Le nouveau droit transitoire administratif

Publié le 13/07/2016

Le Code des relations entre le public et l’Administration est entré en vigueur le 1er janvier 2016. Il se propose notamment de codifier les règles relatives à l’entrée en vigueur des actes administratifs, ainsi que celles portant sur leur application dans le temps. Si l’initiative doit être saluée pour la mise en ordre qu’elle se propose d’accomplir, le contenu du code n’est pas toujours à la hauteur de l’ambition affichée.

Le droit transitoire est une matière complexe, tant en droit privé qu’en droit public. Tous les auteurs1 qui se sont pliés à l’exercice d’une analyse temporelle des normes juridiques en ont souligné la difficulté. Si l’analyse est ardue, la synthèse l’est plus encore. Et pour cause : point de règles générales ici, ni de solutions toutes faites. Les dispositions transitoires édictées par le législateur « ne valent que pour la loi qui les contient, et règlent le conflit de lois dans le temps non pas par des préceptes d’ordre général, mais en procédant cas par cas »2. Cela explique que « l’attitude de la doctrine à l’égard de ces dispositions est, traditionnellement, fort réservée »3. Le rôle de celle-ci a donc été d’ordonner, de mettre en cohérence, en d’autres termes, de chercher les « principes »4 directeurs du droit transitoire. Depuis quelques années maintenant, le scepticisme de départ s’est mué en véritable engouement et de nombreux ouvrages ont consacré tout ou partie de leurs développements à ces questions. Forts de nouveaux outils conceptuels, les juges eux-mêmes se sont saisi du droit transitoire, pour en ciseler plus franchement les contours : que l’on pense ici à l’arrêt KPMG rendu par le Conseil d’État5 ou aux abrogations différées prononcées par le Conseil constitutionnel6 ! Les autorités de production du droit ont ainsi commencé à utiliser, de manière plus systématique, le droit transitoire. Seul le législateur manquait à l’appel.

Le Code des relations entre le public et l’Administration7 lui a fourni l’occasion de s’inscrire au sein de ce mouvement. Véritable « lex generalis des relations du public avec l’Administration »8, le code a pour vocation de définir les « règles transversales »9 de ces rapports. Et parmi celles-ci, se trouvent les règles de droit transitoire, codifiées dans un titre dédié à « l’entrée en vigueur des actes administratifs ». Si ces dernières s’inspirent largement de la jurisprudence du Conseil d’État10, elles innovent néanmoins car, comme ne manque pas de le souligner le Premier ministre dans son rapport au président de la République, « pour la première fois, les obligations qui sont celles de l’Administration en matière de dispositions transitoires sont inscrites dans un texte de niveau législatif »11.

L’adoption du code par voie d’ordonnance a empêché le Conseil constitutionnel de se prononcer, a priori, sur ces dispositions, ce qui aurait pu conduire à confronter l’approche administrativiste à l’approche constitutionnaliste12 du droit transitoire. L’entrée en vigueur du code, au 1er janvier 2016, et la mise en application des dispositions conduira, un jour peut-être, un justiciable à poser une question prioritaire de constitutionnalité, provoquant la rencontre du droit transitoire administratif et droit transitoire constitutionnel devant le prétoire de la rue de Montpensier. Pour l’heure, tel n’est pas le cas. Seule une mise en lumière doctrinale peut venir croiser les approches sur ce point, afin de proposer une lecture critique du nouveau droit transitoire administratif.

Levons dès à présent toute équivoque : l’intitulé du chapitre – « l’entrée en vigueur des actes administratifs » est trompeur. Celle-ci n’en est pas le seul objet13. Les « modalités d’application dans le temps » des actes administratifs y sont aussi traitées. Ce sont donc les deux facettes du droit transitoire qui sont abordées dans le Code des relations entre le public et l’Administration. Le premier aspect du droit transitoire concerne le processus d’entrée en vigueur des normes14. L’interrogation à laquelle le droit transitoire cherche à répondre est alors la suivante : « Comment la norme accède-t-elle à la vie juridique ? ». Il permet de comprendre quelles sont les étapes que doit traverser un texte depuis son existence juridique pour entrer en vigueur et accéder ainsi à la vie juridique pour produire des effets de droit. Le second aspect du droit transitoire est relatif à l’application des normes dans le temps. Dans ce cadre, le droit transitoire vient donner une explication à une nouvelle question : « Une fois la norme entrée en vigueur, à quelles situations juridiques s’applique-t-elle ? ».

Les articles L. 221-2 et L. 221-3 traitent du processus d’entrée en vigueur des actes administratifs ; l’article L. 221-8 l’envisage pour les décisions administratives individuelles. Pour pouvoir étudier ces dispositions, il est nécessaire de garder à l’esprit une difficulté particulière au droit transitoire : l’écueil linguistique. Une partie du problème repose sur les termes employés par les autorités de production du droit, la « variation d’expression » pouvant résulter non seulement des « impératifs contextuels », mais aussi du « style du rédacteur »15. Pour appréhender le processus à l’œuvre, il faut ainsi savoir s’extraire du lexique employé par ces dernières. Un autre aspect du problème résulte des choix opérés par la doctrine dans l’analyse du processus, et particulièrement du fait qu’elle se fonde sur une catégorie de normes en particulier. À cet égard, les lois ont retenu tout l’intérêt des auteurs lorsqu’ils ont cherché à expliquer les « conflits de lois dans le temps »16. Pour s’intéresser au nouveau droit transitoire administratif, il est nécessaire de considérer les lois au sens large, c’est-à-dire les règles de droit ou plutôt, les normes.

Les articles L. 221-4 et suivants sont relatifs aux modalités d’application dans le temps des actes administratifs. Cela signifie que l’application dans le temps des actes administratifs fait l’objet de dispositions particulières au sein du Code des relations entre le public et l’Administration. Ce constat n’est pas banal : c’est bien la première fois qu’un texte fixe, de manière générale, au sein d’un chapitre lui étant spécialement dédié, le cadre temporel de l’application des normes.

Avec le Code des relations entre le public et l’Administration, le droit transitoire est saisi, de manière globale, pour la première, par le législateur. Les choix effectués quant à ce nouveau droit transitoire administratif ne sont pourtant pas tous judicieux, qu’ils concernent le processus d’entrée en vigueur des actes administratifs (I) ou l’application dans le temps des actes administratifs (II).

I – Le processus d’entrée en vigueur des actes administratifs

Le Code des relations entre le public et l’Administration met en évidence la difficulté d’appréhender le processus d’entrée en vigueur des normes, et fournit l’opportunité d’en retracer, de manière plus cohérente les contours. Le législateur a, en effet, fait le choix de distinguer la manière dont les actes administratifs réglementaires, d’une part, et les décisions administratives individuelles, d’autre part, entraient en vigueur. Au-delà de la « variation d’expression », se trouve une véritable différence de perspective. Or cette distinction ne se justifie pas, car toutes les normes entrent en vigueur de la même manière, qu’il s’agisse des lois, des actes administratifs réglementaires, ou encore des décisions administratives individuelles.

Les fondements de la différenciation opérée par le législateur doivent être mis en évidence (A), afin d’en tirer les conséquences nécessaires quant à la mise en cohérence du processus d’entrée en vigueur des différentes normes (B).

A – Les fondements critiquables de la différenciation du processus d’entrée en vigueur des différentes normes

La différenciation du processus d’entrée en vigueur des actes administratifs réglementaires (art. L. 221-2) et des décisions administratives individuelles (art. L. 221-8) résulte de ce que le législateur a réfléchi en fonction de la différence de nature des normes, et non en se fondant sur l’identité du processus d’entrée en vigueur (1). Ne cherchant pas à expliciter celui-ci, il a ainsi introduit des confusions regrettables. À cela s’ajoute un second défaut : le code a tendance à mélanger les étapes du processus d’entrée en vigueur et les effets juridiques qui en résultent (2).

1 – Une approche différenciée critiquable

Pour les actes administratifs réglementaires, l’article L. 221-2 du code se focalise sur l’« entrée en vigueur » proprement dite, dans une formulation qui rappelle, pour les lois, l’article 1er du Code civil. En revanche, pour les décisions administratives individuelles, rien de tel n’apparaît : l’article L. 221-8 énonce simplement qu’« une décision individuelle expresse est opposable à la personne qui en fait l’objet au moment où elle est notifiée ». La comparaison de ces deux articles laisse à penser que les actes administratifs réglementaires entreraient en vigueur d’une manière différente des décisions administratives individuelles. Si la différence de nature entre les uns et les autres est indéniable (a), elle ne saurait justifier une différence de traitement dans leur processus d’entrée en vigueur : celui-ci est identique (b).

a – Une différence de nature indéniable

Actes administratifs réglementaires et décisions administratives individuelles présentent bien une différence de nature17. En effet, les premiers constituent des règles lorsque les secondes sont des décisions18. Comme l’a mis en évidence le professeur Mayer19, les décisions et les règles s’opposent frontalement. Les décisions sont individuelles, concrètes20 et catégoriques21, tandis que les secondes sont générales, abstraites et hypothétiques.

Les caractères des décisions ont emporté des conséquences quant à la manière dont elles sont appréhendées en droit transitoire. Ainsi, « parce qu’elle vise tels faits concrets, la décision n’a pas de caractère permanent. De là vient que son application dans le temps ne soulève que des questions très simples : en particulier, il n’existe pas de véritable conflit de décisions dans le temps »22. C’est pourquoi, la doctrine a étudié les conflits de lois relatifs aux règles, sans s’intéresser aux conflits de lois relatifs aux décisions. Si la question de l’application dans le temps des normes est, en grande partie, dénuée d’intérêt lorsque sont en cause des décisions, celle du processus d’entrée en vigueur ne l’est point.

