Balade « jardins » en Anjou

Publié le 16/06/2021

Balade « jardins » en Anjou

Château de Gastines.

DR

Balades en compagnie du jardinier en chef au château de Gastines, déambulations à Chambiers, au manoir de Châtelaison, et à Puygirault.

Les jardins du château de Gastines

Les propriétaires des jardins du château de Gastines sont soucieux de préserver leur trésor de verdure !

Un châtelet défensif du XVIe siècle. Sillonnant les allées qui contournent les parties paysagères et les bosquets de charmilles, ce château se dévoile majestueux, à peine caché par un très vieux chêne dont l’âge se devine par la perte de son écorce. La structure de défense du château est clairement définie : ici, des douves en eau, là le pont-levis, l’étroitesse des fenêtres… Malgré les inévitables changements de propriétaires, la demeure construite en 1590 par René Cléreau d’Échemiré a conservé ses proportions d’origine et son époque Louis XIII. Fort heureusement, le logis du même style Louis XIII mais construit vers 1865 et formant en équerre une aile grandiloquente et très Viollet-le-Duc a été détruite en 1963. La pureté de la propriété a été donc maintenue et bien restaurée par les Castries qui ont repris en 1990 le domaine.

Un mélange de parc à l’anglaise et de jardin à la française. Le paysagiste Louis Benech s’est attelé à une redéfinition du tracé de certains jardins anciens afin d’en retrouver leur régularité et d’apporter un souffle de modernité ; mais les Castries eux-mêmes dessinent les autres carrés de verdure. D’un côté, plusieurs chambres de verdure dans le parfait style à la française de parterres bien ordonnés ; plus loin vers l’étang, un parc à l’anglaise moins strict et bien plus sauvage, entre eaux et canaux de drainage, plantations arborées de diverses espèces et prairies libres. Le charme réside dans ce contraste d’un agencement maîtrisé, à la rigueur contrôlé face à une perspective plus ouverte et libre. Avec une vision très pointue et précise du premier plan, l’œil est appelé à un champ large et infini en arrière-plan.

Le parti pris de deux uniques couleurs : le blanc, le vert. Presqu’aucun parterre de fleurs ici, pas de mixed-borders aux couleurs bariolées ; mais une fort belle harmonie de vert et de blanc. Ici, les buis succèdent aux ifs qui précèdent les fusains du Japon et les lauriers thym ; l’ensemble étant cintré par des charmilles parfaitement taillées. Et côté floraison, le blanc est de rigueur, tant pour les roses que le magnolia, les hydrangeas, les pommiers et poiriers, les boules de neige. Dans ce jardin, la succession de chambres de verdure est magique : l’une avec des rosiers sur tiges (des rosiers iceberg buissonnants), la seconde avec des arbres à fruits de plein vent, la troisième pour cacher la piscine, etc. À Gastines, aucun labyrinthe pour se perdre romantiquement ; mais une succession de boules, de vagues qui apparaissent à travers les portes, les palissades, et laissent à peine dévoiler quelques sculptures en bronze d’inspiration antique mais contemporaines. Quel travail que la taille de ces topiaires, mais quel raffinement ! Et pour amuser l’enfant qui sommeille en chacun d’entre nous, des moutons en buis broutent sur le gazon. En déambulant à travers la beauté des chambres de verdure parfaitement entretenues, on comprend que le lieu ait reçu en 2005 le label « Jardin remarquable ».

• Château de Gastines, 49150 Fougeré. Tél. : 02 41 90 17 57

Les jardins du château de Chambiers

Autre ambiance dans cette propriété familiale depuis 5 générations qui a été reprise en 1981 par les Crouan et transformée en chambre et table d’hôtes.

