Chronique de droit de la distribution 2019 (1re partie)
Suivant le plan de l’ouvrage dont elle constitue le prolongement (Dissaux N. et Loir R., Droit de la distribution, 2017, LGDJ, Précis Domat), la toute première livraison de cette chronique de droit de la distribution couvre l’intégralité de l’année 2019, année marquée par une importante réforme des relations commerciales et une actualité jurisprudentielle toujours aussi dense. Elle a été rédigée par Nicolas Dissaux, professeur à l’université de Lille, directeur du M2 Études judiciaires et processuelles, Yves-Édouard Le Bos, maître de conférences en droit privé à Sorbonne Nouvelle-Paris 3, et Romain Loir, maître de conférences en droit privé, HDR, à l’université de La Réunion, où il codirige le M2 Droit des affaires.
I – Les principes du droit de la distribution
A – Liberté
1 – Liberté de la concurrence
Concentrations. L’année 2019 aura été marquée par la poursuite du mouvement de modernisation et de simplification de la notification des opérations de concentration1. Un décret du 18 avril2 a en effet supprimé l’obligation de déposer trois ou quatre dossiers de notification et ouvert la possibilité d’une notification en ligne3. Au cours des mois écoulés, deux décisions méritent aussi d’être remarquées, car elles constituent les suites de l’importante affaire Fnac/Darty. On se souvient qu’en 2016 l’Autorité de la concurrence n’avait autorisé la prise de contrôle de Darty par la Fnac qu’à la condition que six magasins soient cédés4. La moitié de ces cessions n’ayant pas été réalisées, l’Autorité avait, en 2018, sanctionné Fnac-Darty à hauteur de 20 millions d’euros. Le Conseil d’État a estimé qu’elle n’avait, ce faisant, commis aucune erreur de droit ou d’appréciation5. L’autre décision remarquable émane de l’Autorité de la concurrence. En 2016, celle-ci avait, pour la première fois, englobé dans le même marché les ventes en magasin et les ventes réalisées sur internet. Elle retient la même approche 3 ans plus tard, dans le secteur de la vente de jouets6, dès lors que les canaux de distribution traditionnels et en ligne sont fortement substituables.
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Ententes. L’importance accordée au commerce en ligne est confirmée par la décision que l’Autorité de la concurrence a rendue le 1er juillet 20197. Relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la distribution des cycles haut de gamme, elle s’inscrit dans le droit fil du célèbre arrêt Pierre Fabre8 par lequel la CJCE avait jugé qu’une tête de réseau ne peut interdire à ses distributeurs de revendre via un site internet. L’Autorité de la concurrence estime en effet que la clause du contrat de distribution sélective qui impose aux distributeurs de livrer les cycles haut de gamme dans des points de vente physiques, leur interdisant de facto la vente en ligne, va au-delà de ce qui est nécessaire pour protéger la sécurité des consommateurs et la haute technicité des produits. Particulièrement nocive pour la concurrence, cette stipulation constitue une restriction anticoncurrentielle par l’objet. Si des exceptions demeurent imaginables (lorsque l’interdiction est proportionnée aux objectifs légitimes de « préservation de la qualité des produits et de sécurisation de leur bon usage » et si elle ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre ces objectifs), elles paraissent donc bien limitées9. Au nom de la liberté de la concurrence, il est donc interdit d’interdire la vente sur le propre site internet du distributeur. En revanche, on rappellera que la CJUE a admis qu’une tête de réseau puisse prohiber la commercialisation de produits de luxe via des plates-formes en ligne10. Combien de temps cette distinction entre la vente sur le site du distributeur et celle sur une market place va-t-elle pouvoir tenir ?
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Abus de position dominante. Si l’augmentation des tarifs peut être condamnée par le « petit » droit de la concurrence11, elle ne tombe pas forcément sous la coupe du « grand ». L’Autorité de la concurrence avait pourtant retenu que la société Sanicorse, spécialisée dans l’élimination des déchets d’activités de soins à risques infectieux, s’était rendue coupable d’un abus de position dominante, qualifié d’abus « d’exploitation », en imposant à ses clients captifs une « augmentation brutale, significative, persistante et injustifiée du prix des prestations d’élimination, et notamment du traitement des déchets »12. La cour d’appel de Paris n’est toutefois pas de cet avis et refuse de voir dans la pratique concernée un abus « d’exploitation » : « Il n’appartient en effet pas à l’Autorité de se substituer aux organes de direction de l’entreprise en position dominante pour déterminer quelle doit être sa politique, notamment tarifaire, sur le marché pertinent, et ce n’est que si, et seulement si, les conditions de transactions passées entre cette entreprise et ses partenaires économiques peuvent, au vu de l’ensemble des circonstances de la cause, être objectivement qualifiées de non équitables, que l’Autorité est en droit d’intervenir »13. La liberté des prix reste bien le principe ! Et pour les juges parisiens, l’abus ne pourra être retenu que si les prix résultant de l’augmentation sont excessifs : « Dès lors que l’application d’une augmentation tarifaire n’est rien d’autre que la fixation d’un prix, l’appréciation du caractère équitable ou non équitable d’une telle augmentation se confond avec celle du caractère équitable ou non équitable du prix en résultant ». Or cet excès n’était, selon eux, pas établi en l’espèce.
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2 – Liberté contractuelle
Liberté contractuelle et refus d’agrément. La distribution sélective repose sur des critères définis par le fournisseur, destinés à choisir les distributeurs14. On aurait pu penser, du moins en matière de distribution sélective qualitative, que le candidat qui correspond à ces critères est en droit d’intégrer le réseau ou d’y demeurer : à quoi bon en effet fixer des critères s’ils ne sont pas déterminants ? Ce n’est pourtant pas la position retenue par la jurisprudence, pour laquelle la liberté contractuelle implique le droit de ne pas retenir un candidat qui remplirait les critères15 ou de ne pas renouveler son contrat16. Les juges ont enfoncé le clou en 2019. Dans une première affaire, la cour d’appel avait retenu la responsabilité de la tête d’un réseau de distribution sélective qui avait refusé son agrément. Les juges du fond s’étaient fondés sur l’obligation de bonne foi du fournisseur, qui lui imposerait non seulement de sélectionner ses distributeurs sur le fondement de critères définis et objectivement fixés, mais aussi d’appliquer ceux-ci de manière non discriminatoire. Cassation, au visa des principes de liberté contractuelle et de liberté du commerce et de l’industrie : « L’exigence de bonne foi ne requiert pas, de la part de la tête d’un réseau de distribution, la détermination et la mise en œuvre d’un tel processus de sélection »17. Les têtes de réseau sont donc parfaitement libres de refuser un candidat. C’est très nettement dans cette perspective que s’inscrit l’arrêt rendu par la cour d’appel de Paris dans une seconde affaire : « Il convient de rappeler qu’aucune obligation de conclure un contrat de distribution sélective avec tous les distributeurs remplissant les critères de sélection ne pèse sur le fournisseur, en raison du principe de la liberté contractuelle. De la même façon, le fournisseur n’a aucune obligation d’agréer à nouveau un distributeur après la résiliation de son contrat, même s’il remplit les critères, les engagements perpétuels étant prohibés »18. Le principe est donc clair, mais pas pour autant sans limites : d’une part, le droit commun prohibe l’abus19 ; d’autre part, le droit de la concurrence peut avoir une incidence importante. Bien que cela ne relève pas de l’évidence, les juges considèrent en effet que le refus d’agrément ne constitue pas une pratique unilatérale mais un accord de volontés susceptible de caractériser une entente anticoncurrentielle20. L’analyse, développée par la CJCE dès 198321, repose sur l’idée selon laquelle « l’agrément se fonde sur l’acceptation, expresse ou tacite, de la part des contractants, de la politique poursuivie par AEG exigeant, entre autres, l’exclusion du réseau de distributeurs ayant les qualités pour y être admis, mais n’étant pas disposés à adhérer à cette politique »22. Reste à savoir quand un refus d’agrément constitue une entente anticoncurrentielle. Cela pourrait être le cas lorsqu’il s’insère « dans une politique générale du fournisseur visant à exclure une ou des formes déterminées de distribution qui seraient aptes à distribuer les produits en cause, à créer des barrières artificielles à l’entrée sur le marché de la distribution des produits concernés ou à éliminer des distributeurs menant une pratique de prix bas »23. En tout état de cause, on rappellera aussi que le refus d’agrément peut être couvert par le règlement d’exemption n° 330/201024.
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3 – Liberté des prix
B – Transparence
Réforme des relations commerciales. Quelques mois après la loi EGALIM25, l’ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 201926 a opéré une réforme d’ampleur du titre IV du livre IV du Code de commerce27 (v. infra), ce titre crucial qui pose d’indispensables règles de transparence et prohibe les pratiques restrictives de concurrence, dont certaines sont à l’origine d’un contentieux considérable. Accueilli avec un certain scepticisme28, le texte modifie aussi bien la forme que le fond du droit des relations commerciales.
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Forme. En la forme, l’ordonnance réalise une appréciable restructuration d’un titre jusque-là mal fagoté. Le chapitre premier, désormais intitulé « De la transparence de la relation commerciale », est divisé en trois sections, qui portent respectivement sur « Les conditions générales de vente », « La négociation et la formalisation de la relation commerciale » (la section étant elle-même divisée en deux sous-sections, relatives aux conventions écrites et à la clause de renégociation), puis « La facturation et les délais de paiement ». Les dispositions relatives à ceux-ci (qui constituent une sous-section 2, la sous-section 1 étant consacrée à la facturation) sont largement réorganisées et s’avèrent désormais beaucoup plus lisibles. Rebaptisé « Des pratiques commerciales déloyales entre entreprises », le chapitre 2 régit les « pratiques restrictives de concurrence » et les « autres pratiques prohibées ». Quant au chapitre 3, corroborant l’existence d’un droit spécial de la distribution agricole, il regroupe les « Dispositions spécifiques aux produits agricoles et aux denrées alimentaires », soit une série de règles relatives aux annonces de prix29, à l’exigence d’un contrat écrit ou d’un bon de commande dans certains cas30, ainsi qu’à l’obligation de faire référence, dans les conventions écrites et dans les conditions générales de vente, aux indicateurs dégagés par la loi EGALIM31.
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Fond. Sur le fond, l’ordonnance consacre des solutions jurisprudentielles, mais elle comporte surtout de profondes innovations. Le gouvernement a manifestement entendu rassurer certains acteurs de la distribution en introduisant, avec plus ou moins de succès, davantage de flexibilité et de sécurité. À s’en tenir à l’essentiel, deux piliers du droit des relations commerciales sont affectés : le premier concerne la transparence de ces relations ; le second, leur équilibre (v. infra).
