Réserve, ouvre-toi !
Musée de Pont-Aven
Il faut saluer l’initiative du musée de Pont-Aven : organiser une exposition participative invitant le public à voter pour présenter quelques-unes des œuvres qui dorment dans les réserves. Le succès a été au rendez-vous, puisque près de 2 000 votes ont été enregistrés.
60 œuvres étaient proposées et seulement 35 ont été retenues sur 5 thèmes différents : « Le noir et blanc », « Les personnages », « L’architecture », « Les costumes », « Les variations colorées ».
Ces peintures, aquarelles, gravures et lithographies ont justement bénéficié d’un accrochage sur les cimaises de ce musée qui, par ailleurs, possède de nombreuses œuvres de la célèbre école de Pont-Aven, initiée par Paul Gauguin et Émile Bernard notamment.
Parmi les créations exposées, des artistes peu connus mais intéressants côtoient des peintres à la grande notoriété : Odilon Redon, Henry Sérusier ou Maxime Maufra.
Ainsi, le musée de cette petite cité se révèle actif et avant-gardiste, en associant le public à ses décisions.
Tout un processus s’est mis en place pour la réalisation de ce projet novateur. Il a fallu présélectionner les tableaux à présenter : ce fut le rôle de l’équipe de conservation qui a dû s’assurer du bon état de conservation des œuvres et proposer un choix symbolisant la variété des toiles et gravures. Le vote des participants s’est effectué en ligne.
Une fois sélectionnées, les œuvres ont été accrochées, accompagnées par les cartels réalisés par le musée auxquels se sont ajoutés ceux rédigés par l’atelier d’écriture du centre socioculturel « La Balise », à Concarneau, et par l’association des amis du musée de Pont-Aven.
La collaboration a été forte entre musée et public, il en résulte une exposition à travers laquelle on découvre des artistes souvent confidentiels dont l’œuvre mérite d’être connue.
Dans la variété des thèmes, l’influence de l’école de Pont-Aven, elle-même inspirée par l’estampe japonaise alors en vogue à l’époque, est le plus souvent présente. Les contours sont simplifiés, pas de modelé, peu de perspective et des jeux de surfaces planes.
En des gris-bleu raffinés, Albert Clouard évoque dans une lithographie L’Oratoire de Saint-Guirec à Ploumanac’h, en une atmosphère silencieuse, paisible, tandis que dans la gouache de Louis Roy, vivent des Femmes près d’une rivière, exécutées en une palette de verts et de mauves ; succinctement décrits, les personnages demeurent vivants.
Tout comme l’est le Couple enlacé de dos, aquarelle signée Henry Sérusier, membre actif de l’école de Pont-Aven, et dans laquelle apparaît la simplification de la forme cependant expressive et délimitée par un fin tracé ; le rouge d’un manteau illumine cette œuvre.
Gaston Linden propose un Portrait de Yannick en des bruns nuancés éclairés du blanc de la coiffe et du col de la robe de la jeune fille au visage mis en lumière et qui semble quelque peu intimidée.
François-Alfred Delobbe saisit ce moment difficile de l’attente d’une femme espérant le retour de pêche de son mari ; vue de dos, elle semble bien esseulée face à l’étendue d’une mer calme ; anxiété et douceur de la gamme colorée s’unissent ici parfaitement.
Parmi les eaux-fortes : Pluie sur Belon, un calme paysage d’eau sur laquelle voguent des bateaux et de nature : arbres et collines abrités par un ciel nuageux, là encore, l’atmosphère est paisible…
Intéressante démarche que cette exposition participative, où le public est en lien direct avec le musée et lui permet de découvrir la création au plus près.