Le Code des relations entre le public et l’Administration, comme la doctrine du droit transitoire, a dédaigné l’explicitation du processus d’entrée en vigueur des décisions administratives individuelles. Il convient alors de s’interroger sur le bien-fondé d’un tel désintérêt. En d’autres termes, la différence de nature des actes administratifs réglementaires et des décisions administratives individuelles doit-elle fonder une différence d’approche quant au traitement de leur entrée en vigueur ? La réponse soutenue est négative.

b – Une identité du processus d’entrée en vigueur ignorée

La différence de nature entre les actes administratifs réglementaires et les actes administratifs individuels ne saurait en aucun cas fonder une différence de traitement dans leur processus d’entrée en vigueur. Une telle réponse s’inscrit à contre-courant des justifications apportées jusqu’à présent par la doctrine, et notamment par Jacques Héron. Pour ce dernier, « ce qui justifie que toutes ces autorités [investies du pouvoir de poser des textes normatifs] soient considérées comme un législateur au sens du droit transitoire, c’est qu’elles édictent des normes abstraites selon une procédure qui donne lieu à publicité, quelle qu’en soit la forme »23.

La distinction entre normes abstraites et normes concrètes conduit alors l’auteur à mettre expressément de côté l’étude de la jurisprudence24, mais aussi, implicitement, celle des décisions individuelles. Pour autant, au regard de l’argumentation développée par le doyen de Caen, ce n’est pas tant le caractère « abstrait » ou « concret » de la norme qui fonde l’exclusion de la jurisprudence, mais le fait que « le juge est censé révéler une règle qui existait déjà »25, et dont la date est masquée. Aussi, le moment où la norme entre en vigueur ne peut être connu.

À l’inverse, pour les décisions individuelles, la date de création de la norme est identifiable. En conséquence, l’opposition entre les règles et les décisions, mise en avant par la doctrine, n’empêche pas d’exposer (pour le législateur) ni d’étudier (pour la doctrine), le processus d’entrée en vigueur des décisions administratives individuelles.

Il ne semble donc pas judicieux que le code ait distingué l’entrée en vigueur des actes administratifs réglementaires et celle des décisions individuelles, et ce d’autant que cette différenciation est source de confusion quant aux effets qui en sont déduits. Une autre approche aurait ainsi pu être retenue.

2 – Une différenciation entraînant une distorsion quant au processus d’entrée en vigueur

L’article L. 221-2 se concentre sur l’« entrée en vigueur » des actes administratifs réglementaires ; l’article L. 221-8 se rapporte à « l’opposabilité » de la décision individuelle. L’un se concentre sur une étape du processus d’entrée en vigueur de la norme, mais en masque l’effet ; l’autre ne s’intéresse qu’à l’effet, sans s’interroger sur sa cause. Pour clarifier ce paradoxe, il faut ainsi se demander si les différences mises en avant portent à conséquence (a). Puisque tel n’est pas le cas, une distorsion a-juridique du processus d’entrée en vigueur peut être mise en évidence (b).

a – L’existence de différences sans gravité

L’étape initiale du processus d’entrée en vigueur d’une norme est son adoption. Il s’agit, pour les actes administratifs, réglementaires comme individuels, de la signature de l’acte par l’autorité administrative compétente. Ni les articles L. 221-2 et L. 221-8 du Code des relations entre le public et l’Administration pour les actes administratifs, ni l’article 1er du Code civil pour les lois n’en font mention. Ce concept, occulté, est pourtant capital : l’adoption de la norme marque le début de son existence juridique.

Vient ensuite la phase de la publicité du texte. L’article L. 221-2 utilise le terme de « publicité », l’article L. 221-8 de « notification ». La « publicité » est « l’action de rendre public »26 et, ainsi, de faire connaître la norme. Pour les actes réglementaires, elle peut prendre deux formes : la publication, d’une part, et l’affichage, d’autre part. Il est logique que la publicité de la décision individuelle s’opère par le biais d’une simple notification : la décision devant être connue d’une personne ou d’un groupe de personnes seulement, « ce mode de publicité est parfaitement adapté à la nature des normes édictées par ce genre de décisions, lesquelles visent une personne déterminée »27.

Enfin, se produit l’étape finale du processus : l’« entrée en vigueur ». C’est elle qui permet l’entrée de la norme dans l’ordre juridique28, et donc sa conversion en norme « juridique » : elle « détermine le moment où ces actes [administratifs unilatéraux] produisent l’intégralité de leurs effets de droit »29. Or si l’article L. 221-2 traite bien de l’entrée en vigueur des actes administratifs réglementaires, cette notion a entièrement disparu de l’article L. 221-8. Apparaît, toutefois, celle de l’« opposabilité » de la décision administrative individuelle. Là se situe le cœur du problème : affirmer que la décision est opposable revient à considérer qu’elle a force obligatoire… et une décision ne peut avoir force obligatoire que si elle est entrée en vigueur ! D’où la nécessité de clarifier le processus à l’œuvre.

b – L’apparition d’une distorsion a-juridique du processus d’entrée en vigueur

Le premier point à éclaircir est donc celui du moment où la décision individuelle entre en vigueur. De manière logique, une norme ne peut entrer en vigueur avant d’avoir été portée à la connaissance de ses destinataires. En effet, si rétroactivité il existe, celle-ci ne concerne que la question de l’application dans le temps et non le processus d’entrée en vigueur30. L’article L. 221-8 lie l’opposabilité de la décision au procédé de notification. Cette association ne doit pas masquer qu’ont lieu deux étapes : la notification, qui emporte observabilité de la norme, et l’entrée en vigueur, qui lui donne force obligatoire, et donc opposabilité. Cependant, celles-ci sont concomitantes : l’entrée en vigueur a lieu en même temps que la publication.

Cette simultanéité s’explique de la manière suivante. La publication a pour objet de porter la norme à la connaissance de ses destinataires d’une part, et de définir le moment de l’entrée en vigueur de celle-ci, d’autre part. L’étape de la publicité a donc pour effet de rendre la norme observable. Sa fonction est d’indiquer aux destinataires de la norme qu’ils vont être soumis à celle-ci31. Une fois réalisée, elle permet à une autre étape d’advenir : l’entrée en vigueur, qui conférera à la norme sa force obligatoire. Dans le cadre d’une décision individuelle, cette norme s’adresse à une ou plusieurs personnes de manière précise en visant un élément déterminé. Dès lors, il n’y a pas lieu, pour rendre cette norme obligatoire, de ménager un délai – ne serait-ce que d’un jour – entre publicité et entrée en vigueur.

Le second point à démêler est celui des effets de l’entrée en vigueur de la décision individuelle. Ainsi que l’a montré Richard Tremblay, l’entrée en vigueur de l’acte détermine le moment où celui-ci devient obligatoire, c’est-à-dire à la fois invocable par ses destinataires et opposables à eux32. Par facilité, l’article L. 221-8 du code ne traite pourtant que de la seule opposabilité de la norme, évitant de préjuger de l’entrée en vigueur de l’acte en lui-même et par conséquent, de l’ensemble des effets produits par celle-ci.

L’occultation de l’invocabilité laisse suggérer que celle-ci pourrait avoir lieu à un autre moment que celui de la survenue de l’opposabilité. Une partie de la doctrine valide ce dédoublement. Ainsi, pour Jacques Petit, le législateur a codifié la jurisprudence du Conseil d’État selon laquelle les décisions individuelles favorables sont invocables dès la signature de l’acte33 – c’est-à-dire son adoption – alors que les décisions individuelles défavorables ne sont opposables au destinataire que suite à leur notification34 – c’est-à-dire lorsqu’est réalisée la formalité de publicité. Cette explication revient à accepter la dissociation de la force obligatoire de la norme : la décision individuelle serait partiellement obligatoire à partir de la signature de l’acte – elle est invocable – et complètement obligatoire – elle est opposable – à partir de la notification de l’acte.

En termes logiques, cette position mène à la conclusion suivante : la décision individuelle était en vigueur dès l’adoption de l’acte, c’est-à-dire avant même d’être observable. Or cette conclusion est bancale. Seule l’entrée en vigueur de la norme peut rendre celle-ci obligatoire, c’est-à-dire à la fois opposable et invocable, et cette entrée en vigueur se déroule au moment de la notification.

Au vu de ces éléments, s’il est possible de saluer l’entreprise du législateur de codifier les règles d’entrée en vigueur des normes administratives, il n’en demeure pas moins que le résultat n’est qu’en demi-teinte. Satisfaisante pour les actes réglementaires, elle est inadéquate pour les décisions individuelles. Cette distorsion doit mener à réfléchir à une mise en cohérence du processus d’entrée en vigueur des différentes normes.

B – La mise en cohérence nécessaire du processus d’entrée en vigueur des différentes normes

Pour rendre plus cohérent le code, une réécriture de l’article L. 221-8 relatif aux décisions administratives individuelles, est nécessaire afin de paralléliser sa structure avec celle de l’article L. 221-2, relatif aux actes administratifs réglementaires (1) dans la mesure où les deux peuvent être considérés comme des « décisions administratives » au sens que leur confère Benjamin Defoort35. Tout bien considéré, il apparaît qu’une telle entreprise, pour aussi souhaitable qu’elle paraisse, est insuffisante. Partant du constat que les décisions individuelles et les actes réglementaires entrent en vigueur de la même manière parce que l’ensemble des normes étatiques ne peuvent accéder à la vie juridique que d’une seule façon, un « droit de l’entrée en vigueur » des règles juridiques peut être envisagé (2).

1 – La réécriture souhaitable de l’article L. 221-8

La réécriture de l’article L. 221-8 est souhaitable au regard de deux éléments : la compréhension du processus d’entrée en vigueur des décisions individuelles, d’une part (a) ; celle de la manière dont elles s’appliquent dans le temps, d’autre part (b).

a – La réécriture du processus d’entrée en vigueur de l’article L. 221-8

Derrière l’énoncé de l’article L. 221-8 du code, qui énonce qu’« une décision individuelle expresse est opposable à la personne qui en fait l’objet au moment où elle est notifiée », le législateur a, en réalité, voulu préciser qu’« une décision individuelle expresse entre en vigueur au moment où elle est notifiée ». Cette simplification pourrait être prise en considération pour réécrire l’article L. 221-8.