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Essentiel. Sans pouvoir entrer dans le détail des différentes innovations, on se contentera ici de l’essentiel32 :
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facturation : la réforme ne révolutionne pas les règles applicables à la facturation. Elle n’opère que quelques modifications, applicables aux factures émises après le 1er octobre 201933 ;
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conditions générales de vente (CGV) : les premiers changements concernent le contenu des conditions générales de vente34 ; celui-ci n’est plus défini limitativement (« notamment ») et ne recouvre plus nécessairement les « conditions de vente », ce qui est heureux35. Pour les produits agricoles ou pour les produits alimentaires comportant un ou plusieurs produits agricoles, les CGV devront faire référence aux indicateurs énumérés par le Code rural depuis la loi EGALIM36 et expliciter les conditions dans lesquelles il en est tenu compte pour la détermination des prix37. Les seconds changements affectent l’obligation de communication des CGV : « Toute personne exerçant des activités de production, de distribution ou de services qui établit des conditions générales de vente est tenue de les communiquer à tout acheteur qui en fait la demande pour une activité professionnelle (…) ». C’est un éclaircissement : en principe, l’établissement des CGV n’est pas obligatoire. Les modalités de la transmission sont précisées, le texte indiquant qu’elle s’effectue par tout moyen constituant un « support durable »38. La sanction est une amende administrative39 ;
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conventions récapitulatives : les nouvelles dispositions40 sont en principe applicables aux conventions conclues postérieurement à l’entrée en vigueur de l’ordonnance. Sous deux réserves néanmoins. La première concerne les conventions conclues pour une durée supérieure à 1 an, en cours au jour de l’entrée en vigueur de l’ordonnance : elles sont soumises à celle-ci à compter du 1er mars 202041. La seconde concerne les avenants (v. ci-dessous).
Les textes anciens définissaient un régime de droit commun42 et un régime spécifique aux grossistes43. La réforme abolit cette distinction, pour lui substituer celle qui oppose la convention de droit commun, applicable aux grossistes44, à la convention relative aux « produits de grande consommation », qui n’est pas applicable à ces derniers45. Ces produits de grande consommation, énumérés par un décret n° 2019-1413 du 19 décembre 2019 (il s’agit par exemple des produits alimentaires, des boissons (alcoolisées ou non), des produits de lavage d’entretien ou d’hygiène corporelle…), sont « des produits non durables à forte fréquence et récurrence de consommation ».
Le régime de la convention de droit commun est marqué par trois changements importants. Primo, le texte précise que tout avenant « (…) fait l’objet d’un écrit qui mentionne l’élément nouveau le justifiant »46. Cette disposition, applicable immédiatement aux contrats en cours47, doit permettre un meilleur contrôle de ces modifications par l’Administration. Deuxio, les « services de coopération commerciale » concourent désormais à la détermination du prix convenu. Tertio, une certaine souplesse est accordée aux négociateurs, puisque le fournisseur ne devra communiquer ses conditions générales de vente au distributeur que dans un « délai raisonnable » avant le 1er mars48, date à laquelle, comme par le passé, la convention doit être conclue pour une durée de 1, 2 ou 3 ans. Il n’en reste pas moins que l’ensemble demeure assez lourd.
La convention propre aux produits de grande consommation doit mentionner « (…) le barème des prix unitaires (…) »49, ainsi que le « (…) chiffre d’affaires prévisionnel (…) »50. Lorsque la convention est conclue pour une durée de 2 ou 3 ans, il faudra prendre garde à définir les modalités selon lesquelles ce prévisionnel sera révisé51. La date limite de communication des CGV est en outre de rigueur : cette transmission doit intervenir « (…) au plus tard 3 mois avant le 1er mars (…) », la dérogation pour les produits soumis à un cycle de commercialisation particulier étant toutefois maintenue52.
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Nouvelle réforme ? À peine 5 mois après l’ordonnance du 24 avril, une commission d’enquête parlementaire a rendu public un rapport riche de 41 propositions, qui pourraient aboutir à de nouvelles modifications du droit des relations commerciales53 ! N’était-il pas possible de réfléchir un peu plus tôt à ces propositions de façon à éviter de modifier substantiellement un texte nouveau-né ? Il ne faudrait pas perdre de vue que la modification incessante des textes affecte considérablement les pratiques des professionnels du secteur et s’avère source d’une insécurité juridique extrêmement préjudiciable.
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C – Équilibre
1 – Actualité législative et réglementaire
Ordonnance du 24 avril 2019. Opérant un parallèle évident avec les dispositions du Code de la consommation, l’ordonnance du 24 avril intitule le chapitre II du titre IV du Code de commerce « Pratiques commerciales déloyales entre entreprises ». La section 2 regroupe trois pratiques prohibées : la hausse ou la baisse artificielle des prix54 ; la vente « hors statuts » par une association ou une coopérative d’entreprise et d’administration55 ; et l’utilisation irrégulière du domaine public pour la vente de produits ou une prestation de services56. Sur le fond, le droit applicable à ces pratiques n’est guère modifié. En revanche, la section 1 change profondément les règles applicables aux pratiques restrictives de concurrence, ainsi que leurs sanctions.
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Les pratiques restrictives de concurrence. Le nouvel article L. 442-1 du Code de commerce ne vise plus que trois pratiques prohibées : l’obtention d’un avantage sans contrepartie ou disproportionné ; la soumission à des obligations créant un déséquilibre significatif ; et la rupture brutale des relations commerciales établies.
L’article L. 442-2 du Code de commerce maintient l’interdiction de la revente hors réseau, qui avait failli être supprimée. Quant à l’article L. 442-3, il ne prévoit la nullité que des clauses ou contrats prévoyant, d’une part, la possibilité de bénéficier rétroactivement de remises, de ristournes ou d’accords de coopération commerciale57 ; d’autre part, la possibilité de bénéficier automatiquement des conditions plus favorables consenties aux entreprises concurrentes par le cocontractant58.
La revente à perte est désormais visée par l’article L. 442-5 du Code de commerce, les exceptions étant intégrées à ce même texte, tandis que l’article L. 442-6 prohibe l’imposition d’un prix de revente. L’article L. 442-7 issu de l’ordonnance n° 2019-358 définit en des termes renouvelés la pratique de prix de cession abusivement bas. Enfin, l’article L. 442-8 remplace l’ancien article L. 442-10 sur les enchères inversées à distance.
À bien y regarder, seuls les articles L. 442-1 et L. 442-7 du Code de commerce comportent des modifications notables.
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Article L. 442-1 du Code de commerce. Le texte précise d’abord la personne susceptible d’être sanctionnée. C’est celle qui exerce des « (…) activités de production, de distribution ou de services (…) »59. S’agissant des seules pratiques visées par l’article L. 442-1, I, l’ordonnance prévoit qu’elles peuvent être caractérisées aussi bien « (…) dans le cadre de la négociation commerciale (…) » que dans celui de « (…) la conclusion ou de l’exécution d’un contrat (…) ».
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Avantage sans contrepartie. La première pratique prohibée60 fait l’objet d’une définition plus précise et plus juridique que par le passé, les auteurs du texte ayant utilement recours au terme de « contrepartie » : est sanctionné le fait « d’obtenir ou de tenter d’obtenir de l’autre partie un avantage ne correspondant à aucune contrepartie ou manifestement disproportionné au regard de la valeur de la contrepartie consentie ».
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Déséquilibre significatif. La deuxième est, quant à elle, modifiée sur un seul point. Alors que l’ancien texte visait le fait de soumettre ou de tenter de soumettre un « partenaire commercial » à des obligations créant un déséquilibre significatif, le nouveau fait référence à « l’autre partie ». Retour, là encore, à une terminologie plus juridique qu’économique. La substitution est importante, dans la mesure où la jurisprudence avait, en tirant argument de la notion de « partenaire commercial », entrepris de cantonner la pratique aux seules relations qui s’inscrivent dans une certaine durée et sont articulées autour d’un projet commun61. Un tel cantonnement, qui semblait peu justifié, n’a plus lieu d’être.
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Rupture brutale. La définition de la troisième pratique (la rupture brutale d’une relation commerciale établie) est également modifiée à plusieurs égards. Ainsi l’appréciation du préavis écrit tient-elle compte « notamment » de la durée de la relation commerciale, « (…) en référence aux usages du commerce ou aux accords interprofessionnels (…) ». Si elle constitue un élément important pour la détermination du délai de préavis, la durée de la relation n’est donc pas le seul élément à prendre en considération, ce qui est conforme à la jurisprudence. Le nouveau texte s’avère également plus souple, les délais fixés par les accords interprofessionnels n’étant que des indices, non des minimums à respecter impérativement. Les dispositions spécifiques aux produits sous marque de distributeur et aux enchères à distance ont été supprimées.
Surtout, l’article L. 442-1, II, alinéa 2, du Code de commerce prévoit aujourd’hui qu’en cas de litige entre les parties sur la durée du préavis « (…) la responsabilité de l’auteur de la rupture ne peut être engagée du chef d’une durée insuffisante dès lors qu’il a respecté un préavis de 18 mois (…) »62. On comprend bien la justification de ce plafond, qui tient à la volonté d’éviter la fixation par le juge de préavis exagérément longs et de sécuriser l’auteur de la rupture. On peut toutefois douter de son efficacité et de sa pertinence : de son efficacité, car la plupart des relations commerciales n’imposent de toute façon pas une durée de préavis aussi longue ; de sa pertinence, dans la mesure où, dans certains cas exceptionnels, un préavis de 18 mois peut s’avérer insuffisant. Pourquoi la partie qui subit la rupture devrait-elle alors renoncer à un préavis plus long et ne pas obtenir une indemnisation à hauteur de son préjudice en cas de préavis trop bref ?
On peut encore s’interroger sur l’entrée en vigueur de ce nouveau plafond. A priori, rien n’interdirait de l’appliquer à une relation délictuelle engagée avant l’entrée en vigueur de l’ordonnance, mais dont la rupture serait postérieure à cette dernière.
Une nouvelle réforme du droit de la rupture brutale des relations commerciales établies semble envisagée, si peu de temps après l’ordonnance du 24 avril. Il est notamment envisagé d’imposer un délai de préavis minimum de 6 mois et d’imposer une motivation écrite de toutes les ruptures…63
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Les sanctions. Exception faite des pratiques visées par les articles L. 442-5 et L. 442-6 du Code de commerce, passibles de sanctions pénales, les sanctions sont d’ordre civil et résident dans l’engagement de la responsabilité de l’auteur de la pratique64, ou dans la nullité des clauses ou contrats65.
