Cette semaine chez Les Surligneurs : E. Macron va avoir du mal à inscrire l’IVG dans la charte des droits fondamentaux européenne

Publié le 28/01/2022

Les Surligneurs, spécialisés dans le legal checking,  évaluent cette semaine la faisabilité juridique de  l’inscription du droit à l’IVG dans la Charte européenne des droits fondamentaux, du « chèque alimentation durable » d’Anne Hidalgo ou encore de l’ambition de Yannick Jadot d’« arrêter » le projet de Gazoduc Nord Stream 2. Ils se penchent également sur la drôle d’idée du maire de Sainte-Anastasie-sur-Issole (Var) qui entend organiser une consultation des électeurs pour savoir qui parrainer. Sans oublier Marine Le Pen qui risque d’être condamnée à supporter ses députés zemmouristes…

Cette semaine chez Les Surligneurs : E. Macron va avoir du mal à inscrire l'IVG dans la charte des droits fondamentaux européenne

Emmanuel Macron veut inscrire la protection de l’environnement et le droit à l’IVG dans la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne

Lors de son discours prononcé au Parlement européen le 19 janvier dernier, Emmanuel Macron a annoncé les objectifs de la présidence française du Conseil de l’Union européenne. Il a affirmé son souhait « d’actualiser » la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne « pour être plus explicite sur la reconnaissance du droit à l’avortement ou sur la protection de l’environnement ».  Seulement, la protection de l’environnement est déjà garantie par la Charte des droits fondamentaux. Par ailleurs, s’il veut élargir la protection de l’environnement et y inscrire le droit à l’avortement, il faudra convaincre les autres États membres de modifier les traités.

Tout d’abord, la protection de l’environnement est déjà prise en compte par la Charte. Elle exige, en effet, « un niveau élevé de protection de l’environnement et l’amélioration de sa qualité doivent être intégrés dans les politiques de l’Union et assurés conformément au principe du développement durable ». Cela étant, l’imprécision du texte ajouté au fait qu’il ne permette pas encore à tout citoyen d’invoquer directement un droit à la protection de l’environnement devant les tribunaux lorsqu’il a subi un préjudice environnemental, constituent des lacunes.

Si Emmanuel Macron souhaite élargir la portée de la protection de l’environnement en consacrant des objectifs clairement définis tels que la lutte contre les changements climatiques – de la même façon qu’il souhaite y inscrire un droit à l’avortement –, il devra convaincre les autres États membres de voter en faveur de la modification des traités qui requièrent l’unanimité. Problème, le droit à l’avortement n’est toujours pas reconnu comme un droit fondamental par la Cour européenne des droits de l’homme et de nombreux États membres (Espagne, Slovaquie…) ont reculé sur cette question, sans oublier Malte qui l’interdit.

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Un maire lance une consultation des électeurs pour désigner le candidat à l’élection présidentielle qu’il parrainera

Sésame de la compétition électorale pour la magistrature suprême, le parrainage concentre les tensions politiques. Pour remédier à son indécision, le maire de la commune de Sainte-Anastasie-sur-Issole (Var) s’est résolu à organiser une consultation des électeurs. L’édile varois l’ignore peut-être, mais cette initiative inspirée de la démocratie participative soulève de nombreux problèmes juridiques.

Tout d’abord, le maire ne peut pas, de manière générale, décider seul d’organiser une consultation locale, alors qu’une telle initiative revient au conseil municipal. En outre, il indique par avance vouloir se plier au résultat du vote, alors qu’une consultation locale, à l’inverse d’un référendum local qui oblige l’exécutif local, ne débouche que sur un avis de la population. Quoi qu’il en soit, cette procédure participative est illégale, car elle ne permet pas légalement la mise en œuvre d’une votation pour déterminer le candidat à parrainer pour l’élection présidentielle. En effet, le Code général des collectivités territoriales n’autorise la participation des électeurs que pour décider des seules affaires locales. Or, le choix de parrainer ou de ne pas parrainer, tout comme le choix du candidat parrainé, n’est pas une « décision locale » sur laquelle les électeurs peuvent avoir leur mot à dire, mais constitue un pouvoir propre du maire.

En définitive, le Conseil constitutionnel pourrait bien décider que recourir à une telle consultation rende le parrainage nul, en raison d’un mode de choix qui ne cadre pas avec l’esprit des textes régissant l’élection présidentielle. Il en résulterait toute une votation (avec le coût que cela représente) pour aboutir à une signature… qui ne sera pas prise en compte.

