Suspectés de trafic à la prison de Réau, le 2e des six surveillants libéré
Depuis le 12 mars, six gardiens du centre pénitentiaire de Réau (Seine-et-Marne) sont soupçonnés d’avoir introduit en détention des objets ou des substances illicites, selon Jean-Michel Bourlès, procureur à Melun. Cinq d’entre eux ont été écroués, le 6e a été placé sous contrôle judiciaire. Mais la chambre de l’instruction vient d’ordonner la libération d’un 2e mis en cause.
Le procureur de la République a confirmé hier à Actu-Juridique que deux des six surveillants du CPSF (centre pénitentiaire sud-francilien) de Réau, mis en examen le 15 mars, sont libres sous contrôle judiciaire. Le premier avait été placé sous CJ à l’issue de sa garde à vue et de son défèrement au tribunal de Melun, avec interdiction d’exercer son activité professionnelle, avait alors précisé Jean-Michel Bourlès. Une seconde personne, incarcérée avec quatre de ses collègues, a été élargie après avoir fait appel de sa mise en détention devant la chambre de l’instruction. Ni M. Bourlès ni l’avocat parisien Robin Binsard, qui la défend, n’ont indiqué s’il s’agit de la femme de 28 ans, cible « d’une étude de faisabilité » afin de déterminer si elle peut bénéficier d’une détention à domicile sous surveillance électronique – soit le port d’un bracelet à la cheville.
Quoi qu’il en soit, les six gardiens de Réau sont tous mis en examen dans le cadre d’une information judiciaire ouverte par le parquet de Melun des chefs d’association de malfaiteurs, trafic de stupéfiants (cannabis), remise illicite d’objets en détention (téléphones portables, chargeurs et bouteilles d’alcool), de blanchiment et de corruption.
La juge d’instruction en charge du dossier doit désormais définir qui a fait quoi, et depuis quand.
La direction de la prison les avait « signalés »
L’enquête préliminaire, confiée aux policiers de Melun-Val de Seine après que la direction avait « signalé » ses agents, âgés de 28 à 48 ans, a établi un trafic contre rémunération depuis l’automne 2022. Des milliers d’euros en espèces, à la provenance inexpliquée, ont été découverts chez certains des prévenus.
Dès jeudi 14 mars, 48 heures après leur interpellation, le procureur Bourlès était convaincu de la gravité des faits reprochés ; aussi avait-il requis leur incarcération. Le vendredi, après leur mise en examen, deux des suspects avaient été emprisonnés, quand l’un était relâché sous contrôle judiciaire. Les trois autres avaient été écroués jusqu’à ce que le juge des libertés et de la détention (JLD) organise les débats contradictoires, lundi 18 et mardi 19 mars. À l’issue de ceux-ci, le JLD a ordonné leur placement en détention. A ce jour, ils ne sont donc plus que quatre derrière les barreaux.
Ce type d’infractions ne relève malheureusement pas d’un cas isolé. Dans une interview à Franceinfo, un syndicaliste de l’UFAP-UNSa Justice, ami des suspects de Réau, avait mis en avant les salaires de la pénitentiaire. Il ne justifiait pas les délits mais déclarait « nous sommes sous-payés ». Il est aussi fréquent que des gardiens tombent « dans un engrenage » : « J’ai fini par céder [et] je savais que si j’arrêtais, ils [les détenus] me dénonceraient », avait raconté Sophie, ancienne surveillante à Meaux-Chauconin, à la barre du tribunal correctionnel (notre article du 31 mars 2023 ici). La buandière du même établissement avait été condamnée trois mois plus tôt (compte-rendu d’audience du 7 décembre 2022, ici) quand un de ses collègues avait écopé, deux ans auparavant, de 15 mois ferme.
Référence : AJU431574