Redonner au tribunal de commerce de Créteil « la place qui lui est due »

Publié le 05/02/2024
Redonner au tribunal de commerce de Créteil « la place qui lui est due »
Ville de Créteil

Un an après sa prise de fonction, Philippe Jombart, président du tribunal de commerce de Créteil (94), a présenté ses vœux, mais surtout le bilan de l’année 2023 et les perspectives à venir, avec toujours le souhait de mieux accompagner les entreprises en difficulté et d’améliorer les procédures au sein de sa juridiction.

La salle A du palais de justice de Créteil est bondée ce 16 janvier pour l’audience solennelle de rentrée du tribunal de commerce, désormais présidée par Philippe Jombart qui a succédé à François Bursaux l’an dernier. On se presse pour assister aux vœux mais surtout au bilan de cette première année de mandature. C’est aussi l’occasion de connaître les huit nouveaux juges qui ont été élus à l’automne dernier et qui prennent désormais leurs fonctions.

Après l’introduction du procureur général, Philippe Jombart salue d’abord le redémarrage progressif des activités économiques dans le Val-de-Marne dans un contexte post-Covid, un renouveau qui reste fragile au vu d’un climat international instable. Le magistrat n’en est que plus volontaire pour soutenir les dirigeants d’entreprise et les aider à manœuvrer dans la tourmente, notamment grâce à de nouveaux dispositifs.

Un terrain économique dynamique, mais encore fragile

Mais c’est d’abord l’heure du bilan : au cours de cette année 2023, le tribunal de commerce de Créteil a rendu 14 604 décisions, un nombre en hausse de 10 %. Si le nombre de jugements en contentieux général se révèle stable (1 410), il a augmenté concernant les ordonnances de référés (+21 %) et les injonctions de payer (+27 %), ces dernières ayant même doublé entre 2021 et 2023.

Philippe Jombart y voit la confirmation du « succès de ces procédures rapides et simples de recouvrement de créances », succès qui n’est cependant pas sans conséquences puisqu’il engendre aussi « une tension sur la trésorerie des entreprises ». Sur les 4 775 injonctions de payer ordonnées au cours de l’année 2023, 15 % d’entre elles ont été traitées à distance via la signature électronique : « La méthode ayant maintenant fait ses preuves, le volume devrait augmenter en 2024 » espère-t-il.

Autre augmentation majeure, celle des procédures collectives, au nombre de 986 en 2023, qui ont bondi de 43 %. Elles concernent en grande partie le secteur de la restauration et du bâtiment. 87 % d’entre elles sont des liquidations judiciaires et 11 % des redressements judiciaires. « Les ouvertures de procédures collectives ont concerné 2 314 salariés contre 1 718 en 2022, soit + 35 % », note Philippe Jombart. « Au total 147 860 entreprises sont inscrites au registre du commerce et des sociétés de notre tribunal confirmant le dynamisme de notre département. »

La prévention des difficultés des entreprises était une priorité que le nouveau président du tribunal de commerce de Créteil avait lui-même annoncé. Dont acte, puisqu’au cours de l’année, trois juges affectés à la prévention détection ont invité ou convoqué 400 chefs d’entreprise en entretiens de prévention. Toutefois, seuls 41 % d’entre eux ont répondu à la convocation. « Pour mémoire nous avions durant l’année 2022, reçu moins de 100 chefs d’entreprise. » 2024 sera donc une année où il ne faudra pas relâcher les efforts sur le sujet, insiste le magistrat : « Le travail sur la détection des petites entreprises en difficulté et la sensibilisation de leur dirigeant est un travail de longue haleine. Je suis persuadé qu’avec l’appui de nos partenaires notre persévérance portera ses fruits. »

Autre moyen d’aider les entreprises du Val-de-Marne, le dispositif APESA 94, vient d’être lancé en décembre dernier et est présidé par Christian Fosse : « Il a été sollicité sur six cas depuis l’annonce de sa création à l’été dernier », se félicite Philippe Jombart. Cette structure vise à apporter un soutien psychologique aux dirigeants d’entreprises en souffrance.

Encore et toujours, aller au-devant des chefs d’entreprise

La fin de l’année 2023 laisse entrevoir une augmentation d’ouvertures de procédures collectives. Cette tendance va-t-elle mettre à rude épreuve le fonctionnement global du tribunal de commerce, notamment en termes de délais ? « Nous devons accentuer nos efforts pour gérer l’ensemble des flux avec plus d’efficacité, ceci notamment au travers d’un dialogue permanent avec les auxiliaires de justice et le greffe. »

Pour 2024, Philippe Jombart veut maintenir le cap désigné l’an passé : « Notre priorité absolue : recruter des candidats juges de qualité et leur permettre d’accroître leurs compétences. La promotion 2025 comptera 3 à 5 nouveaux juges dont au moins 3 femmes, qui suivront notre parcours de formation interne, et bien entendu la formation initiale de l’École nationale de la magistrature. » Une intention salutaire, puisque la nouvelle fournée de juges présentée lors de ces vœux ne compte qu’une seule femme pour sept hommes.

En deuxième axe prioritaire, il appelle à « inciter les justiciables à utiliser les procédures amiables et préventives, quitte à être plus directifs. » Pour ce faire, Philippe Jombart veut là encore innover avec « un nouveau mode de fonctionnement impliquant la convocation des parties en personnes, avec pour ambition de convaincre les parties de tenter une conciliation avec l’objectif que cela concerne à terme 25 % des instances. »

Agir avant qu’il ne soit trop tard, le credo de l’ancien cadre Renault n’a pas changé et il le fait savoir : il a bien l’intention de continuer à améliorer la prise en charge des entreprises en difficulté, à accompagner en amont, plutôt que punir. « Il est indispensable que nous continuions à aller au contact des chefs d’entreprise au travers des organisations patronales, consulaires et des associations de chefs d’entreprise, pour présenter, expliquer et démystifier le rôle du tribunal. »

C’est enfin avec franchise que Philippe Jombart fait part de ses aspirations : « Je continuerai, comme l’ont fait mes prédécesseurs et pour les mêmes raisons à argumenter auprès des instances pour que le tribunal de commerce de Créteil retrouve la place qui lui est due dans la hiérarchie des tribunaux de commerce, être l’un des plus importants tribunaux judiciaires de France !  »

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