La disposition perdrait cependant une partie de sa substance : celle concernant son application. Car derrière « l’opposabilité » de la décision individuelle se joue en réalité la manière dont celle-ci « prend effet »36 : obligatoire à partir du moment où elle entre en vigueur, elle intègre l’ordonnancement juridique au moment de la notification. Elle devient alors opposable aux destinataires par l’Administration. La décision est-elle, pour autant, invocable plus tôt ? Les destinataires de la norme ne connaissent pas celle-ci avant la notification et, même s’ils ont une idée de sa teneur, notamment s’ils ont eux-mêmes sollicité la décision ou encore si l’Administration a compétence liée, ils ne possèdent aucune certitude. C’est pourquoi, ils ne peuvent s’en prévaloir : la décision n’est donc pas invocable avant la notification. Pour comprendre par quel mécanisme le destinataire de la norme peut se voir appliquer celle-ci avant l’entrée en vigueur, il faut étudier l’autre facette du droit transitoire : l’application dans le temps des normes.

b – La réécriture des modalités d’application dans le temps de l’article L. 221-8

La question de l’invocabilité de la décision individuelle n’a pas de conséquences lorsque la décision est défavorable : elle s’applique entièrement à partir du moment où elle entre en vigueur. En revanche, si cette décision est favorable, le destinataire de la norme pourra demander à ce qu’elle lui soit appliquée dès la signature de l’acte, la jurisprudence du Conseil d’État n’ayant pas été remise en cause. Il n’est donc pas question du processus d’entrée en vigueur de la décision individuelle, mais de son application dans le temps qui peut avoir une applicabilité rétroactive lorsque la norme est favorable à son destinataire.

Pour prendre en compte les modalités d’application dans le temps des décisions individuelles, l’article L. 221-8 du Code des relations entre le public et l’Administration mériterait d’être complété de la manière suivante :

« Une décision individuelle expresse entre en vigueur au moment où elle est notifiée.

Si elle est favorable, le destinataire pourra demander à ce qu’elle lui soit appliquée dès la signature de la décision par l’autorité administrative ».

Reste que la réécriture de l’article L. 221-8 du code ne concerne que les décisions individuelles expresses, à l’exclusion des décisions individuelles implicites. Et pour cause : ces dernières ne sont tout simplement pas notifiées. Pour celles-ci, l’entrée en vigueur s’effectue au moment où le délai – qui court depuis la sollicitation de l’Administration par l’administré – s’est écoulé. Le terme du délai joue ici le même rôle que la notification : il est l’élément de preuve rendant certaine la connaissance de la norme par son destinataire.

La confrontation des règles de droit transitoire relatives aux actes administratifs réglementaires, d’une part, et aux décisions administratives individuelles, d’autre part, conduit à s’interroger sur la pertinence de l’écriture d’un « droit de l’entrée en vigueur » des normes, quelles qu’elles soient.

2 – L’écriture envisageable d’un « droit de l’entrée en vigueur » des normes

Toutes les normes entrent en vigueur selon un même processus, qui peut certes être, le cas échéant, adapté ou complété, mais qui ne varie fondamentalement jamais. Trois étapes se retrouvent pour toutes les normes : l’adoption, la publicité et l’entrée en vigueur. La première phase est décisive pour leur conférer force exécutoire ; les deux suivantes, pour leur donner force obligatoire. Cette identité pourrait conduire à penser un « droit de l’entrée en vigueur » de l’ensemble des normes étatiques.

a – L’identité des processus d’entrée en vigueur des normes

En ce qui concerne l’adoption, il convient de partir d’un constat initial qui fait l’unanimité des analyses doctrinales : l’adoption de la loi comme celle de l’acte administratif (réglementaire ou individuel) marquent le début de leur existence juridique. Ces différentes normes acquièrent-elles force exécutoire à partir de ce moment ?

Pour répondre à cette question, il convient d’observer que la loi, pour entrer en vigueur, doit être promulguée : l’étape de la promulgation s’intercale entre son adoption et sa publication. Pour que la loi acquiert force exécutoire, il faut que deux ordres soient accomplis successivement. Dans un premier temps, l’adoption donne l’ordre au président de la République de promulguer la loi dans un délai de quinze jours. Dans un deuxième temps, la promulgation déclenche la publication de la loi37. À cet égard, le Conseil constitutionnel a énoncé très clairement, dans la décision n° 2001-448 DC, que « la promulgation de la loi par le président de la République vaut ordre à toutes les autorités et à tous les services compétents de publier sans délai »38.

La promulgation est donc un acte d’exécution de la loi. Sa présence dans le processus d’entrée en vigueur permet de comprendre pourquoi, à l’inverse, les actes administratifs ne nécessitent pas cette étape pour accéder à la vie juridique. La promulgation est l’ordre donné aux autorités administratives de prendre en compte la norme avant qu’elle ne devienne obligatoire et qu’elle s’adresse à ses destinataires. L’acte administratif étant pris par l’Administration, celle-ci ne peut s’adresser qu’à des destinataires infra-réglementaires, c’est-à-dire des particuliers. C’est pourquoi son adoption le rend, de lui-même, exécutoire.

Quant à la force obligatoire de l’acte, elle résulte de l’entrée en vigueur de celui-ci, qu’il soit administratif (réglementaire ou individuel) ou législatif. Pour que celle-ci puisse intervenir, une phase préalable doit s’être déroulée : la publicité.

Contrairement à un point de vue partagé par certains membres de la doctrine, la publicité n’a pas pour effet la mise en vigueur de la norme. D’abord, la publicité de l’acte rend celui-ci observable : il est désormais connu de ses destinataires39. Ensuite, elle a pour objet de définir la date d’entrée en vigueur qui a lieu, pour les actes administratifs comme pour les lois, de manière supplétive, le lendemain de l’accomplissement des formalités de publicité, et pour les décisions individuelles, au moment de la notification. Sans cela la norme « s’apparente à un mécanisme de conception parfaite mais qui doit être « actionné » pour produire son effet »40.

L’acte peut alors entrer en vigueur : il devient obligatoire. La norme peut alors « prendre effet », et s’appliquer à ses destinataires.

b – La possible détermination d’un droit de l’entrée en vigueur des normes

Toutes les normes entrent en vigueur selon un même processus : adoption, publicité, entrée en vigueur. Ces trois « temps » remplissent trois fonctions différentes : rendre l’acte exécutoire, rendre l’acte connaissable, rendre l’acte applicable. Deux choses peuvent changer : une ou plusieurs étapes peuvent s’ajouter ; les modalités des étapes peuvent varier. Un droit de l’entrée en vigueur des normes est cependant possible, car si des différences existent, elles peuvent être aisément dépassées.

Tout d’abord, des étapes peuvent s’ajouter. La loi, par exemple, est rendue exécutoire par deux formalités, et non une seule : l’adoption et la promulgation. Que l’on pense aussi au contrôle de constitutionnalité des lois, particulièrement lorsqu’il est obligatoire, ou encore au contrôle de légalité de certains actes administratifs réglementaires, qui sont des actes de « perfection » de la norme. Le schéma initial ne change toutefois jamais.

Ensuite, les modalités des étapes peuvent varier : les procédures d’adoption, de publicité ou d’entrée en vigueur ne sont pas les mêmes d’une norme à une autre. La publicité s’adapte aux destinataires visés : publication pour la loi, qui doit toucher tous les citoyens ; publication ou affichage pour les actes administratifs réglementaires, selon que les destinataires sont plus ou moins nombreux ; simple notification pour les décisions administratives individuelles.

Les similarités étant bien plus importantes que les différences, le législateur pourrait privilégier l’identité à la différenciation. Cela justifierait qu’il aille plus loin que ce qu’il n’a déjà fait avec le Code des relations entre le public et l’Administration, afin de définir un véritable « droit de l’entrée en vigueur » des normes, quelles qu’elles soient.

II – L’application dans le temps des actes administratifs

Le Code des relations entre le public et l’Administration ne s’est pas contenté d’envisager les modalités de résolution des conflits de lois dans le temps par la mise en place d’un droit transitoire « instrumental »41, c’est-à-dire par l’édiction de mesures visant à organiser la succession dans le temps de la réglementation ancienne et de la réglementation nouvelle. Il est allé plus loin en développant les lignes directrices d’un véritable droit transitoire « substantiel », autrement dit, des normes qui régissent « directement les situations juridiques affectées par le changement de réglementation, sans renvoyer à l’ancien ou au nouveau texte »42.

Cette façon de procéder doit être saluée, d’autant qu’elle repose sur des choix fondés (A). Le législateur reste cependant novice dans sa manière de faire, et nombre de dispositions pour lesquelles il a opté fragilisent le nouveau droit transitoire de l’Administration (B).

A – Des choix fondés

Le législateur a fourni, par le Code des relations entre le public et l’Administration, un effort louable pour donner aux autorités administratives les outils leur permettant de maîtriser l’application dans le temps des normes qu’elles édictent. L’effort n’est pas seulement appréciable dans son principe. Deux éléments tangibles le rendent particulièrement bienvenu.

Le premier élément est la manière prudente d’approcher l’application dans le temps des actes administratifs : la matière est sensible, et le code l’aborde de manière réfléchie (1). Le second élément relève des outils proposés à l’Administration pour maîtriser l’application dans le temps (2).

1 – La prudence dans l’abord de l’application dans le temps

La manière d’aborder l’application dans le temps des actes administratifs est doublement prudente. Premièrement, le code s’est refusé à envisager la rétroactivité comme une option possible pour l’Administration (a). Deuxièmement, il s’est méfié des conséquences que pouvait avoir l’application immédiate de la réglementation nouvelle (b).

a – Le refus général de la rétroactivité

La rétroactivité des actes administratifs n’a pas sa place dans le Code des relations entre le public et l’Administration. Si une telle assertion est absolument vraie pour les actes réglementaires, elle doit être relativisée pour les actes individuels.