L’article L. 442-4 du Code de commerce innove en prévoyant que « toute personne justifiant d’un intérêt peut demander à la juridiction saisie d’ordonner la cessation des pratiques (…) » restrictives de concurrence66, « ainsi que la réparation du préjudice subi », alors que l’action était autrefois réservée au ministère public ou au ministre de l’Économie. Il ajoute que « seule la partie victime [de ces] pratiques (…) peut faire constater la nullité des clauses ou contrats illicites ». Il en ressort que la sanction d’une clause abusive est, en droit commercial, la nullité, pas le « non écrit ». Ce choix, qui tranche curieusement avec celui opéré par le Code civil67 et le Code de la consommation68, n’est pas sans incidence69. Au regard de la récente jurisprudence du Conseil constitutionnel, dont il ressort que l’interdiction des clauses abusives protège un intérêt général70, la voie de l’action en nullité aurait pu être ouverte plus largement ; mais le texte la réserve à la partie protégée.
Le ministère public et le ministre de l’Économie conservent les pouvoirs dont ils disposaient avant la réforme71 mais le montant de l’amende civile est plafonné72. Il ne peut en effet excéder le plus élevé des trois montants suivants : 5 millions d’euros ; le triple du montant des avantages indûment perçus ; ou 5 % du chiffre d’affaires hors taxes réalisé en France par l’auteur des pratiques. Avant l’ordonnance, le juge pouvait fixer le montant de l’amende indifféremment en fonction de l’un ou l’autre de ces critères.
Malheureusement, la spécialisation des juridictions n’est pas remise en cause73 : elle ne repose pourtant en la matière sur aucune justification sérieuse et s’avère source de regrettables difficultés pratiques et procédurales.
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Le décret n° 2019-642 du 26 juin 2019 liste les catégories de produits biocides dont les pratiques commerciales telles que les remises, les rabais, les ristournes, la différenciation des conditions générales et particulières de vente au sens du I de l’article L. 441-6 du Code de commerce ou la remise d’unités gratuites et toutes pratiques équivalentes sont interdites.
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2 – Jurisprudence
a – Déséquilibre significatif
Partenaire commercial. L’ancien article L. 442-6, I, 2°, du Code de commerce interdisait le fait de soumettre ou de tenter de soumettre « un partenaire commercial » à des clauses abusives. Que fallait-il déduire de cette référence au « partenaire commercial » ? Assurément, que le texte n’a pas vocation à s’appliquer en l’absence de relation de nature commerciale74. Mais pour le reste ? La cour d’appel de Paris75, entraînant dans son sillage la Commission d’examen des pratiques commerciales76, avait cru pouvoir définir le partenaire commercial comme « le professionnel avec lequel une entreprise commerciale entretient des relations commerciales pour conduire une activité quelconque, ce qui suppose une volonté commune et réciproque d’effectuer de concert des actes ensemble dans des activités de production, de distribution ou de services, par opposition à la notion plus large d’agent économique ou plus étroite de cocontractant ». Il en résultait notamment que les relations sporadiques ou basées sur des engagements unilatéraux ne pouvaient être passées au crible du déséquilibre significatif. Ainsi, en l’espèce, les juges du fond77 avaient-ils exclu l’existence d’un partenariat commercial en présence de contrats de location de site internet qui n’engendraient aucun courant d’affaires stable et continu entre les parties dès lors qu’ils portaient sur des opérations ponctuelles à objet et durée limités ; ils ajoutaient que la société locataire ne faisait que s’acquitter de ses loyers, ce qui excluait toute réciprocité ou tout accord autour d’un projet commun. Une telle jurisprudence était de nature à réduire sensiblement le champ d’application de la prohibition commerciale des clauses abusives. Elle a néanmoins été condamnée par l’ordonnance du 24 avril 2019, qui a substitué la notion juridique de « partie » à celle de « partenaire commercial » (v. supra). Bien que non applicable aux faits de l’espèce, la réforme a sans doute inspiré les magistrats de la Cour de cassation, puisqu’ils ont récemment censuré l’arrêt de la cour d’appel de Paris en définissant le partenaire commercial comme « la partie avec laquelle l’autre partie s’engage, ou s’apprête à s’engager, dans une relation commerciale »7879. En posant une définition (beaucoup) plus exigeante, la cour d’appel avait ajouté au texte de l’ancien article L. 442-6, I, 2°, du Code de commerce une condition qu’il ne comportait pas. Désormais, plus question, donc, de cantonner la sanction du déséquilibre significatif aux seules relations stables, continues et axées autour d’une volonté commune ou d’un projet commun. C’est heureux car l’ancien texte ne paraissait effectivement guère poser une telle exigence80, et parce que la notion de « partenaire commercial » était suffisamment floue pour engendrer une réelle insécurité juridique81.
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Preuve de la soumission. En droit commercial, le déséquilibre significatif n’est, avant comme après l’ordonnance du 24 avril 2019, sanctionné que s’il résulte d’une « soumission » ou d’une « tentative de soumission »82. Le but n’est pas, en effet, d’éradiquer les déséquilibres librement acceptés. Mais comment prouver la contrainte, qui ne prend pas nécessairement la forme de pressions ou de coercitions irrésistibles83 ? C’est la question qui était au cœur de l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt de la chambre commerciale de la Cour de cassation du 20 novembre 201984. En l’espèce, le ministre de l’Économie avait agi contre diverses sociétés de la grande distribution en leur reprochant d’avoir imposé des clauses abusives dans les conventions qui les unissaient à leurs fournisseurs. La Cour de cassation approuve la cour d’appel d’avoir retenu que la preuve d’une soumission n’était pas établie. D’une part, elle juge que « si la structure d’ensemble du marché de la grande distribution peut constituer un indice de l’existence d’un rapport de force déséquilibré, se prêtant difficilement à des négociations véritables entre distributeurs et fournisseurs, ce seul élément ne peut suffire et doit être complété par d’autres indices établissant l’absence de négociation effective ». D’autre part, « s’il a pu être déduit, dans certains cas, un indice de soumission ou de tentative de soumission de déséquilibre significatif, de l’adoption, par un certain nombre de fournisseurs, de clauses identiques qui leur étaient manifestement défavorables, tel n’est pas le cas dans la présente espèce » puisque le ministre n’apportait aucun élément de preuve. L’arrêt délivre ainsi deux enseignements et soulève une interrogation. Premier enseignement : contrairement à ce qu’on avait pu penser85, la structure du marché de la grande distribution ne permet pas de présumer la soumission : le déséquilibre inhérent à ce marché ne peut être qu’un indice, parmi d’autres, de la contrainte. Deuxième enseignement, qui n’est qu’une confirmation : le caractère prérédigé de certaines clauses est un indice de la soumission86 mais… encore faut-il en rapporter la preuve. Enfin, une question : ne sera-t-il pas plus simple, à l’avenir, d’invoquer l’article L. 442-1, I, 1°, qui prohibe le fait « d’obtenir ou de tenter d’obtenir de l’autre partie un avantage ne correspondant à aucune contrepartie ou manifestement disproportionné au regard de la valeur de la contrepartie consentie » ? Ce texte n’impose pas, en effet, la preuve d’une soumission ou d’une tentative de soumission pour établir une telle pratique87.
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b – Rupture brutale des relations commerciales établies
Problèmes articulaires. Le droit de la rupture brutale des relations commerciales établies occupe une place si importante qu’il entre inévitablement en concurrence avec d’autres droits. Victime de sa croissance, il souffre de problèmes d’articulation avec le droit commun ainsi qu’avec certains droits spéciaux.
Articulation avec le droit commun. La première question est particulièrement délicate : si l’article L. 442-1, II88, du Code de commerce (fondement d’une action en responsabilité qui est en principe de nature délictuelle) est applicable, la victime de la rupture est-elle néanmoins en mesure d’invoquer le droit commun ? La jurisprudence était assez incertaine. Certains arrêts avaient répondu par la négative89, quand d’autres semblaient admettre une réponse positive90. Plusieurs décisions récentes pourraient permettre d’y voir un peu plus clair. Au premier abord pourtant, ces arrêts semblent assez contradictoires. Par l’un d’entre eux, la Cour de cassation juge en effet de façon très ferme que « les dispositions de l’article L. 442-6, I, 5°, du Code de commerce, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019, sont exclusives de celles de l’article 1382, devenu 1240, du Code civil »91. En l’espèce, le demandeur invoquait à titre principal le droit de la rupture brutale des relations commerciales établies et, à titre subsidiaire, le droit commun. La cour d’appel ayant retenu l’application du premier, « c’est à bon droit » qu’elle a pu juger que la demande fondée sur le droit commun de la responsabilité civile délictuelle devait être rejetée, « en l’absence de toute faute délictuelle distincte établie ». Le droit des relations commerciales chasse donc le droit commun. Pourtant, plusieurs autres décisions semblent ouvrir la voie à une invocation de celui-ci. À plusieurs reprises, la Cour de cassation a en effet confirmé la position adoptée en 201892 : « Le principe du non-cumul interdit seulement au créancier d’une obligation contractuelle de se prévaloir, contre le débiteur de cette obligation, des règles de la responsabilité délictuelle et n’interdit pas la présentation d’une demande distincte, fondée sur l’article L. 442-6, I, 5°, du Code de commerce, qui tend à la réparation d’un préjudice résultant non pas d’un manquement contractuel mais de la rupture brutale d’une relation commerciale établie »93. Il est donc parfaitement possible d’invoquer à la fois les dispositions du Code de commerce et celles du Code civil. Allant plus loin, la Cour de cassation a même censuré la décision de juges du fond qui avaient requalifié une demande fondée sur le droit commun, en jugeant que cette demande reposait, en réalité, sur les dispositions d’ordre public de l’ancien article L. 442-6, I, 5° : autant dire que si le demandeur entend invoquer le droit commun à la place du droit spécial, il est en droit de le faire94. Comment expliquer de telles divergences ? Tout s’éclaire si l’on distingue ainsi que le fait la Cour de cassation : la direction que prend cette dernière semble bien s’appuyer, en effet, sur une distinction entre deux hypothèses. Première situation : la victime de la rupture brutale invoque le droit commun de la responsabilité civile délictuelle ; cette voie lui est fermée95, sauf si elle invoque une faute délictuelle distincte. Comment justifier une telle solution ? Certainement pas par la règle selon laquelle le droit spécial l’emporte sur le droit commun car il n’existe ici aucune opposition entre l’un et l’autre96. En revanche, le caractère d’ordre public du droit de la rupture brutale pourrait constituer un argument beaucoup plus solide. Dans la mesure où il s’agit de sanctionner une faute délictuelle correspondant à la rupture d’une relation commerciale établie, on ne voit pas, en effet, comment il serait possible de contourner l’application d’une règle d’ordre public. Seconde hypothèse : la victime de la rupture entend invoquer le droit de la responsabilité civile contractuelle ; cette possibilité lui est clairement ouverte par la jurisprudence97, preuve que le droit spécial n’écarte pas