La gouvernance et l’organisation de l’Assemblée nationale en six questions

Publié le 18/07/2024

Alors que les députés doivent élire ce jeudi leur nouveau président, on revient avec Me Patrick Lingibé sur les principales règles de fonctionnement de la chambre basse. 

La gouvernance et l’organisation de l'Assemblée nationale  en six questions
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L’Assemblée nationale est la chambre basse composée des 577 députés élus directement par les électrices et les électeurs dans chacune des circonscriptions territoriales créées à cet effet. Suite à la dissolution inattendue décidée par le président de la République le 9 juin 2024, les élections législatives anticipées des 30 juin et 7 juillet 2024 ont porté à l’Assemblée nationale des minorités parlementaires dont aucune ne dispose en l’état à elle seule d’une majorité décisionnelle. En effet, aux termes de ces élections, la répartition des sièges serait la suivante : Union de la gauche 198, ENS Ensemble ! (Majorité présidentielle) 150, RN Rassemblement National 125, LR Les Républicains 39, DVD Divers droite 27, UXD Union de l’extrême droite 17, DVG Divers gauche 12, REG Régionaliste 9, DVC Divers centre 6, HOR Horizons 6, UDI Union des Démocrates et Indépendants 3, SOC Parti socialiste 2, ECO Ecologistes 1, DIV Divers 1 et EXD Extrême droite 1.

Cependant, contrairement à ce que l’on pourrait penser, la configuration politique de l’Assemblée nationale ne se réduit pas pour l’essentiel à trois blocs politiques qui seraient monolithiques. En effet, derrière certains de ces blocs se cachent en réalité plusieurs partis ou mouvements politiques qui se sont regroupés pendant la campagne électorale pour faire front et gagner, mais qui en réalité ne se rejoignent pas sur toutes les actions politiques.

Au-delà de ce constat, ce qui est important, ce sont avant tout les groupes politiques qui seront constitués au sein de l’Assemblée nationale le jour de l’installation, soit le jeudi 18 juillet 2024. En effet, le chapitre V du Règlement Intérieur de l’Assemblée nationale traite dans ses articles 16 à 23 des groupes. Les députés peuvent ainsi se regrouper par affinités politiques pour former un groupe qui doit comprendre au moins 15 membres, non compris les députés apparentés. Ces groupes sont constitués sous forme d’association présidée par le président du groupe et composée des membres du groupe et apparentés. Ils peuvent assurer leur service intérieur par un secrétariat administratif dont ils règlent eux‑mêmes le recrutement et le mode de rétribution. Ces groupes offrent des moyens d’action et d’expression aux députés qui en sont membres. Ils se constituent en remettant à la Présidence une déclaration politique signée de leurs membres, accompagnée de la liste de ces membres et des députés apparentés et du nom du président du groupe. La déclaration peut mentionner l’appartenance du groupe à l’opposition. Ces documents sont publiés au Journal officiel. Le jeudi 18 juillet 2024, date de l’élection à la présidence de l’Assemblée nationale, il sera constaté les différents groupes politiques constitués et cela permettra d’avoir une image réelle de la composition de l’Assemblée nationale.

C’est en tout état de cause une composition très émiettée qu’offre la configuration politique 2024 de l’Assemblée nationale : aucun des groupes politiques composant cette chambre parlementaire ne peut à lui seul constituer une majorité décisionnelle. En effet, si elle constitue, avec le regroupement de plusieurs partis politiques, ses 198 députés, la Gauche Front Populaire représente un peu plus de 34 %. Mais ce bloc composite est très loin d’atteindre les 289 députés requis pour atteindre la majorité absolue. Autrement dit, cela imposera aux groupes politiques de s’entendre pour trouver, quoiqu’il en coûte, une majorité parlementaire pour voter des textes partagés à la chambre basse. Cette situation exigera donc de trouver un consensus qui n’est pas le point fort de la culture politique française marquée par l’affrontement, contrairement à celle de nos voisins notamment allemands ou italiens, avec le risque de décevoir les électrices et électeurs ayant fait un choix de vote. Cette situation est inédite sous la Cinquième République pour trois raisons. Plusieurs observations sont à formuler avant d’aborder les six questions sur l’Assemblée nationale.

