Intérêt à agir du contribuable local et recours en invalidité du contrat

Publié le 28/08/2020

Pour démontrer un intérêt à agir dans le cadre d’un recours Tarn-et-Garonne, le contribuable local doit établir que le contrat administratif ou certaines de ses clauses « sont susceptibles d’emporter des conséquences significatives sur les finances ou le patrimoine de la collectivité ».

Cette solution retenue par l’arrêt Le Monnier s’inspire particulièrement de la jurisprudence Casanova de 1901. Bien que favorable au contribuable local, elle n’en demeure pas moins contradictoire avec la jurisprudence Département du Tarn-et-Garonne. En outre, la question des moyens invocables par le contribuable local demeure irrésolue et les limites inhérentes au recours en invalidité du contrat des tiers rendent ce dernier toujours peu attractif pour les contribuables locaux.

CE, 27 mars 2020, no 426291

Bien qu’il ait été rendu il y a 6 ans, l’arrêt Département du Tarn-et-Garonne1 n’a pas encore révélé tous ses aspects. L’arrêt Le Monnier et autres, n° 426291, lu le 27 mars 2020, est l’occasion pour le Conseil d’État de statuer, pour la première fois, sur un recours en invalidité du contrat formé par des contribuables locaux et de caractériser l’intérêt à agir de ces derniers.

L’EPCI Métropole du Grand Nancy a conclu, en 2011, un contrat de concession de service d’une durée de 30 ans avec les sociétés Enedis et EDF. Un avenant a été conclu en 2015 afin de modifier des clauses relatives à l’indemnité versée aux cocontractants en cas de résiliation unilatérale par l’EPCI et de préciser quels biens concédés pourront bénéficier de l’application ou non du régime des biens de retour.

Des tiers ont formé un recours en invalidité du contrat contre cet avenant en se prévalant de leur qualité de contribuables locaux. La cour administrative d’appel de Nancy, qui n’a pas relevé expressément la qualité de contribuable local des requérants mais uniquement celle d’usager du service public concédé, a considéré que les requérants devaient démontrer que les clauses devaient affecter « de façon significative les finances ou le patrimoine de la Métropole du Grand Nancy » pour leur reconnaître un intérêt à agir et les a déboutés. Ces derniers se pourvoient en cassation contre cette décision.

Néanmoins, avant que le Conseil d’État ne statue, le contrat litigieux a été résilié unilatéralement par la Métropole du Grand Nancy. L’EPCI a alors présenté devant le Conseil d’État des conclusions à fin de non-recevoir au motif que la résiliation privait d’objet le pourvoi formé.

L’affaire soulève deux questions. La première concerne les tiers au contrat. Il s’agit de savoir si un recours Tarn-et-Garonne est recevable lorsque le contrat litigieux est résilié. La seconde concerne la caractérisation de l’intérêt à agir des contribuables locaux dans le cadre de ce recours.

Le Conseil d’État a rejeté les conclusions à fin de non-recevoir de l’EPCI en considérant simplement que la résiliation d’un contrat ne fait pas perdre à un recours Tarn-et-Garonne son objet. Concernant l’intérêt à agir des contribuables locaux dans le cadre de ce même recours, le Conseil d’État rend un arrêt qui sera sans doute de principe. Il considère que le contribuable local démontre un intérêt lésé s’il parvient à établir que le contrat ou les clauses litigieux « sont susceptibles d’emporter des conséquences significatives sur les finances ou le patrimoine de la collectivité ». Il précise également, contrairement à l’arrêt de la cour administrative d’appel, qu’une clause peut avoir des répercussions financières y compris lorsque sa mise en œuvre est « incertaine ».

L’arrêt Le Monnier apporte de nouvelles précisions sur le recours Tarn-et-Garonne. Ces précisions, au seul regard de l’effectivité de ce recours, semblent, au premier abord, satisfaisantes pour le contribuable local (I). Toutefois, en reconnaissant au contribuable local un intérêt à agir semblable à celui qui lui est reconnu dans le recours pour excès de pouvoir, l’arrêt Le Monnier semble démontrer que le recours Tarn-et-Garonne n’est pas totalement adapté au cas des contribuables locaux (II).