nécessairement le droit commun. Comment expliquer cette autre solution ? Par l’idée selon laquelle l’action en responsabilité contractuelle et l’action fondée sur la rupture brutale des relations commerciales établies n’ont pas les mêmes origines et ne réparent pas forcément les mêmes préjudices. L’une prend sa source dans un manquement contractuel, dont elle indemnise toutes les conséquences prévisibles ; l’autre est fondée sur un manquement délictuel qui dépasse la sphère du seul contrat et vise à réparer les seuls préjudices consécutifs à la brutalité de la rupture. Invoquer le droit commun de la responsabilité contractuelle ne revient donc pas à contourner le droit de la rupture brutale des relations commerciales établies : il s’agit de sanctionner autre chose, voilà tout. C’est ce qu’illustre bien l’arrêt du 25 septembre 201998. En l’espèce, la victime fondait son action en indemnisation à la fois sur l’ancien article 1147 du Code civil et sur l’ancien article L. 442-6, I, 5°, et invoquait notamment une inexécution déloyale du préavis. La cour d’appel avait déclaré sa demande en dommages et intérêts au titre du préavis irrecevable en se fondant sur la règle de non-cumul des responsabilités contractuelle et délictuelle. Son arrêt est cassé : « En statuant ainsi, alors que, saisie de conclusions de la société Australie qui, sans contester la durée du préavis consenti, invoquaient une inexécution déloyale de celui-ci lui ayant fait subir un manque à gagner, il lui appartenait de déterminer le régime de responsabilité applicable à cette demande et de statuer en conséquence, la cour d’appel a violé les textes susvisés ». On comprend que l’une des demandes de la société ne tendait pas à obtenir la sanction d’une rupture brutale (elle ne visait pas à « contester la durée du préavis consenti »), mais celle d’un manquement à l’obligation de bonne foi au cours du préavis, c’est-à-dire a priori une inexécution du contrat source de responsabilité contractuelle99. Dès lors, et puisqu’il s’agit de deux demandes distinctes fondées sur des manquements distincts, le cumul est parfaitement possible. Il le serait d’ailleurs aussi si la victime invoquait une faute non plus contractuelle mais délictuelle distincte de la rupture brutale des relations commerciales établies100. Si la jurisprudence paraît ainsi plus claire, on émettra tout de même quelques réserves car il n’est pas toujours facile, loin s’en faut, de distinguer un manquement contractuel de la rupture brutale d’une relation commerciale établie. Ne serait-ce que parce qu’en pratique c’est bien souvent la violation d’un contrat qui marque la rupture…
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Articulation avec les droits spéciaux. La question de l’articulation du droit de la rupture brutale des relations commerciales établies avec d’autres droits spéciaux n’est pas simple. Il n’est pas certain, en effet, que l’on puisse toujours appliquer en la matière la règle selon laquelle le droit spécial l’emporte sur le droit commun101. Toujours est-il que la jurisprudence semble adopter la ligne directrice suivante : tout dépend du point de savoir si le régime en concurrence avec celui de l’actuel article L. 442-1, II, du Code de commerce prévoit ou non des règles relatives à la rupture de la relation concernée. Si la réponse est positive, le régime concurrent paraît devoir l’emporter102. En revanche, si ce régime concurrent ne prévoit rien, il n’y a guère d’obstacles à l’application du droit de la rupture brutale des relations commerciales établies. C’est ainsi que la Cour de cassation a cassé l’arrêt d’une cour d’appel qui avait écarté l’application de l’article L. 442-6, I, 5°, du Code de commerce à la cessation des relations entre un gérant-mandataire et son mandant : « Qu’en statuant ainsi, alors que, si le régime institué par les articles L. 146-1 et suivants du Code de commerce prévoit, en son article L. 146-4, le paiement d’une indemnité minimale au profit des gérants-mandataires en cas de résiliation du contrat sans faute grave de leur part, il ne règle en aucune manière la durée du préavis à respecter, que le même texte laisse à la convenance des parties, ce dont il se déduit qu’ont vocation à s’appliquer les règles de responsabilité instituées par l’article L. 442-6, I, 5°, du même code lorsque le préavis consenti est insuffisant au regard de la durée de la relation commerciale établie entre les parties et des autres circonstances, la cour d’appel a violé » l’article L. 442-6 du Code de commerce, applicable aux faits de l’espèce, ainsi que l’article L. 146-4 du Code de commerce103. La solution est plutôt logique : dans la mesure où il n’existe pas de contradiction entre les deux régimes, ils doivent pouvoir s’appliquer de façon complémentaire. Un autre arrêt suscite, en revanche, davantage d’interrogations. Il en ressort en effet que l’application du contrat-type LOTI institué par la loi d’orientation des transports intérieurs104 exclut celle du droit de la rupture brutale des relations commerciales établies : « Attendu que l’article L. 442-6, I, 5, du Code de commerce, qui instaure une responsabilité de nature délictuelle, ne s’applique pas dans le cadre des relations commerciales nées de transports publics routiers de marchandises exécutés par des sous-traitants, lorsque le contrat-type, qui prévoit la durée des préavis de rupture régit, faute de dispositions contractuelles, les rapports du sous-traitant et de l’opérateur de transport »105. Il est vrai que ce contrat-type prévoit des règles relatives à la rupture, dont la présence, on l’a dit, conduit généralement la Cour de cassation à écarter l’application du droit de la rupture brutale des relations commerciales établies. Mais le problème tient au fait que ces règles émanent… d’un contrat. Or les juges ne sont pas tenus par les stipulations contractuelles qui fixent la durée du préavis, pas plus d’ailleurs que par les usages106. Et même homologué par le pouvoir réglementaire, comment ce contrat-type pourrait-il écarter l’application d’une disposition d’ordre public ?
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Exigence d’une relation commerciale établie. Le caractère établi de la relation est souvent apprécié au regard des attentes légitimes de la prétendue victime107. Dans cette perspective, le seul fait d’annoncer la cession du fonds de commerce n’est pas à lui seul déterminant108. La cession n’empêche d’ailleurs pas de caractériser une relation unique malgré le changement de personnes, à la condition que le repreneur ait eu l’intention de poursuivre la relation initiale109. En revanche, le caractère établi de la relation ne peut être apprécié au regard des relations entretenues avec un groupe de sociétés, celui-ci étant dépourvu de personnalité morale : seules doivent être prises en compte les relations entretenues avec chacune des sociétés de ce groupe110.
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Brutalité de la rupture. Un arrêt du 7 mai 2019 tranche une question intéressante. En l’espèce, une entreprise avait, dès février 2012, notifié à son partenaire la résiliation des contrats qui les liaient, cette rupture devant prendre effet en décembre 2013. Après cette annonce, les parties ont longuement négocié en vue de la conclusion de nouveaux contrats. Finalement en vain, de sorte que l’entreprise informa en octobre 2013 son partenaire de sa volonté de ne pas renouveler les contrats. Pour apprécier la durée du préavis effectivement réalisé, fallait-il tenir compte de la notification initiale de rupture ou de l’annonce de non-renouvellement ? Sans surprise, la Cour de cassation retient que seule compte la notification, « la circonstance que les parties avaient poursuivi leurs échanges en vue de la conclusion de nouveaux contrats » ne pouvant, « à elle seule, faire échec aux effets d’une telle notification »111. La brutalité de la rupture n’en sera que plus difficile à établir.
Brutalité qui peut, dans de rares cas, s’avérer justifiée. On pense d’abord à l’hypothèse de l’inexécution de ses obligations par l’une des parties mais à la seule condition, rappelée à plusieurs reprises par la Cour de cassation en 2019, que ce manquement soit suffisamment grave112. On pense ensuite à l’hypothèse dans laquelle des circonstances économiques particulières justifieraient une rupture brutale. La Cour de cassation avait déjà admis cette sorte de « fait justificatif économique »113. Dans un arrêt rendu le 6 février 2019, elle approuve une cour d’appel d’avoir jugé que la rupture n’était pas imputable à une entreprise dont la situation, marquée par une diminution significative de son activité, était « consécutive à la crise financière et économique de 2008 »114. On notera que le pourvoi reprochait à la cour d’appel de n’avoir pas établi en quoi ces circonstances économiques étaient constitutives d’un cas de force majeure mais que la Cour de cassation affirme qu’une telle recherche n’était nullement nécessaire. Autrement dit, ce n’est pas en tant que cas de force majeure que les circonstances économiques peuvent justifier une rupture brutale ; il s’agit d’un fait justificatif autonome.
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Préjudice. En cas de rupture brutale, la victime est traditionnellement indemnisée à hauteur de la perte de marge brute subie pendant la période de préavis qui n’a pas été exécutée115. On a cependant justement fait remarquer que cette méthode d’indemnisation pouvait s’avérer trop généreuse, dans la mesure où elle ne prenait pas en considération les économies de coûts variables qui pouvaient être réalisées par la victime116. La jurisprudence n’est pas restée insensible à cette critique, plusieurs arrêts acceptant de déduire ces coûts variables du montant des dommages et intérêts117. Mais faut-il aller plus loin et tenir compte des économies de frais fixes éventuellement réalisées par la victime à partir de sa cessation d’activités ? La Cour de cassation l’avait déjà admis118 ; elle l’a récemment confirmé, approuvant une cour d’appel d’avoir soustrait à la perte de marge brute les économies de personnel et de loyer dont avait pu bénéficier la victime depuis la fin de son activité119. La solution peut paraître équitable, mais il faut bien comprendre que de telles économies ne seront pas toujours réalisées et qu’en outre leur preuve risque souvent d’être délicate. Équitable, elle n’en est pas moins difficilement compatible avec les décisions qui, par ailleurs, affirment qu’il n’y a pas lieu, pour évaluer le préjudice, de tenir compte des circonstances postérieures à la rupture (c’est d’ailleurs l’argument qu’invoquait le pourvoi en l’espèce). La jurisprudence refuse ainsi de tenir compte de la rapide reconversion de la victime après la rupture120. Elle refuse également de prendre en considération la rapide revente des marchandises, semblant malheureusement confondre l’appréciation de la durée du préavis nécessaire, qui s’apprécie uniquement au jour de la notification de la rupture, avec l’appréciation du préjudice, qui devrait s’apprécier au jour où le juge statue121.
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c – Autres pratiques
Revente hors réseau. On signalera un arrêt rendu par la cour d’appel de Paris le 9 janvier 2019122, condamnant sur le fondement de l’ancien article L. 442-6, I, 6°, du Code de commerce le tiers à un réseau de distribution sélective Porsche qui avait publié dans un magazine une offre de trois véhicules de la marque. Le texte sanctionnait en effet le fait de « participer directement ou indirectement à la violation de l’interdiction de revente hors réseau faite au distributeur lié par un accord de distribution sélective ou exclusive ». C’est au tiers de prouver l’origine de son approvisionnement123 : faute de le faire, il ne peut qu’engager sa responsabilité, comme en l’espèce. Malgré des hésitations, l’interdiction a été maintenue par la réforme de mai 2019124.
