Le cœur nu de Baudelaire

Publié le 03/11/2021

Le manuscrit du recueil le Cœur mis à nu de Baudelaire est exposé à la BnF, dans l’exposition qui lui est consacrée : « Baudelaire, la modernité mélancolique ».

BnF

Dès les premières lignes, Charles Baudelaire prévient ses éventuels lecteurs : « Je pense commencer Mon cœur mis à nu n’importe où, n’importe comment, et le continuer au jour le jour, suivant l’inspiration du jour et de la circonstance, pourvu que l’inspiration soit vive ». Pendant longtemps, on a pensé que cet ouvrage était autobiographique. On sait aujourd’hui qu’il n’en est rien. Il y avait pourtant de quoi être désemparé, et Baudelaire s’y entendait en la matière. Les exégètes pensent que ces notes ont été prises pour la rédaction d’un ouvrage futur et qu’elles en sont les brouillons. En réalité, nous n’en savons rien ! Le seul indice est un commentaire qu’il fit à propos de Marginalia d’Edgar Poe : « S’il vient à quelque ambitieux la fantaisie de révolutionner d’un seul coup le monde entier de la pensée humaine, de l’opinion humaine et du sentiment humain, l’occasion s’en offre à lui. La route qui mène au renom universel s’ouvre droite et sans obstacle devant lui. Il lui suffira en effet d’écrire et de publier un très petit livre. Le titre en sera simple – quelques mots bien clairs – Mon cœur mis à nu. […] Mais l’écrire – voilà la difficulté. Aucun homme ne pourrait l’écrire, même s’il l’osait. Le papier se recroquevillerait et se consumerait au moindre contact de sa plume enflammée ».

Ce texte comprenant 85 pensées entasse toutes les colères de l’écrivain, assemble les réflexions du poète sur l’amour et les femmes, Dieu, la peine de mort, le progrès, l’histoire de la France, etc. Il devait, comme Baudelaire l’écrivit à sa mère en 1861, « rendre pâle les confessions de Jean-Jacques ». Comme les trois autres recueils de notes : Fusées, Hygiène, et Carnet, Mon cœur mis à nu fut publié en 1887 dans ses Œuvres posthumes et Correspondances inédites, précédées d’une étude biographique par Eugène Crépet. Un exemplaire relié en demi-maroquin rouge a été adjugé 375 €, le 8 juin 2016 par la maison Thierry Desbenoît. Ces journaux intimes ou « livre de rancune », sont restés à l’état de feuilles volantes jusqu’à la mort du poète en 1867. Parmi elles, le manuscrit du Cœur mis à nu est actuellement exposé à la BnF dans le cadre de la commémoration du 200e anniversaire de la naissance de Baudelaire.

Ces Journaux intimes dont le Cœur mis à nu ont connu plusieurs éditions. De la seconde, un exemplaire du tirage unique à 50, relié en demi-chagrin noir orné, a été adjugé 80 €, à Drouot, le 15 avril 2015 par la maison Fraysse et Associés. Le texte de ces recueils de notes trouva finalement son établissement quasi définitif dans l’édition que donna en 1949 Jacques Crépet.

Plan
X