Un ex-rendez-vous de chasse. Prenant un verre devant la maison dans la cour, un jeune brocart est venu sans peur aucune brouter l’herbe à 20 mètres de nous. C’est fréquent, nous dit la propriétaire. Au petit matin ou à la tombée du jour, ils sortent du bois et viennent grappiller les fleurs, manger les boutons de rose. Charmant pour le visiteur, un peu moins pour la jardinière ! Mais tout s’explique, car le lieu a toujours été et depuis le XVIIe siècle un rendez-vous de chasse du proche et voisin château de Durtal. D’ailleurs, le jardin recréé laisse apercevoir de belles percées sur la forêt pour rappeler justement la proximité des bois. Chambiers est demeuré un lieu de chasse jusqu’à la seconde guerre mondiale et les Crouan ont repris la gestion et l’exploitation des 40 hectares (parc, bois) depuis 1980.

Entre vieux arbres et rhododendrons. Le domaine peut s’enorgueillir de posséder quelques très beaux et vieux sujets : un majestueux chêne de quatre siècles, une dizaine de cèdres regroupés en massif ayant plus de 200 ans, et le long de l’allée d’arrivée, des massifs de rhododendrons de 3 mètres de haut. Majorité de fleurs blanches néanmoins ponctuées de touches rose pour ces beaux massifs impressionnants par leur densité. Sur la façade est un parterre d’ifs, en cônes tronqués, de boules de buis, de topiaires agencés en carrés, à l’image des parterres à la française ; l’ensemble ayant été recréé et dynamisé il y a 30 ans environ.

Une table d’hôtes locavore. Quittez les boiseries XVIIIe siècle du premier salon, le billard français du second salon, pour vous glisser dans les tonalités ocre et safran de la salle à manger décorée de pochoirs qui s’inspirent de la vie artistique et de mécène du bon roi René, duc d’Anjou. En provenance de petits producteurs et maraîchers bios voisins, la cuisine est bonne, familiale et axée sur le végétal. Preuve en est le potage de fanes (radis, céleri, betterave) relevé de pesto et adouci par la crème fraîche ; la salade composée ; le travers de porc et sa cocotte de légumes. Pour finir, une excellente tarte aux citrons avec des agrumes niçois très doux, goûteux et juteux. La propriétaire est présidente bénévole de l’association « Bienvenue au Château » qui regroupe des demeures ouvertes au public encore aux mains de leurs propriétaires, et connaît de nombreuses histoires sur la région et aime à vous les faire partager. Profitez-en !

• Château de Chambiers, 49430 Durtal. Tél. : 02 41 76 07 31

Les jardins du manoir de Châtelaison

À Saint-Georges-sur-Layon, le rêve d’enfant de Jean-Pierre Gentilhomme de réhabiliter une propriété s’est concrétisé avec le ravissant manoir du début du XVIe siècle et les jardins qu’il a créés de A à Z sur un terrain vierge et récupéré d’une exploitation agricole.

Une perle architecturale. Classé « Monument historique », le manoir interpelle par la beauté de ses fenêtres décorées de motifs gothiques flamboyant, par sa tour octogonale cachant un escalier à vis. Sur le côté, un petit logis prolonge le corps du bâti principal et on ne peut qu’admirer la restauration entreprise, la propriété ayant été acquise dans les années 1976 dans un état de total abandon. Aucune faute de goût, une pureté de style, une rénovation avec des matériaux anciens ont permis l’obtention du prix spécial du jury « Vieilles Maisons Françaises » catégorie « Jardin contemporain et patrimoine ».

Un jardin créé par un passionné. Si Jean-Pierre Gentilhomme est votre guide, alors vous serez vraiment chanceux. En effet, il est réellement passionné et tellement heureux quand des visiteurs s’intéressent à ce travail, l’œuvre de toute une vie… Créativité et persévérance sont au rendez-vous dans ces jardins qui cumulent tous les jardins en une promenade variée, éclectique. D’un côté, deux massifs parfaitement symétriques avec des haies de charmilles ; d’un autre, une inspiration méditerranéenne avec jeux de carrés en ardoises au pied d’un cyprès ; plus loin, des fusains dorés taillés en nuage à la japonaise ; en contrebas un charmant labyrinthe d’herbe et de carreaux en terre cuite des Rairies ; longeant la route des parties bien plus sauvages où poussent différentes espèces d’arbres et en remontant vers la maison des mix-borders à l’anglaise sur fond de topiaires en carrés, cônes, champignons, camemberts. On sent que la patte personnelle du propriétaire-jardinier est omniprésente et qu’il s’est amusé en créant son jardin.