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d – Sanctions et procédure
Personnalité des peines. Alors qu’elle fait parfois prévaloir la rigueur juridique sur la réalité économique125 (v. supra), la Cour de cassation dépasse, d’autres fois, les notions strictement juridiques, pour s’appuyer sur des notions économiques. Dans une affaire opposant le ministre de l’Économie à Carrefour, la Cour de cassation s’était ainsi fondée sur la notion d’entreprise, sans vouloir s’arrêter à celle de personnalité juridique. En l’espèce, la DGCCRF du Cher avait assigné la SAS Carrefour Hypermarchés France en lui reprochant d’avoir obtenu des avantages manifestement disproportionnés au regard de la valeur du service rendu126. En cours de procédure, la société Carrefour France absorba la SAS Carrefour hypermarchés France, ce qui n’empêcha pas la cour d’appel de condamner la première au paiement d’une amende civile, en raison des faits commis par la seconde. Le pourvoi invoqua le principe de personnalité des peines, mais fut rejeté par la Cour de cassation : « que (…) les dispositions de l’article L. 442-6 du Code de commerce, qui visent tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers, auteur des pratiques restrictives énoncées par ce texte, s’appliquent à toute entreprise, indépendamment du statut juridique de celle-ci, et sans considération de la personne qui l’exploite ; que le principe de la personnalité des peines, résultant des articles 8 et 9 de la déclaration de 1789, ne fait pas obstacle au prononcé d’une amende civile à l’encontre de la personne morale à laquelle l’entreprise a été juridiquement transmise (…) »127. La CEDH a récemment jugé que cette solution ne portait pas atteinte au principe de personnalité des peines : « S’il est vrai qu’à l’issue de cette opération la société Carrefour hypermarchés France a cessé d’exister sur le plan juridique, il n’en reste pas moins que l’activité de l’entreprise dont elle était la structure juridique s’est poursuivie au travers de la société requérante » ; « partant, la Cour estime qu’en prononçant contre la société requérante l’amende civile prévue par l’article L. 442-6 du Code de commerce, sur le fondement du principe de la continuité économique et fonctionnelle de l’entreprise, les juridictions internes n’ont pas porté atteinte au principe de la personnalité des peines »128. C’est donc la logique du « grand » droit de la concurrence, lequel accorde, on le sait, une place centrale à la notion d’entreprise, qui gagne le « petit ». On peut toutefois se demander si la solution de la Cour de cassation pourra être maintenue à l’avenir, dès lors que le nouvel article L. 442-1 du Code de commerce vise toute « personne » exerçant des activités de production, de distribution ou de services…
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Juridictions spécialisées. Le Code de commerce attribue un « pouvoir juridictionnel exclusif » à certaines juridictions de première instance et à la cour d’appel de Paris pour connaître du contentieux né de l’ancien article L. 442-6, devenu l’article L. 442-1 du Code de commerce129. Cette spécialisation des juridictions, qui ne repose sur aucune justification sérieuse, est de surcroît à l’origine d’importantes difficultés procédurales. En particulier, que se passe-t-il lorsqu’une juridiction de première instance non spécialisée a, par erreur, statué en application de l’ancien article L. 442-6 ou du nouvel article L. 442-1 ? L’appel doit-il être dirigé devant la cour d’appel de Paris ou devant la cour d’appel dans le ressort de laquelle est située la juridiction qui a rendu la décision ? La Cour de cassation a heureusement posé une solution claire par deux arrêts du 29 mars 2017130 : la cour d’appel de Paris n’a de pouvoir juridictionnel exclusif que pour connaître des seuls appels dirigés contre des décisions émanant de juridictions spécialisées ; l’appel dirigé contre la décision d’une juridiction non spécialisée relève en revanche du pouvoir de la cour d’appel dans le ressort de laquelle est située cette juridiction. Dans la première hypothèse, encore faut-il que la juridiction spécialisée ait effectivement statué en application de l’ancien article L. 442-6 : est-ce le cas lorsque ce texte n’était invoqué qu’en tant que moyen de défense ou que sous la forme d’une demande subsidiaire ? La Cour de cassation a répondu par l’affirmative dans deux arrêts, du 3 juillet131 et du 6 novembre 2019132. Dans la seconde hypothèse, l’appel sera recevable mais les juges du second degré ne pourront statuer que « dans les limites de leur pouvoir juridictionnel », c’est-à-dire qu’ils ne pourront connaître d’une demande fondée sur l’article L. 442-1133. C’est ainsi que, pour censurer un arrêt de la cour d’appel de Grenoble qui avait déclaré un appel irrecevable, la chambre commerciale a jugé « que, saisie de l’appel d’un jugement rendu par le tribunal de commerce de Gap, juridiction non spécialisée située sur son ressort, il lui appartenait de déclarer l’appel recevable, de constater, le cas échéant, le défaut de pouvoir juridictionnel du tribunal pour statuer sur un litige relevant de l’article L. 442-6 du Code de commerce et de statuer dans les limites de son propre pouvoir juridictionnel sur les demandes formées devant elle »134. En revanche, l’appel formé devant la cour d’appel de Paris contre la décision d’une juridiction non spécialisée (extérieure au ressort de la cour parisienne !) sera irrecevable, à moins que l’appel ait été interjeté avant le revirement de jurisprudence du 29 mars 2017 : dans ce dernier cas, l’application de la règle issue de ce revirement aboutirait en effet à priver l’appelant, « qui ne pouvait ni connaître, ni prévoir, à la date à laquelle [il] a exercé son recours, la nouvelle règle jurisprudentielle limitant le pouvoir juridictionnel de la cour d’appel de Paris, d’un procès équitable, au sens de l’article 6, paragraphe 1, de la convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales »135.
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II – Les distributeurs agissant pour leur compte
A – Les accords verticaux
Franchise : conclusion du contrat. Le droit de la franchise est saturé d’idées reçues. Trop souvent, les débats s’abîment dans des échanges caricaturaux. À main gauche, les défenseurs des franchisés feraient preuve d’angélisme et de naïveté. À droite, les pro-franchiseurs seraient les suppôts d’un libéralisme débridé. Tout cela est pourtant bien trop fruste. Il convient de privilégier le réalisme, la meilleure posture. Voyez par exemple ces quatre décisions rendues le 10 avril dernier par la cour d’appel de Colmar136. Chacune montre l’importance d’une telle approche. Chaque fois, la nullité d’un contrat de franchise était demandée. Aucun document d’information précontractuelle n’avait été remis aux candidats à l’intégration d’un réseau de restauration. Tous avaient rapidement essuyé de lourdes pertes. Le manque de rentabilité du concept était avéré, l’octroi d’une juste indemnité sollicité. Rejetée en première instance, la nullité fut prononcée par les magistrats du second degré dans les quatre affaires au terme d’une motivation exemplaire. La cour d’appel balaie d’abord d’un revers de plume les arguties que le franchiseur opposait à la recevabilité des demandes. Non, la demande n’était pas prescrite : si le contrat avait été conclu 5 ans avant l’introduction de l’assignation, les franchisés n’avaient pu s’aviser de leur erreur, de leur vice du consentement donc, que bien après, une fois les premiers bilans sortis et révélant l’inanité du réseau. Sur le fond, ensuite, même réalisme. La juridiction du second degré écarte ainsi une série d’éléments que ce franchiseur, comme beaucoup d’autres, invoquait de manière passablement mécanique. L’absence de remise d’un document d’information précontractuelle ne suffit pas à établir le vice du consentement : soit ! N’empêche : il ne servait à rien de prétendre que tel candidat franchisé était rompu aux affaires parce qu’il avait exploité une précédente activité ou que tel autre n’avait pas besoin d’information relative au marché local au motif qu’il était du coin. Le métier de franchiseur doit être pris au sérieux : on ne badine pas avec l’information due à son cocontractant. C’est ce que souligne expressément la cour d’appel de Colmar : « S’il est exact qu’il importe de tenir compte, pour apprécier un éventuel vice du consentement, de l’expérience du futur franchisé et de sa connaissance du marché local, il est essentiel de souligner que ceci ne peut concerner que le secteur d’activité visé par la franchise. En effet, l’obligation d’information précontractuelle doit justement permettre au futur franchisé qui ne serait pas connaisseur de l’activité spécifique de la franchise, d’être renseigné par le spécialiste en la matière qu’est le franchiseur ». Que le gérant de la société franchisée ait auparavant exploité un bar de nuit ne saurait donc limiter les obligations d’un franchiseur dans le secteur de la restauration. Qu’il ait par ailleurs connu la ville d’implantation de son restaurant, cela ne lui conférait pas davantage les moyens d’apprécier pleinement les enjeux de l’ouverture d’un restaurant puisqu’il ne disposait d’aucune connaissance sur le marché local dans le secteur d’activité considéré, n’étant pas en mesure d’avoir accès à toutes les données dont le franchiseur, de par son expertise, pouvait disposer. Enfin, peu importe que le candidat à l’intégration du réseau ait disposé d’un délai important pour réfléchir avant de s’engager. Et pour cause : à défaut de bénéficier de l’information précontractuelle légalement requise, ce temps ne lui servait pas à grand-chose ! Bref, la nullité des contrats s’imposait. Avec toutes les conséquences pécuniaires qui s’ensuivent. La cour ordonne par conséquent non seulement la restitution de toutes les sommes versées en application du contrat, droit d’entrée et redevances, mais aussi le dédommagement du préjudice correspondant à la perte de chance de mieux investir ses fonds, ledit préjudice étant ici évalué à 50 % du montant des investissements. Et ce n’est pas tout : les magistrats indemnisent au surplus le gérant de son préjudice personnel, correspondant là encore à une perte de chance de mieux investir ses capitaux. En somme, la franchise est appréhendée comme un investissement qui se devait d’être rentable. Une leçon d’économie.
