Tribunal de Pontoise : « Papa a fait des bêtises et il est en prison »

Publié le 17/02/2023

Mardi 24 janvier, Nicolas, 30 ans, voleur récidiviste, est jugé en comparution immédiate pour vol de voiture en réunion. Il nie une partie des faits.

Tribunal de Pontoise : « Papa a fait des bêtises et il est en prison »
Tribunal de Pontoise (Photo : ©J. Mucchielli)

 Nicolas est prévenu d’avoir commis neuf infractions à Sèvres, Limours, Vauréal, Mériel, l’Isle-Adam, Villiers-sur-Marne et Villabé. Avec une bande, ils ont volé des Lexus et des Toyota, entre le 27 septembre et le 30 novembre. C’est ce que soutient le parquet. Renvoyé en comparution immédiate le 22 décembre, il a demandé un délai pour préparer sa défense. Il a passé les fêtes en détention provisoire, et comparaît ce mardi 24 janvier devant le tribunal correctionnel de Pontoise.

C’est à la suite de deux vols commis les 22 et 23 novembre que la police repère une Citroën C5 suspecte, dont ils pensent qu’elle sert aux voleurs. En examinant les plaintes récentes, ils font le rapprochement avec sept autres vols, au mode opératoire identique. Toujours les mêmes modèles, dont la particularité est d’avoir un système de démarrage défaillant, raison pour laquelle elles sont ciblées.

Le portable de Nicolas borne à proximité des lieux de commission des faits. C’est sur la base de ces relevés que les 9 vols sont imputés à Nicolas ; « en réunion », car Nicolas n’était pas seul. Un dénommé Moussa, mineur, a parlé en garde à vue. Il prétend conduire la C5 et laisser Nicolas voler le véhicule ciblé. Le procureur interroge Nicolas sur son rôle.

«—  Non, je ne démarre pas les voitures.

— Peu importe, c’est un vol en réunion, on s’en fiche de qui fait quoi. »

Le prévenu reconnaît trois vols et conteste les six autres. Si son portable bornait, c’est que c’était un téléphone collectif : ceux qui sont dans l’action le prennent avec eux. Parfois, Nicolas n’était même pas au courant qu’un vol aurait lieu. Il n’était que l’exécutant d’une bande organisée. La présidente lui demande : « Pourquoi vous avez fait ça ?

— Je vais pas vous mentir, pour la rémunération.

— Combien ?

— 200 euros. »

Le parquet pense que l’activité de Nicolas était lucrative, et qu’il ne faisait pas que dans le vol de voiture. Lors de la perquisition, de nombreux vêtements de luxe ont été retrouvés. « Ce sont des vêtements que j’ai achetés il y a 4 ans, quand je pouvais me permettre certaines choses », explique-t-il sans convaincre le parquet, qui entend bien demander la confiscation de ces biens.

« Je ne suis absolument pas convaincue »

À le voir s’absenter en pleine nuit pour quelques heures, connaissant son casier, la compagne de Nicolas se doutait qu’il lui cachait des choses. Nicolas est actuellement incarcéré à la Maison d’arrêt de Fleury-Mérogis pour tentative de vol et recel. La présidente l’interroge : « Qu’est-ce que vous pouvez en dire ?

— Le plus dur, c’était de dire la vérité à mon fils.

— Vous l’avez fait ?

— Je lui ai dit que papa a fait des bêtises et qu’il est en prison. »

Nicolas est sur le chemin de la rédemption : il est référent de parcours auprès de jeunes, qu’il sensibilise aux dangers qui les guettent. Trafic de drogue pour les garçons, prostitution pour les filles.

« — Vous voyez le paradoxe entre votre comportement et ce que vous essayez d’inculquer aux jeunes ?

— Oui, je ne l’explique pas. »

Suite à une peine de 13 mois de prison, il avait déclaré à l’enquêteur de personnalité : « J’ai besoin de parler, cette peine est un coup de massue. » Cette fois-ci, le juge d’application des peines est favorable à la révocation partielle du sursis probatoire en cours d’exécution. L’assesseure de gauche, d’un ton sec, demande au prévenu : « J’ai pas compris, vous allez arrêter quand ?

— Euh, là, maintenant.

— Vous avez un sursis probatoire, vous avez fait de la détention qui vous a mis un ‘coup de massue’, et vous dites que vous aviez besoin d’une période de réflexion ? »

La juge énumère les promesses vaines de Nicolas, qui enfonce la tête dans son col. « C’est bien ce que je pensais. Vous ne répondez même pas aux convocations. Alors je ne suis absolument pas convaincue. »

« Votre métier est un métier dangereux. Pour les autres »

Le procureur en ses réquisitions poursuit : « Ces vols alimentent des filières organisées, c’est un trafic extrêmement lucratif, il faut que la sanction soit exemplaire. » Il demande 18 mois de prison avec maintien en détention et confiscation des scellés – les vêtements de luxe.

L’avocat s’avance : « Sans surprise, je ne suis pas d’accord, moi, ce qui m’importe, ce sont les faits. » Il regrette que l’on croie sur parole le complice de Nicolas, sous prétexte qu’il est mineur et son client trentenaire. Il pense que le boss est protégé, car ces deux-là ont peur des représailles. « Il est coupable de certains vols, alors il serait coupable de tous les faits ? » À destination du parquet, il cite l’ancien premier président de la Cour de cassation, Pierre Truche : « Votre métier est un métier dangereux. Pour les autres. »

Mais Nicolas est condamné à la peine requise.

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