La première idée qui anime le Code des relations entre le public et l’Administration est le refus catégorique de toute rétroactivité des actes administratifs réglementaires. Pour aussi catégorique qu’il soit, ce refus reste néanmoins tacite. La rétroactivité – éventuelle – n’est tout simplement pas évoquée, contrairement à ce que prévoit l’article 2 du Code civil pour les lois lorsqu’est énoncé que « la loi ne dispose que pour l’avenir ; elle n’a point d’effet rétroactif ». Cet article ne trouve pas son pendant pour les actes administratifs.

Est-ce un mal ? Il n’en est rien. La règle posée par le Code civil n’est que l’illusion d’une interdiction : le législateur peut adopter des lois rétroactives. L’article 2 s’adresse en réalité au juge lorsque la loi ne prescrit rien sur sa propre application temporelle. Le principe de non-rétroactivité de la loi n’a d’ailleurs pas valeur constitutionnelle. Tout au plus le législateur doit-il respecter le cadre jurisprudentiel posé par le Conseil constitutionnel qui compense l’absence de consécration du principe, soit, pour certains auteurs, par le biais du principe de sécurité juridique, soit, pour d’autres, via le principe d’égalité43.

Le Code des relations entre le public et l’Administration ne tombe pas dans le piège des apparences. Il prohibe pourtant bel et bien toute rétroactivité des actes administratifs réglementaires, conformément à une solution jurisprudentielle ancienne44. L’article L. 221-4, en affirmant qu’une « nouvelle réglementation ne s’applique pas aux situations juridiques définitivement constituées avant son entrée en vigueur ou aux contrats formés avant cette date », se refuse à ce que les actes administratifs réglementaires puissent être d’application immédiate dans certains cas. Or une telle application a pu être assimilée à une application rétroactive de la norme tant en doctrine45 que dans la jurisprudence administrative46. Si l’application immédiate est prohibée, « sauf s’il en est disposé autrement par loi », l’application rétroactive du règlement ne peut, a fortiori, qu’être interdite.

Seule exception : la décision administrative individuelle. Lorsque celle-ci est favorable, le destinataire peut demander à ce qu’elle lui soit applicable non à partir de la notification de l’acte, mais dès l’adoption de celui-ci ; ce qui revient à considérer que la décision individuelle peut avoir une application rétroactive.

Comment cela s’explique-t-il47 ? Tout d’abord, la décision doit être favorable : il s’agit d’un cas de rétroactivité « plus douce ». L’administré bénéficie d’un adoucissement de sa situation, et mérite donc d’en profiter. Ensuite, la décision est individuelle, elle ne concerne les droits que d’une seule personne ou d’un groupe de personnes. Aucune atteinte au principe d’égalité ne peut donc être caractérisée, car nulle différence de traitement ne peut ainsi être mise en évidence. Enfin, il revient à l’administré de demander à ce que la décision lui soit appliquée à partir du moment de la signature : le principe de sécurité juridique ne peut être remis en cause. Seul l’administré peut faire le choix de la rétroactivité.

Le refus général se double, à bon escient, d’une certaine méfiance face à l’application immédiate de la réglementation nouvelle.

b – La méfiance face à l’application immédiate

La seconde originalité qui apparaît dans le Code des relations entre le public et l’Administration se trouve dans le sort réservé à l’application immédiate de la réglementation. Lorsqu’il est question de conflits de lois dans le temps, l’application immédiate de la norme nouvelle est le principe. Le code fait cependant preuve d’une certaine méfiance envers celle-ci, ce qui transparaît au regard de deux éléments. Premièrement, l’application immédiate de la réglementation nouvelle est limitée ; deuxièmement, le législateur a fait en sorte qu’elle puisse être exclue.

Premièrement, le législateur a cherché à doublement limiter l’application immédiate de la réglementation nouvelle. Tout d’abord, de façon directe, il a souhaité empêcher celle-ci dans certains cas visés à l’article L. 221-4. Cet article considère que la réglementation nouvelle ne s’applique ni aux « situations juridiques définitivement constituées avant son entrée en vigueur » ni aux « contrats en cours avant cette date », sauf exception légale. Ensuite, de façon indirecte, le législateur a confié aux autorités administratives la possibilité d’éviter l’effet immédiat de la réglementation nouvelle. Ensuite, de façon indirecte, le Code des relations entre le public et l’Administration pose l’obligation pour « l’autorité investie du pouvoir réglementaire » d’édicter des « mesures transitoires ». Il s’agit là d’un des apports les plus essentiels du code. Deux objectifs peuvent le justifier : que l’application immédiate ne soit pas souhaitable, ou qu’il faille accompagner un changement de législation.

Deuxièmement, le législateur a voulu éviter, dans certains cas, toute application immédiate de la réglementation nouvelle. L’article L. 221-6 du code envisage ainsi trois types de « mesures transitoires » : prévoir une date d’entrée en vigueur différée des règles édictées ; préciser, pour les situations en cours, les conditions d’application de la nouvelle réglementation ; énoncer des règles particulières pour régir la transition entre l’ancienne et la nouvelle réglementation. Derrière le vocable de « mesures transitoires » coexistent des genres de modalités d’application du droit transitoire. D’un côté, se trouvent des mesures qui privilégient l’application générale de la réglementation, mais en préférant d’en différer l’entrée en vigueur ; d’un autre, des mesures qui rejettent l’application générale des nouvelles normes édictées.

Le code a donc développé un nombre assez conséquent de moyens permettant que ne soit pas appliquée de manière immédiate une réglementation nouvelle, ce qui témoigne d’une prudence dans l’abord de l’application des normes administratives dans le temps.

2 – La maîtrise générale de l’application immédiate

Pour parvenir à maîtriser l’application immédiate de la réglementation nouvelle, le code offre deux outils particulièrement précieux à l’Administration. Le premier est un outil conceptuel : celui du refus de l’assimilation de l’application immédiate à l’application rétroactive (a). Le second est un outil pratique : celui d’adapter, pour renforcer, la limitation de l’application immédiate (b).

a – La maîtrise des fondements

L’article L. 221-4 du Code des relations entre le public et l’Administration ne passe pas par le prisme de la rétroactivité pour justifier le refus de l’application immédiate de la loi nouvelle aux « situations juridiques définitivement constituées » et aux « contrats formés avant cette date » : là réside tout son intérêt. Premièrement, l’assimilation de l’application immédiate à de la rétroactivité est théoriquement discutable. Deuxièmement, cette assimilation a été dépassée dans la jurisprudence.

Premièrement, le code évite l’écueil de l’assimilation de l’application immédiate à la rétroactivité. Ce faisant, il s’inspire des théories de Paul Roubier qui, dans son étude sur le Droit transitoire48, s’est opposé à la doctrine traditionnelle des « droits acquis » pour élaborer une « conception ternaire »49 du droit transitoire.

Selon la doctrine des « droits acquis », « ou bien le droit est acquis, et la loi nouvelle ne peut le remettre en cause sans être ipso facto une loi rétroactive, ou bien le droit n’est pas encore acquis, et la loi nouvelle pourra en disposer librement »50. En revanche, selon la conception de Paul Roubier, « il n’est plus question de l’existence d’un droit acquis, mais de la présence – ou non – d’un fait accompli »51, ce qui l’amène à distinguer rétroactivité, effet immédiat et postactivité là où, traditionnellement, s’opposait rétroactivité et non-rétroactivité.

Selon cette vision, l’effet immédiat « désigne l’hypothèse où une loi nouvelle s’applique à l’égard d’une situation juridique en cours au moment où elle entre en vigueur. La loi nouvelle a effet immédiat lorsqu’elle régit le développement futur de la situation en cours, sans toucher toutefois ses éléments déjà accomplis, ce qui impliquerait un effet rétroactif. Si, au contraire, le développement à venir de la situation en cours reste régi par la loi ancienne, on dira que cette dernière « survit » : elle reste applicable malgré son abrogation »52. Que le législateur refuse l’application immédiate de la loi nouvelle aux situations constituées n’est pas fondé sur le rejet de la rétroactivité53, mais sur le traitement réservé aux droits acquis, une fois réglée la question de la rétroactivité de la norme54.

Deuxièmement, le code a opté pour une conception en accord avec la jurisprudence et, particulièrement, celle du Conseil constitutionnel. Ce dernier n’examine pas les atteintes aux contrats « en cours » ou « légalement conclus », aux situations « existantes » ou « légalement acquises » à travers le prisme de la non-rétroactivité, mais de celui d’autres principes constitutionnels : sécurité juridique, jurisprudence des « situations légalement acquises », liberté contractuelle, confiance légitime, principe d’égalité, droit au recours, séparation des pouvoirs55.

Ainsi, par exemple, le Palais de Montpensier, se fondant sur la liberté issue de l’article 4 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen, considère qu’il n’est pas possible pour le législateur de modifier les contrats lorsqu’ils sont « en cours », mais que des exceptions peuvent être permises. Cela revient à admettre que, par principe, la loi ancienne doit survivre pour les « situations constituées » ou les « contrats en cours », sans empêcher que, par exception, la loi nouvelle puisse leur être appliquée, immédiatement.

Cette solution s’inscrit également dans le droit-fil de la jurisprudence administrative. Alors que le Conseil d’État avait, dans un premier temps, assimilé application immédiate et rétroactivité dans l’arrêt KPMG56, il a, trois ans plus tard, rectifié le tir dans son arrêt Compagnie générale des eaux et commune d’Olivet57. Le code confirme ainsi, de manière tout à fait bienvenue, la position du Palais Royal.

b – La maîtrise du renforcement

L’article L. 221-5 du Code des relations entre le public et l’Administration envisage, à son alinéa 2, une possibilité (et non une obligation) accordée à l’Administration. Celle-ci peut « avoir recours [aux mesures transitoires], sous les mêmes réserves et dans les mêmes conditions [que celles visées à l’alinéa 1], afin d’accompagner un changement de réglementation ». Ce changement peut être une modification de la réglementation en cours, mais aussi son abrogation selon l’article L. 243-1.