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Franchise : justification de l’affectation des redevances publicitaires. Parce qu’il est à la tête d’un réseau, le franchiseur a la charge de son image. Ainsi doit-il veiller à ce qu’une certaine discipline y soit observée. De fait, les franchisés qui ne respecteraient pas le concept risquent de nuire à l’ensemble du réseau. Au franchiseur, donc, de gendarmer ces francs-tireurs, et ce dans l’intérêt bien compris de tous les autres. Il ne s’agit pourtant pas seulement de défendre l’image du réseau. Il faut aussi la promouvoir. D’où une obligation de publicité137. À cet égard, les contrats s’avèrent souvent incomplets. Rares sont en effet ceux qui prévoient l’obligation pour le franchiseur d’avoir à rendre compte des actions menées de ce chef. Une redevance publicitaire est mise à la charge des franchisés qui ne peuvent ainsi vérifier l’exécution de l’obligation corrélative. Un minimum de transparence devrait s’imposer au regard de la nature du contrat de franchise et, à tout le moins, de l’équité qui s’y attache138. Tout pouvoir requiert cependant un contre-pouvoir, celui d’une tête de réseau comme un autre. Cela passe au minimum par une obligation d’information tout au long du contrat de distribution. De fait, comment savoir si un franchiseur respecte ses obligations publicitaires, par exemple, s’il ne dit rien de ses actions ou si celles-ci sont injustifiées, ne servant que ses intérêts personnels ? La question est au cœur d’une dialectique, devenue banale, opposant la transparence à l’opacité. À lire l’article 1200 du Code civil, les tiers peuvent se prévaloir d’un contrat « notamment pour apporter la preuve d’un fait ». Supposez toutefois que les franchisés aient connaissance d’un contrat dont ils ignorent tout ou partie des stipulations. Ont-ils le droit d’en obtenir communication ? Pour ce qui nous concerne, un franchiseur est-il tenu de révéler le contenu des contrats qui le lient à d’autres personnes, fournisseurs référencés du réseau par exemple ? Pas de difficulté, bien sûr, si le contrat de franchise prévoit une telle obligation de communication. Dans ce cas, le franchiseur doit s’exécuter139. Mais quid dans le silence du contrat ? Avant tout procès au fond, l’article 145 du Code de procédure civile constitue un fondement envisageable à la reconnaissance d’un tel droit au contrat. S’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, dispose ce texte, « les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé ». Imaginez que le franchisé ait confié à son franchiseur le soin de négocier les meilleures conditions tarifaires auprès des fournisseurs référencés de ce réseau. La tête de réseau joue le rôle de centrale de référencement, c’est-à-dire d’un courtier. Or le courtier, comme tout intermédiaire dans la conclusion d’un contrat, est tenu de rendre compte. Ce qui signifie deux choses : non seulement restituer les sommes perçues à l’occasion de la mission de courtage, mais aussi informer le donneur d’ordres de l’ensemble des démarches accomplies dans son intérêt. Partant, le distributeur devrait être en mesure de connaître le contenu des contrats conclus entre son propre cocontractant et les fournisseurs du réseau. Ne serait-ce qu’afin de s’assurer que la tête de réseau ne conserve pas les rabais, remises et ristournes consentis par ces fournisseurs en fonction du volume des commandes réalisées. Le secret des affaires s’y oppose-t-il ? L’argument ne convainc pas. S’il suffisait de l’agiter ou de brandir l’existence d’une clause de confidentialité à seule fin d’éviter d’avoir à produire telle ou telle pièce compromettante, le droit du demandeur au procès équitable serait littéralement bafoué. Comment établirait-il l’exécution par la tête de réseau de ses obligations s’il n’avait accès aux contrats conclus avec les fournisseurs ? C’est donc à juste titre que la Commission d’examen des pratiques commerciales a rendu un avis du 26 mars 2015 sur ce point : « Le commerçant mandant (ici le franchisé) bénéficie d’un droit d’accès aux seules informations nécessaires à la défense de ses droits. Dans le cas particulier présenté, au regard des éléments contractuels avancés, le mandataire à la négociation (ici le franchiseur) doit communiquer au franchisé les informations concernant les remises et rémunérations versées par le fournisseur »140. La Cour de cassation semble hésiter. Après avoir opté pour la transparence en 2014141, elle s’était partiellement ravisée en 2017142. Un arrêt du 6 novembre 2019 revient toutefois à ce qui paraît le plus raisonnable143. Une franchisée soutenait que les redevances de publicité versées tous les mois n’étaient pas affectées à la communication prévue par le contrat. Elle avait ainsi, sur le fondement de l’article 145, demandé et obtenu par une ordonnance rendue sur requête qu’un huissier soit désigné pour consulter au siège social du franchiseur toutes les factures réglées par celui-ci au titre de la publicité effectuée pour la notoriété de la marque et dans l’intérêt exclusif des franchisés. La Cour de cassation n’y trouve rien à redire. Ses motifs méritent d’être reproduits in extenso : « Mais attendu, en premier lieu, que la requête visée, avec les pièces produites à l’appui, par l’ordonnance du 1er juillet 2016 à laquelle elle se trouve annexée, énonçant que le franchiseur ne produirait jamais volontairement les éléments de preuve en cas de procédure contradictoire et l’arrêt ayant retenu que l’effet de surprise, indispensable, ne pouvait jouer que par la mise en œuvre d’une procédure non contradictoire au regard du risque que faisait peser la société Attila Gestion de s’abstenir de communiquer les documents à son adversaire, voire de les faire disparaître, la cour d’appel, qui a caractérisé l’existence de circonstances susceptibles de justifier une dérogation au principe de la contradiction (…), a légalement justifié sa décision ». Sans doute l’arrêt continue-t-il en se référant au pouvoir souverain d’appréciation des juges du fond : « Et attendu, en second lieu, que c’est dans l’exercice de son pouvoir souverain d’appréciation du motif légitime de conserver ou d’établir, avant tout procès, la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution du litige que la cour d’appel a retenu qu’il existait un intérêt légitime pour la société Egitec d’obtenir cette mesure d’instruction, dès lors qu’elle considérait que les fonds perçus par la société Attila Gestion au titre de la publicité pour des actions ou des développements n’étaient pas utilisés au bénéfice de la notoriété de la franchise mais entraînaient son enrichissement personnel (…) ». Cela contribue à en amenuiser quelque peu la portée. Cela étant, le franchisé n’a-t-il pas en principe un intérêt légitime à connaître l’utilisation qui a été faite des sommes versées au titre de la publicité ? Certains contrats stipulent que les redevances sont versées sur un compte bancaire dédié : cela peut en effet faciliter la transparence à cet égard.
ND
Franchise : la procédure prévue par une clause résolutoire n’a pas à être respectée en cas de manquement grave de l’une des parties. Comment articuler la faculté reconnue à chacune des parties à un contrat de le résilier en cas de manquement suffisamment grave imputable à l’autre et celle de stipuler une clause résolutoire dont les modalités d’application s’imposent en principe aux parties ? La question n’a pas été réglée par la réforme du droit des contrats opérée en 2016. Celle-ci a certes consacré la jurisprudence ayant reconnu le pouvoir de résiliation unilatérale à l’article 1226 du Code civil, dont le premier alinéa dispose que « le créancier peut, à ses risques et périls, résoudre le contrat par voie de notification » et que, « sauf urgence, il doit préalablement mettre en demeure le débiteur défaillant de satisfaire à son engagement dans un délai raisonnable ». Hélas, ce texte ne résout pas la question de savoir si ce pouvoir libère les parties de l’obligation d’avoir à respecter les termes et conditions d’une clause résolutoire. Quant à la jurisprudence, elle est parfois chaotique : si la plupart des arrêts posent que la résiliation unilatérale aux risques et périls du créancier autorise ce dernier à faire fi des clauses ayant organisé la rupture du contrat144, d’autres retiennent parfois la solution contraire145. Y a-t-il ici le signe de quelque divergence jurisprudentielle ? Peut-être. Les deux positions sont-elles conciliables ? Peut-être aussi. Un auteur l’a suggéré : les fautes les plus graves paralyseraient les clauses résolutoires, les autres non146. La distinction risque toutefois de verser dans le byzantinisme : parmi les fautes suffisamment graves pour justifier la résiliation unilatérale du contrat, certaines le seraient plus que d’autres et la résiliation serait plus ou moins expéditive. Un nid à contentieux. Qui plus est, si la gravité de la faute du débiteur justifie la cessation de tout le contrat, à plus forte raison justifie-t-elle la mise à l’écart de l’une de ses parties, peu important que celle-ci soit une clause résolutoire. Qui peut le plus, peut le moins. Il faut dès lors saluer ce nouvel arrêt rendu le 9 juillet 2019 à propos d’un contrat de franchise. Ses termes généraux attestent d’une position de principe : « La gravité du comportement d’une partie à un contrat peut justifier que l’autre partie y mette fin de manière unilatérale à ses risques et périls, sans être tenue de mettre préalablement son cocontractant en demeure de respecter ses obligations ni de caractériser une situation d’urgence ». Dès lors qu’une partie n’invoque pas la clause résolutoire stipulée au contrat, mais se prévaut de la faculté de résiliation unilatérale du contrat pour manquement grave telle que définie par la jurisprudence, la cour d’appel en a déduit, à bon droit, que cette société n’était pas tenue de respecter les modalités formelles de résiliation contractuelle. Bien sûr, l’arrêt concernait un contrat qui n’était pas soumis au nouveau droit des contrats, ce qui explique la référence à la faculté de résiliation unilatérale « telle que définie par la jurisprudence », et non telle que consacrée et précisée par l’article 1226 du Code civil. Cela explique l’absence d’exigence d’une mise en demeure préalable. Que la partie ayant invoqué la faculté de rompre le contrat ne fût pas tenue de respecter les conditions prévues par la clause résolutoire, cela n’en reste pas moins une solution qui doit s’imposer quel que soit le régime auquel le contrat rompu se trouve assujetti.
ND
Conséquences de la cessation du contrat de franchise. La cessation du contrat de franchise emporte logiquement la perte de certains droits. Le franchisé ne pourra plus utiliser la marque du franchiseur sans se rendre coupable de contrefaçon147. Il ne doit pas créer la moindre confusion dans l’esprit du public. À défaut, il engage sa responsabilité à l’égard de son ancien franchiseur. Et peu importe que ce risque ait disparu lors de la délivrance de l’assignation compte tenu du long délai qui s’est écoulé entre la fin du contrat de franchise et les premières mises en demeure adressées à l’ancien franchisé. « Le droit à réparation naît au jour de la survenance du dommage, de sorte que la disparition éventuelle de celui-ci au jour où la victime saisit le juge pour en obtenir réparation ne la prive pas de son action »148.
