Panorama de droit administratif (1er septembre – 15 octobre 2020)
Les décisions de cette sélection indiquent qu’une mesure de police doit être simple et lisible et que l’autorité détentrice d’un pouvoir réglementaire peut élaborer des lignes directrices. Elles fournissent des précisions sur la jurisprudence Czabaj, en matière de contentieux administratif, de droit des collectivités territoriales et de droit de l’Union. Le Conseil d’État s’aligne sur la solution du Conseil constitutionnel relative aux ordonnances non ratifiées et rappelle qu’une autorité publique n’est jamais tenue de prendre une circulaire.
Une mesure de police doit être simple et lisible
CE, réf., 6 sept. 2020, n° 443751, Ministre des Solidarités et de la Santé. Le caractère proportionné d’une mesure de police s’apprécie nécessairement en tenant compte de ses conséquences pour les personnes concernées et de son caractère approprié pour atteindre le but d’intérêt général poursuivi. Sa simplicité et sa lisibilité, nécessaires à sa bonne connaissance et à sa correcte application par les personnes auxquelles elle s’adresse, sont des éléments de son effectivité qui doivent, à ce titre, être pris en considération. Le préfet, lorsqu’il détermine les lieux dans lesquels il rend obligatoire le port du masque, est en droit de délimiter des zones suffisamment larges pour englober de façon cohérente les points du territoire caractérisés par une forte densité de personnes ou une difficulté à assurer le respect de la distance physique, de sorte que les personnes qui s’y rendent puissent avoir aisément connaissance de la règle applicable et ne soient pas incitées à enlever puis remettre leur masque à plusieurs reprises au cours d’une même sortie. Il peut, de même, définir les horaires d’application de cette règle de façon uniforme dans l’ensemble d’une même commune, voire d’un même département, en considération des risques encourus dans les différentes zones couvertes par la mesure qu’il adopte. Il doit, toutefois, tenir compte de la contrainte que représente, même si elle reste mesurée, le port d’un masque par les habitants des communes concernées, qui doivent également respecter cette obligation dans les transports en commun et, le plus souvent, dans leur établissement scolaire ou universitaire ou sur leur lieu de travail.
Disposer du pouvoir réglementaire n’interdit pas d’élaborer des lignes directrices
CE, 21 sept. 2020, n° 428683, A. Il résulte du décret du 17 avril 2008 que l’attribution d’une indemnité de départ volontaire n’a pas le caractère d’un avantage statutaire. Le décret se borne à déterminer le plafond de cette indemnité et la possibilité d’en moduler le montant, sans fixer celui-ci. Chaque ministre est, ainsi, compétent, dans l’exercice de ses prérogatives d’organisation des services placés sous son autorité, pour établir, dans le respect des règles générales fixées par ces mêmes dispositions, la réglementation applicable au versement de cette indemnité au sein de son administration.
Dans le cas où un texte prévoit l’attribution d’un avantage sans avoir défini l’ensemble des conditions permettant de déterminer à qui l’attribuer parmi ceux qui sont en droit d’y prétendre ou de fixer le montant à leur attribuer individuellement, l’autorité compétente peut, qu’elle dispose ou non en la matière du pouvoir réglementaire, encadrer l’action de l’Administration1, dans le but d’en assurer la cohérence, en déterminant, par la voie de lignes directrices, sans édicter aucune condition nouvelle, des critères permettant de mettre en œuvre le texte en cause, sous réserve de motifs d’intérêt général conduisant à y déroger et de l’appréciation particulière de chaque situation. Dans ce cas, la personne en droit de prétendre à l’avantage en cause peut se prévaloir, devant le juge administratif, de telles lignes directrices si elles ont été publiées. En revanche, il en va autrement dans le cas où l’Administration peut légalement accorder une mesure de faveur au bénéfice de laquelle l’intéressé ne peut faire valoir aucun droit. S’il est loisible, dans ce dernier cas, à l’autorité compétente de définir des orientations générales pour l’octroi de ce type de mesures, l’intéressé ne saurait se prévaloir de telles orientations à l’appui d’un recours formé devant le juge administratif.