 La première est qu’il convient de rappeler que le régime constitutionnel de la Cinquième République est un régime parlementaire qui se caractérise par la responsabilité du gouvernement devant le Parlement qui peut le renverser. Cependant, le régime parlementaire français a une particularité en ce qu’il assure une prééminence très forte du président de la République au sein de l’architecture constitutionnelle. Le Parlement se trouve très encadré dans ses actions et est le plus souvent aux ordres de l’Exécutif présidentiel pour la chambre basse (sauf en période de cohabitation forcée). Le système électoral majoritaire à deux tours favorise le groupe ayant le plus de suffrages exprimés. Ainsi, si les élections législatives s’étaient limitées à un seul tour de scrutin comme c’est le cas dans le système britannique, la composition de l’Assemblée nationale aurait été différente. En effet, un scrutin à deux tours permet des unions pouvant reconfigurer les résultats du deuxième tour par rapport à ceux obtenus au premier tour (désistement d’un candidat au profit d’un autre). Présentement, ce que l’on appelle le front républicain constitué entre les partis traditionnels dits de gouvernement a permis clairement au parti politique Rassemblement National de ne pas arriver en tête au second tour.

 La deuxième que l’on oublie trop souvent est que la réduction du mandat présidentiel de sept ans à cinq ans, adoptée par voie référendaire le 24 septembre 2000 avec un taux d’abstention record, visait à éviter notamment les risques de cohabitation connus pendant deux septennats, la majorité parlementaire élue pour cinq ans pouvant changer au cours du mandat présidentiel de sept années. Des élections législatives intervenant après l’élection du chef de l’État ont toujours confirmé le choix fait quelques semaines plus tôt pour l’élection du locataire de l’Élysée. Avec ces élections législatives anticipées, le président de la République s’est lui-même placé en position de fragilité, d’autant que lui-même ou son potentiel successeur en cas de démission ne pourra juridiquement dissoudre cette composition hétéroclite avant un an, soit le 9 juillet 2025, avec tous les risques que toute dissolution engendre nécessairement.

1° Scrutin majoritaire, majorité absolue et majorité relative ?

Le scrutin majoritaire est le mode de scrutin suivant lequel les sièges sont attribués au candidat (dans le cas d’un scrutin uninominal ou binominal) ou encore à la liste (dans le cas d’un scrutin de liste) qui a obtenu la majorité des voix. Cette majorité est dite absolue lorsqu’elle correspond à plus de la moitié des suffrages exprimés et dite relative lorsqu’elle réunit le plus grand nombre de voix sans arriver pour autant à la majorité absolue. Le scrutin majoritaire vise à doter l’assemblée d’une majorité forte pour permettre au groupe ou à la liste d’élus majoritaires de gouverner ladite assemblée. Ce dispositif avantage le groupe majoritaire en sièges, lequel a obtenu le plus de voix par rapport aux autres groupes politiques de l’assemblée. Dans un scrutin proportionnel, la répartition se fait en raison du poids de chaque groupe représenté par le nombre de suffrages obtenus. L’application d’un scrutin proportionnel intégral risque d’amener dans une assemblée une majorité ingouvernable. Un exemple peut être fourni avec les élections régionales qui ont eu lieu le 15 mars 1998 sur la base d’un scrutin proportionnel intégral suivant la règle de la plus forte moyenne à un tour. Il en est résulté que dans plusieurs régions aucun groupe politique n’avait la majorité absolue et donc ne pouvait gouverner. Cela a donné naissance à des coalitions politiques jugées à l’époque contre-nature. Le mode de scrutin a été modifié pour avoir un scrutin majoritaire avec une dose de proportionnelle. On voit que le scrutin majoritaire vise l’efficacité électorale alors que le scrutin proportionnel vise l’équité électorale. La problématique des dernières élections législatives anticipées, c’est qu’elles n’ont pas permis de dégager une très forte majorité en faveur du bloc ayant le plus grand nombre d’élus à la chambre basse. Il en ressort que la majorité ne peut être atteinte dans les circonstances de l’espèce qu’en recourant à une majorité de coalition pour gouverner.

On parle de majorité absolue lorsqu’un groupe politique qui a obtenu le plus de suffrages exprimés obtient également plus de la moitié des sièges au sein de l’assemblée. Ainsi, l’Assemblée nationale étant composée de 577 députés, la majorité absolue est de 289 députés. Il faut néanmoins rappeler sur ce point que dans la mandature 2017-2022 de la 15e législature, aucun groupe politique ne détenait à lui tout seul la majorité absolue. En effet, La République en Marche disposait de seulement 266 députés, Les Républicains de 100 députés, le MODEM de 57 députés, les socialistes et apparentés de 28 députés, Agir ensemble de 22 députés, de l’UDI et des indépendants de 19 députés, Libertés et Territoires de 18, La France insoumise de 17 députés et la Gauche démocrate et républicaine de 15 députés. Ce n’est donc qu’en allant chercher l’appui d’autres forces politiques alliées et partageant le même programme politique qu’une majorité absolue a été trouvée. Pour faire passer des textes à l’Assemblée nationale, il convient que le groupe pilote dispose d’une majorité avec ses alliés potentiels pour faire adopter ses projets et propositions de loi et, surtout, échapper à toute motion de censure qui renverserait le gouvernement.

