Les très bons résultats du contrôle fiscal

Publié le 10/03/2023
Finance, budget, fiscal
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Résultats en hausse grâce au recours à l’intelligence artificielle, progrès de la relation de confiance, durcissement de la lutte contre la fraude fiscale : Bercy dresse un bilan positif du contrôle fiscal pour l’année 2022.

Bercy se félicite des résultats obtenus en matière de contrôle et de lutte contre la fraude fiscale. En 2022, les montants mis en recouvrement après contrôle fiscal atteignent un niveau inédit avec un total de 14,6 milliards d’euros, soit 8,2 % et 1,2 milliard d’euros de plus qu’en 2021. En matière de contrôle fiscal, les résultats ont non seulement retrouvé leur niveau d’avant crise sanitaire mais ont dépassé ceux obtenus en 2019.

Les succès du datamining

Ces résultats historiques s’expliquent notamment par le renforcement du ciblage national du contrôle fiscal par l’exploitation des bases de données (datamining) qui est optimisée grâce à l’utilisation de l’intelligence artificielle. En 2021, près d’un contrôle sur deux avait été diligenté suite à une analyse de datamining. Ce chiffre est en progression puisque 52 % des contrôles des entreprises ont été engagés en 2022 suite au datamining. Par ailleurs, 2 milliards d’euros de droits et pénalités ont été mis en recouvrement auprès des contribuables sur des dossiers qui avaient été ciblés par le datamining les années passées (+ 67 % par rapport à 2021). Le travail des équipes de l’administration fiscale sur les bases de données permet en effet d’accroître l’efficience du contrôle fiscal. D’après le dernier rapport de la DGFiP paru en mai 2022, les productions issues du projet de datamining Ciblage de la fraude et valorisation des requêtes (CFVR) représentaient, fin décembre 2021, plus de 44 % de la programmation du contrôle fiscal, avec un objectif de 50 % en 2022. Le CFVR est un projet d’envergure développé dès 2014 qui a pour ambition d’améliorer l’efficacité des opérations de contrôle fiscal et s’inscrit dans le cadre de la modernisation des travaux d’analyse de données et de ciblage. En s’appuyant sur des méthodes exploratoires basées sur la statistique et des algorithmes, et en permettant de modéliser des comportements, cet outil utilise les techniques de l’intelligence artificielle pour identifier de façon automatique des cas de fraudes fiscales possibles.

Miser sur l’accompagnement des contribuables de bonne foi

En 2019, la loi pour un État au service d’une société de confiance dite ESSOC a instauré, dans l’ensemble des relations avec l’administration, un droit à régularisation en cas d’erreur. Une personne de bonne foi ne peut pas faire l’objet d’une sanction si elle a régularisé sa situation de sa propre initiative ou après avoir été invitée à le faire par l’administration dans le délai indiqué par celle-ci. En 2022, L’accompagnement des contribuables de bonne foi dans le cadre de la relation de confiance a progressé, constate Bercy. Près de 45 % des contrôles sur pièces se sont terminés de façon apaisée par des régularisations en cours de contrôle, soit 47 000 dossiers en 2022 contre 43 000 en 2021.

Bercy a mis en place un accompagnement fiscal personnalisé à destination des PME qui est en progression. En 2022, 667 PME supplémentaires ont bénéficié de l’accompagnement fiscal personnalisé, soit un total de 1 494 entreprises accompagnées au 31 décembre 2022 contre 827 en 2021. Cette offre comprend une intervention de l’administration fiscale, à la demande du contribuable, soit pour des opérations récurrentes à fort enjeu financier, soit à des étapes clés de développement économique, ou de restructuration d’une entreprise nécessitant un dialogue de qualité entre l’administration fiscale et l’entreprise pour une parfaite compréhension des questions posées et de la situation de l’entreprise. Cet accompagnement comprend également une aide au diagnostic des principales questions fiscales à traiter. Il s’agit pour Bercy d’aider l’entreprise à identifier des points fiscaux sur lesquels une prise de position de l’administration fiscale a une utilité, que ce soit pour éclairer une décision ponctuelle ou assurer la régularité d’une opération récurrente, et l’aider à formaliser ses questions. Concrètement, un interlocuteur unique de la PME est désigné et l’administration fiscale s’engage à répondre par écrit et dans les meilleurs délais, en s’adaptant au calendrier des échéances économiques et fiscales de l’entreprise. La position de l’administration fiscale est rendue sous la forme d’un rescrit.