Une originalité ponctuée d’humour. En voyant la précision des plantations et la taille exacte des topiaires, on pourrait penser à une certaine rigueur ou à un certain immobilisme. Mais à Châtelaison, c’est tout le contraire : l’amusement pointe au détour de chaque parcelle, l’humour est présent dans les diverses parties du terrain de 8 000 m². Imaginé par Jean-Pierre Gentilhomme, le labyrinthe n’a pas de sortie ; caché dans une grotte, c’est Adam qui incite Ève à la faute en lui tendant une pomme ; échappant au saut-de-loup, grenouilles et sangliers se glissent entre les dégoulinades de lierres et les alchémilles. Alors qu’un classicisme de jardins remontant au XVIe siècle caractérise les massifs et les chambres de verdure, les nombreuses fabriques cachées sur tout dans la partie « sauvage » du parc sont étonnantes et entraînent vers un art-paysage du XIXe siècle : porte du paradis, chaises dans un cadre de tableau, dégringolade de fontaines…

• Jardins du manoir de Châtelaison, 49700 Saint-Georges-sur-Layon. Tél. : 02 41 59 64 24

Les jardins du Puygirault

Abandonnons les chambres de verdure, les haies de buis et d’ifs pour un voyage pédagogique dans l’histoire des jardins potagers.

Une saga familiale en 3 volets. En 1978, près de Saumur, les Bouchard père et fils créent le musée du champignon dans des caves acquises quelques années auparavant. Le lieu vous intéressera sûrement pour découvrir, outre le classique champignon de Paris, une douzaine d’autres variétés aux noms parfois amusants : vesse-de-loup, trompette de la mort, langue de bœuf, oreille de lièvre… Quelques années plus tard, en 2000, dans une autre galerie souterraine, le sculpteur Philippe Cormand va passer 1 000 jours sous la terre pour sculpter dans la pierre de tuffeau une vingtaine de monuments du Val de Loire. En 2018, après 1 an et demi de conception, auquel s’ajoute le travail du jardinier-paysagiste Patrick Genty, ouvrent les jardins de Puygirault qui présentent environ 1 300 variétés de végétaux et retracent l’histoire du potager à travers les siècles.

Les plantes domestiquées par l’Homme depuis la nuit des temps. Quelque 14 jardins clos racontent l’épopée du potager : notre rapport avec les plantes sauvages à l’époque de la cueillette, les premiers labours et les végétaux africains, le jardin antique et le végétal issus de la colonisation romaine, le jardin médicinal, le jardin médiéval, le jardin de Contentement inspiré du traité d’agronomie d’Olivier de Serres, l’Asie et ses plantes, les belles américaines, les végétaux nés de l’insularité ou des terres volcaniques, le potager d’un curieux, la prairie des abeilles et des plantes mellifères, le jardin bouquetier pour célébrer la beauté des fleurs…

Un savoir-faire à transmettre. En visitant ces lieux, nous sommes pris d’un émerveillement pour le travail du concepteur du jardin, Patrick Genty, et du jardinier chef Stéphane Michon. Aucune prétention dans leur savoir, mais la farouche et formidable volonté de rester loin des schémas et plans sur papier, les mains dans la terre pour travailler encore eux-mêmes le végétal, et avant toute chose le désir de transmettre leurs connaissances, leur savoir-faire aux apprentis, aux plus jeunes. Travail du semis en godets, du repiquage en pots et de la plantation en pleine terre ; mais surtout façonnage de grands pots à végétaux entourés d’un tressage d’osier et de châtaignier ; mise en valeur de variétés végétales méconnues ; souci d’une pédagogie simple et adaptée au public adulte et enfant : on repart de Puygirault plus savant et émerveillé.

• Jardins du Puygirault, route de Gennes, 49400 Saumur. Tél. : 02 41 53 95 62