Le 94 accélère sa politique cyclable pour répondre au défi climatique

Publié le 27/12/2024
Le 94 accélère sa politique cyclable pour répondre au défi climatique
Gautierbzh/AdobeStock

Le département du Val-de-Marne a pour ambition de devenir « le premier département écologique d’Île-de-France ». Pour cela, des arbres sont plantés par milliers, des panneaux solaires sont installés en masse, et une politique volontariste est menée pour développer la pratique du cyclisme. Le point avec Françoise Lecoufle, vice-présidente du conseil départemental en charge des infrastructures routières. Entretien.

Actu-Juridique : Depuis quand le département du Val-de-Marne cherche-t-il à développer la pratique du vélo ?

Françoise Lecoufle : Le Val-de-Marne mène depuis de nombreuses années une politique en faveur de la pratique du vélo au travers du Schéma départemental des itinéraires cyclables (SDIC). Face aux défis écologiques et économiques, le département porte une ambition forte : que chaque Val-de-Marnais puisse avoir accès à une solution de mobilité propre pour ses déplacements. La pratique du vélo en constitue une alternative majeure. Pour répondre aux défis climatiques et de santé publique, le département s’est fixé comme objectif d’accélérer sa politique cyclable. Une stratégie vélo départementale a été adoptée en décembre 2023 avec pour objectif d’atteindre 660 km d’itinéraires cyclables, dont 450 km d’ici 2030. La stratégie vélo s’appuie sur une hiérarchisation du réseau, avec des axes structurants reliant les grands pôles urbains et des itinéraires de rabattement vers les gares et les lieux de vie. Elle est établie aussi en cohérence avec le plan vélo de la région Île-de-France et celui de la métropole du Grand Paris. Les itinéraires cyclables précis sont définis en concertation avec les collectivités locales et les associations d’usagers. Pour financer sa politique cyclable, le département a prévu un investissement d’environ 12 à 17 millions d’euros par an (au lieu de 7 millions d’euros avant 2023) en très grande partie dédié à la construction d’aménagements. Ces investissements peuvent être cofinancés par l’État, la région et la métropole et comprennent aussi le soutien financier du département vis-à-vis des communes pour la réalisation d’aménagements cyclables.

AJ : Quel est le bilan, un an plus tard ?

Françoise Lecoufle : Le département a déjà sécurisé plusieurs axes et poursuivi les efforts de résorption des coupures cyclables, avec des réalisations emblématiques : la passerelle entre le pont Mandela et les berges de Seine à Charenton-le-Pont ou l’aménagement d’un giratoire à la hollandaise sur le carrefour Pompadour à Créteil, par exemple. Un an après l’adoption de la stratégie vélo, malgré l’impact des Jeux olympiques sur les calendriers, plusieurs projets structurants vont se concrétiser cet automne avec le démarrage de chantiers sur la RD120 à Vincennes et Saint-Mandé, la RD4 à Joinville-le-Pont, et la RD6 à Charenton-le-Pont.

AJ : Les Val-de-Marnais se déplacent-ils beaucoup à vélo ?

Françoise Lecoufle : Si les chiffres précis de fréquentation à l’échelle départementale sont encore à affiner, il faut noter une augmentation de 80 % de l’usage du vélo sur certaines portions du département entre 2019 et 2020. Sur certains axes aux portes de Paris, on dénombre plus de 3 000 cyclistes par jour, comme au Kremlin-Bicêtre, à Ivry-sur-Seine, Charenton-le-Pont ou Saint-Mandé. Il est primordial de répondre à leurs besoins et d’accompagner cette évolution. Le réseau cyclable est en expansion, les infrastructures – stationnements, continuités d’itinéraires, rénovation des pistes existantes – sont en train d’être améliorées. Des milliers de places de stationnement vélo seront créées sur les nouveaux pôles des gares du Grand Paris Express (M14, M15). L’objectif du département, inscrit dans la stratégie vélo, est d’atteindre 9 % de part modale pour le vélo en 2030. La marge de progression est donc encore très importante.

AJ : Le département mène également des actions de sensibilisation au cyclisme. En quoi consistent-elles ?

