Avant-propos

Publié le 03/02/2017

 

Aux urnes ! 44 834 000 électeurs sont inscrits au 1er mars 2016, soit environ 230 000 électeurs de plus sur un an, et le nombre d’électeurs a encore évolué puisque l’inscription était, de manière générale, possible jusqu’au 31 décembre 2016.

La rédaction des Petites affiches poursuit, avec le présent numéro, une réflexion aussi diverse que possible sur le statut du président de la République et sur le processus électoral en cours. La conception gaullienne d’une élection directe par le peuple, à laquelle peuvent concourir d’autres candidats ou d’autres forces que celles représentées par les partis politiques traditionnels, subsiste-t-elle encore ?

On peut en douter si on considère que les primaires organisées par les principales formations deviennent un mode de sélection des candidats, et que la situation actuelle accroît de ce fait la bipolarisation de la vie politique. Mais les règles sont toujours fondées sur le caractère individuel des candidatures, et l’histoire de la Ve République comporte nombre d’exemples de candidatures, potentielles ou effectives, qui dépassent un clivage classique droite-gauche. Il n’est pas rare que des candidats cherchent à dépasser ce clivage, qui pourtant, sauf en 1969 et en 2002, façonne le second tour. L’acte de candidature est donc ouvert, comme pour toute élection, avec un système d’avance et de remboursement financier qui vise à encourager cette diversité, la condition majeure tenant au soutien de 500 élus, constaté par le Conseil constitutionnel. L’éparpillement des candidatures, et l’éparpillement des voix qui en résulte est toujours un risque. Celui-ci est d’autant plus évident qu’il est banal de constater aujourd’hui à la fois l’éclatement de l’offre politique, les évolutions rapides des électorats, et, sans doute est-ce une nouvelle donnée, l’attention portée aux consultations électorales à l’étranger. Le Brexit, l’élection de Donald Trump, les évolutions politiques italiennes, allemandes ou espagnoles pèseront naturellement sur la campagne.

Début 2017, un nombre important de règles sont parfaitement stabilisées, jusque dans leurs détails, et donc ne présentent pas d’aléas pour les candidats. La loi organique du 25 avril 2016, sans bouleverser ce cadre d’ensemble, a permis de modifier certaines de ces règles. En premier lieu, on doit souligner que la durée de prise en compte des recettes et des dépenses n’a pas changé : elle demeure fixée à un an avant le mois du premier tour. En revanche, les règles relatives aux « parrainages », dont la quête est toujours l’objet de multiples attentions médiatiques, entre les candidats potentiels qui n’atteignent pas le seuil, ceux pour lesquels le franchissement du seuil de 500 signataires est un élément de dramatisation, des maires qui saisissent l’occasion pour susciter l’attention sur d’autres sujets, etc., cette phase est toujours particulièrement mouvementée. Les règles nouvelles, qui exigent un retour individuel du formulaire par son signataire et prévoient une information périodique sur le niveau de signatures atteint, sont de nature à assurer davantage de transparence pendant cette phase.

Longtemps réclamée par les médias audiovisuels, la substitution de l’égalité par l’équité entre les candidats pendant la période précédant la campagne officielle est désormais prévue par la loi organique et reprise par une recommandation du CSA1 et vaut tant pour le temps d’antenne que pour le temps de parole. Dans la phase postérieure à la celle des parrainages, la campagne sera donc plus ouverte. Nul doute que certains candidats s’en plaindront.

On doit également souligner la spécificité, elle aussi nouvelle, des règles de publicité données aux déclarations de patrimoine, qui seront, pour tous les candidats, consultables par tous, sans toutefois que la Haute autorité pour la transparence de la vie publique, qui assurera cette publication, ne puisse y adjoindre des observations2, et jusqu’à six mois après la fin du mandat pour l’élu.

En outre, mais un numéro suivant y reviendra, la jurisprudence sur le financement a désormais largement concrétisé les règles applicables. En particulier, la décision du Conseil constitutionnel du 4 juillet 2013, portant sur le compte de campagne de Nicolas Sarkozy, en dépit du fracas médiatique et politique qu’elle a déclenché, et qui en a occulté le contenu même, doit être analysée en ce qu’elle donne des indications claires en matière de meetings et de déplacements, tandis que la jurisprudence antérieure a par exemple réglé la question des sondages et celle des publications d’ouvrages.

Reste-il des inconnues ? Oui : chaque élection apporte son lot d’originalités, que ce soit dans les candidatures, le déroulement des campagnes, ou encore les résultats. Faut-il rappeler que c’est à l’occasion d’une élection présidentielle que le Conseil constitutionnel a posé le principe de dignité du scrutin3 (proclamation du 8 mai 2002) ? Les citoyens peuvent-ils, pour l’élection la plus fortement mobilisatrice et qui désormais légitime, en principe de façon synchrone, une majorité et un gouvernement pour cinq ans, espérer également une campagne « digne », à la hauteur des enjeux ?

La rédaction

ANNEXE : Évolution du nombre d’électeurs et des taux d’abstention

Année

Nombre d’électeurs

Date

Abstentions

2012

22 avril (premier tour)

20,52 %

46 066 307

6 mai (second tour)

19,65 %

2007

22 avril (premier tour)

16,23 %

44 472 733

6 mai (second tour)

16,03 %

2002

21 avril (premier tour)

28,4 %

41 191 169

5 mai (second tour)

20,29 %

1995

23 avril (premier tour)

21,6 %

39 976 944

7 mai (second tour)

20,3 %

1988

24 avril (premier tour)

18,6 %

38 179 118

8 mai (second tour)

15,9 %

1981

24 avril (premier tour)

18,9 %

36 398 859

10 mai (second tour)

14,1 %

1974

5 mai (premier tour)

15,8 %

30 602 953

19 mai (second tour)

12,7 %

1969

1er juin (premier tour)

22,4 %

29 513 360

15 juin (second tour)

31,1 %

1965

5 décembre (premier tour)

15,2 %

28 910 500

19 décembre (second tour)

15,7 %

Notes de bas de pages

  • 1.
    Recommandation n° 2016-2, 7 sept. 2016, du Conseil supérieur de l’audiovisuel aux services de radio et de télévision en vue de l’élection du président de la République.
  • 2.
    Cons. const., 9 oct. 2013, n° 2013-675 DC.
  • 3.
    Cons. const., 8 mai 2002, n° 2002-111 PDR, portant proclamation des résultats de l’élection du président de la République.
LPA 03 Fév. 2017, n° 124a7, p.3

Référence : LPA 03 Fév. 2017, n° 124a7, p.3

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