Tribunal de Pontoise : « Elle est sacrément amochée Madame »
Le tribunal correctionnel de Pontoise en formation à juge unique juge, mardi 14 mai, l’un des sept dossiers de violences conjugales de la journée. Cette fois-ci, un homme de 41 ans qui reconnaît (à peu près) intégralement les faits et s’en excuse.

La juge appelle un nouveau dossier de violences conjugales, et c’est Oumramdane, 41 ans, qui se lève avec un air blasé. On lui reproche trois séries de faits de violences contre celle qui était sa concubine à l’époque, c’est-à-dire en janvier 2023, en juin 2023 et le 18 novembre 2023 lorsque, requis par la sœur de sa compagne, les policiers sont intervenus à leur domicile de Montmagny. Il venait de la frapper, elle en portait des traces visibles, et lui avait les pupilles dilatées – un joint qu’il a fumé après pour « redescendre », a-t-il expliqué.
La compagne d’Oumramdane explique aux policiers qu’ils se disputaient (encore une fois) et qu’il lui a craché dessus. Elle lui a rendu son crachat et il l’a alors frappée. Elle s’est réfugiée dans la chambre pour appeler sa sœur, qui l’a retrouvée en urgence. Oumramdane a continué à la poursuivre et elle s’est réfugiée dans la salle de bains. Il a défoncé la porte et l’a frappée au visage, avant que la sœur n’intervienne et que les policiers ne l’embarquent, lui.
Comme elle dénonce trois séries de faits, il est jugé pour le tout. Elle avait déjà porté plainte en juin 2023. Les policiers ont retrouvé la photo de son œil au beurre noir qu’elle avait fournie à l’époque. Oumramdane ne conteste pas. Mais cette fois-ci, il y a des ITT : 5 jours.
« Grosses claques et coups de pied dans les côtes »
La juge et le prévenu entament un dialogue : « Est-ce toujours votre positionnement aujourd’hui ?
— Oui, par contre…
— Vous ne reconnaissez pas la nature des coups.
— Voilà, je n’ai jamais mis de coups de poing et de coups de pied.
— Vous avez reconnu « des grosses claques », et des « coups de pied dans les côtes » la première fois. Sur les faits du 18 novembre, elle est sacrément amochée madame, 7 points de suture au niveau de la lèvre.
— Oui, je confirme.
— Comment expliquez-vous cela ?
— Notre couple était très fragile, j’avais des problèmes au travail et nous faisions face à des problèmes financiers.
« Madame dit que vous avez un comportement impulsif »
— Madame dit que vous avez un comportement impulsif, c’est vrai ça ?
— Je m’excuse auprès de la victime, mon comportement est inadmissible. En plus, j’ai moi-même subi des violences étant enfant, je sais ce que c’est. Mais j’ai pas su me contrôler.
— Madame avait souhaité retirer sa plainte dès le lendemain pour ‘passer à autre chose et souhaiter se reconstruire’. Vous n’avez plus de contact avec elle depuis ?
— J’ai décidé de rompre définitivement, de ne plus reprendre contact, je pense qu’on n’est pas fait pour vivre ensemble.
— Vous n’aviez jamais été violent avec d’autres compagnes ?
— Non jamais, je ne suis pas violent, je déteste la violence.
— Et vous avez des problèmes avec les stupéfiants ?
— Non, ce matin je me réveillais à peine et j’ai été accusé à tort de plein de trucs. Elle est extrêmement jalouse. Sans vouloir faire la victime – j’aurais jamais dû réagir comme ça – elle m’a poussé à bout. Elle a dit des insultes sur mes parents qui sont décédés.
— Encore une fois elle pouvait vous dire ce qu’elle voulait ça ne justifie en rien d’être violent.
— Totalement d’accord avec vous. »
Le contrôleur judiciaire de Oumramdane estime dans son rapport que le prévenu se remet en question et reconnaît sa culpabilité ; il consulte un psychologue et un addictologue (pour le cannabis), tout en poursuivant une activité de chauffeur de taxi qu’il a débutée en 2011.
Cette reconnaissance des faits semble être le minimum pour le procureur. « Vous avez au moins eu l’’honnêteté de reconnaitre les faits et c’est à mettre à votre profit, contrairement aux faits qui nous préoccupent, qui eux sont bien plus détestables, car la violence n’est pas justifiable », et c’est pourquoi il demande huit mois de prison avec sursis.
« Si ces provocations n’avaient pas eu lieu on ne serait pas là »
Étrangement, l’avocat du prévenu n’adopte pas le profil bas de son client : « Il n’est pas dans notre intérêt de salir une victime, mais … » il va quand même le faire. « Il était très souvent attaqué verbalement sur le terrain de la jalousie, elle lui prêtait des liaisons ! Alors évidemment ça n’excuse rien mais si ces provocations n’avaient pas eu lieu, on ne serait pas là aujourd’hui ». Il trouve la peine demandée un peu élevée. « Certes, la victime a été abîmée, mais il me semble que pour une première fois, vous pourriez un peu diminuer le quantum. »
Le prévenu tente de rattraper le coup : « Je m’excuse infiniment auprès de la victime et je m’engage à ne plus jamais commettre ces faits-là », et décision est prise sur le siège et sans tergiverser de le condamner aux réquisitions.
Référence : AJU445155