Compte tenu du nombre de députés à rallier pour obtenir une majorité absolue, la tentative de disposer d’une telle majorité politique uniforme est très peu probable en l’état au vu des rapports de force politique en présence. En effet, la confrontation et la radicalisation des mouvements politiques n’iront pas dans ce sens, d’autant que ce serait compliqué sur le plan moral et politique pour certains groupes. La minorité majoritaire parlementaire irait plutôt rechercher des majorités et consensus pour l’adoption de projets de texte. Contrairement à ce que l’on pense, des textes ont été adoptés avec une majorité dépassant celle des formations politiques habituelles, après débats et prise en compte d’amendements. Cette situation inédite va renforcer le rôle premier du Parlement dans la maîtrise des textes.

2° Le Bureau de l’Assemblée nationale

 Le bureau de l’Assemblée est composé de 22 membres : 1 président, 6 vice-présidents, 3 questeurs et 12 secrétaires.

Cela débute obligatoirement par l’élection du président de l’Assemblée nationale. Il faut savoir que c’est le doyen d’âge de l’Assemblée nationale qui doit présider la première séance de 17e législature jusqu’à l’élection du président, aucun débat ne pouvant avoir lieu sous cette présidence temporaire. Les six plus jeunes députés présents sont appelés pour remplir les fonctions de secrétaire jusqu’à l’élection du Bureau.

Le président de l’Assemblée nationale est élu au scrutin secret à la majorité absolue aux deux premiers tours : le candidat donc obtenir 289 voix sur ce nom. Si l’élection n’est pas acquise aux deux premiers tours, il est procédé à un troisième tour où le candidat ayant obtenu le plus de suffrages exprimés est élu. En cas d’égalité de voix, le candidat le plus âgé est élu. Il est élu par la durée de la mandature. Il est à noter qu’il reviendra au prochain locataire de l’Hôtel de Lassay de désigner l’un des trois membres du Conseil constitutionnel qui devront remplacer les trois membres sortants non-renouvelables dont le mandat expire le 8 mars 2025.

Les 21 autres membres du Bureau sont élus, au début de chaque législature, au cours de la séance qui suit l’élection du Président et obligatoirement renouvelés chaque année suivante. L’élection des vice-présidents, des questeurs et des secrétaires a lieu en s’efforçant de reproduire au sein du Bureau la configuration politique de l’Assemblée et de respecter la parité entre les femmes et les hommes. Si la répartition des postes fait l’objet d’un accord, les présidents des groupes établissent la liste unique de leurs candidats aux différentes fonctions qui est déposée au secrétariat général de l’Assemblée, ces nominations prenant effet immédiatement dès la publication de ladite liste. À défaut d’accord, il est procédé à un scrutin.

3° Les commissions permanentes de l’Assemblée nationale

 L’article 43 de la Constitution, premier alinéa, limite à 8 maximum le nombre de commissions permanentes. En application de l’article 36 du Règlement Intérieur de l’Assemblée nationale, ces huit commissions permanentes sont les suivantes :

1° Commission des affaires culturelles et de l’éducation qui traite des questions touchant à l’enseignement scolaire, l’enseignement supérieur, la recherche, la jeunesse, les sports, les activités artistiques et culturelles, la communication et la propriété intellectuelle.

2° Commission des affaires économiques qui traite de l’agriculture et de la pêche, de l’énergie et des industries, de la recherche appliquée et de l’innovation, de la consommation, du commerce intérieur et extérieur, des postes et des communications électroniques, du tourisme, de l’urbanisme et du logement.

3° Commission des affaires étrangères qui traite de la politique étrangère et européenne, des traités et des accords internationaux, des organisations internationales, de la coopération et du développement, de la francophonie et des relations culturelles internationales.

4° Commission des affaires sociales qui traite de l’emploi et des relations du travail, de la formation professionnelle, de la santé et de la solidarité, des personnes âgées, des personnes handicapées, de la famille, de la protection sociale, des lois de financement de la sécurité sociale et du contrôle de leur application, de l’insertion et de l’égalité des chances.

