Chez les Surligneurs : Pourquoi parler de « scènes de sexe » plutôt que de viol au procès Mazan ?

Publié le 27/09/2024

 Pourquoi la cour d’assises parle-t-elle de « scènes de sexe » et non pas de viol dans le procès Mazan ? Les Surligneurs vous répondent. Cette semaine, ils se penchent aussi sur le vote de confiance et le statut du nouveau ministre des transports. 

Chez les Surligneurs : Pourquoi parler de "scènes de sexe" plutôt que de viol au procès Mazan ?

Procès des viols de Mazan : pourquoi parler de “scène de sexe” plutôt que de “viols” ?

Lors du procès Mazan, une déclaration du président de la cour criminelle du Vaucluse a provoqué l’indignation : “On va parler de scènes de sexe plutôt que de viols.” Cette phrase a suscité une forte réaction, notamment sur les réseaux sociaux, où de nombreux internautes ont exprimé leur mécontentement en affirmant que l’utilisation du terme “sexe” minimisait la gravité des actes reprochés.

Cette distinction se justifie par le principe fondamental de la présomption d’innocence, reconnu par le Conseil constitutionnel comme principe à valeur constitutionnelle et ancré dans la Déclaration des droits de l’homme. Selon l’article préliminaire du Code de procédure pénale et l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, toute personne accusée d’une infraction est présumée innocente jusqu’à la preuve de sa culpabilité. Qualifier ces scènes de “viol” reviendrait à considérer les accusés comme coupables de viol avant même qu’un jugement ne soit rendu, c’est-à-dire aller à l’encontre de la présomption d’innocence. On rappelle à toutes fins utiles qu’une personne est présumée innocente jusqu’à son éventuelle condamnation, y compris pendant le procès.

Pour que ces scènes soient qualifiées de “viol”, il faut que tous les éléments constitutifs de l’infraction soient établis par le tribunal, notamment l’acte de pénétration et l’usage de violence ou de contrainte. Ce n’est qu’à l’issue du procès, après que les accusés aient été déclarés coupables, que la qualification pourra changer.

Bien que cette position puisse choquer face aux preuves présentées, le respect de la présomption d’innocence est crucial pour protéger les droits des accusés. Si ce principe n’est pas respecté par un juge, le jugement pourrait être remis en cause par la Cour de cassation, et pourrait même entraîner une condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l’homme.

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Procès des viols de Mazan : Y’a-t-il “viol et viol” comme le dit la défense ?

Mardi 10 septembre, lors du procès Mazan, l’avocat de la défense Guillaume de Palma a choqué en déclarant : “Il y a viol et viol et, sans intention de le commettre, il n’y a pas viol”. Il a ensuite précisé qu’un viol nécessite une “intention coupable”, c’est-à-dire que l’auteur doit être conscient de commettre un acte non consenti.

En droit pénal, trois éléments doivent être réunis pour caractériser une infraction : légal, matériel et moral. L’article 222-23 du Code pénal définit le viol comme tout acte de pénétration sexuelle imposé par violence, contrainte, menace ou surprise, de plus l’article 121-3 du même code précise qu’un crime nécessite une intention. Ainsi, l’avocat souligne que, dans cette affaire, il faut prouver que l’auteur avait conscience du non-consentement de la victime. Cependant, il ne peut y avoir “viol et viol”, soit il y a viol, soit il n’y a pas viol, sur ce point les propos de Guillaume de Palma sont juridiquement incorrects.

Son approche sur le fond, bien que légale, suscite des débats. La jurisprudence actuelle confirme que le seul fait de constater que la personne poursuivie “ne pouvait pas ne pas se rendre compte que sa partenaire n’était pas tout à fait consentante” ne caractérise pas avec certitude l’absence de consentement. Cette problématique se fait entendre sur dans le débat public au travers de la discussion sur l’inscription explicite du consentement dans la loi. Emmanuel Macron s’était d’ailleurs prononcé en faveur de cette évolution en 2024.

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Gouvernement Barnier : Le premier ministre est-il tenu de demander la confiance des députés ?

Suite à l’annonce de la composition du gouvernement Barnier, mettant ainsi fin à la période record de 68 jours durant laquelle le gouvernement démissionnaire de Gabriel Attal a expédié les affaires courantes, la question du vote de confiance auprès des députés se pose. Bien qu’Élisabeth Borne et Gabriel Attal aient évité cet exercice, est-il obligatoire ?

L’article 49, alinéa 1 de la Constitution prévoit que le Premier ministre peut engager la responsabilité du gouvernement devant l’Assemblée nationale à travers un vote de confiance après une déclaration de politique générale. Cependant, l’interprétation de ce texte laisse entendre que ce vote n’est pas impératif. Dès 1966, Georges Pompidou affirmait que le Premier ministre était libre de demander ou non ce vote.

Cette pratique a été suivie par plusieurs chefs de gouvernement, notamment ceux sans majorité absolue. La majorité des constitutionnalistes considèrent que cet engagement n’est pas obligatoire, d’autant que le texte ne précise pas quand il doit être fait. Toutefois, une minorité de constitutionnalistes défend une interprétation stricte de l’article, soulignant que la pratique politique ne doit pas supplanter le texte.

Enfin, l’absence de sanction en cas de non-respect de cet engagement renforce la souplesse de son application. Les députés peuvent toutefois engager eux-mêmes la responsabilité du gouvernement en déposant une motion de censure, comme le prévoit l’article 49 alinéa 2. La sanction serait alors politique.

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François Durovray, nouveau ministre des transports, peut-il rester président du conseil départemental de l’Essonne ?

François Durovray, récemment nommé ministre des Transports dans le gouvernement de Michel Barnier, a annoncé qu’il resterait président du conseil départemental de l’Essonne. Ce cumul de fonctions qui peut interroger : en a-t-il le droit ?

L’article 23 de la Constitution interdit aux ministres de cumuler leur poste avec certaines fonctions, telles qu’un mandat parlementaire ou un emploi public. Toutefois, les mandats locaux, comme ceux de président de conseil départemental, ne sont pas concernés par cette interdiction. Par ailleurs, la loi de 2014 sur le non-cumul des mandats n’interdit le cumul que pour les parlementaires.

En conséquence, bien que l’usage veuille qu’un ministre abandonne ses fonctions locales, aucune obligation légale n’impose à François Durovray de quitter la présidence de l’Essonne. Il est donc tout à fait en droit de cumuler ces deux fonctions.

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