Surveillance des épidémies d’arbovirose : le Val-de-Marne au cœur de l’épicentre

Publié le 07/11/2024
Surveillance des épidémies d’arbovirose : le Val-de-Marne au cœur de l’épicentre
saccobent/AdobeStock

L’implantation du moustique tigre en Île -de-France est un facteur de risque d’épidémies vectorielles comme comme la dengue, le chikungunya ou encore le zika. Dès 2023 un premier cas autochtone de dengue a été signalé dans le Val-de-Marne. Le point sur la surveillance épidémiologique au sein du département du Val-de-Marne (94).

Dans un contexte de changement climatique et de mondialisation des échanges, les maladies vectorielles ont tendance à apparaître dans des secteurs géographiques épargnés jusqu’alors, ou, comme le paludisme, à réapparaître dans des secteurs où elles avaient disparu. Une maladie vectorielle est transmise par un vecteur, souvent un arthropode se nourrissant de sang, tel le moustique. En piquant une personne ou un animal infecté, il ingère les parasites, virus ou bactéries contenus dans le sang. Après un délai d’incubation de quelques jours, l’insecte contaminé peut transmettre l’agent pathogène à une personne saine à l’occasion d’une autre piqûre. Chaque année, des voyageurs infectés revenant de pays où sévissent ces maladies (océan indien, Antilles, Guyane et Asie du Sud-est en particulier), sont susceptibles d’introduire ces virus en métropole.

Implantation du moustique tigre en métropole

L’installation du moustique Aedes albopictus (communément appelé « moustique tigre ») contribue au développement de ces pathologies. Il est notamment présent dans les départements français de l’océan indien où il a provoqué une très importante épidémie de chikungunya en 2006. Sa première installation en métropole a été constatée en 2004 à Menton. Depuis le 1er janvier 2024, le moustique tigre est implanté durablement dans 78 départements de métropole. Il est également présent à la Réunion et à Mayotte. Dans les départements français d’Amérique (Guadeloupe, Martinique, Guyane), le vecteur à l’origine des principales épidémies de dengue, de fièvre jaune, de chikungunya et, depuis fin 2015, de Zika est le moustique Aedes aegypti. Certaines espèces de moustiques autochtones peuvent également être vectrices du virus du Nil occidental (West Nile virus), ou de parasites responsables du paludisme. Les vecteurs du paludisme sont des moustiques du genre Anophèle. À ce jour, il n’y a plus de transmission locale du paludisme en France, excepté à Mayotte et en Guyane.

Le Val-de-Marne, particulièrement touché

Les autorités surveillent l’implantation de ce moustique en France métropolitaine en raison de sa capacité de transmettre des maladies tropicales après avoir piqué des personnes malades. Depuis le 1er janvier 2020, l’ensemble des départements du territoire métropolitain est considéré comme à risque d’implantation et de développement du moustique tigre. Ce moustique tropical est désormais implanté sur une grande partie du territoire métropolitain. Il est présent dans 78 départements sur 96. Le moustique tigre est présent et actif dans tous les départements d’Île-de-France.

La surveillance épidémiologique mise en place permet de classer chaque département selon cinq niveaux d’alerte, allant du vert au pourpre, ce dernier représentant le niveau le plus critique. La totalité des départements de la région francilienne sont en vigilance rouge, ce qui signifie que le moustique tigre y est implanté et actif. Le Val-de-Marne se singularise puisqu’il est en vigilance pourpre, ce qui signifie que des cas autochtones de maladie vectorielles ont été recensés dans le département. En octobre 2023, l’ARS a, en effet, confirmé un premier cas autochtone de dengue au sein du département, une situation inédite en Ile-de-France. Un cas est défini comme autochtone lorsque la personne contracte la maladie sans avoir voyagé en zone d’endémicité dans les quinze jours précédant l’apparition des symptômes. Deux campagnes de démoustication successives, dont l’objectif est de réduire le risque de propagation de la dengue ont été engagées dans le département, dans la commune de Limeil-Brévannes. Elles ont été couplées à une enquête de terrain comprenant du porte à porte auprès des riverains pour détecter d’autres cas potentiels et relayer les messages de prévention.

Renforcement du dispositif de lutte anti-vectorielles au sein du Val-de-Marne

L’ARS Île-de-France est responsable de la mise en œuvre d’actions de surveillance des moustiques tigres et de lutte anti-vectorielle sur le territoire francilien. Renforcé du 1er mai au 30 novembre, le dispositif a pour objectif de prévenir la prolifération des moustiques tigres et d’empêcher la propagation des maladies. Ce dispositif est actif sur l’ensemble de la région et régi par arrêtés du ministère de la Santé, déclinés au niveau local en concertation avec les préfectures et les collectivités locales. Il s’appuie sur les actions de l’agence régionale de démoustication (ARD) : surveillance entomologique, surveillance épidémiologique et sensibilisation des personnes résidant dans les zones où la présence du moustique est avérée. Ces opérations s’inscrivent dans le cadre du dispositif de lutte contre la dissémination du moustique Aedes albopictus en France métropolitaine fixé par l’instruction n° DGS/VSS1/2019/258 du 12 décembre 2019 et le décret n° 2019-258 du 29 mars 2019 relatif à la prévention des maladies vectorielles. Trois arrêtés du 23 juillet 2019 sont venus préciser les compétences de l’Agence régionale de santé ainsi que les modalités de mise en œuvre des missions de surveillance entomologique, d’intervention autour des détections et de prospection, traitement et travaux autour des lieux fréquentés par les cas humains de maladies transmises par les moustiques vecteurs et la liste des départements où l’implantation du moustique tigre constitue une menace pour la santé de la population.

Un risque assez élevé d’épidémie

Les cas de dengue et de chikungunya ont augmenté ces dernières années en France hexagonale. Depuis le 1er janvier 2024, en France métropolitaine, plus de 1 679 cas de dengue ont été importés en métropole, contre 131 cas sur la même période en 2023. Dans une expertise publiée le 13 septembre 2024, l’Anses estime que la probabilité d’apparition d’une épidémie d’arbovirose, tout virus confondu, dans les cinq prochaines années est assez élevée. La dengue, comme le chikungunya ou le Zika, est une arbovirose, c’est-à-dire une maladie due à un virus transmis par des arthropodes vecteurs. En cas d’épidémie, les moyens de prévention et de contrôle des arboviroses pourraient être rapidement saturés. La gestion de cas d’arboviroses, qu’ils soient importés ou autochtones, requiert des moyens matériels, financiers et humains importants. La survenue d’une épidémie pourrait avoir un impact sanitaire ainsi qu’économique et social, notamment sur les secteurs de la santé et du tourisme, conclut l’Anses.

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