L’indemnité légale de licenciement : aspects pratiques

Publié le 26/12/2017

Dans le cadre d’un partenariat avec l’AFJE vous trouverez régulièrement dans nos colonnes une interview d’un juriste d’entreprise sur une question d’ordre pratique. Dans ce numéro nous nous sommes intéressés à l’indemnité légale de licenciement. En effet, le décret n° 2017-1398 du 25 septembre 2017, entré en vigueur le 27 septembre dernier, procède à une revalorisation de l’indemnité légale de licenciement. Quel est l’apport de ce décret ? Quelles sont les précautions à prendre ? Entretien avec Olivier Piernik, directeur du département droit social de Disneyland Paris.

Les Petites Affiches

Quel est l’apport de ce décret ?

Olivier Piernik

En réalité, le législateur est intervenu pour modifier deux aspects touchant à l’indemnité légale de licenciement :

LPA

Quels sont les salariés concernés par cette réforme ?

O.P.

Les salariés qui auront 8 mois d’ancienneté ininterrompue au service du même employeur à la date d’envoi de leur lettre de licenciement pourront désormais bénéficier d’une indemnité légale de licenciement, contre un an auparavant.

Il convient également de noter que l’indemnité légale de mise à la retraite et l’indemnité due en cas de rupture conventionnelle seront concernées dans les mêmes termes par cette réforme, le régime de ces indemnités étant calqué sur celui de l’indemnité légale de licenciement.

Dernière précision, la réduction de la condition d’ancienneté s’applique à compter des licenciements ou mises à la retraite envoyées à compter du 24 septembre 2017. De même, les conventions de ruptures conventionnelles signées au-delà de cette date devront prendre en compte cette réduction d’ancienneté.

LPA

Le motif du licenciement a-t-il un impact sur la détermination de l’indemnité de licenciement ?

O.P.

Bien évidemment, et la réforme ne vient pas modifier ce point, cette indemnité de licenciement continuera à ne pas être due pour les licenciements pour faute grave ou lourde.

LPA

Comment calculer le salaire de référence ?

O.P.

L’article R. 1234-4 du Code du travail modifié par le décret n° 2017-1398 du 25 septembre 2017 nous donne la méthode à appliquer qui s’inspire largement de celle actuelle.

Il convient en effet de prendre la plus favorable des deux assiettes suivantes :

  • soit la moyenne mensuelle des 12 derniers mois précédant le licenciement, ou lorsque la durée de service du salarié est inférieure à 12 mois, la moyenne mensuelle de la rémunération de l’ensemble des mois précédant le licenciement ;

  • soit le tiers des trois derniers mois. Dans ce cas, toute prime ou gratification de caractère annuel ou exceptionnel, versée au salarié pendant cette période, n’est prise en compte que dans la limite d’un montant calculé à due proportion.

LPA

Comment déterminer le montant de l’indemnité ?

Le même décret vient ici majorer l’indemnité de licenciement :

  • pour les années jusqu’à 10 ans : un quart de mois de salaire par année d’ancienneté (contre 1/5 auparavant) ;

  • pour les années à partir de 10 ans : un tiers de mois de salaire par année d’ancienneté (contre 2/15 auparavant).

NB : Étant précisé que pour le licenciement en cas d’inaptitude professionnelle et impossibilité de reclassement, cette indemnité légale doit être doublée.

En cas d’année incomplète, l’indemnité est calculée proportionnellement au nombre de mois complets.

Cette nouvelle indemnité de licenciement s’applique à compter des licenciements ou mise à la retraite envoyés à compter du 27 septembre dernier. Les conventions de ruptures conventionnelles signées au-delà de cette date devront également prendre en compte cette nouvelle indemnité.

LPA

L’indemnité de licenciement est-elle assujettie à l’impôt sur le revenu ? Aux cotisations sociales, CSG et CRDS ?

O.P.

Aucun changement en ce qui concerne le régime social et fiscal de cette indemnité.

L’indemnité légale de licenciement est intégralement exonérée de cotisations de sécurité sociale, de CSG et CRDS dans la limite de 2 PASS et elle n’est pas imposable dans la limite de 6 PASS.

LPA

Avez-vous des recommandations spécifiques ?

O.P.

Pour rappel, l’indemnité légale de licenciement est une indemnité minimale qui est due, à défaut de dispositions plus favorables de la convention collective ou du contrat de travail.

Au niveau de l’entreprise, chaque employeur devra donc comparer le montant de l’indemnité conventionnelle à celui de l’indemnité légale « nouveau régime ». L’indemnité la plus favorable devra être accordée.

Au niveau des branches, compte tenu de cette obligation de comparaison entre convention collective et disposition légale, il est probable que certaines d’entre elles prévoient, du fait de cette revalorisation légale, des indemnités conventionnelles désormais moins favorables que celle prévue par le Code du travail aujourd’hui.

Se posera alors la question de renégocier — sans y être obligés toutefois —  un réajustement de leur dispositif conventionnel pour continuer à se montrer plus favorable…

LPA

Cette réforme simplifiera-t-elle ou compliquera-t-elle en pratique les choses pour les entreprises ?

O.P.

Il faut ici bien comprendre que la modification du régime de calcul de l’indemnité de licenciement tel qu’il vient d’être décrit n’a pas pour objectif premier de simplifier les choses pour l’entreprise. Elle peut même la compliquer dans la mesure où il sera ici souligné que 3 modes de calcul de cette indemnité coexistent en 2017 (v. schéma infra) !

L’objectif affiché du législateur a bien plutôt été d’accorder une majoration de l’indemnité légale de licenciement en contrepartie de l’acceptation d’un barème d’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse désormais plafonné !

DR