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Anne Hidalgo veut expérimenter le « chèque alimentation durable » permettant d’acheter « des produits locaux et sains »

Anne Hidalgo propose, en tant que candidate socialiste à l’élection présidentielle, d’expérimenter un « chèque d’alimentation durable ». L’idée est de promouvoir le recours aux circuits courts afin de garantir un accès à la qualité alimentaire à tous, tout en privilégiant l’agriculture locale. Reste que prévoir un système dérogatoire au profit des produits locaux est susceptible d’entraver la libre circulation des marchandises protégées par les traités européens.

Au regard de la jurisprudence européenne, la mesure proposée pourrait, en ce sens, être illégale. Pour braver l’illégalité de ce « chèque », il faudrait établir qu’il a pour objectif la protection de la santé publique ou encore la défense de l’environnement, mais pas – et c’est la ligne à ne pas franchir – la seule protection de l’économie locale.

Problème, la proposition d’Anne Hidalgo ne s’inscrit pas explicitement dans ces objectifs, puisqu’elle distingue entre « produits sains », d’un côté, et « produits locaux », de l’autre. Or local et sain ne vont pas forcément ensemble, d’autant qu’Anne Hidalgo se place clairement sur le terrain du développement économique de l’agriculture locale. En clair, si Anne Hidalgo souhaite ouvrir l’accès local aux circuits courts, elle devra mettre en avant des motivations environnementales, et pas seulement viser les producteurs locaux. D’autant que production locale et protection de l’environnement ne vont pas forcément ensemble non plus.

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Yannick Jadot souhaite « arrêter » le projet de Gazoduc Nord Stream 2 entre la Russie et l’Allemagne

Invité dans l’émission « C dans l’air », Yannick Jadot, député européen et candidat écologiste à l’élection présidentielle, a déclaré vouloir mettre fin au projet Nord Stream 2 portant sur la construction – achevée – d’un gazoduc entre la Russie et l’Allemagne. Problème, un président de la République française ne peut pas s’inviter dans une affaire qui concerne deux États souverains, et un groupement d’entreprises.

La France n’est pas impliquée, si ce n’est très indirectement par la présence de la société Engie au sein du projet, et n’a donc aucune prise juridique sur ce projet. Peut-être Yannick Jadot espère-t-il s’appuyer sur l’Union européenne pour freiner le projet. Seulement, la Commission européenne, chargée de défendre l’intérêt général de l’Union, a déjà déclaré ne pas être compétente pour interdire le projet car il a été initié par l’Allemagne et non par l’Union européenne. De plus, l’énergie est une compétence partagée de l’Union avec les États membres.

En résumé, Yannick Jadot ne peut, en définitive, compter que sur la toute récente opposition politique à ce projet des États-Unis, qui ont déjà pris des sanctions contre les distributeurs concernés et qui ont pu ralentir les travaux. Il peut encore s’appuyer sur certains États membres de l’Union européenne hostiles à ce projet, mais cela relève de la géopolitique, pas du droit.

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Marine Le Pen appelle deux eurodéputés « à renoncer à leur mandat » après leur ralliement à Éric Zemmour

Estimant que deux députés européens ont été élus sur les idées du Rassemblement National (RN), Marine Le Pen, candidate à l’élection présidentielle, a appelé ces derniers à rendre leur mandat après leur ralliement à Éric Zemmour. Cette demande, qui fait suite à une migration partisane, est certes tout à fait politique, mais s’avère discutable sur le plan juridique. Un mandat politique est donné au candidat ayant comptabilisé un certain nombre de voix des électeurs. Ce candidat, une fois élu devient alors représentant : autrement dit, il peut valablement s’exprimer au nom de tous les électeurs.

Ainsi, les deux nouveaux « zemmouristes », à l’image des autres députés français, sont investis d’un mandat dit représentatif, par opposition au mandat dit impératif. Le mandat impératif, prohibé par la Constitution, fait de l’élu le fidèle exécutant de la volonté des électeurs. Cela permet, par exemple, de l’obliger à les consulter avant toute décision ou de le révoquer. Dans ce cas, l’élu s’apparente à une sorte de commissaire du peuple, qui remplit des tâches précises sur instruction.

À l’inverse, le mandat représentatif implique que les élus exercent le pouvoir librement et tranchent en leur âme et conscience sur les questions à traiter. Par conséquent, on ne peut pas les blâmer pour des positions ou opinions qu’ils défendent puisqu’ils ont été déclarés aptes à travers la compétition électorale, à exprimer la volonté nationale.

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