La possibilité d’accompagner le changement de législation par des mesures transitoires pose un problème quant au principe d’égalité puisque des personnes placées dans des situations comparables sont soumises à des régimes juridiques différents. À cet égard, le code a justement doté les autorités administratives d’une habilitation expresse : celle-ci permet d’évacuer assez facilement l’argument de la rupture d’égalité.

La pertinence du choix ne peut véritablement se comprendre qu’en comparant la (nouvelle) position des autorités administratives avec celle du législateur. Ce dernier, lorsqu’il adopte des mesures transitoires, ne dispose pas d’une habilitation constitutionnelle générale, du même ordre que celle conférée à l’Administration par l’article L. 221-5. Est-il entièrement libre pour autant ?

À première vue, sa liberté est totale : le Conseil constitutionnel a développé une jurisprudence très favorable à ces mesures, laissant au Parlement une véritable latitude en la matière, n’hésitant pas à souligner le caractère « exceptionnel et transitoire »58 des dispositions adoptées, pour immanquablement conclure à l’absence de rupture d’égalité59. À y regarder de plus près, cependant, le Conseil recherche toujours si le législateur a été habilité à prendre de telles mesures. Avec un constat : si l’habilitation n’est pas textuelle, le Conseil cherchera à doter le législateur d’une habilitation jurisprudentielle quitte à… passer par quelques contorsions argumentatives. Cette approche peut être mise en lumière par l’étude de deux décisions « QPC » : la décision Mlle Fazia C.60, d’une part, et la décision MM. Jean-Louis M. et Jacques B.61, d’autre part.

Dans la première décision, le Conseil constitutionnel commence par analyser l’effet temporel des dispositions qui lui sont soumises, soulignant que « les dispositions contestées limitent les effets sur la nationalité de l’application immédiate de l’article 311-25 du Code civil », pour mettre en évidence l’objectif suivi par le législateur, à savoir « assurer la stabilité de la nationalité des personnes à la date de leur majorité »62. Dans un deuxième temps, en énonçant que « la différence de traitement qui résulte de la succession de deux régimes juridiques dans le temps n’est pas, en elle-même, contraire au principe d’égalité »63, le Conseil constitutionnel autorise celle-ci dans son principe, avant d’examiner concrètement les choix du législateur en faisant application de sa jurisprudence relative au principe d’égalité.

Dans la seconde décision, le Conseil constitutionnel débute en exposant les normes mobilisées lors du contrôle de constitutionnalité, le principe d’égalité et les dispositions transitoires relatives à la Nouvelle-Calédonie, prévues par les articles 76 et 77 de la Constitution64. Ces dernières constituent l’habilitation constitutionnelle permettant de prendre des mesures transitoires. Il suit ensuite son raisonnement habituel relatif à l’atteinte au principe d’égalité pour conclure que « la différence de traitement instituée par la loi est en lien direct avec l’objectif d’intérêt général poursuivi et tient compte de la situation particulière des collectivités relevant de l’article 73 ou de l’article 74 de la Constitution et de la Nouvelle-Calédonie »65. Aucune atteinte inconstitutionnelle au principe d’égalité n’est caractérisée.

Plusieurs enseignements peuvent être tirés de ces deux décisions. Tout d’abord, un point commun : le Conseil constitutionnel produit un effort d’argumentation concernant la possibilité d’adopter des mesures transitoires qu’il n’effectue pas en contrôle a priori. Ensuite, une similarité : le fondement de l’action du législateur dans l’adoption des mesures transitoires. Les convergences paraissent toutefois s’arrêter là puisque, d’un côté, se trouve une habilitation jurisprudentielle, tandis que, d’un autre côté, se trouve une habilitation textuelle. Derrière cette différence, c’est toutefois toujours la possibilité d’agir du législateur qui est recherchée, puisque le Conseil constitutionnel vient justifier le fondement de l’action du Parlement en l’absence de disposition contraire. Un dernier apport peut enfin être mis en valeur : dans les deux cas, la possibilité de prendre des mesures transitoires justifie, en partie, la différence de traitement, et permet de conclure à la constitutionnalité des dispositions en cause.

En fournissant aux autorités administratives une habilitation expresse pour prendre des mesures transitoires, le Code des relations entre le public et l’Administration évite donc au juge administratif de passer par de telle circonvolutions : il pourra alors se consacrer directement à la manière dont celle-ci viennent adapter le passage à la nouvelle réglementation.

B – Des choix fragilisés

Pour l’application dans le temps comme pour le processus d’entrée en vigueur des actes administratifs, le Code des relations entre le public et l’Administration « peut mieux faire ». Les fondations ont été posées, mais le législateur a construit son édifice « à l’aveugle ». Les choix opérés sont ainsi fragilisés par le manque de clarté des dispositions (1), dont il n’a pas toujours su correctement apprécier la portée (2).

1 – Des choix fragilisés par manque de clarté des dispositions

Le code utilise des concepts ambigus pour gérer l’application dans le temps des actes administratifs réglementaires. Premièrement, la signification de « situations définitivement constituées » reste trouble, de telle sorte qu’il n’est pas possible de déterminer clairement quand est exclue l’application immédiate de la réglementation nouvelle (a). Deuxièmement, le code, qui offre la possibilité à l’Administration de différer l’application immédiate de la réglementation nouvelle, l’a fait dans des termes trop incertains pour sécuriser l’application dans le temps des actes administratifs (b).

a – La signification trouble de la notion de « situations définitivement constituées »

L’article L. 221-4 du code pose le principe de la survie de la loi ancienne pour les « situations définitivement constituées » et les « contrats formés avant cette date ». La « survie de la loi ancienne » peut être entendue comme le cas où « la loi nouvelle édicte un régime nouveau à l’égard des situations futures, en laissant le régime ancien s’appliquer aux situations en cours »66. Il s’agit de l’une des exceptions à l’application « générale » de la loi nouvelle67.

Le Code des relations entre le public et l’Administration a ainsi choisi de faire perdurer la réglementation ancienne dans deux types de cas : les « situations définitivement constituées », d’une part ; les « contrats formés avant cette date », d’autre part. Un problème d’ordre sémantique se pose alors : si le public comme l’Administration peut assez aisément qualifier un « contrat », par opposition à un « acte unilatéral », il n’en est pas de même pour ce qui est des « situations définitivement constituées ». Or le code ne définit pas ce que recouvrent les « situations définitivement constituées », ni à l’article L. 221-4, ni au détour d’une autre disposition.

Selon Jacques Petit, cela est « fort sage » car « si, en la matière, la jurisprudence administrative a été, sans conteste, influencée par les idées de Paul Roubier (…) elle ne s’y enferme pas »68. L’incertitude est pourtant nuisible, pour une raison simple : il n’est pas possible de savoir dans quels cas l’article L. 221-4 s’applique. D’où la nécessité de tracer les contours de ce que peuvent être les « situations définitivement constituées ».

Une proposition de réponse peut être amorcée à la suite des travaux de Pierre-André Côté. Pour ce dernier, les situations constituées regroupent deux hypothèses : celle des « droits acquis », d’une part ; celle des « autres situations en cours », d’autre part69. Les premiers ne peuvent être exactement définis, mais l’auteur souligne que « plus grands sont les coûts individuels et plus grave le préjudice causé à l’individu par l’application immédiate de la loi, plus grandes sont les chances que les droits acquis soient reconnus »70. Les seconds correspondent à certaines hypothèses de « dispersion des faits »71, concept mis en avant par Jacques Héron72.

Sans définir ce que recouvre le vocable, il eut été « plus sage », semble-t-il, que le législateur établisse au moins des critères de qualification, à l’instar de ceux proposés par Pierre-André Côté. Cela aurait été dans le sens de la sécurité juridique, objectif que promeut toute législation à visée générale relative au droit transitoire. Faute de l’avoir fait, il reviendra au juge, en procédant au cas par cas, de caractériser ces situations. Ce qu’il fait déjà à l’heure actuelle.

À ce premier problème s’ajoute un second : celui de la rédaction des dispositions relatives au report de l’application immédiate.

b – La rédaction incertaine des dispositions relatives au report de l’application immédiate

L’article L. 221-6 prévoit la possibilité pour l’Administration de décider de différer l’entrée en vigueur des règles qu’elle édicte. Cette modalité ne résout pas les conflits de lois dans le temps : l’effet sur les situations juridiques causera une perturbation identique à celle de l’effet immédiat « instantané », mais à une date ultérieure. Derrière la simplicité apparente de l’entrée en vigueur différée, qui peut être assimilée à un effet immédiat « retardé » se pose ainsi de redoutables problèmes, accrus par les formulations choisies par le législateur.

Le nœud du problème réside dans les effets de l’entrée en vigueur différée, qui conduit à des problèmes similaires à ceux issus de l’entrée en vigueur immédiate. Comment cela s’explique-t-il ? La raison est la suivante : lorsqu’il y a report de l’entrée en vigueur de la norme, celle-ci « s’applique dans toutes ses dispositions et à toutes les situations juridiques »73. Par conséquent, retarder l’entrée en vigueur n’est « d’aucune utilité lorsque les situations juridiques elles-mêmes sont rebelles au changement de législation : la perturbation causée par ce dernier est d’égale importance, quelle que soit sa date »74. Concrètement, cela signifie que les conflits de lois ne sont pas évités : ils se produiront à une date ultérieure. Si la mise en œuvre de ce procédé est simple, les conséquences sont complexes. Or le Code des relations entre le public et l’Administration a mal géré cette complexité, en mesurant imparfaitement les conséquences des choix rédactionnels qui ont été effectués par le législateur.

