La première des bibliographies pour bibliophiles

Publié le 27/03/2024

Vermot & Associés

L’un des plus célèbres ouvrages d’aphorismes, celui de La Rochefoucault, Caractères, pensées, maximes et sentimens n’a guère la faveur des bibliophiles. On n’en voit que peu d’exemplaires dans les ventes, sinon dans des éditions tardives. Si on a la chance d’en découvrir une édition originale (Paris, 1693), on peut lire sur la page de titre que l’ouvrage a été imprimé par Nicolas de Bure, « à la Ville de Montpellier, sur le quay des Augustins ». Ce Nicolas de Bure (1631-1694 ou 1703) a donné naissance à une lignée de libraires-éditeurs qui officièrent jusqu’au milieu du dix-neuvième siècle. Et même un peu plus, dans la mesure où notre confrère Gilles de Bure (1940-2013), d’abord journaliste au Journal des arts, fut un critique reconnu, notamment spécialiste de l’architecture, et ensuite écrivain en laissant plus d’une dizaine d’ouvrages.

Son ancêtre Nicolas était le fils d’un homme d’armes dans la Compagnie de Jehan de Pellevé. Il ne suivit pas les traces de son père puisqu’il fut mis en apprentissage en 1643 chez le libraire Adam Pousset, et fut reçu libraire lui-même en 1660. Il s’installa alors à l’enseigne « à la Ville de Montpellier », sur le quai des Augustins à Paris. D’où l’adresse bibliographique insolite sur la page de titre des Maximes de François de La Rochefoucauld. Guillaume de Bure (1663-1748) prit la succession de son père. On croise ensuite plusieurs membres de la famille, tous libraires, pour arriver à Jean (1702-1786), le véritable créateur du fonds de librairie De Bure. Reçu maître le 30 décembre 1721, il exerça « À l’image saint Paul » jusqu’en 1786. Fort de ses connaissances, ce dernier publia de 1763 à 1769 une Bibliographie instructive qui fait encore référence. Il s’agit en effet du premier répertoire à l’usage des bibliophiles, qui comprend 6 140 entrées classées par ordre de matière. Cet ouvrage dont le sous-titre est Traité de la connaissance des livres rares et singuliers comprend 9 volumes répartis en 3 tomes pour l’Histoire, 2 pour la Théologie et les Belles-lettres (in-8). On joint généralement le Supplément à la bibliographie instructive, ou catalogue des livres du cabinet de feu M. Louis Jean Gaignat (Paris, de Bure, 1769).

Un exemplaire complet de l’édition originale, relié en veau fauve marbré, dépareillé et en état médiocre pour les deux derniers volumes, a été adjugé 110 €, à Bordeaux, le 16 avril 2021 par la maison Briscadieu. Un autre exemplaire de l’originale, incomplet des deux derniers tomes, relié en veau marbré d’époque, le dos orné, a été vendu 300 €, à La Salle, le 19 février 2024 par la maison Vermot & Associés, assistée par François Bétis.

Le fils de Jean de Bure, François-Jean (1743-1802) s’est distingué en éditant l’Almanach royal en 1786 ; il avait épousé Anne-Charlotte d’Houry (1745-1828), dont le grand-père Jean (1678-17152) avait imaginé en 1699 l’Almanach Royal, que ses descendants éditèrent jusqu’en 1814. Quant à l’Almanach, sous divers titres, il dura jusqu’en 1919. Quant aux de Bure suivants, Paul puis Albert, ils étaient qualifiés de bibliothécaires.

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