ND
Location-gérance. La loi n° 2019-486 du 22 mai 2019, relative à la croissance et à la transformation des entreprises, a supprimé la condition d’exploitation préalable du fonds donné en location-gérance. Auparavant, l’article L. 144-3 du Code de commerce exigeait pourtant que les personnes physiques ou morales concédant une location-gérance aient exploité pendant 2 années au moins le fonds ou l’établissement artisanal mis en gérance. C’était bien le moins ! Comment prétendre louer un fonds n’ayant pas fait l’objet d’une exploitation suffisante ? Le vent ni le vide ne se peuvent louer sérieusement. Bien sûr, exiger 2 ans d’exploitation relevait un peu de l’arbitraire : pourquoi 2 ans et pas 3 ou 4 ? La fixation d’un délai était néanmoins plus simple. Au demeurant, le législateur prévoit une série d’exceptions de nature à ménager une place au réalisme. Le système a toutefois été jugé trop complexe. Le législateur l’a donc supprimé. Avec le risque qu’un tel laxisme favorise les spéculations sur les fonds de commerce, que la loi n° 56-277 du 20 mars 1956 avait précisément voulu endiguer. Autre époque, dira-t-on ? Permettre de louer un fonds dont l’existence n’a pas été éprouvée par une durée raisonnable d’exploitation, c’est toutefois nécessairement favoriser de fausses locations.
ND
B – Les accords horizontaux (v. infra sur les coopératives agricoles)
III – Les distributeurs agissant pour le compte d’autrui
A – Distributeurs soumis au droit du travail
1 – Les salariés
2 – Les quasi-salariés
B – Distributeurs indépendants
1 – Distributeurs agissant au nom d’autrui
2 – Distributeurs agissant en leur nom propre
IV – Secteurs spécifiques
A – Distribution agricole
B – Distribution pharmaceutique
C – Distribution de la presse
V – Droit international de la distribution
A – Conflit de juridictions
B – Loi applicable
(À suivre)
Notes de bas de pages
-
1.
De Silva I., « La modernisation et la simplification du contrôle des concentrations », JCP E 2018, 1460.
-
2.
D. n° 2019-339, 18 avr. 2019 : JO, 20 avr. 2019, texte n° 10.
-
3.
Sur ce point, v. Aut. conc., communiqué, 18 oct. 2019.
-
4.
Aut. conc., déc. n° 116-DCC, 27 juill. 2016, relative à la prise de contrôle exclusif de Darty par la Fnac.
-
5.
CE, 3e-8e ch. réunies, 7 nov. 2019, n° 424702.
-
6.
Aut. conc., déc. n° 19-DCC-65, 17 avr. 2019, relative à la prise de contrôle conjoint de la Sté Luderix International par la Sté Jellej Jouets et l’indivision résultant de la succession de M. Stéphane Mullier.
-
7.
Aut. conc., déc. n° 19-D-14, 1er juill. 2019.
-
8.
CJUE, 3e ch., 13 oct. 2011, n° C-439/09 : Europe 2011, comm. 471, note Idot L. ; Contrats, conc. consom. 2011, comm. 263, note Decocq G.
-
9.
V. égal. Aut. conc., déc. n° 18-D-23, 24 oct. 2018, relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la distribution de matériels de motoculture.
-
10.
CJUE, 6 déc. 2017, n° C-230/16.
-
11.
En particulier au titre du déséquilibre significatif. V., par ex., CEPC, avis n° 19-9, 19 sept. 2019, relatif à une demande d’avis d’une organisation professionnelle portant sur des pratiques mises en œuvre par des fournisseurs invoquant un cas de force majeure.
-
12.
Aut. conc., déc. n° 18-D-17, 20 sept. 2018, relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de l’élimination des déchets d’activités de soins à risques infectieux en Corse.
-
13.
CA Paris, 5-7, 14 nov. 2019, n° 18/23992, SARL Sanicorse.
-
14.
Dissaux N. et Loir R., Droit de la distribution, 2017, LGDJ, Précis Domat, nos 813 et s.
-
15.
CA Paris, 19 oct. 2016, n° 14/07956.
-
16.
Cass. com., 8 juin 2017, n° 15-28355.
-
17.
Cass. com., 27 mars 2019, n° 17-22083.
-
18.
CA Paris, 27 mars 2019, n° 17/09056.
-
19.
Cass. com., 8 juin 2017, n° 15-28355.
-
20.
CA Paris, 23 janv. 2019, n° 16/16856 ; CA Paris, 27 mars 2019, n° 17/09056 ; Aut. conc., n° 19-D-08, 9 mai 2019.
-
21.
CJCE, 25 oct. 1983, n° 107/82.
-
22.
CJCE, 25 oct. 1983, n° 107/82, § 38.
-
23.
CA Paris, 23 janv. 2019, n° 16/16856.
-
24.
Sur lequel v. Dissaux N. et Loir R., Droit de la distribution, 2017, LGDJ, Précis Domat, nos 334 et s.
-
25.
L. n° 2018-938, 30 oct. 2018.
-
26.
Ord. n° 2019-359, 24 avr. 2019 : JO, 25 avr. 2019, texte n° 16.
-
27.
V. égal. Ord. n° 2019-358, 24 avr. 2019 : JO, 25 avr. 2019, texte n° 14.
-
28.
Buy F., « La (décevante) réforme du droit des relations commerciales », D. 2019, p. 1122 ; Vogel L. et Vogel J., « Droit de la négociation commerciale : une réforme courageuse mais perfectible », AJCA 2019, p. 208 ; Dissaux N. et Loir R., « La réforme de la relation commerciale : une névrose française », JCP E 2019, 1362.
-
29.
C. com., art. L. 443-1 rempl. ; Ord. n° 2019-359, 24 avr. 2019, art. 3, 2°.
-
30.
C. com., art. L. 443-2 rempl. ; C. com., art. L. 443-3 rempl. ; Ord. n° 2019-359, 24 avr. 2019, art. 3, 2°.
-
31.
C. com., art. L. 443-4 créé ; Ord. n° 2019-359, 24 avr. 2019, art. 3, 2°.
-
32.
Pour une étude plus complète, Dissaux N. et Loir R., « Réforme d’ampleur du droit des relations commerciales », JCP G 2019, 589.
-
33.
Ord. n° 2019-359, 24 avr. 2019, art. 5, III ; v. nouvel article L. 441-9 du Code de commerce.
-
34.
C. com., art. L. 441-1, I, rempl. ; Ord. n° 2019-359, 24 avr. 2019, art. 1, 2°.
-
35.
Dissaux N. et Loir R., Droit de la distribution, 2017, LGDJ, Précis Domat, n° 483.
-
36.
C. rur., art. L. 631-24, III ; C. rur., art. L. 631-24-1 ; C. rur., art. L. 631-24-3 ; lorsque de tels indicateurs existent.
-
37.
C. com., art. L. 443-4, I, créé ; Ord. n° 2019-359, 24 avr. 2019, art. 3, 2°.
-
38.
C. com., art. L. 441-1, II, rempl. ; Ord. n° 2019-359, 24 avr. 2019, art. 1, 2°.
-
39.
C. com., art. L. 441-1, IV, rempl. ; Ord. n° 2019-359, 24 avr. 2019, art. 1, 2°.
-
40.
C. com., art. L. 441-3 à L. 441-7 rempl. ; Ord. n° 2019-359, 24 avr. 2019, art. 1, 2°.
-
41.
Ord. n° 2019-359, 24 avr. 2019, art. 5, II.
-
42.
C. com., art. L. 441-7 ancien.
-
43.
C. com., art. L. 441-7-1 ancien.
-
44.
C. com., art. L. 441-3 rempl. ; Ord. n° 2019-359, 24 avr. 2019, art. 1, 2°.
-
45.
C. com., art. L. 441-4 rempl. ; Ord. n° 2019-359, 24 avr. 2019, art. 1, 2°.
-
46.
C. com., art. L. 441-3, II, rempl. ; Ord. n° 2019-359, 24 avr. 2019, art. 1, 2°.
-
47.
Ord. n° 2019-359, 24 avr. 2019, art. 5, I.
-
48.
C. com., art. L. 441-3, V, rempl. ; Ord. n° 2019-359, 24 avr. 2019, art. 1, 2°.
-
49.
C. com., art. L. 441-4, III, rempl. ; Ord. n° 2019-359, 24 avr. 2019, art. 1, 2°.
-
50.
C. com., art. L. 441-4, IV, rempl. ; Ord. n° 2019-359, 24 avr. 2019, art. 1, 2°.
-
51.
C. com., art. L. 441-4, IV, rempl.
-
52.
C. com., art. L. 441-4, VI, rempl. ; Ord. n° 2019-359, 24 avr. 2019, art. 1, 2°.
-
53.
Commission d’enquête sur la situation et les pratiques de la grande distribution et de ses groupements dans leurs relations commerciales avec leurs fournisseurs, rapport AN, doc. n° 2268, 25 sept. 2019 ; Delpech X., « Nouvelle réforme en vue pour le droit des relations commerciales fournisseurs-grande distribution ? », AJCA 2019, p. 408.
-
54.
C. com., art. L. 442-9 rempl. ; Ord. n° 2019-359, 24 avr. 2019, art. 2, 2° ; C. com., art. L. 443-2 ancien.
-
55.
C. com., art. L. 442-10 rempl. ; Ord. n° 2019-359, 24 avr. 2019, art. 2, 2° ; C. com., art. L. 442-7 ancien.
-
56.
C. com., art. L. 442-11 rempl. ; Ord. n° 2019-359, 24 avr. 2019, art. 2, 2° ; C. com., art. L. 442-8 ancien.
-
57.
C. com., art. L. 442-3, a), rempl. ; Ord. n° 2019-359, 24 avr. 2019, art. 2, 2°.
-
58.
C. com., art. L. 442-3, b), rempl. ; Ord. n° 2019-359, 24 avr. 2019, art. 2, 2°.
-
59.
V., déjà, Cass. 3e civ., 15 févr. 2018, n° 17-11329 ; Cass. com., 25 janv. 2017, n° 15-13013.
-
60.
C. com., art. L. 442-1, I, 1°, rempl. ; Ord. n° 2019-359, 24 avr. 2019, art. 2, 2°.
-
61.
CA Paris, 5-4, 27 sept. 2017, n° 16/00671 ; cependant cassé par Cass. com., 15 janv. 2020, n° 18-10512, v. infra ; CA Paris, 5-11, 11 janv. 2019, n° 17/00234.
-
62.
Ord. n° 2019-359, 24 avr. 2019, art. 2, 2°.
-
63.
Commission d’enquête sur la situation et les pratiques de la grande distribution et de ses groupements dans leurs relations commerciales avec leurs fournisseurs, rapp. AN, doc. n° 2268, 25 sept. 2019.
-
64.
C. com., art. L. 442-1 rempl. ; C. com., art. L. 442-2 rempl. ; C. com., art. L. 442-7 rempl. ; Ord. n° 2019-359, 24 avr. 2019, art. 2, 2° et 3°.
-
65.
C. com., art. L. 442-3 ; C. com., art. L. 442-8 rempl. ; Ord. n° 2019-359, 24 avr. 2019, art. 2, 2° et 4°.
-
66.
Visées par C. com., art. L. 442-1 à L. 442-3 rempl. ; C. com., art. L. 442-7 rempl. ; C. com., art. L. 442-8 rempl.