Inapplicabilité de l’enveloppe globale aux indemnités des conseillers territoriaux
CE, 21 sept. 2020, n° 426376, Établissement public territorial Plaine Commune. Le quatrième alinéa de l’article L. 5219-2-1 du Code général des collectivités territoriales, qui prévoit que les indemnités des élus des établissements publics territoriaux sont régies par les dispositions de l’article L. 5211-12 du même code à l’exception de celles de son premier alinéa, doit être interprété comme rendant applicable le dispositif de l’enveloppe indemnitaire globale, prévu au deuxième alinéa de ce dernier article et qui constitue, pour les autres établissements publics de coopération intercommunale, un plafond uniquement pour les indemnités attribuées aux présidents, vice-présidents et, lorsqu’elles sont facultatives, à certains conseillers, aux indemnités votées par le conseil de territoire pour l’exercice effectif des fonctions de président et de vice-président d’un établissement public territorial, mais non aux indemnités prévues de droit par le Code général des collectivités territoriales pour l’exercice effectif des fonctions de conseiller d’un établissement public territorial.
Jurisprudence Czabaj et recours juridictionnels
CE, 25 sept. 2020, n° 430945, Sté La Chaumière et Mme A. En règle générale et sauf circonstances particulières dont se prévaudrait le requérant, le délai raisonnable au-delà duquel il est impossible d’exercer un recours juridictionnel ne saurait, sous réserve de l’exercice de recours administratifs pour lesquels les textes prévoient des délais particuliers, excéder un an à compter de la date à laquelle une décision expresse lui a été notifiée ou de la date à laquelle il est établi qu’il en a eu connaissance. Ces règles sont applicables à la contestation des décisions non réglementaires qui ne présentent pas le caractère de décisions individuelles, lorsque la contestation émane des destinataires de ces décisions à l’égard desquels une notification est requise pour déclencher le délai de recours.
Par une appréciation souveraine des faits exempte de dénaturation, la cour a jugé qu’en se bornant à invoquer l’atteinte que porterait l’arrêté litigieux au droit de propriété, les requérants ne faisaient état d’aucune circonstance particulière justifiant de proroger au-delà d’un an le délai raisonnable dans lequel elles pouvaient exercer un recours juridictionnel2.
Annulation d’une décision de préemption : office du juge de l’exécution
CE, 28 sept. 2020, n° 436978, Ville de Paris. Il appartient au juge administratif, saisi de conclusions en ce sens par l’ancien propriétaire ou par l’acquéreur évincé et après avoir mis en cause l’autre partie à la vente initialement projetée, d’exercer les pouvoirs qu’il tient des articles L. 911-1 et suivants du Code de justice administrative afin d’ordonner, le cas échéant sous astreinte, les mesures qu’implique l’annulation, par le juge de l’excès de pouvoir, d’une décision de préemption, sous réserve de la compétence du juge judiciaire, en cas de désaccord sur le prix auquel l’acquisition du bien doit être proposée, pour fixer ce prix. À ce titre, il lui appartient, après avoir vérifié, au regard de l’ensemble des intérêts en présence, que le rétablissement de la situation initiale ne porte pas une atteinte excessive à l’intérêt général, de prescrire au titulaire du droit de préemption qui a acquis le bien illégalement préempté, s’il ne l’a pas entre-temps cédé à un tiers, de prendre toute mesure afin de mettre fin aux effets de la décision annulée et, en particulier, de proposer à l’ancien propriétaire puis, le cas échéant, à l’acquéreur évincé d’acquérir le bien, à un prix visant à rétablir, sans enrichissement injustifié de l’une des parties, les conditions de la transaction à laquelle l’exercice du droit de préemption a fait obstacle.
Contestation par QPC d’une ordonnance non ratifiée
CE, 28 sept. 2020, n° 441059, U. et a. Le délai d’habilitation ayant expiré3 et les dispositions [de l’article L. 3841-2 du Code de la santé publique] litigieuses étant intervenues dans des matières qui sont du domaine législatif, la circonstance que l’ordonnance du 22 avril 2020 n’ait pas encore été ratifiée ne fait pas obstacle au fait que, dans le cadre d’un recours dirigé contre un décret pris pour son application, la question de la conformité des dispositions en cause aux droits et libertés garantis par la Constitution soit transmise au Conseil constitutionnel.