I – Une décision favorable pour le contribuable local

Le Conseil d’État devait répondre à deux questions nouvelles. Le rejet des conclusions à fin de non-recevoir, bien qu’attendu, est très satisfaisant pour les requérants (A). Quant à l’appréciation de l’intérêt lésé des contribuables locaux, elle pourrait satisfaire, du moins partiellement, une part de la doctrine qui était très critique quant à l’effectivité du recours Tarn-et-Garonne (B).

A – La recevabilité d’un recours Tarn-et-Garonne contre un contrat résilié

Une des questions posées par l’arrêt Le Monnier est de savoir si un recours Tarn-et-Garonne perd son objet et doit être rejeté lorsque le contrat objet de ce recours a été résilié. Le Conseil d’État dans l’arrêt Le Monnier répond négativement à cette question. Cette position confirme la jurisprudence relative aux effets des actes juridiques dans le temps. Le Conseil d’État a précisé, dans un récent arrêt, que l’arrivée à terme d’un contrat administratif ne fait pas obstacle à son annulation2. L’arrêt Le Monnier n’est pas sans rappeler la décision Association SOS Racisme – Touche pas à mon pote, concernant les recours pour excès de pouvoir formés contre les actes administratifs unilatéraux abrogés, lorsque leurs effets subsistent3.

La résiliation unilatérale d’un contrat ne peut pas priver d’objet un recours Tarn-et-Garonne lorsque le requérant demande l’annulation du contrat. La question peut toutefois se poser plus pertinemment lorsque le requérant ne demande que la résiliation judiciaire du contrat administratif. En théorie, le contrat ayant déjà été résilié, le recours en invalidité des contrats doit être considéré comme irrecevable. Cependant, les causes et les conséquences, notamment indemnitaires, d’une résiliation unilatérale pour motif d’intérêt général et d’une résiliation judiciaire diffèrent sensiblement. Ces différences peuvent motiver la recevabilité du recours afin de permettre au juge administratif de résilier judiciairement le contrat.

La résiliation unilatérale d’un contrat administratif pourrait également avoir une incidence sur un recours indemnitaire formé, par exemple, par un concurrent évincé. L’estimation du gain manqué de ce dernier pourrait en effet être amoindrie si le contrat administratif était résilié. Il en serait probablement de même pour un usager d’un service public concédé si la concession avait pour conséquence une augmentation des redevances. Il convient aux tiers intéressés de ne pas négliger l’impact que peut avoir la résiliation du contrat lorsqu’ils forment un recours Tarn-et-Garonne.

B – La caractérisation de l’intérêt à agir des contribuables locaux formant un recours Tarn-et-Garonne

L’arrêt Le Monnier apporte des précisions intéressantes quant à la définition de l’intérêt lésé des contribuables locaux. Jusqu’à présent, seuls les tribunaux administratifs et les cours administratives d’appel ont eu l’occasion de s’intéresser à de tels recours formés depuis l’arrêt Tarn-et-Garonne. Le Conseil d’État considère désormais qu’un contribuable local voit son intérêt lésé lorsque le contrat litigieux ou certaines de ses clauses « sont susceptibles d’emporter des conséquences significatives sur les finances ou le patrimoine de la collectivité ».

Le Conseil d’État semble adopter une conception plutôt objective de l’intérêt lésé du contribuable local. Des conceptions plus subjectives, notamment l’exigence d’un impact direct sur les impôts locaux que certains auteurs avaient envisagé4 et que certains juges du fond avaient admis5, étaient envisageables mais n’ont pas été retenues.