Première difficulté : le « retard » peut être soit certain – si une date est fixée – soit hypothétique – dans le cas d’un renvoi à une norme différente. Les modalités de report auraient mérité d’être inscrites à l’article L. 221-6.

Deuxième difficulté : le champ d’application de l’article L. 221-6 ne recouvre pas l’ensemble de ces cas visés à l’article L. 221-2, mais seulement ceux qui concernent « l’autorité administrative investie du pouvoir réglementaire ». L’article L. 221-6 laisse penser que seule cette dernière peut différer l’entrée en vigueur de la nouvelle réglementation, alors que l’article L. 221-2 affirme que le législateur ou une autre autorité administrative peut agir en ce sens. Dès lors, l’autorité qui adopte le règlement, d’une part et l’autorité qui décide de différer l’entrée en vigueur de la réglementation, d’autre part, semblent pouvoir être distinctes. Se pose alors une question de compétence, d’autant plus importante que le pouvoir de différer l’entrée en vigueur de la réglementation est conséquent. Ce problème est particulièrement sérieux dans la mesure où les conditions de déclenchement de l’article L. 221-6 sont aisées à réunir, ce qui confère à l’autorité compétente un large pouvoir discrétionnaire.

Cette liberté est similaire à celle du législateur, pour lequel le Conseil constitutionnel n’a pas hésité à considérer qu’il ne fait « qu’user des pouvoirs qui lui appartiennent de fixer les conditions de mise en vigueur des règles qu’il édicte »75 lorsqu’il adopte de telles mesures. Or cette liberté paraît justifiée dans la mesure où le législateur, créateur de la norme « substantielle », est le seul à même de choisir la norme « temporelle » qui lui conférera l’efficacité désirée. Qu’il souhaite renvoyer ou non cette appréciation au pouvoir réglementaire (dans le cas de « décrets d’application »), aucun autre organe ne peut lui dicter son choix.

D’où une troisième difficulté : s’il se révélait que « l’autorité investie du pouvoir réglementaire » et « l’autorité édictant la nouvelle réglementation » étaient des autorités distinctes, dans quelle mesure l’appréciation du « retard » dans l’entrée en vigueur de la réglementation nouvelle pourrait-elle être contestée ? Alors que le code se proposait de systématiser l’application des normes dans le temps, les choix rédactionnels font surgir des interrogations importantes quant à la mise en œuvre des mesures transitoires, ce qui est l’inverse du but recherché.

2 – Des choix fragilisés par la portée incertaine des dispositions

Porté par de bonnes intuitions, le législateur n’a pas su construire un ensemble suffisamment stable, faute d’avoir anticipé toutes les implications des dispositions relatives à l’application dans le temps des actes administratifs. L’encadrement de l’application immédiate est ainsi parfois hasardeux (a), et la possibilité de son exclusion imprécise (b).

a – L’encadrement hasardeux de l’application immédiate

L’article L. 221-4 du code prévoit que, par exception au principe de survie de la loi ancienne pour les contrats en cours et les situations constituées, la nouvelle réglementation puisse s’appliquer immédiatement. Cette exception est encadrée : elle ne saurait être que légale. En d’autres termes, si la loi le prévoit, le règlement administratif pourra s’appliquer immédiatement.

L’Administration est placée dans une situation différente du législateur. Par principe, la loi n’est pas sensée porter atteinte aux situations constituées ni aux contrats en cours. Ce principe ne présente toutefois pas un caractère absolu. Très tôt, le Conseil constitutionnel a ainsi considéré qu’« en inscrivant la sûreté au rang des droits de l’Homme, l’article 2 de la Déclaration de 1789 n’a pas interdit au législateur d’apporter, pour des motifs d’intérêt général, des modifications à des contrats en cours d’exécution »76 avant de soutenir la même idée en se fondant sur l’article 4 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen77.

En effet, la loi peut s’appliquer immédiatement à des « situations constituées » ou des « contrats en cours » si l’une des trois conditions suivantes est respectée : premièrement, si le législateur agit avec une « motif d’intérêt général suffisant »78 ; deuxièmement, si « l’économie des contrats légalement conclus »79 n’est pas gravement atteinte ; troisièmement, si « le cadre légal »80 applicable n’est pas modifié. Si la première condition est toujours autonome81, le professeur Gahdoun a mis en évidence un phénomène d’émancipation de la condition de l’absence de modification du « cadre légal ». Il semblerait alors que le développement de la condition du « cadre légal » prend sa source dans le traitement, parfois erratique82, de celle de « l’économie des contrats légalement conclus »83.

Que devient, au regard de ces éléments, l’exception posée à l’article L. 221-4 du code ? Un simple trompe-l’œil. Car la loi qui modifie des « situations constituées » et des « contrats en cours », doit elle-même respecter un « motif d’intérêt général suffisant », ou encore ne pas bouleverser « l’économie des contrats légalement conclus », pour que soit préservée la stabilité de ces situations juridiques.

Cela signifie en conséquence, que la dérogation envisagée par le Code des relations entre le public et l’Administration n’est en rien absolue – et ne peut, par ailleurs, être comprise qu’au regard de la jurisprudence constitutionnelle. Derrière l’expression « sauf s’il en est disposé autrement par la loi », il convient de lire « sauf s’il en est disposé autrement par la loi dans le respect de la Constitution », et se reporter, donc, aux décisions du Conseil constitutionnel84.

Cela pose un redoutable problème d’articulation des contentieux, particulièrement dans le cas où la loi en question n’a pas fait l’objet d’un contrôle de constitutionnalité. Car les juges ordinaires, tant dans l’ordre administratif que dans l’ordre judiciaire85 ont déjà développé toute une jurisprudence relative à l’application immédiate de la loi aux contrats en cours. Et celle-ci diffère sensiblement de celle du Conseil constitutionnel. Par exemple, pour les juges du Palais Royal, l’applicabilité de la loi est déterminée par la combinaison des jurisprudences KPMG86 et Compagnie générale des eaux et commune d’Olivet87, de telle sorte que la loi ne peut s’appliquer aux contrats en cours que « si un motif d’intérêt général suffisant lié à un impératif d’ordre public le justifie et que s’il n’est dès lors pas porté une atteinte excessive à la liberté contractuelle ». Le juge administratif s’attachera-t-il à vérifier que la loi respecte la Constitution, se faisant le relais du Palais de Montpensier ? Ou préférera-t-il appliquer ses propres critères ? La codification génère ici plus d’interrogations qu’elle n’en résout.

b – La possibilité imprécise de l’exclusion de l’application immédiate

L’adaptation de l’application immédiate de la réglementation dans le temps peut se faire par de véritables « mesures transitoires » qui permettent d’éviter les conflits de réglementation dans le temps, que l’autorité administrative ait choisi de modifier les normes en vigueur (art. L. 221-6), ou qu’elle ait décidé de les abroger (art. L. 243-1). L’avancée se veut substantielle, mais tout bien considéré, sa portée est imprécise, tant au regard des mesures envisagées que de leur potentielle combinaison.

La première imprécision porte sur les types de mesures envisagées. L’article L. 221-6 envisage d’abord un premier cas où l’autorité administrative peut adopter des « mesures transitoires » pour apporter une solution à un conflit de normes dans le temps : lorsqu’elle souhaite préciser, pour les situations en cours, les conditions d’application de la nouvelle réglementation.

Avec un premier problème : que faut-il entendre par « conditions d’application de la nouvelle réglementation » aux situations en cours ? Deux éléments doivent ici être clarifiés. Le premier porte sur « les conditions d’application » ; le second sur les « situations en cours ».

Tout d’abord, pour les « conditions d’application » deux grandes possibilités sont ici ouvertes. Premièrement, ne pas appliquer la nouvelle réglementation aux situations en cours. Deuxièmement, adapter la nouvelle réglementation aux situations en cours, par des dispositions spécifiques, c’est-à-dire édicter une réglementation transitoire. Cette deuxième possibilité est théoriquement envisageable. Elle est cependant redondante avec la faculté d’« énoncer des règles particulières pour régir la transition entre l’ancienne et la nouvelle réglementation », prévue au 3° de l’article. Les « mesures transitoires » présentées visées ici correspondent donc à la méthode instrumentale de résolution de conflits de norme dans le temps.

Encore faut-il définir les « situations en cours ». Celles-ci peuvent être de deux ordres : soit « définitivement constituées », soit « en cours de constitution ». Pour les situations « définitivement constituées », l’article L. 221-4 prévoit déjà le mécanisme de survie de la loi ancienne. Restent alors les « situations en cours de constitution ». Pour qu’une situation puisse être considérée comme « définitivement constituée », plusieurs faits doivent parfois être accomplis. La situation peut être en cours de constitution quand un ou plusieurs faits sont accomplis, mais pas les autres.

Il s’agit donc, pour l’autorité réglementaire, de pouvoir étendre la solution de principe prévue à l’article L. 221-4 pour les « situations définitivement constituées » aux situations « en cours de constitution », posant ainsi, de manière générale, la survie de la loi ancienne à toutes les situations en cours. La rédaction de l’article L. 221-6 comme celle de l’article L. 221-4 auraient pu être simplifiées. L’article L. 221-6 aurait pu ainsi disposer simplement que les mesures transitoires pouvaient consister à « ne pas appliquer aux situations en cours la réglementation nouvelle ». Quant à l’article L. 221-4, il aurait pu être rédigé de la sorte : « Sauf s’il en est disposé autrement par la loi, par principe, une nouvelle réglementation ne s’applique pas aux situations juridiques définitivement constituées avant son entrée en vigueur ou aux contrats formés avant cette date. Elle peut ne pas être appliquée à d’autres situations juridiques dans les cas visés à l’article L. 221-5 ».

Parmi les « mesures transitoires » possibles, l’article L. 221-6 envisage ensuite un second cas où l’autorité administrative peut apporter une solution à un conflit de normes dans le temps : lorsqu’elle veut énoncer des règles particulières pour régir la transition entre l’ancienne et la nouvelle réglementation.