5° Commission de la défense nationale et des forces armées qui traite de l’organisation générale de la défense, des liens entre l’armée et la Nation, de la politique de coopération et d’assistance dans le domaine militaire, des questions stratégiques, des industries de défense, des personnels civils et militaires des armées, de la gendarmerie, de la justice militaire, des anciens combattants.

6° Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire qui traite de l’aménagement du territoire, de la construction, des transports, de l’équipement, des infrastructures, des travaux publics, de l’environnement et de la chasse.

 7° Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire qui traite des questions de finances publiques, des lois de finances, des lois de programmation des orientations pluriannuelles des finances publiques, du contrôle de l’exécution du budget, de la fiscalité locale, de la conjoncture économique, de la politique monétaire, des banques, des assurances, du domaine et des participations de l’État.

8° commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République qui traite des lois constitutionnelles, des lois organiques, du Règlement Intérieur de l’Assemblée, du droit électoral, des droits fondamentaux, des libertés publiques, de la sécurité, de la sécurité civile, du droit administratif, de la fonction publique, de l’organisation judiciaire, du droit civil, commercial et pénal, de l’administration générale et territoriale de l’État, des collectivités territoriales.

L’effectif maximum de chaque commission est égal à un huitième de l’effectif des membres composant l’Assemblée, arrondi au nombre immédiatement supérieur, soit 73 membres.

Il faut savoir que la présidence de la Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire revient obligatoirement à un député appartenant à un groupe s’étant déclaré d’opposition à la majorité parlementaire.

Les 8 commissions permanentes doivent se réunir pour élire leurs bureaux composés à savoir du président, de 4 vice‑présidents et de 4 secrétaires. La Commission des affaires sociales et la Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire doivent également nommer chacune un rapporteur général. La composition du bureau de chaque commission permanente doit s’efforcer de reproduire la configuration politique de l’Assemblée et de respecter la parité entre les femmes et les hommes.

Les commissions revêtent une importance capitale car ce sont elles qui effectuent le travail parlementaire de fond avant que les projets de texte arrivent devant l’Assemblée pour être votés.

À côté de ces commissions permanentes, l’Assemblée peut créer des commissions spéciales ou des commissions d’enquêtes.

Il existe par ailleurs une Délégation aux outre-mer qui a été créée par une décision de la Conférence des Présidents du 17 juillet 2012. Elle se compose de 54 députés, dont les 27 députés ultramarins qui sont tous membres de droit. Elle est chargée d’informer la représentation nationale sur toute question relative aux outre-mer.

Pour rappel, en application de l’article 47 du Règlement Intérieur, la Conférence des Présidents est composée outre du Président, des vice-présidents de l’Assemblée, des présidents des commissions permanentes, des rapporteurs généraux de la commission des affaires sociales et de la commission des finances, de l’économie générale et de l’évaluation, du président de la commission des affaires européennes et des présidents des groupes.

4° La motion de censure ou le vote de défiance

 L’article 49 de la Constitution prévoit trois procédures de mise en cause de la responsabilité du gouvernement devant l’Assemblée nationale :

La première procédure a trait à ce que l’on appelle la question de confiance et est fondée sur le premier aliéna de l’article 49 de la Constitution. Elle résulte d’une initiative du gouvernement caractérisée par l’engagement de la responsabilité du gouvernement sur son programme ou sur une déclaration de politique générale, d’où le nom couramment donné de « question de confiance ». Elle requiert préalablement une décision formelle du Premier ministre après délibération du conseil des ministres, cette dernière ne pouvant aucunement être considérée comme une autorisation pour le chef du gouvernement comme l’a jugé le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2016-736 DC du 4 août 2016, Loi relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels. Il convient de préciser que la question de confiance, qui prévoit que le Premier ministre peut engager la responsabilité du gouvernement sur son programme sur une déclaration de politique générale, n’est aucunement une obligation. Ainsi, elle n’est jamais demandée lorsqu’il n’y a pas de majorité absolue en faveur du chef de l’État ou en l’espèce du chef du gouvernement. Il faut savoir que cette absence de majorité absolue acquise n’est pas nouvelle et cela a entraîné ainsi que la question de confiance n’a pas été demandée notamment de 1966 à 1974 ou encore de 1988 à 1993, faute de majorité absolue.

La deuxième procédure concerne précisément la motion de censure et est prévue par le second alinéa de l’article 49 de la Constitution. Elle résulte du dépôt d’une motion de censure à l’initiative d’un certain nombre de députés.

La troisième procédure dite 49-3 a trait à l’engagement de la responsabilité du gouvernement sur le vote d’un texte et est fondée sur le troisième alinéa de l’article 49 de la Constitution.