Le forfait de post-stationnement ne présente pas le caractère d’une sanction
CE, 30 sept. 2020, n° 438253, Sté Sixt AF. Le forfait de post-stationnement prévu par l’article L. 2333-87 du Code général des collectivités territoriales constitue le montant de la redevance d’occupation du domaine public qui doit être acquitté lorsque celle-ci n’a pas été payée dès le début du stationnement. Il n’a pas le caractère d’une indemnité qui viserait à réparer un dommage causé par une faute de celui qui doit l’acquitter. Par la suite, la société requérante ne peut utilement soutenir que les dispositions relatives au paiement du forfait de post-stationnement méconnaissent le principe constitutionnel selon lequel nul ne peut s’exonérer de sa responsabilité personnelle, garanti par l’article 4 de la Déclaration de 1789. La personne morale propriétaire du véhicule étant, en sa qualité de titulaire du certificat d’immatriculation, débitrice du forfait de post-stationnement, les dispositions contestées n’ont pas, en prévoyant qu’elle serait redevable de la majoration prévue en l’absence de paiement de ce forfait dans les délais légaux, méconnu ce même principe de responsabilité.
Ne visant pas à réprimer un manquement du titulaire du certificat d’immatriculation à une obligation légale ou contractuelle, il ne saurait avoir le caractère d’une sanction. Par suite, la requérante ne peut utilement soutenir que les dispositions législatives critiquées méconnaissent les principes des droits de la défense et de personnalité des peines garantis par l’article 8 de la Déclaration de 1789. Par ailleurs, les conditions dans lesquelles une majoration de ce forfait peut être mise à la charge de cette même personne en cas d’absence de paiement ne méconnaissent pas davantage les droits de la défense et le principe de personnalité des peines garantis par cet article.
De la distinction entre redevance et impôt
CE, 5 oct. 2020, n° 423928, Sté Le Nickel. La redevance superficiaire, introduite à l’article Lp. 131-3 par la loi du pays du 16 avril 2009 relative au Code minier de la Nouvelle-Calédonie, n’a ni le caractère d’une redevance domaniale, dès lors qu’elle ne constitue pas la contrepartie de l’autorisation d’occuper le domaine public, ni le caractère d’une redevance pour service rendu, dès lors qu’elle ne tend pas à couvrir les charges d’un service public ou les frais d’établissement et d’entretien d’un ouvrage public et ne trouve pas sa contrepartie dans les prestations fournies par ce service ou l’utilisation de cet ouvrage. La redevance superficiaire exigée lors de l’attribution d’une concession doit dès lors être regardée comme un impôt, droit ou taxe institué par la Nouvelle-Calédonie sur le fondement de la compétence qui lui est reconnue par l’article 22 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999. Alors même qu’elle a été instituée par le Code minier, cette redevance entre dans le champ du régime de stabilisation fiscale prévu par l’article 7 du Code général des impôts de la Nouvelle-Calédonie.
Responsabilité de l’État du fait d’une violation du droit de l’Union par un jugement
CE, 9 oct. 2020, n° 414423, Sté Lactalis Ingrédients. En vertu des principes généraux régissant la responsabilité de la puissance publique, une faute lourde commise dans l’exercice de la fonction juridictionnelle par une juridiction administrative est susceptible d’ouvrir droit à indemnité4. Si l’autorité qui s’attache à la chose jugée s’oppose à la mise en jeu de cette responsabilité dans les cas où la faute lourde alléguée résulterait du contenu même de la décision juridictionnelle et où cette décision serait devenue définitive, la responsabilité de l’État peut cependant être engagée dans le cas où le contenu de la décision juridictionnelle est entaché d’une violation manifeste du droit de l’Union européenne ayant pour objet de conférer des droits aux particuliers.
