqu’un et que ça a mis mon ADN partout. En tout cas, moi, si j’y avais été, la fenêtre je l’aurais ouverte. Donc ça ne peut pas être moi. »

Vingt ans, 9 condamnations et un laconisme tranquille face à la condamnation qui vient.

« Neuf condamnations, ça fait beaucoup, observe la magistrate.

— Je suis bien en prison là, je suis habitué.

— Vous êtes bien, vraiment ? Et ça se passe bien ? Vous faites quoi ? s’enquiert la présidente avec intérêt.

— Je suis auxiliaire, je distribue les plats.

— Et vous avez des projets ?

— Pour quand je serai sorti ?

— Oui, de formation par exemple ?

— A Fleury, y’a pas ça », élude Walid. Il ajoute une dernière précision: « Pour le moment, personne ne vient me visiter. Mais ça va venir. »

La parquetière a requis 12 mois avec mandat de dépôt ainsi que la révocation d’un sursis qui pesait sur Walid, et la même peine pour Rayan. Dépourvu d’avocat, Walid a désormais la parole pour se défendre :

« Non, c’est bon.

— Vous pouvez parler sur les faits, sur votre situation.

— Non, non, ça ira ».

Walid veut en finir. Après la suspension, il entend sa peine : 12 mois de prison, révocation du sursis à hauteur de 6 mois, maintien en détention. Son comparse est condamné à 12 mois et le tribunal a prononcé un mandat d’arrêt. Walid tourne les talons avec l’air de s’en ficher royalement.

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