L’article 50 de la Constitution précise que lorsque l’Assemblée nationale adopte une motion de censure ou lorsqu’elle désapprouve le programme ou une déclaration de politique générale du gouvernement, le Premier ministre doit remettre au président de la République la démission du gouvernement. Dans ce cas, le Premier ministre est tenu de présenter la démission de son équipe. Ainsi, les députés peuvent déposer, auprès du Président de l’Assemblée nationale, une motion de censure.

Pour être recevable, celle-ci doit être signée par un dixième au moins des membres de l’Assemblée, soit 58 députés sur les 577 députés.

 Toutefois, afin d’éviter les motions à répétition, chaque signataire ne peut signer que trois motions durant la session ordinaire et durant une session extraordinaire.

Dès le dépôt de la motion, aucune signature ne peut être ajoutée ni retirée.

La liste des signataires est publiée au Journal officiel dans le compte rendu intégral des débats.

De plus, d’une part, le dépôt d’une motion de censure ouvre un délai de 48 heures durant lequel elle ne peut pas être mise aux voix, empêchant ainsi les votes trop émotionnels et d’autre part, seuls les députés favorables à la motion de censure participent au scrutin, la motion n’est adoptée que si elle est votée par la majorité absolue des membres composant l’Assemblée.

Il faut savoir que dans l’histoire de la Cinquième République, une seule motion de censure a été adoptée le 5 octobre 1962 contre le gouvernement de Georges Pompidou, entraînant sa démission (pour information les députés protestaient contre la décision de Charles de Gaulle de faire approuver sur la base de l’article 11 de la Constitution par référendum la révision de la Constitution en vue de permettre l’élection du président de la République au suffrage universel direct). Cependant, une motion de censure a failli également être votée à trois voix près le 1er juin 1992 contre le gouvernement de Monsieur Pierre Bérégovoy, les députés protestant contre la politique agricole commune.

5° Le recours à l’article 47 de la Constitution pour régler le Budget par voie forcée

 L’article 47 de la Constitution prévoit une procédure spéciale d’adoption forcée des lois de finances en cas d’inertie ou de blocage parlementaire.

Il convient de préciser tout d’abord que les lois de finances qui fixe le Budget de l’État, autrement dit ses ressources et ses charges, peuvent être regroupées globalement en trois catégories :

*les lois de finances qui sont initialement votées avant le début des exercices budgétaires qui constituent les Budgets primitifs de l’État ;

*les lois de finances rectificatives qui modifient en cas de nécessité les lois budgétaires initiales ;

*les lois de règlement qui traitent des exercices qui sont clôturés et qui permettent d’apprécier les dépenses effectuées et ressources encaissées par rapport aux prévisions figurant dans les lois de finances.

L’article 47 de la Constitution a été modifié par l’article 22 de la loi constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008 de modernisation des institutions de la Ve République qui prévoit dans son second alinéa que si l’Assemblée nationale ne s’est pas prononcée en première lecture dans le délai de 40 jours après le dépôt d’un projet, le gouvernement doit saisir le Sénat qui doit statuer dans un délai de 15 jours. En tout état de cause, si le Parlement ne s’est pas prononcé dans un délai de 70 jours, les dispositions du projet peuvent être mises en vigueur par voie d’ordonnance.

 6° Le recours à l’article 47-1 de la Constitution pour régler les lois de la Sécurité sociale par la voie forcée

 Il convient de préciser que cet article a été ajouté par la loi constitutionnelle n° 96-138 du 22 février 1996 instituant les lois de financement de la sécurité sociale qui a complété l’avant-dernier alinéa de l’article 34 de la Constitution avec les dispositions suivantes :

« Les lois de financement de la sécurité sociale déterminent les conditions générales de son équilibre financier et, compte tenu de leurs prévisions de recettes, fixent ses objectifs de dépenses, dans les conditions et sous les réserves prévues par une loi organique. »

Cet article 47-1 prévoit une procédure spéciale d’adoption forcée des lois de financement de la Sécurité sociale en cas d’inertie ou de blocage parlementaire. Il prévoit dans son second alinéa que si l’Assemblée nationale ne s’est pas prononcée en première lecture dans le délai de 20 jours après le dépôt d’un projet, le gouvernement doit saisir le Sénat qui doit statuer dans un délai de 15 jours. En tout état de cause, si le Parlement ne s’est pas prononcé dans un délai de 50 jours, les dispositions du projet peuvent être mises en œuvre par voie d’ordonnance.

 

 

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