Pour apprécier si le contenu d’une décision juridictionnelle de l’ordre administratif est entaché d’une violation manifeste du droit de l’Union européenne, il appartient au juge administratif, ainsi que la Cour de justice de l’Union européenne l’a indiqué dans ses arrêts Köbler du 30 septembre 2003 (CJUE, 30 sept. 2003, n° C-224/01), Tomášová du 28 juillet 2016 (CJUE, 28 juill. 2016, n° C-168/15) et Hochtief Solutions Magyarországi Fióktelepe du 29 juillet 2019 (CJUE, 29 juill. 2019, n° C-620/17), de tenir compte de tous les éléments caractérisant la situation qui lui est soumise, notamment du degré de clarté et de précision de la règle de droit de l’Union en question, de l’étendue de la marge d’appréciation que cette règle laisse aux autorités nationales, du caractère intentionnel ou involontaire du manquement commis ou du préjudice causé. En particulier, une violation du droit de l’Union est suffisamment caractérisée lorsque la décision juridictionnelle concernée est intervenue en méconnaissance manifeste d’une jurisprudence bien établie de la Cour de justice de l’Union européenne en la matière.
Il résulte de ces jurisprudences, notamment de l’arrêt Köbler, qu’il appartient à l’ordre juridique de chaque État membre de désigner la juridiction compétente pour trancher les litiges relatifs à la réparation des dommages causés aux particuliers par les violations du droit de l’Union qui résultent du contenu d’une décision d’une juridiction nationale statuant en dernier ressort, et qu’il revient au juge national compétent de rechercher si la juridiction nationale en question a méconnu de manière manifeste le droit de l’Union applicable.
Il y a lieu, pour le juge administratif saisi de conclusions tendant à ce que la responsabilité de l’État soit engagée du fait d’une violation manifeste du droit de l’Union à raison du contenu d’une décision d’une juridiction administrative devenue définitive, de rechercher si cette décision a manifestement méconnu le droit de l’Union européenne au regard des circonstances de fait et de droit applicables à la date de cette décision.
Rejet implicite d’un recours gracieux : application de la jurisprudence Czabaj
CE, 12 oct. 2020, n° 429185, Ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation. Les règles relatives au délai raisonnable au-delà duquel le destinataire d’une décision ne peut exercer de recours juridictionnel sont applicables à la contestation d’une décision implicite de rejet née du silence gardé par l’Administration sur une demande présentée devant elle, lorsqu’il est établi que le demandeur a eu connaissance de la décision5. Le principe s’applique également au rejet implicite d’un recours gracieux6. La preuve de la connaissance du rejet implicite d’un recours gracieux ne saurait résulter du seul écoulement du temps depuis la présentation du recours. Elle peut en revanche résulter de ce qu’il est établi, soit que l’intéressé a été clairement informé des conditions de naissance d’un refus implicite de son recours gracieux, soit que la décision prise sur ce recours a par la suite été expressément mentionnée au cours de ses échanges avec l’Administration. S’il n’a pas été informé des voies et délais dans les conditions prévues par les textes applicables, l’auteur du recours gracieux dispose, pour saisir le juge, d’un délai raisonnable qui court, dans la première hypothèse, de la date de naissance de la décision implicite et, dans la seconde, de la date de l’événement établissant qu’il a eu connaissance de cette décision.
Contrôle restreint sur les critères de rémunération d’un enseignant contractuel
CE, 12 oct. 2020, n° 428656, Mme A. Il résulte des articles 4 et 5 du décret n° 81-535 du 12 mai 1981 et de l’arrêté interministériel du 29 août 1989 fixant la rémunération des professeurs contractuels que le classement d’un professeur contractuel dans l’une des quatre catégories de rémunération est opéré par l’autorité administrative sur la base exclusive des titres universitaires détenus et de la qualification professionnelle antérieure. Il appartient ensuite à l’autorité administrative de déterminer la rémunération de l’agent en tenant compte, au sein de la catégorie retenue, des indices minimum, moyen et maximum prévus par l’arrêté du 29 août 1989, en fonction notamment de l’expérience de cet agent dans l’enseignement et des caractéristiques particulières du poste pour lequel il est recruté. Il incombe au juge, saisi d’une contestation en ce sens, de vérifier qu’en déterminant, d’une part, la classe de rattachement de l’agent et, d’autre part, sa rémunération, l’Administration n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation.
