Cette semaine chez les Surligneurs : Pas d’interdiction du burkini sur les plages !
Savez-vous que le Président de la République est la seule autorité constitutionnelle à ne pas être soumise à des normes déontologiques ? Les Surligneurs, spécialisés en Legal checking, vous expliquent tout dans cet article. Ils reviennent aussi cette semaine sur le burkini et l’éventualité d’un « tri des patients » dans le cadre de la réorganisation du CHU de Bordeaux.
Il est illégal d’interdire le Burkini sur les plages de Fréjus
A Fréjus, le maire Rassemblement national David Rachline veut interdire le burkini dans les piscines et sur les plages. Pour les piscines, c’est en général assez clair, puisque les règlements intérieurs interdisent déjà toute une série de vêtements (les shorts de bain par exemple). En revanche, à la plage, le principe est la liberté vestimentaire, affirmé par le Conseil d’État en 2016. La même question de l’interdiction du burkini se posait, le juge administratif avait alors estimé que le port de ce vêtement n’est pas incompatible avec le principe de laïcité, sauf en cas de trouble à l’ordre public.
En l’occurrence, David Rachline, justifie cette double interdiction par des motifs de respect du principe républicain de laïcité et pour des raisons d’hygiène et de sécurité publique. Le juge administratif avait rappelé en 2016, que la laïcité ne s’applique qu’aux agents, au sein de service public. Toutefois, les troubles à l’ordre public peuvent justifier une interdiction selon les circonstances, comme l’avait également jugé le Conseil d’État en 2017, au sujet d’une plage corse. En l’occurrence, l’interdiction temporaire était justifiée car une rixe avait éclatée et nécessité ll’intervention d’une “centaine de CRS et de gendarmes qui ont dû établir un périmètre de sécurité autour des trois familles afin d’éviter leur lynchage par la population et avait abouti à l’hospitalisation de cinq personnes, ainsi qu’à l’incendie de trois véhicules”.
Ce n’est pour l’instant pas le cas à Fréjus, la décision du maire n’est pas conforme à l’état du droit.
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Contestation de l’autorisation du burkini à la piscine à Grenoble par un déféré-laïcité au résultat très incertain
Par une délibération municipale, la ville de Grenoble a autorisé la tenue du burkini dans ses piscines municipales. Le préfet de l’Isère a saisi le juge administratif dans le cadre du déféré-laïcité, une nouvelle procédure prévue par la loi du 24 août confortant les principes de la République, aussi appelée “contre le séparatisme”. Selon le préfet, la délibération ne respecte pas le principe de laïcité.
De plus la laïcité, issue de la loi de 1905, ne s’applique pas de la même manière aux usagers des services publics et aux agents de ces services publics. Au contraire, les usagers jouissent d’une totale liberté (sauf exception prévue par la loi), pourvu que cela ne porte pas atteinte au bon fonctionnement du service. Dans le cas présent, la délibération municipale modifie le règlement intérieur des piscines et notamment les caractéristiques des vêtements autorisés pour les usagers. Or, le burkini atteste en principe de l’appartenance à une religion, mais pour autant il ne porte pas atteinte en lui-même au principe de laïcité.
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La fermeture du CHU de Bordeaux entraînera-t-elle vraiment un tri des patients à l’entrée ?
C’est le syndicat Sud santé qui déplore cette possibilité, à la suite de la réorganisation du CHU de Bordeaux. En effet, pour faire face à la pénurie de personnels soignants, les urgences seront fermées la nuit pour les adultes, qui ne pourront y accéder qu’en passant par le Samu Centre 15. Il s’agit ainsi d’un circuit pour être admis aux urgences, pour éviter les entrées injustifiées de personnes qui auraient dû passer par la médecine de ville
Juridiquement, il n’y a pas de tri puisque tous les patients sont traités de la même façon. En cas de maintien malgré le défaut de personnel, la responsabilité administrative du CHU aurait pu être engagée. Par ailleurs, les enfants restent admis sans passer par le 15, ils sont dans une situation différente de celle des adultes.
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La déontologie politique malmenée par le pantouflage de Jean-Baptiste Djebbari
Quelques heures avant la démission du Gouvernement, une société spécialisée dans les voitures à l’hydrogène annonce par tweet que Jean-Baptiste Djebbari, alors encore ministre des transports a été nommé membre du conseil d’administration de la société. Une nouvelle fonction approuvée par la Haute autorité pour la transparence de la vie publique quelques jours auparavant.
Le concept de déontologie politique est devenu récemment une discipline juridique, en raison des scandales des années 2010. Elle est très vaste puisqu’elle concerne les élus locaux comme les ministres en passant par les parlementaires, ainsi que leurs proches. Elle comprend deux obligations principales : déclarer ses intérêts et son patrimoine. La première a pour but de prévenir les situations de conflit d’intérêt, la seconde vise à lutter contre la corruption.
La Haute autorité pour la transparence de la vie publique, créée par une loi de 2013, est l’organe chargé de contrôler le bon respect de la déontologie dans la vie publique. Elle reçoit les déclarations et vérifie leur exhaustivité, leur exactitude et leur sincérité. En cas de conflit, la haute autorité peut publier un avis sur une situation donnée (ce qui peut entraîner l’émergence de scandales) et transmettre des faits au juge pénal.
Ainsi, Jean-Baptiste Djebbari semble bien respecter les règles déontologiques puisque la Haute Autorité a publié plusieurs avis à son sujet. Enfin, l’absence de déontologie présidentielle est assez remarquable. En se fondant sur le principe de séparation des pouvoirs, le Conseil constitutionnel à rappelé qu’aucune loi ne pouvait imposer d’obligations au Président et que seul celui-ci pouvait se fixer des règles déontologiques. Le Président de la République est aujourd’hui la seule autorité constitutionnelle à ne pas être soumise à des normes déontologiques.
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Mise à jour 27/05 à 9h21 : Suite aux observations de certains lecteurs, nous avons précisé dans la deuxième information la jurisprudence administrative en remplaçant la phrase initiale « Le juge administratif s’est déjà prononcé sur ce sujet, et en a conclu que le port du burkini à la plage n’est pas incompatible avec le principe de laïcité, sauf trouble à l’ordre public » par « Le juge administratif s’est déjà prononcé sur ce sujet, et en a conclu que le port du burkini à la plage n’est pas incompatible avec le principe de laïcité, mais il peut être à l’origine de troubles à l’ordre public ».
Référence : AJU295393