Le code prévoit donc que l’autorité réglementaire puisse adopter des dispositions transitoires substantielles, autrement dit une réglementation différente en substance tant de la réglementation ancienne que de la réglementation nouvelle, précisément pour accompagner le passage à la nouvelle norme.

Comment accompagner ce changement de législation ? Pierre Fleury-Le Gros envisage deux cas proches mais distincts qui s’opposent « à la solution de l’application « générale » » de la loi nouvelle88, par l’adoption de mesures substantielles. Le premier est l’édiction d’un régime juridique totalement différent tant de la réglementation ancienne que de la réglementation nouvelle. Le second consiste à opérer de la manière suivante. En premier lieu, la réglementation nouvelle gère les situations en cours et futures, mais chacune se voit imposer un régime différent. En second lieu, pour les situations en cours, la réglementation choisie est différente de celle qui était en vigueur jusqu’à ce moment. Dans les deux cas, il y a application d’un régime substantiel, nouveau, différent tant du régime antérieur que de celui mis en place par la loi nouvelle, soit aux situations en cours et futures, soit aux seules situations en cours. Là encore, le Code des relations entre le public et l’Administration aurait pu se faire plus précis.

Par ailleurs, la lecture de l’article L. 221-6 du Code des relations entre le public et l’Administration pourrait laisser penser que les « mesures transitoires » présentées sont exclusives les unes des autres ; rien, cependant, ne le justifie. La seconde imprécision porte donc sur la possibilité de combiner les mesures transitoires entre elles.

En effet, la liste des « mesures transitoires » ne paraît pas exhaustive, l’usage du verbe « pouvoir » indique des options parmi d’autres, effet rétroactif excepté. D’un point de vue logique, certaines mesures ne peuvent pas se combiner entre elles. Par exemple, la survie de la loi ancienne et l’édiction d’un régime transitoire substantiel s’excluent l’une l’autre.

En revanche, chacune de ces mesures de droit transitoire peut se combiner avec la première option, celle du report de l’entrée en vigueur de la nouvelle réglementation. L’entrée en vigueur différée ne résout jamais un conflit de lois dans le temps, elle permet juste aux destinataires de la norme de ne pas être pris au dépourvus lorsque la matière est complexe. Parfois, cependant, il convient de prévoir, en plus, une solution au conflit de lois dans le temps, soit par la « survie de la loi ancienne », soit par l’édiction d’un régime transitoire. Il aurait ainsi été souhaitable que le législateur explicite cette possibilité.

Que penser de ce nouveau droit transitoire administratif ? Il est à l’image d’une assiette végétarienne dans un restaurant gastronomique : une idée alléchante, mais qui laisse sur sa faim. Faute d’avoir entièrement réfléchi à l’équilibre des goûts – et malgré de bons produits – le plat ne parvient pas à atteindre cette saveur délicieuse que les Japonais appellent « umami ».