Annulation du décret d’application d’une loi incompatible avec le droit de l’Union : régime supplétif applicable
CE, 12 oct. 2020, n° 419146, Sté Vert Marine. Il résulte de l’interprétation donnée par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE, 11 juin 2020, n° C-472/19) que, pour ne pas méconnaître les objectifs de la directive du 26 février 2014, le droit français doit prévoir la possibilité pour un opérateur économique, lorsqu’il est condamné par un jugement définitif prononcé par une juridiction judiciaire pour une des infractions pénales énumérées à l’article L. 3123-1 du Code de la commande publique, et que, pour cette raison, il se trouve en principe exclu des procédures d’attribution des contrats de concession pour une durée de 5 ans, d’apporter la preuve qu’il a pris des mesures correctrices susceptibles de démontrer le rétablissement de sa fiabilité. Toutefois, la faculté de faire preuve de sa fiabilité ne saurait être ouverte lorsque l’opérateur a été expressément exclu par un jugement définitif de la participation à des procédures de passation de marché ou d’attribution de concession, pendant la période fixée par ce jugement.
L’article L. 3123-1 du Code de la commande publique est incompatible avec l’article 38 de la directive du 26 février 2014 en tant qu’il ne prévoit pas de dispositif de mise en conformité permettant à un opérateur économique candidat à l’attribution d’un contrat de concession d’échapper aux interdictions de soumissionner prévues en cas de condamnation pour certaines infractions.
La requérante est fondée à demander l’annulation de la décision implicite du Premier ministre rejetant sa demande d’abrogation des articles R. 3123-16 à R. 3123-21 du Code de la commande publique.
L’annulation a nécessairement pour conséquence que, dans l’attente de l’édiction des dispositions législatives et réglementaires nécessaires au plein respect des exigences découlant du droit de l’Union européenne, l’exclusion de la procédure de passation des contrats de concession prévue à l’article L. 3123-1 du Code de la commande publique n’est pas applicable à la personne qui, après avoir été mise à même de présenter ses observations, établit dans un délai raisonnable et par tout moyen auprès de l’autorité concédante qu’elle a pris les mesures nécessaires pour corriger les manquements correspondant aux infractions mentionnées au même article pour lesquelles elle a été définitivement condamnée et, le cas échéant, que sa participation à la procédure de passation du contrat de concession n’est pas susceptible de porter atteinte à l’égalité de traitement.
Assurance-chômage des agents publics : précisions procédurales
CE, 14 oct. 2020, n° 427696, C. En vertu de l’article L. 5424-1 du Code du travail, les agents fonctionnaires et non fonctionnaires de l’État involontairement privés d’emploi ont droit à une allocation d’assurance dont l’employeur assure la charge et dont il peut, en application de l’article L. 5424-2 du même code, confier la gestion à Pôle emploi par convention. Une telle convention de gestion ayant été signée entre l’ancien employeur du requérant et Pôle emploi, cet établissement public assurait, pour le compte des administrations de l’État relevant des ministères économiques et financiers, le calcul et le versement des prestations depuis le 1er février 2014.
S’agissant des prestations dues au titre de la période antérieure au 1er février 2014, à supposer que la convention conclue entre l’État et Pôle emploi soit restée sans incidence sur leur gestion, la demande adressée par le requérant à Pôle emploi en novembre 2014 devait être regardée comme adressée à l’État, compétent en la matière. En effet, en l’absence de décision expresse de l’État sur cette demande, il était réputé l’avoir implicitement rejetée à l’expiration du délai de 2 mois suivant la date de sa réception par Pôle emploi dès lors que ce dernier était tenu de la transmettre à l’autorité compétente en application des dispositions combinées des articles L. 114-2, L. 114-3 et L. 231-4 du Code des relations entre le public et l’Administration. En outre, dans cette hypothèse et eu égard à la nature de ce contentieux, il appartenait au tribunal, saisi d’un recours dirigé contre le refus des prestations sollicitées, de communiquer la requête tant à Pôle emploi qu’à l’autorité compétente au sein de l’État.
