Cette semaine chez les Surligneurs : pourquoi P. Palmade n’est-il pas en détention provisoire ?

Publié le 24/02/2023

Est-ce parce que Pierre Palmade est un humoriste célèbre qu’il a échappé jusqu’ici à la détention provisoire ? Pas du tout ! Les Surligneurs vous expliquent les vraies raisons. Les spécialistes du legal checking reviennent aussi sur la sanction infligée au député LFI Thomas Portes pour avoir joué avec un ballon à l’effigie d’un ministre. 

Cette semaine chez les Surligneurs : pourquoi P. Palmade n'est-il pas en détention provisoire ?

Pierre Palmade n’est pas placé en détention provisoire et pour l’instant c’est logique

 À la suite de l’accident de voiture survenu le 10 février dernier, le comédien Pierre Palmade vient d’être mis en examen et placé sous assignation à résidence avec surveillance électronique, pour homicide et blessures involontaires. L’absence d’incarcération malgré sa mise en examen a suscité une grande incompréhension notamment sur les réseaux sociaux. Elle est pourtant logique, au vu des conditions de la détention provisoire, laquelle n’a rien de systématique.

Une information judiciaire, c’est-à-dire une enquête menée par le juge d’instruction, a été ouverte. À ce stade, la personne reste présumée innocente et doit demeurer libre par principe. Le juge d’instruction peut décider de mettre en examen les personnes à l’encontre desquelles il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable le fait qu’elles aient pu participer, comme auteur ou comme complice, à la commission des infractions.

L’article 137 du code de procédure pénale prévoit cependant la possibilité pour le juge d’instruction de soumettre la personne mise en examen à certains dispositifs “en raison des nécessités de l’instruction ou à titre de mesure de sûreté”. Il peut décider d’astreindre la personne à une ou plusieurs obligations du contrôle judiciaire ou, si celles-ci se révèlent insuffisantes, à une assignation à résidence avec surveillance électronique. Ce n’est que si ces dispositifs ne permettent pas d’assurer le bon déroulement de l’instruction, que le juge d’instruction peut décider de placer la personne en détention provisoire, en dernier recours. Si c’est effectivement le cas, le juge d’instruction doit alors saisir le juge des libertés et de la détention pour que celui-ci valide la mesure après débat contradictoire.

La détention provisoire est soumise à plusieurs conditions. Elle ne peut intervenir que pour certaines infractions, les crimes ou délits punis d’au moins trois ans d’emprisonnement. De plus, elle ne peut intervenir que si elle est justifiée par certains motifs, comme les risques de destruction des preuves, pour empêcher la pression sur les témoins ou victimes, ou même garantir la présentation de la personne devant la justice.

Pour le moment, Pierre Palmade a été placé sous assignation à résidence avec surveillance électronique au sein d’un service hospitalier spécialisé en addictologie. Le parquet ayant fait appel pour obtenir la détention provisoire, la question devra à nouveau être tranchée par la chambre de l’instruction de la cour d’appel. En tout état de cause, s’ilne respecte pas les obligations de son contrôle judiciaire, il pourra alors être placé en détention provisoire.

La mesure de surveillance dont il fait l’objet durant l’information judiciaire n’a pas pour but de réprimer l’éventuelle infraction mais simplement de le contraindre à certaines obligations le temps que l’enquête se poursuive. Ce n’est que plus tard dans la procédure que le tribunal correctionnel pourra intervenir pour prononcer une peine, le cas échéant.

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Benjamin Lucas (député EELV) : la sanction disciplinaire contre Thomas Portes est “une atteinte à la liberté d’expression »

Lors de la séance du 10 février 2023, le député (LFI) Thomas Portes devait prendre la parole mais de nombreux orateurs ont demandé à ce qu’il soit sanctionné en raison d’une photo postée sur Twitter où il posait le pied sur un ballon à l’effigie de la tête du ministre Olivier Dussopt. Le député a été sanctionné par l’Assemblée nationale d’une “censure avec exclusion temporaire” de quinze jours, adoptée à “une large majorité” pour “provocations envers l’Assemblée nationale”. Ce n’est pas pour son tweet que l’élu a été sanctionné par ses pairs, mais pour avoir persisté à ne pas présenter d’excuses et avoir commis ce qui ressemble à un excès de désinvolture en séance publique.