Pour les ETI et les grandes entreprises, Bercy a mis au point une offre de partenariat afin de répondre de manière sécurisée aux problématiques fiscales qu’elles identifient comme présentant un risque juridique et financier. En 2022, 17 nouveaux groupes sont entrés dans le partenariat fiscal dédié aux grandes entreprises et aux entreprises de taille intermédiaire, portant leur nombre à 66. L’administration s’engage à examiner le traitement fiscal de certaines opérations identifiées suffisamment à l’avance par rapport aux échéances déclaratives ou opérationnelles En outre, elle mobilise un interlocuteur dédié à l’entreprise afin de développer dans le temps une meilleure connaissance de son activité et de ses caractéristiques et de créer une meilleure confiance réciproque des deux parties. La position de l’administration fiscale est formalisée sous forme d’un rescrit.

Durcir la lutte contre la fraude fiscale

Autre axe de développement en 2022 : la lutte intensive contre la fraude fiscale, qui représente 30 % des contrôles sur place contre 26 % en 2020, s’est poursuivie. Les contrôles répressifs ont représenté 5,1 milliards d’euros en 2022.

L’action pénale menée par la DGFIP en matière fiscale s’est intensifiée. Le nombre de saisines de l’autorité judiciaire pour des fraudes à l’impôt (dénonciations obligatoires, plaintes pour fraude fiscale, plaintes transmises au SEJF, plaintes et signalements pour escroquerie fiscale) a encore augmenté cette année : 1 770 en 2022, 1 620 en 2021 et 1 484 en 2020.

Mis en place depuis le 1er juillet 2019 et issu de la transformation du service national de douane judiciaire (SNDJ), le service d’enquête judiciaire des finances  (SEJF) réunit au sein d’une seule et même structure l’expertise des officiers de douane judiciaire et des officiers fiscaux judiciaires, sous la direction d’un magistrat de l’ordre judiciaire. Concrètement, les équipes du SEJF recherchent et constatent, sur l’ensemble du territoire, les délits de fraude fiscale complexe, qu’il s’agisse de fraude réalisée via les paradis fiscaux, de fraude recourant au faux ou à la falsification ou encore de fraude utilisant les domiciliations fiscales fictives ou artificielles. Le SEJF est par ailleurs particulièrement sollicité sur les dossiers de plaintes pour présomption de fraude fiscale de la DGFiP. En 2022, le SEJF a été saisi de 48 dossiers de plaintes pour présomption de fraude, un chiffre en augmentation de 7 % par rapport à l’année passée. Dans le cadre de la réforme du verrou fiscal, un mécanisme de transmission automatique au parquet a été mis en place, assorti de pénalités administratives pour les affaires dans lesquelles les droits appliqués atteignent 100 000 euros. Ce seuil est réduit à 50 000 euros pour les affaires concernant les personnes soumises à une déclaration auprès de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP). Précisons que, dans les autres situations, l’administration reste juge de l’opportunité de déposer une plainte pour fraude fiscale. Une fois saisi du dossier, le procureur est libre de poursuivre ou non. Pour apprécier les suites à donner à une dénonciation, il peut solliciter de l’administration une actualisation de la situation fiscale du contribuable ou des pièces complémentaires. Il peut engager une enquête préliminaire avec l’assistance des officiers de police fiscale et surtout avec l’utilisation de tous les moyens de recherche des preuves prévues par la procédure pénale. Dans le cadre de ce mécanisme de dénonciations obligatoires, 1 373 dossiers, représentant 659 millions d’euros de droits rappelés, ont été transmis à l’autorité judiciaire (1 217 dossiers en 2021 et 823 en 2020).