La solution retenue s’inspire de la proposition formulée par le rapporteur public Dacosta dans ses conclusions sur l’arrêt Tarn-et-Garonne. Il a considéré que le contribuable local voyait son intérêt lésé lorsque « l’exécution est susceptible de peser de façon significative sur les finances locales »6. Mais surtout, la solution se rapproche particulièrement de la jurisprudence Casanova7 de 1901 qui admet le recours pour excès de pouvoir des contribuables locaux contre les actes unilatéraux ayant une incidence sur les finances publiques de la collectivité territoriale. Les conclusions du rapporteur public Le Corre8 se sont particulièrement intéressées à la solution retenue par la jurisprudence Casanova.

Les conclusions prennent notamment en compte le fait que la jurisprudence Decuty9, ayant ouvert aux contribuables locaux l’ancien recours Martin10, trouvait sa source dans la jurisprudence Casanova. Elles retracent l’évolution de cette dernière jusqu’à l’arrêt Commune de Rivedoux-Plage de 2016 qui restreignait l’intérêt à agir des contribuables locaux en rejetant les recours contre les actes unilatéraux ayant une incidence minime sur les finances publiques11. Pour Madame Le Corre, la reconnaissance de cet intérêt à agir du contribuable local doit, au vu de l’évolution de la jurisprudence Casanova, remplir deux conditions, à savoir « une condition de probabilité et une condition de taille, aucune ne devant aboutir à un résultat nul ». De fait, la jurisprudence Casanova, bien que pensée uniquement dans le cadre du recours pour excès de pouvoir, a directement et considérablement inspiré l’arrêt Le Monnier.

Cette position est favorable pour le contribuable local. Le contrat, par définition, suppose une dépense et a un impact sur les finances publiques. La question de la probabilité ne vaudra que pour certaines clauses très particulières. Le Conseil d’État a par ailleurs précisé en l’espèce que les clauses litigieuses permettaient au juge, malgré leur caractère « incertain », d’apprécier leur impact sur les finances publiques et caractérisaient la lésion de l’intérêt du contribuable. La « condition de taille » en revanche laisse supposer qu’il sera délicat pour le contribuable local de former un recours en cette seule qualité pour des contrats d’un faible montant ou encore si l’élément vicié n’a qu’un impact très limité sur les finances publiques. Malgré cette restriction, le contribuable local n’aura pas de difficultés particulières pour démontrer l’existence d’un intérêt lésé en formant un recours Tarn-et-Garonne.

Il conviendra cependant de relever un certain degré de subjectivité qui ne porterait pas tant sur le contribuable que sur la collectivité même. Toutes les collectivités territoriales ont leurs spécificités juridiques, financières et patrimoniales. Ainsi, l’intérêt à agir retenu en l’espèce pour un contribuable communal pourra ne pas l’être pour le contribuable d’une autre commune, qui dispose de plus de moyens par exemple. Il convient au requérant de se montrer prudent. Dans un tel contentieux, « il n’y a pas de seuil financier au-delà duquel l’intérêt pour agir du contribuable serait automatiquement admis »12.

Toutefois, cela signifie que le juge administratif n’apprécie pas la situation du requérant contribuable local de manière subjective. Seule la situation patrimoniale et financière de la collectivité territoriale fait l’objet d’une telle appréciation. La formulation du Conseil d’État ne révèle pas l’existence d’un préjudice direct pour le contribuable local. Il s’agit avant tout pour ce dernier de démontrer au juge administratif que le contrat porte préjudice financièrement à l’administration contractante. Alors que le recours Tarn-et-Garonne était élaboré pour permettre aux tiers de faire valoir leurs intérêts lésés par un contrat administratif, le juge administratif reconnaît que le contribuable local formant un tel recours doit démontrer que son intérêt est lésé lorsque celui de la collectivité est également lésé. Ce qui peut laisser dubitatif.

Contrat

II – Un recours toujours peu adapté pour le contribuable local

Si la position du Conseil d’État permet de garantir, dans une certaine mesure, l’effectivité du recours en invalidité du contrat formé par un contribuable local, il n’en demeure pas moins que l’arrêt Le Monnier s’inscrit difficilement dans la jurisprudence Tarn-et-Garonne. Sur plusieurs aspects, les deux arrêts semblent contradictoires (A). Par ailleurs, l’arrêt Le Monnier n’évoque pas la question des moyens invocables par le contribuable local. Or l’intérêt à agir reconnu à ce dernier rend délicate la résolution de cette question (B).