La censure avec exclusion temporaire est la plus lourde et la plus rare des quatre sanctions prévues par l’article 71 du Règlement de l’Assemblée nationale (RAN). Elle entraîne l’exclusion du député pour les quinze journées de séance qui suivent et la privation de la moitié de l’indemnité parlementaire pour deux mois. Le Bureau de l’Assemblée propose la sanction après audition du député visé puis la soumet au vote à l’ensemble des députés.

En réaction, le député EELV Benjamin Lucas a dénoncé cette sanction d’“atteinte à la liberté d’expression”. Rappelons que la liberté d’expression dont jouissent les députés est liée à leur statut. Même s’ils ne peuvent, en principe, être poursuivis en justice et ne doivent pas rendre compte de leurs propos et actes, la discipline parlementaire s’applique. Elle permet de maintenir l’ordre sans recourir à une autorité extérieure qui entraverait l’indépendance du Parlement. Ainsi, la liberté d’expression est bornée par les parlementaires eux-mêmes, collectivement, afin de préserver l’institution et son image, tout comme la courtoisie des débats.

Enfin, la discipline parlementaire concerne les propos et actes commis au sein comme en dehors de l’assemblée (art. 70). Lorsqu’il posait avec un ballon au pied à l’effigie d’un membre du gouvernement en portant l’écharpe tricolore et postait la photo avec son compte officiel, il agissait en tant que député. Plus encore, c’est dans l’hémicycle que le ministre, la présidente de l’Assemblée nationale puis de nombreux députés ont exigé des excuses auxquelles il s’est refusé.

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 Selon Federica Mogherini, l’Union européenne “établit des normes au niveau mondial”

Selon Federica Mogherini, ancienne haute représentante des affaires étrangères de l’Union européenne, « l’Union ne manque de rien. Nous sommes puissants en termes normatifs, puisque nous établissons des normes au niveau mondial« , laissant entendre l’existence d’une suprématie mondiale européenne. Or, en droit, l’Union européenne est seulement compétente pour établir des normes au sein de l’espace de l’Union européenne seulement, quand bien même la législation européenne peut avoir une influence mondiale.

En effet, en droit, l’Union européenne ne peut nullement établir des normes au niveau mondial. Selon le Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, la portée des normes de l’Union européenne s’applique aux États membres, aux institutions et aux citoyens de l’Union européenne. En droit, le principe est que tout ordre juridique est limité par l’espace géographique qu’il gouverne. En d’autres mots, les normes édictées par un État ou une organisation s’appliquent aux institutions et aux particuliers se trouvant sur son territoire.

Les normes de l’Union européenne exercent cependant une influence significative à l’échelle mondiale dans de nombreux domaines, notamment le commerce, l’environnement, la protection des consommateurs et la politique étrangère. Cette capacité d’influence est appelée ”l’effet Bruxelles”, un phénomène théorisé par Anu Bradford, de l’université Columbia aux États-Unis et largement.

L’effet Bruxelles fait référence à la tendance des entreprises et des États dans le monde à se conformer aux normes de l’Union européenne afin de pouvoir opérer sur son marché. L’Union européenne, étant l’un des plus grands marchés au monde et pesant 20 % du PIB mondial, les entreprises et les États effectuent face à cela un calcul d’opportunité et en concluent qu’il est souvent plus bénéfique de s’accorder aux normes de l’Union généralement plus élevées et contraignantes.

Certaines entreprises ou États dans le monde prennent donc en considération la législation de l’Union dans leurs activités commerciales pour éviter d’être exclues d’un marché de presque 500 millions de consommateurs au pouvoir d’achat élevé. Par exemple, Coca-Cola a dû mettre en place des politiques notamment en matière d’étiquetage afin de se conformer aux exigences européennes. L’entreprise a aussi dû s’accorder aux normes alimentaires conformément au règlement sur la sécurité alimentaire ou encore même en matière de publicité qui comprend l’obligation d’inclure des avertissements de santé.

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