Un centre pour la prévention des difficultés des entreprises dans le 92
Consacré à l’écoute et à l’orientation des chefs d’entreprises en difficulté dans le département, le CIP 92 était inauguré le 10 octobre 2017. Il sera présidé par Francis Boucly, juge honoraire du tribunal de commerce de Nanterre.
La vie des entrepreneurs est souvent loin d’être un long fleuve tranquille, il suffit que l’entreprise perde un client important ou se voit refuser un crédit bancaire pour que les retards de paiements se multiplient et qu’un cercle vicieux s’enclenche, menant parfois jusqu’à la faillite… C’est justement pour éviter ces situations, lorsque cela est possible, que les CIP (Centre d’information sur la prévention des difficultés des entreprises) interviennent. Lancé en 1999 par William Nahum — alors président du Conseil régional de l’ordre des experts-comptables de Paris Île-de-France —, le CIP national apporte une aide et une expertise aux chefs d’entreprises qui connaissent des difficultés. Il fédère aujourd’hui une soixantaine d’antennes territoriales, développées aux fils des ans pour être plus à même de comprendre les spécificités des entreprises locales. Avec en tête, toujours le même objectif : offrir une plate-forme d’écoute et d‘accueil pour aiguiller les entrepreneurs en détresse.
65e déclinaison territoriale, le CIP 92 était inauguré le 10 octobre 2017 à la préfecture de Nanterre, en présence du président du CIP national, William Nahum, et de très nombreux partenaires : association des magistrats consulaires, experts-comptables, commissaires aux comptes, barreau des Hauts-de-Seine ou encore chambres consulaires. Présidé par le juge honoraire Francis Boucly, le CIP 92 devrait rapidement faire preuve de son utilité : avec sa place de deuxième département de France en matière économique, le territoire des Hauts-de-Seine a en effet connu la création de 16 653 entreprises en 2016. Un chiffre qui ne doit pas cacher les 996 procédures collectives (concernant un total de 3 100 salariés) qui ont été initiées au tribunal de commerce de Nanterre dans la même période, ou les 246 faillites enregistrées au premier trimestre 2017.
En pratique, les « Entretiens du Jeudi » sont tenus toutes les deux semaines par le CIP 92 au CGA Picpus (41, rue des Trois Fontanot à Nanterre) où sont accueillis gratuitement et en toute confidentialité les chefs d’entreprises. En prenant rendez-vous par téléphone en amont, ces derniers pourront bénéficier d’un entretien personnalisé tenu par un trio de bénévoles (expert-comptable-commissaire aux comptes, avocat et ancien juge du tribunal de commerce) qui les orienteront vers les dispositifs les plus adaptés à leur situation. Nouveauté du dispositif, les CIP ont étendu leurs missions pour être en mesure de proposer un accompagnement psychologique au dirigeant lorsque cela est nécessaire. Les bénévoles qui repèrent les signes de détresse psychologique pourront ainsi faire appel à un psychologue du réseau APESA, qui contactera le chef d’entreprise dans les 24 h. Francis Boucly, juge honoraire du tribunal de commerce de Nanterre et président du CIP 92 revient pour les Petites Affiches sur le mode de fonctionnement de ces centres.
LPA
Quels sont les objectifs du CIP ?
Francis Boucly
Notre but n’est pas de faire du conseil, on informe les chefs d’entreprises sur ce qui existe pour les aider à prévenir les difficultés. L’une des caractéristiques les plus importantes des CIP est leur confidentialité : contrairement à ce qui peut se passer dans d’autres organismes publics ou tribunaux, les gens peuvent venir ici de manière anonyme, sans même donner le nom de leur entreprise s’ils le désirent, et s’assurer que les informations qu’ils donnent resteront en ce lieu. Le chef d’entreprise est reçu par trois personnes : un expert-comptable ou commissaire aux comptes, un avocat et un juge honoraire de tribunal de commerce. Cela permet d’avoir une triple compétence et d’aborder tous les problèmes que l’on peut rencontrer dans une entreprise. Enfin, il faut souligner le caractère gratuit de ce service (les trois personnes qui viennent là le font bénévolement), ce qui est assez exceptionnel pour ce type de service. D’autant que nous sommes le seul organisme à fournir la conjonction de ces trois compétences. L’expérience a montré qu’un tel dispositif est très profitable, car il permet une appréciation globale des difficultés pour orienter le plus intelligemment le chef d’entreprise vers les mécanismes qui peuvent lui être utiles.
LPA
Quelle sera la cible du CIP 92 ?
FB
Le CIP des Hauts-de-Seine est le 65e au niveau national, et il est particulièrement bienvenu, car c’était une sorte d’anomalie que le deuxième département français en termes d’importance économique n’ait pas son propre CIP. Il y a 160 000 entreprises dans les Hauts-de-Seine, mais ce sont les TPE et PME qui nous intéressent particulièrement, car les grandes entreprises ont déjà ce qu’il faut. Dans ces catégories, les chefs d’entreprises sont souvent isolés et ne savent pas toujours comment faire face aux difficultés auxquelles ils sont confrontés. Généralement, ils sont aussi peu enclins à confier leurs difficultés et c’est pour ça que notre système est confidentiel et gratuit. Nous faisons cela dans un lieu tout à fait neutre, le centre de gestion agréé Picpus qui nous met à disposition des locaux.
LPA
Quels seront vos outils et les dispositifs sur lesquels vous allez aiguiller les chefs d’entreprises qui viennent à vous ?
FB
En cas de difficulté, il existe de nombreux dispositifs et organismes qui ne sont pas toujours bien connus par les entreprises. Je pense par exemple à la CCSF (Commission des chefs des services financiers), qui peut accorder des délais de paiement pour tout ce qui est prestations, Ursaff et autres. On a aussi la médiation du crédit qui va aller voir un banquier qui refuserait d’accorder un crédit ou un découvert, ou la médiation des entreprises pour ce qui concerne les conflits entre clients et fournisseurs. Enfin, il y a tout ce qui passe dans les tribunaux de commerce avec les procédures préventives telles que le mandat ad hoc et la conciliation. Nous pouvons orienter les gens qui viennent vers ce type de procédures amiables et en tant que juge honoraire de tribunal de commerce, je pourrai être particulièrement utile en la matière.