A – Des contradictions entre l’arrêt Le Monnier et l’arrêt Tarn-et-Garonne

Plusieurs aspects de l’arrêt Le Monnier semblent contredire soit la lettre, soit l’esprit de la jurisprudence Tarn-et-Garonne. On peut tout d’abord noter entre les deux arrêts une contradiction concernant l’intérêt lésé. Le contrat ne lèse pas directement les intérêts du contribuable local mais ceux de la collectivité territoriale. Or la jurisprudence Tarn-et-Garonne exige bien du requérant qu’il démontre que le contrat administratif lèse « ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine ». Certes, le terme « suffisamment » suppose de nuancer les choses. Il n’est pas attendu du requérant qu’il démontre un intérêt purement direct et certain. Cependant l’intérêt lésé du contribuable local reconnu dans l’arrêt Le Monnier semble bel et bien indirect. Pour défendre ses intérêts, il doit défendre les intérêts de la collectivité territoriale en démontrant un impact négatif sur les deniers publics ou le patrimoine de cette dernière et non un impact sur sa situation personnelle, notamment sa situation fiscale.

Ce point a son importance concernant une potentielle demande d’indemnisation d’un préjudice. Ce n’est pas le contribuable local qui subit directement un préjudice mais l’administration locale contractante. Le préjudice du contribuable local n’est qu’indirect puisqu’il ne se reflétera que dans l’hypothèse d’une hausse des impôts locaux résultant des pertes occasionnées par un contrat. Dès lors, le contribuable local ne peut demander une indemnisation dans le cadre d’un tel recours. Il ne pourra demander que l’annulation ou la résiliation du contrat. Le juge administratif est dès lors conduit à contrôler uniquement la validité du contrat, ce qui est paradoxal puisqu’il dispose dans le cadre de ce recours Tarn-et-Garonne de la plénitude de ses pouvoirs.

De cette contradiction naît également un problème pratique. Le requérant est obligé de recourir à un avocat lorsqu’il forme un recours de plein contentieux13 contrairement au recours pour excès de pouvoir. Malgré un potentiel remboursement des frais irrépétibles, ceci peut être de nature à décourager les contribuables locaux à former un recours Tarn-et-Garonne, le ministère d’avocat étant « un puissant levier financier de restriction de l’accès au juge »14. La perception d’indemnités, même faibles, aurait pu contrebalancer une telle dépense et encourager le contribuable local à former un recours Tarn-et-Garonne.

De plus, les chances d’obtenir l’annulation d’un contrat administratif dans le cadre du recours Tarn-et-Garonne sont très faibles. Le juge ne peut annuler un contrat administratif que s’il est entaché d’un vice d’une particulière gravité caractérisé « notamment » par l’intention délictuelle de la part de la collectivité15. Il ne peut pas davantage annuler ou résilier le contrat administratif si une telle décision porte une atteinte plus grande à l’intérêt général que le maintien du contrat vicié16. Si les chances pour le contribuable local d’obtenir une indemnisation semblent nulles, celles de voir le contrat annulé ou même résilié ne semblent guère plus importantes.

De fait, l’arrêt Le Monnier, en s’abstenant de retenir un intérêt lésé trop subjectif pour ne pas fermer aux contribuables locaux le recours Tarn-et-Garonne, semble trahir partiellement l’esprit de ce recours. Des difficultés d’articulation entre les deux arrêts apparaissent également lorsque sont observés les moyens potentiellement invocables par le contribuable local.