Françoise Lecoufle : Le département mène des actions ciblées pour promouvoir la pratique du vélo, notamment auprès des collégiens, des personnes âgées et en situation de handicap, avec des ateliers, des formations à la pratique et des projets d’insertion sociale par le vélo. À titre d’exemple, le département accompagne la pratique du vélo (et des trottinettes) auprès des collégiens au travers d’actions telles que le vélo-école, des séances de remise en selle, l’identification des itinéraires vers les collèges, des ateliers d’autoréparation… Le département soutient également les acteurs de l’économie sociale et solidaire pour favoriser l’usage du vélo par les publics les plus fragiles, et notamment des personnes en insertion sociale et professionnelle, en leur permettant d’acquérir des vélos, et ainsi favoriser l’accès à l’emploi et à la formation. Afin de rendre le vélo accessible à tous, le département s’engage également à cibler ses aides à l’économie sociale et solidaire autour des mobilités actives, du réemploi et de l’économie circulaire, afin de soutenir des initiatives telles que les recycleries vélo, la cyclologistique de proximité, les chantiers d’insertion de réparation de vélos, les vélo-écoles… Enfin, le département favorise la pratique du vélo adaptée aux personnes en situation de handicap, et les personnes âgées, au travers de financements dédiés. En effet, certaines discontinuités d’itinéraires peuvent constituer un frein important à la pratique du vélo pour ces publics.

AJ : Le 94 ambitionne de devenir le « premier département écologique d’Île-de-France ». Que recouvre cette expression ?

Françoise Lecoufle : Lors de la campagne des élections départementales de juin 2021, le nouvel exécutif a pris l’engagement de faire du Val-de-Marne un département de référence en matière de qualité de vie afin d’améliorer son attractivité. Ainsi, dès la première séance de l’Assemblée départementale en octobre 2021, le département a adopté le plan 50 000 arbres qui consiste à planter 50 000 nouveaux arbres partout sur le territoire d’ici à la fin du mandat. À la fin de la saison de plantation 2024-2025, 50 % de l’objectif devrait être atteint. Le département a également engagé en 2022 l’élaboration d’un Schéma directeur de transition énergétique du patrimoine bâti départemental (SDTE), qui sert de boussole pour faire preuve d’une plus grande sobriété énergétique dans les équipements départementaux et pour engager des travaux de construction neuve à haute performance environnementale ou de rénovation énergétique très exigeants. Le SDTE fixe également des objectifs sans précédent en matière de recours aux énergies renouvelables, notamment en posant des panneaux solaires photovoltaïques et en multipliant les raccordements de nos équipements, quand cela est possible, au réseau de chaleur urbain (géothermie). Aujourd’hui, plus de 7 000 mètres carrés de panneaux solaires sont posés sur 12 équipements départementaux, permettant une production électrique équivalente à la consommation moyenne de 6 collèges. Concernant le raccordement des équipements à la géothermie, 11 bâtiments départementaux supplémentaires ont été raccordés depuis 2021. En 2025, il est notamment prévu de raccorder à la géothermie la préfecture et l’hôtel du département.

AJ : Qu’en est-il de la protection des espaces naturels ?

Françoise Lecoufle : Le département valorise les atouts écologiques du Val-de-Marne. Ainsi, le parc départemental du Coteau à Arcueil/Gentilly a été classé en Espace naturel sensible (ENS) tout en incluant les 600 mètres linéaires de la Bièvre renaturée. Grâce à cet outil juridique, cet espace vert situé en milieu dense sera durablement préservé de toute urbanisation. Des perspectives similaires sont à l’étude, par exemple le domaine du Château des Rêts à Chennevières-sur-Marne. Encore plus ambitieux, le département a adopté, en octobre 2024, un périmètre de protection des espaces agricoles et naturels, élaboré en étroite concertation avec les 16 communes et les 2 établissements publics territoriaux concernés. Le Val-de-Marne est ainsi le premier département francilien à avoir sanctuarisé 4 177 hectares, soit 17 % de son territoire, pour empêcher leur urbanisation, l’étalement urbain et ainsi les préserver durablement. Faire du Val-de-Marne une référence écologique, c’est aussi adapter le département aux effets du dérèglement climatique, en particulier lors des épisodes de canicule. Les actions en faveur du retour de la baignade dans la Marne et la Seine se sont amplifiées. Grâce aux Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024, les travaux que nous avons menés et que nous poursuivons se sont accélérés, notamment de la mise en conformité des mauvais réseaux d’assainissement. Le département a aussi livré en avril dernier une station de dépollution des eaux pluviales à Champigny-sur-Marne dont la particularité est de rejeter directement dans la Marne des eaux de pluie propres à 99,9 %. L’ensemble des actions et objectifs visant à rendre le Val-de-Marne plus résilient a été compilé dans une stratégie climat départementale adoptée en juin 2024.

Il convient de préciser que sur bon nombre de politiques publiques, le département est accompagné financièrement par la région Île-de-France à hauteur de 50 millions d’euros et par la métropole du Grand Paris à hauteur de 20 millions d’euros.

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