-
67.
C. civ., art. 1171.
-
68.
C. consom., art. L. 212-1.
-
69.
V. récemment Cass. 1re civ., 13 mars 2019, n° 17-23619, D.
-
70.
Cons. const., 30 nov. 2018, n° 2018-749 QPC.
-
71.
Le texte consacrant la jurisprudence imposant l’information des fournisseurs en cas d’action en nullité, Cass. com., 3 mars 2015, n° 13-27525.
-
72.
C. com., art. L. 442-4, I, rempl. ; Ord. n° 2019-359, 24 avr. 2019, art. 2, 2°.
-
73.
C. com., art. L. 442-4, III, rempl. ; Ord. n° 2019-359, 24 avr. 2019, art. 2, 2°.
-
74.
Cass. 1re civ., 20 févr. 2019, n° 17-27967.
-
75.
CA Paris, 5-4, 27 sept. 2017, n° 16/00671 ; CA Paris, 5-11, 11 janv. 2019, n° 17/00234.
-
76.
CEPC, avis nos 18-3 et 18-7.
-
77.
CA Paris, 5-4, 27 sept. 2017, n° 16/00671.
-
78.
Nous surlignons.
-
79.
Cass. com., 15 janv. 2020, n° 18-10512.
-
80.
Dissaux N. et Loir R., Droit de la distribution, 2017, LGDJ, Précis Domat, n° 577.
-
81.
Sur les difficultés d’appréciation, v. par ex. T. com. Paris, 2 sept. 2019, n° 2017/050625, qui retient que la société Amazon France Services est un partenaire commercial des clients, alors même qu’elle n’a pas de liens contractuels avec eux.
-
82.
Dissaux N. et Loir R., Droit de la distribution, 2017, LGDJ, Précis Domat, n° 578.
-
83.
CA Paris, 18 sept. 2013, n° 12/03177.
-
84.
Cass. com., 20 nov. 2019, n° 18-12823 ; pour une décision récente retenant l’existence d’une soumission – et de nombreuses clauses abusives –, v. la décision rendue dans l’affaire Amazon : T. com. Paris, 2 sept. 2019, n° 2017/050625.
-
85.
Cass. com., 4 oct. 2016, n° 14-28013.
-
86.
Cass. com., 25 janv. 2017, n° 15-23547 ; Cass. com., 27 mai 2015, n° 14-11387.
-
87.
V. Dissaux N., note sous Cass. com., 20 nov. 2019, n° 18-12823 : JCP G 2020, 17.
-
88.
Ancien article L. 442-6, I, 5°, du Code de commerce.
-
89.
CA Lyon, 9 oct. 2014, n° 13/000609 ; CA Rennes, 10 juin 2014 : Juris-Data n° 2014-017847.
-
90.
Cass. com., 7 oct. 2014, n° 13-21086 ; Cass. com., 21 juin 2017, n° 16-12955.
-
91.
Cass. com., 2 oct. 2019, n° 18-15676.
-
92.
Cass. com., 24 oct. 2018, n° 17-25672.
-
93.
Cass. com., 27 mars 2019, n° 16-24630 ; Cass. com., 25 sept. 2019, n° 18-11112 ; Cass. com., 10 avr. 2019, n° 18-12882.
-
94.
Cass. com., 2 oct. 2019, n° 18-10886.
-
95.
Cass. com., 2 oct. 2019, n° 18-15676.
-
96.
Dissaux N. et Loir R., Droit de la distribution, 2017, LGDJ, Précis Domat, n° 599.
-
97.
Cass. com., 27 mars 2019, n° 16-24630 ; Cass. com., 25 sept. 2019, n° 18-11112 ; Cass. com., 10 avr. 2019, n° 18-12882. C’était aussi l’hypothèse à l’origine des deux arrêts cités supra : Cass. com., 7 oct. 2014, n° 13-21086 ; Cass. com., 21 juin 2017, n° 16-12955.
-
98.
Cass. com., 25 sept. 2019, n° 18-11112.
-
99.
Cass. com., 7 oct. 2014, n° 13-21086.
-
100.
Cass. com., 2 oct. 2019 ; par ex., une rupture abusive.
-
101.
Barbier H., RTD civ. 2017, p. 372.
-
102.
Cass. com., 3 avr. 2012, n° 11-13527 ; Cass. com., 8 févr. 2017, n° 15-23050.
-
103.
Cass. com., 2 oct. 2019, n° 18-15676.
-
104.
L. n° 82-1153, 30 déc. 1982.
-
105.
Cass. com., 25 sept. 2019, n° 17-22275 ; v., déjà, Cass. com., 4 oct. 2011, n° 10-20240.
-
106.
Dissaux N. et Loir R., Droit de la distribution, 2017, LGDJ, Précis Domat, n° 610.
-
107.
Cass. com., 27 mars 2019, n° 17-18047.
-
108.
Cass. com., 3 juill. 2019, n° 17-18861.
-
109.
Cass. com., 7 mai 2019, n° 17-17366 ; Cass. com., 3 juill. 2019, n° 17-21826.
-
110.
Cass. com., 16 oct. 2019, n° 18-10806 ; comp., engageant la responsabilité d’une société mère du fait de la rupture de la relation de ses filiales et franchisés, Cass. com., 5 juill. 2016, n° 14-27030.
-
111.
Cass. com., 7 mai 2019, n° 17-17366.
-
112.
Cass. com., 27 mars 2019, n° 17-16548, F-D ; Cass. com., 27 mars 2019, n° 17-18047 ; Cass. com., 5 juin 2019, nos 17-26119 et 18-10359, F-D.
-
113.
Cass. com., 12 févr. 2013, n° 12-11709 ; Cass. com., 8 nov. 2017, n° 16-15285.
-
114.
Cass. com., 6 févr. 2019, n° 17-23361.
-
115.
Cass. com., 24 juin 2014, n° 12-27908.
-
116.
Sur cette question, Dissaux N. et Loir R., Droit de la distribution, 2017, LGDJ, Précis Domat, n° 621.
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117.
CA Paris, 26 oct. 2018, n° 17/12664 ; CA Paris, 14 nov. 2018, n° 16/12500 ; CA Paris, 21 nov. 2018, n° 16/12500 ; CA Paris, 28 nov. 2018, n° 16/20790 ; CA Paris, 5 déc. 2018, n° 16/19171 ; CA Paris, 19 déc. 2018, n° 16/12901.
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118.
Cass. com., 28 mai 2013, n° 12-19147.
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119.
Cass. com., 23 janv. 2019, n° 17-26870.
-
120.
Cass. com., 4 oct. 2016, n° 15-14025.
-
121.
Cass. com., 3 juill. 2019, n° 17-13826.
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122.
CA Paris, 9 janv. 2019, n° 16/25000.
-
123.
Cass. com., 27 oct. 1992, n° 89-21064.
-
124.
C. com., art. L. 442-2.
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125.
Pour refuser d’apprécier le caractère établi d’une relation commerciale au regard des relations entretenues avec un groupe de sociétés, ce dernier n’ayant pas la personnalité juridique, Cass. com., 16 oct. 2019, n° 18-10806.
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126.
Sur le fondement de l’ancien article L. 442-6, III, du Code de commerce.
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127.
Cass. com., 21 janv. 2014, n° 12-29166 ; v. égal. Cons. Const., 18 mai 2016, n° 2016-542 QPC.
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128.
CEDH, 1er oct. 2019, n° 37858/14, Carrefour France c/ France : Juris-Data n° 2019-018932.
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129.
V. C. com., art. L. 442-4.
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130.
Cass. com., 29 mars 2017, n° 15-17659 ; Cass. com., 29 mars 2017, n° 15-24241.
-
131.
Cass. com., 3 juill. 2019, n° 17-22739.
-
132.
Cass. com., 6 nov. 2019, n° 18-12626.
-
133.
C. com., art. L. 442-6 anc.
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134.
Cass. com., 18 sept. 2019, n° 17-19653.
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135.
Cass. com., 20 févr. 2019, n° 17-21861 ; v., déjà, Cass. com., 21 mars 2018, n° 16-28412 : JCP E 2018, 1220, note Loir R.
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136.
CA Colmar, 10 avr. 2019, n° 16/00028 ; CA Colmar, 10 avr. 2019, n° 16/00029 ; CA Colmar, 10 avr. 2019, n° 16/00030 ; CA Colmar, 10 avr. 2019, n° 16/00031.
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137.
Cass. com., 1er févr. 1994, n° 92-10111 ; CA Paris, 25 sept. 1998 : Juris-Data n° 1998-024245.
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138.
C. civ., art. 1194.
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139.
V., par ex., Cass. com., 5 juin 2019, nos 17-26119 et 18-10359.
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140.
CEPC, avis n° 15-14, 26 mars 2015.
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141.
Cass. com., 25 nov. 2014, n° 13-24306.
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142.
Cass. com., 8 juin 2017, n° 15-27146, D : « Mais attendu, en premier lieu, qu’après avoir constaté que le mode de calcul des ristournes n’avait pas été déterminé par le contrat, l’arrêt relève que, même si la société Bricorama a été le mandataire de la société Ploneour dans la négociation avec les fournisseurs, il ne peut lui être imposé de révéler la teneur de ses négociations, qui relève du secret des affaires, mais seulement d’en faire connaître l’issue au distributeur ; que la cour d’appel, qui a ainsi fait ressortir que la demande de production des éléments de preuve litigieux détenus par la société Bricorama qui ne relevait pas de la nature du contrat ni de la loyauté contractuelle et n’était pas justifiée par un intérêt légitime, a pu retenir qu’il n’y avait pas lieu d’y faire droit ».
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143.
Cass. com., 6 nov. 2019, n° 18-15363.
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144.
Cass. com., 4 févr. 2004, n° 99-21480 : JCP G 2004, I 149, n° 10, obs. Rochfeld J. ; RTD civ. 2004, p. 731 et s., obs. Mestre J. et Fages B. ; RDC 2010, p. 44 et s., obs. Genicon T. ; Contrats, conc. consom. 2009, comm. 123, obs. Leveneur L. – Cass. 1re civ., 24 sept. 2009, n° 08-14524 : RDC 2010, p. 44 et s., obs. Genicon T. – Cass. com., 1er oct. 2013, n° 12-20830.
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145.
Cass. 3e civ., 9 oct. 2013, n° 12-23379 ; Cass. com., 15 nov. 2011, n° 10-27838.
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146.
Bakouche D., « L’articulation des résolutions unilatérale et conventionnelle », JCP G 2014, 414.
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147.
Macé M., La contrefaçon du cocontractant. Approche inductive par le contrat de franchise, 2015, PUAM.
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148.
Cass. com., 20 févr. 2019, n° 17-20652.