B – Des doutes sur les moyens invocables par le contribuable local

Le contribuable local, contrairement au préfet et à l’élu local, reste un « tiers ordinaire » au contrat administratif. Les moyens qu’il peut invoquer dans le cadre du recours Tarn-et-Garonne, outre ceux d’ordre public, sont de ce fait restreints aux seuls vices en lien avec son intérêt lésé. L’espèce donne des exemples de moyens invocables par les contribuables locaux tels que les clauses relatives aux biens de retour et à l’indemnisation du cocontractant en cas de résiliation unilatérale. L’arrêt n’apporte cependant aucune précision plus générale et éclairante. On ne peut que supposer quels peuvent être les moyens en lien avec l’intérêt lésé du contribuable local.

En théorie, le contribuable local pourrait justifier d’un intérêt lésé si l’Administration violait les principes fondamentaux de la commande publique. Ces principes ont pour objectif, en partie, de préserver les deniers publics. Il pourrait ainsi soulever les manquements aux obligations de publicité et de mise en concurrence des marchés publics et des concessions.

Il est en revanche probable que le requérant ne puisse justifier d’un intérêt lésé si le vice n’est pas lié directement aux finances publiques ou au patrimoine de l’administration territoriale. Ainsi, le contribuable local ne pourra probablement pas invoquer les manquements au droit environnemental ou la très grande majorité des clauses viciées figurant dans un cahier des clauses techniques particulières, y compris en démontrant que ces clauses illicites entraîneraient un surcoût pour la collectivité. Ces clauses illicites et ces atteintes au droit environnemental n’auront probablement qu’un effet négatif indirect, et très incertain, sur le patrimoine de la collectivité.

Cette restriction des moyens invocables par les tiers au contrat administratif est très critiquée par la doctrine car elle porte atteinte à l’effectivité du recours en invalidité des contrats qui serait « émasculée »17, reléguant les tiers « au rang peu enviable d’éternels étrangers »18. Mais elle devient encore plus critiquable à la lumière de l’arrêt Le Monnier. Cette limitation des moyens invocables par le requérant pouvait potentiellement se justifier, selon le rapporteur public Dacosta dans ses conclusions sur l’arrêt Tarn-et-Garonne, par le fait qu’il s’agit d’un recours de plein contentieux subjectif. Le requérant doit défendre ses intérêts privés et n’est de fait pas garant du principe de légalité.

Or le contribuable local n’est pas garant de la légalité mais ne défend pas non plus ses intérêts personnels. L’approche opérée par le rapporteur public Dacosta semble difficilement applicable au contribuable local compte tenu de l’intérêt à agir qui lui a été reconnu. Il ne semble être ni un tiers ordinaire ni un tiers privilégié. De fait, il serait tout aussi contestable de restreindre les moyens qu’il pourrait invoquer que de lui reconnaître la possibilité de soulever tout moyen.

Une autre approche peut être défendue. La jurisprudence Le Monnier s’inspire particulièrement de la jurisprudence Casanova. Il serait intéressant de s’en inspirer également concernant les moyens invocables. Dans sa note de jurisprudence, Maurice Hauriou considérait que l’arrêt Casanova permettait au recours pour excès de pouvoir d’être « ce qu’il fut toujours essentiellement, un moyen de bonne administration » permettant, en évoquant les collectivités territoriales, de « sauvegarder leurs finances »19.

Il serait peu opportun, à la lumière de l’arrêt Le Monnier, de considérer qu’il devrait en être autrement du recours en invalidité des contrats, même s’il s’agit d’un recours de plein contentieux. Le contribuable local n’est pas simplement bénéficiaire du bon usage des deniers publics. Il est également titulaire du droit constitutionnel de « suivre l’emploi » des deniers publics20. Ce droit devrait être garanti par la jurisprudence Tarn-et-Garonne. Le contribuable local devrait, par conséquent, pouvoir relever tout moyen garantissant une « bonne administration » de la collectivité territoriale. Ces moyens invocables seraient quantitativement très importants pour le contribuable local mais permettraient d’accroître ses chances d’obtenir l’annulation du contrat.