Notes de bas de pages

  • 1.
    V. not. Roubier P., Le droit transitoire (conflits de lois dans le temps), 2e éd., 2008, Paris, Dalloz.
  • 2.
    Dekeuwer-Défossez F., Les dispositions transitoires dans la législation civile contemporaine, 1re éd., 1977, Paris, LGDJ, p. 12.
  • 3.
    Ibid.
  • 4.
    Héron J., Principes du droit transitoire, 1re éd., 1996, Paris, Dalloz.
  • 5.
    CE, 24 mars 2006, n° 288460, Société KPMG.
  • 6.
    Et ce, dès la première décision QPC rendue : Cons. const., 28 mai 2010, n° 2010-1 QPC, Consorts L. (Cristallisation des pensions).
  • 7.
    Codifié pour sa partie législative par l’ord. n° 2015-1341, 23 oct. 2015, relative aux dispositions législatives du Code des relations entre le public et l’Administration et pour sa partie réglementaire par D. n° 2015-1342, 23 oct. 2015, relatif aux dispositions réglementaires du Code des relations entre le public et l’Administration.
  • 8.
    Rapport au président de la République relatif à l’ordonnance n° 2015-1341 du 23 octobre 2015 relative aux dispositions législatives du Code des relations entre le public et l’Administration : JO, n° 0248, 25 oct. 2015, p. 19871, texte n° 1.
  • 9.
    Rapport au président de la République relatif à l’ordonnance n° 2015-1341 du 23 octobre 2015 relative aux dispositions législatives du Code des relations entre le public et l’Administration : JO, n° 0248, 25 oct. 2015, p. 19871, texte n° 1.
  • 10.
    V. part. : Seiller B., « L’entrée en vigueur des actes administratifs unilatéraux », AJDA 2004, p. 1463.
  • 11.
    Rapport au président de la République relatif à l’ordonnance n° 2015-1341 du 23 octobre 2015 relative aux dispositions législatives du Code des relations entre le public et l’Administration : JO, n° 0248, 25 oct. 2015, p. 19871, texte n° 1.
  • 12.
    Gahdoun P.-Y., « L’émergence d’un droit transitoire constitutionnel », RDP 2016, p. 150.
  • 13.
    V. not. : Delvolvé P., « L’entrée en vigueur des actes administratifs », RFDA 2016, p. 50.
  • 14.
    Seiller B., « L’entrée en vigueur des actes administratifs unilatéraux », préc.
  • 15.
    Tremblay R., « La distinction artificielle entre l’entrée en vigueur et la prise d’effet de la loi dans la législation québécoise », in Le temps et le droit. Actes du 4e Congrès international de l’Association internationale de méthodologie juridique, 1996, Yvon Blais, p. 157 à 169 (v. p. 165) ; v. égal. : Seiller B., « L’entrée en vigueur des actes administratifs unilatéraux », préc.
  • 16.
    Contra : Héron J., Principes du droit transitoire, préc.
  • 17.
    Nous distinguons ici actes administratifs réglementaires et décisions administratives individuelles, plutôt que de les considérer d’un point de vue unitaire. En effet, le concept de « décision administrative », récemment réétudié, ne permet pas de saisir le choix du législateur, et de le critiquer. Sur ce point, v. part. l’étude doctorale menée par Benjamin Defoort (Defoort B., La décision administrative, 2015, LGDJ-Lextenso, Thèses, Bibliothèque de droit public, [thèse doct. Droit public, université Paris II, 2012]).
  • 18.
    Il s’agit ici de s’extraire des qualifications utilisées par la jurisprudence comme par les textes pour utiliser les concepts de « règle » et de « décision ». Cela est d’autant plus nécessaire que le code lui-même a une approche « formelle » de la qualification des actes administratifs unilatéraux (Delvolvé P., « La définition des actes administratifs », RFDA 2016, p. 35).
  • 19.
    Mayer P., La distinction entre règles et décisions et le droit international privé, 1re éd., 1973, Paris, Dalloz [thèse doct. Droit privé, université Paris II, 1971], p. 35 et s. La distinction faite par l’auteur dans le cadre d’une étude de droit international peut être transposée à l’ensemble des règles et des décisions, c’est-à-dire qu’elle s’applique également aux règles et aux décisions en droit interne. En témoigne ainsi l’utilisation qu’en fait Pierre Fleury-Legros dans son étude doctorale (Fleury-Le Gros P., Contribution à l’analyse normative des conflits de lois dans le temps en droit privé interne, 1re éd., 2005, Paris, Dalloz [thèse doct. Droit privé, université de Caen Basse Normandie, 2003]).
  • 20.
    Fleury-Le Gros P., Contribution à l’analyse normative des conflits de lois dans le temps en droit privé interne, préc., p. 27. : « Concrètes, elles le sont en ce qu’elles visent des éléments déterminés ».
  • 21.
    Ibid., p. 28. Elles sont catégoriques « en ce qu’elles ordonnent qu’une conséquence de droit soit attachée à l’égard d’une personne déterminée, sans que l’application de cette conséquence soit subordonnée à la survenance incertaine, donc hypothétique, d’un fait déterminé ».
  • 22.
    Héron J., Principes du droit transitoire, préc., p. 14.
  • 23.
    Ibid., p. 12.
  • 24.
    Ibid., p. 12-13.
  • 25.
    Ibid., p. 13.
  • 26.
    Dictionnaire Le Littré, « publicité ».
  • 27.
    Petit J., « L’entrée en vigueur des actes administratifs dans le Code des relations entre le public et l’Administration », AJDA 2015, p. 2433.
  • 28.
    Fleury-Le Gros P., Contribution à l’analyse normative des conflits de lois dans le temps en droit privé interne, préc.
  • 29.
    Seiller B., « L’entrée en vigueur des actes administratifs unilatéraux », préc.
  • 30.
    Sur la contestation de rétro-mise en vigueur, v. not. : Côté P.-A., Interprétation des lois, 3e éd., 1999, Montréal, Thémis ; Fleury-Le Gros P., Contribution à l’analyse normative des conflits de lois dans le temps en droit privé interne, préc.
  • 31.
    Contra : Héron J., Principes du droit transitoire, préc., p. 29. Pour ce dernier, « vocable d’observation évoque deux idées différentes » : celle de « rechercher ou d’essayer d’apercevoir une loi » et celle de se « conformer » ou de « se soumettre » à une norme ; et retient comme définition de l’observabilité celle de la force contraignante. Or, si tel était le cas, il n’y aurait pas de différence entre l’observabilité de la norme et sa force obligatoire.
  • 32.
    Tremblay R., « La distinction artificielle entre l’entrée en vigueur et la prise d’effet de la loi dans la législation québécoise », préc., p. 157 à 169. Néanmoins, pour certains auteurs, « opposabilité » et « invocabilité » sont des termes synonymes. V. part. : Seiller B., « L’entrée en vigueur des actes administratifs unilatéraux », préc.
  • 33.
    CE, sect., 29 déc. 1952, Demoiselle Mattéi.
  • 34.
    CE, 28 oct. 1988, n° 49432, Mademoiselle Gallien.
  • 35.
    Defoort B., La décision administrative, préc.
  • 36.
    Côté P.-A., Interprétation des lois, préc., p. 121-122.
  • 37.
    Contra : Fleury-Le Gros P., Contribution à l’analyse normative des conflits de lois dans le temps en droit privé interne, préc.
  • 38.
    Cons. const., 25 juill. 2001, n° 2001-448 DC, loi organique relative aux lois de finances, cons. 64.
  • 39.
    Contra : Fleury-Le Gros P., Contribution à l’analyse normative des conflits de lois dans le temps en droit privé interne, préc., p. 23. : « Mais, afin de pouvoir être exécutée, cette norme doit ensuite être publiée, c’est-à-dire être portée à la connaissance du public : c’est en cela que consiste la “mise en vigueur” ».
  • 40.
    Ibid., p. 24.
  • 41.
    Dekeuwer-Défossez F., Les dispositions transitoires dans la législation civile contemporaine, préc., p. 208 : l’auteur distingue les dispositions transitoires instrumentales et les dispositions transitoires substantielles.
  • 42.
    Ibid.
  • 43.
    Gahdoun P.-Y., « L’émergence d’un droit transitoire constitutionnel », préc., p. 150.
  • 44.
    CE, ass., 25 juin 1948, Société du Journal l’Aurore.
  • 45.
    C’est le cas de l’ensemble de la doctrine des droits acquis.
  • 46.
    CE, sect., 11 déc. 1998, n° 170717, ministre d’État, garde des Sceaux, ministre de la Justice c/ Angeli.
  • 47.
    Ces explications ne semblent être entièrement valables que pour les décisions administratives individuelles, qui sont des actes administratifs unilatéraux, et non pour les contrats. En ce sens, v. une décision récente du Tribunal des conflits : T. confl. 11 avr. 2016, n° 4043, Société Fosmax. Le Tribunal estime qu’un avenant à un contrat ne peut venir modifier rétroactivement la nature juridique d’un contrat entre les parties. Dans cette décision, la sécurité juridique l’emporte sur la liberté contractuelle, mais dans un cas très particulier : celui de la rétroactivité touchant aux critères de répartition des compétences entre l’ordre juridictionnel administratif et l’ordre juridictionnel judiciaire. Or la question de la compétence juridictionnelle est un moyen d’ordre public. Ainsi, la rétroactivité semble proscrite lorsqu’elle touche à une sphère « objective ». Ce qui ne signifie pas pour autant que si les parties avaient modifié un autre aspect du contrat, subjectif quant à lui, le Tribunal des conflits eût statué dans le même sens.
  • 48.
    Roubier P., Le droit transitoire (conflits de lois dans le temps), préc.
  • 49.
    Gahdoun P.-Y., La liberté contractuelle dans la jurisprudence du Conseil constitutionnel, 2007, Paris, Dalloz, p. 194.
  • 50.
    Ibid. Pour de plus amples développements sur la doctrine des droits acquis en droit public, v. part. : Petit J., Les conflits de lois dans le temps en droit public interne, 2002, LGDJ [thèse doct. Droit public, université Paris II, 1993], p. 148 et s.
  • 51.
    Ibid.
  • 52.
    Côté P.-A., Interprétation des lois, préc., p. 191-192.
  • 53.
    Petit J., « L’entrée en vigueur des actes administratifs dans le Code des relations entre le public et l’Administration », préc., p. 2433.
  • 54.
    Côté P.-A., Interprétation des lois, préc., p. 141-142 : « Il ne s’agit plus, comme jadis, de choisir entre deux solutions, la rétroactivité et la prospectivité. Il faut désormais se livrer, dans chaque cas, à une analyse à deux niveaux : 1) La loi doit-elle ou non recevoir une application rétroactive, c’est-à-dire s’appliquer à l’égard du temps écoulé avant son entrée en vigueur ? ; 2) La loi doit-elle ou non recevoir une application immédiate, c’est-à-dire s’appliquer pour l’avenir à l’égard des situations qui sont en cours au moment de sa prise d’effet ? »
  • 55.
    Gahdoun P.-Y., « L’émergence d’un droit transitoire constitutionnel », préc., p. 150.
  • 56.
    CE, 24 mars 2006, n° 288460, Société KPMG, préc.
  • 57.
    CE, 8 avr. 2009, n° 271737, Compagnie générale des eaux et commune d’Olivet.
  • 58.
    Cons. const., 6 déc. 1990, n° 90-280 DC, loi organisant la concomitance des renouvellements des conseils généraux et des conseils régionaux ; Cons. const., 13 janv. 1994, n° 93-331 DC, loi rétablissant le renouvellement triennal par moitié des conseils généraux ; Cons. const., 25 juill. 2001, n° 2001-448 DC, loi organique relative aux lois de finances.
  • 59.
    Cons. const., 17 juill. 1980, n° 80-120, loi modifiant les articles 13, 14 et 15 de la loi d’orientation de l’enseignement supérieur du 12 novembre 1968 ; Cons. const., 30 oct. 1981, n° 81-130, loi portant abrogation de la loi n° 80-564 du 21 juillet 1980 modifiant les articles 13, 14 et 15 de la loi d’orientation de l’enseignement supérieur du 12 novembre 1968 et portant modification des articles 14 et 15 de ladite loi ; Cons. const., 12 sept. 1984, n° 84-179, loi relative à la limite d’âge dans la fonction publique et le secteur public ; Cons. const., 3 août 1994, n° 94-348, loi relative à la protection sociale complémentaire des salariés et portant transposition des directives nos 92/49 et 92/96 des 18 juin et 10 novembre 1992 du Conseil des communautés européennes, cons. 7 ; Cons. const., 21 oct. 2011, n° 2011-186/187/188/189, Mlle Fazia C. et a. (Effets sur la nationalité de la réforme de la filiation) ; Cons. const., 18 juin 2014, n° 2014-407 QPC, MM. Jean-Louis M. et Jacques B. (Seconde fraction de l’aide aux partis et groupements politiques).
  • 60.
    Cons. const., 21 oct. 2011, n° 2011-186/187/188/189, préc.
  • 61.
    Cons. const., 18 juin 2014, n° 2014-407 QPC, préc.
  • 62.
    Cons. const., 21 oct. 2011, n° 2011-186/187/188/189, préc., cons. 5.
  • 63.
    Cons. const., 21 oct. 2011, n° 2011-186/187/188/189, préc., cons. 6.
  • 64.
    Cons. const., 18 juin 2014, n° 2014-407 QPC, préc., cons. 6 et 7.
  • 65.
    Cons. const., 18 juin 2014, n° 2014-407 QPC, préc., cons. 9.
  • 66.
    Fleury-Le Gros P., Contribution à l’analyse normative des conflits de lois dans le temps en droit privé interne, préc., p. 193.
  • 67.
    Héron J., Principes du droit transitoire, préc. ; Fleury-Le Gros P., Contribution à l’analyse normative des conflits de lois dans le temps en droit privé interne, préc.
  • 68.
    Petit J., « L’entrée en vigueur des actes administratifs dans le Code des relations entre le public et l’Administration », préc., p. 2433.
  • 69.
    Côté P.-A., Interprétation des lois, préc., p. 191.
  • 70.
    Ibid., p. 200.
  • 71.
    Ibid., p. 220.
  • 72.
    Héron J., Principes du droit transitoire, préc.
  • 73.
    Dekeuwer-Défossez F., Les dispositions transitoires dans la législation civile contemporaine, préc., p. 104.
  • 74.
    Ibid., p. 107.
  • 75.
    Cons. const., 26 juill. 1984, n° 84-172 DC, loi relative au contrôle des structures des exploitations agricoles et au statut du fermage, cons. 22.
  • 76.
    Cons. const., 4 juill. 1989, n° 89-254 DC, loi modifiant la loi n° 86-912 du 6 août 1986 relative aux modalités d’application des privatisations, cons. 12.
  • 77.
    Cons. const., 10 juin 1998, n° 98-401 DC, loi d’orientation et d’incitation relative à la réduction du temps de travail, cons. 29.
  • 78.
    V. not. : Cons. const., 4 juill. 1989, n° 89-254, loi modifiant la loi n° 86-912 du 6 août 1986 relative aux modalités d’application des privatisations ; Cons. const., 14 juin 2013, n° 2013-322, M. Philippe W. (Statut des maîtres des établissements d’enseignement privés).
  • 79.
    Cons. const., 23 juill. 1999, n° 99-416 DC, loi portant création d’une couverture maladie universelle ; Cons. const., 16 août 2007, n° 2007-556, loi sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs.
  • 80.
    Cons. const., 18 mars 2009, n° 2009-578, loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion ; Cons. const., 29 mai 2015, n° 2015-470, Société SAUR SAS (Interdiction d’interrompre la distribution d’eau dans les résidences principales).
  • 81.
    Gahdoun P.-Y., préc.
  • 82.
    Ibid.
  • 83.
    Gahdoun P.-Y., « La limitation de la liberté contractuelle par la notion de “cadre légal” », D. 2015, p. 779. ; Gahdoun P.-Y., « L’émergence d’un droit transitoire constitutionnel », préc., p. 150.
  • 84.
    Pour une étude complète du « droit transitoire constitutionnel » : Gahdoun P.-Y., « L’émergence d’un droit transitoire constitutionnel », préc., p. 150.
  • 85.
    Sur ce point, v. part. : Bach L., « Conflits de lois dans le temps », Dalloz, Rép. civ., 1971.
  • 86.
    CE, 24 mars 2006, n° 288460, Société KPMG, préc.
  • 87.
    CE, 8 avr. 2009, n° 271737, Compagnie générale des eaux et commune d’Olivet, préc.
  • 88.
    Fleury-Le Gros P., Contribution à l’analyse normative des conflits de lois dans le temps en droit privé interne, préc., p. 193 et s.
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