257 plaintes pour fraude fiscale ont été déposées après avis favorable de la commission des infractions fiscales (CIF) et 92 plaintes pour escroquerie en matière fiscale.

En outre, les services de contrôle fiscal ont fortement contribué à la répression de la fraude en matière d’aides publiques, comme le fonds de solidarité. Au cours de l’année 2022, 3 760 plaintes et 248 signalements ont été déposés auprès de l’autorité judiciaire. Le préjudice visé par ces plaintes et signalements s’élève à 86,7 millions d’euros.

Progression de la justice négociée

Le recours aux conventions judiciaires d’intérêt public (CJIP) et aux comparutions sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC) continue à progresser. Ces instruments de justice négociée sont réputés efficaces pour des dossiers comportant des problématiques fiscales complexes et pour réduire les délais de procédure applicables en la matière. Le champ d’application de la CJIP a été étendu à la fraude fiscale dans le cadre de la loi Sapin II de décembre 2016. Cet outil permet aux entreprises de négocier une amende afin d’éviter des poursuites, sans reconnaissance de culpabilité, pour les cas de corruption, trafic d’influence ou blanchiment de fraude fiscale. Il a été utilisé pour la première fois en novembre 2017. En 2022, trois CJIP ont été conclues pour des faits de fraude fiscale, complicité de fraude fiscale et blanchiment de fraude fiscale pour un montant total d’amendes d’intérêt public versées s’élevant à 645 millions d’euros. Et 63 affaires de fraude fiscale ont entraîné des condamnations par reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC).

L’aide des services de Tracfin

En 2022, Tracfin a amélioré sa capacité à alimenter les services de lutte contre la fraude et joue un rôle d’alerte essentiel dans la détection des fraudes émergentes. L’enjeu financier des notes et analyses de Tracfin en matière de lutte contre les fraudes s’élève à 1,5 milliard d’euros. Dans ce domaine, Tracfin a effectué 884 signalements en 2022 à destination notamment de l’administration fiscale (458 signalements) et de l’autorité judiciaire (129 signalements). Tracfin opère à partir d’un volume de soupçons déclarés par les 200 000 assujettis aux obligations de vigilance en matière de lutte contre le blanchiment toujours plus élevé : moins de 70 000 déclarations en 2017, contre 167 000 en 2022 (+ 138,6 %). Afin d’anticiper et de contrer les menaces nouvelles, Tracfin suit l’émergence et l’évolution de nouveaux schémas de fraude, par une analyse en continu des déclarations de soupçons. Parmi les évolutions de la fraude détectées en 2022 figurent notamment les fraudes liées aux crypto-actifs, comme la non-déclaration ou à la minoration des plus-values issues des cessions de NFT, les fraudes aux dispositifs d’aide de l’État comme le crédit d’impôt recherche ou encore les schémas de dissimulation d’avoirs à l’étranger par le recours à des donations déguisées ou l’abus de biens sociaux, notamment en exploitant les fuites de documents publics (leaks).

Les chiffres-clés du contrôle fiscal

Au total, l’action des services de contrôle a permis de mettre à jour 14,6 milliards d’euros d’impôts éludés (droits et pénalités) qui ont été mis en recouvrement auprès des particuliers et les entreprises, soit 8,2 et 1,2 milliards de plus qu’en 2021. Les opérations de contrôle fiscal sur place, principalement dans les entreprises, ont permis de mettre en recouvrement 8,8 milliards d’euros de droits et pénalités, soit une augmentation d’un milliard d’euros (+ 13 %) par rapport à l’année 2021. Le contrôle fiscal sur pièces a donné lieu à la mise en recouvrement de 5,8 milliards d’euros de droits et pénalités contre 5,6 milliards d’euros en 2021 (+ 3 %). 10,6 milliards d’euros d’impôts ont été encaissés par l’État suite à contrôle, un niveau équivalent à 2021. En termes de montants encaissés, ce résultat est porté principalement par l’impôt sur les sociétés et la taxe sur les salaires (+ 30 % par rapport à 2021) et les droits de succession (+ 23 % par rapport à 2021).

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