Le contribuable local pourrait ainsi bien plus aisément former un recours Tarn-et-Garonne afin de faire contrôler, par le juge administratif, le bon usage des deniers publics dans les contrats conclus par l’Administration. En contrepartie, les contraintes du recours de plein contentieux, notamment le recours obligatoire au ministère d’avocat, seraient probablement suffisantes pour éviter un accroissement indésirable du contentieux. Néanmoins, tant que l’annulation du contrat administratif constituera une mesure juridictionnelle exceptionnelle et que le contentieux contractuel sera principalement indemnitaire, le recours Tarn-et-Garonne ne présentera toujours qu’un intérêt très réduit pour le contribuable local.

Notes de bas de pages

  • 1.
    CE, ass., 4 avr. 2014, n° 358994, Dpt de Tarn-et-Garonne : Lebon, p. 70 ; JCP A 2014, 2152, comm. Sestier J.-F. ; JCP A 2014, 2153, comm. Hul S. ; JCP A 2014, 2329, chron. Le Bot O. ; Contrats-Marchés publ. 2014, repère 5, note Llorens F. et Soler-Couteaux P. ; Dr. adm. 2014, comm. 36, note Brenet F. ; RFDA 2014, p. 425, concl. Dacosta B. ; RFDA 2014, p. 438, note Delvolvé P. ; RDP 2014, p. 1175, n° 5, note Janicot L. et Lafaix J.-F. ; AJDA 2014, p. 1035, note Bretonneau A. et Lessi J.
  • 2.
    CE, 15 mars 2019, n° 413584, SAGEM : Lebon ; AJDA 2019, p. 1459, note Sourzat L.
  • 3.
    CE, 7 avr. 2011, n° 343387, Assoc. SOS Racisme - Touche pas à mon pote : Lebon, p. 155 ; AJDA 2011, p. 1438, note Bailleul D.
  • 4.
    Dyens S., « Le recours Tarn-et-Garonne : quand la sécurité juridique prime sur la légalité », AJCT 2014, p. 375.
  • 5.
    Par ex. TA Lille, 10 févr. 2017, n° 1604226.
  • 6.
    Concl. Dacosta B. sur CE, ass., 4 avr. 2014, n° 358994, Dpt de Tarn-et-Garonne : RFDA 2014, p. 425.
  • 7.
    CE, 29 mars 1901, n° 94580, Casanova : S. 1901.3, p. 73, note Hauriou M.
  • 8.
    Que nous remercions d’avoir accepté de communiquer ses conclusions.
  • 9.
    CE, 19 nov. 1926, n° 86283, Decuty : Lebon, p. 993 ; RDP 1927, p. 54, concl. Cahen-Salvador G.
  • 10.
    CE, 4 août 1905, n° 14220, Martin : Lebon, p. 749 ; S. 1906, III, p. 49, note Hauriou M. ; RDP 1906, p. 249, note Jèze G. ; D. 1907, III, p. 49.
  • 11.
    CE, 1er juin 2016, n° 391570, Cne de Rivedoux-Plage, inédit au recueil Lebon ; AJDA 2016, p. 1614.
  • 12.
    Bonnefont R., « L'intérêt pour agir des contribuables locaux dans le contentieux contractuel », AJCT 2019, p. 400.
  • 13.
    CJA, art. R. 431-2.
  • 14.
    Mamoudy O., « La gratuité de la justice administrative », AJDA 2020, p. 992.
  • 15.
    CE, 21 oct. 2019, n° 416616, Cne de Chaumont : AJDA 2020, p. 684, note Douteaud S.
  • 16.
    À titre d’exemple, CAA Nancy, 17 déc. 2012, n° 11NC00416, Sté Bancel.
  • 17.
    Laffaille F., « La jurisprudence Tarn-et-Garonne ou le tiers “sans qualité” », AJDA 2018, p. 1201.
  • 18.
    Hourson S., « Les gorges étroites de Tarn-et-Garonne », Dr. adm. 2017, comm. 118.
  • 19.
    Hauriou M., note sous CE, 29 mars 1901, n° 94580, Casanova : S. 1901.3, p. 73.
  • 20.
    DDHC, art. 14.
X