Une autorité publique n’est jamais tenue de prendre une circulaire
CE, 14 oct. 2020, n° 434802, Association pour une consommation éthique. S’il est loisible à une autorité publique de prendre des circulaires, instructions, recommandations, notes, présentations ou interprétations du droit positif visant à faire connaître l’interprétation qu’elle retient de l’état du droit, elle n’est jamais tenue de le faire7. Il en va de même lorsque le droit applicable résulte d’un règlement de l’Union européenne tel que le règlement n° 1169/2011 du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011 dont se prévaut en l’espèce l’association requérante, l’article 288 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne prévoyant qu’il est directement applicable dans l’ordre juridique interne. Il s’ensuit que le refus opposé à la demande de l’association requérante ne constitue pas une décision susceptible d’être déférée au juge de l’excès de pouvoir.
Montant du préjudice subi par une collectivité territoriale du fait des services fiscaux
CE, 15 oct. 2020, n° 420040, Communauté urbaine de Dunkerque. Une faute commise par l’Administration lors de l’exécution d’opérations se rattachant aux procédures d’établissement ou de recouvrement de l’impôt est de nature à engager la responsabilité de l’État à l’égard d’une collectivité territoriale ou de toute autre personne publique si elle lui a directement causé un préjudice. Le montant du préjudice indemnisable doit être calculé en tenant compte, le cas échéant, des impositions qui ont pu être perçues à tort par la même collectivité, à condition que cette perception ait un lien direct avec la faute qui se trouve à l’origine du préjudice dont la réparation est demandée8.
Mesures conservatoires prises par l’Autorité de la concurrence : compétence judiciaire
T. confl., 5 oct. 2020, n° 1493, Stés Google Ireland Ltd, Google LLC et Google France SARL. En vertu de l’article L. 464-7 du Code de commerce, les mesures conservatoires prises par l’Autorité de la concurrence sur le fondement de l’article L. 464-1 du Code de commerce peuvent faire l’objet d’un recours en annulation ou en réformation devant la cour d’appel de Paris.
La décision prise par l’Autorité de la concurrence, sur le fondement de l’article D. 464-8-1 du Code de commerce, de limiter ou non la publicité d’une décision prise sur le fondement de l’article L. 464-1 du même code est indissociable de cette décision elle-même. Dès lors, sa contestation relève également de la cour d’appel de Paris.
Notes de bas de pages
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1.
CE, sect., 4 févr. 2015, nos 383267 et 383268, Min. Intérieur c/ Cortes Ortiz : Lebon, p. 17.
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2.
CE, ass., 13 juill. 2016, n° 387763, Czabaj : Lebon, p. 340.
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3.
Ab. jur., CE, 13 juill. 2016, n° 396170, Syndicat national des entreprises des loisirs marchands (SNELM) et a. : Lebon T., p. 599 et 917. V. Cons. const., 28 mai 2020, n° 2020-843 QPC – Cons. const., 3 juill. 2020, n° 2020-851/852 QPC.
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4.
CE, 18 juin 2008, n° 295831, Gestas : Lebon, p. 230.
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5.
CE, ass., 13 juill. 2016, n° 387763, Czabaj : Lebon, p. 340.
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6.
CE, 18 mars 2019, n° 417270, B. : Lebon, p. 60.
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7.
CE, 8 déc. 2000, n° 209287, Syndicat Sud-PTT-Pays de Savoie : Lebon T., p. 1141 – CE, 14 mars 2003, n° 241057, Le G. : Lebon T., p. 617 et 897 – CE, 30 mars 2005, n° 266127, Syndicat national professionnel des médecins du travail : Lebon T., p. 692.
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8.
CE, 16 nov. 2011, n° 344621, Cne de Cherbourg-Octeville : Lebon T., p. 796, 874, 1139 et 1147 – CE, 24 avr. 2012, n° 337802, Cne de Valdoie : Lebon, p. 169.