Chez les Surligneurs : Constitutionnaliser le droit des étrangers, pour quoi faire ?
Le député RN Sébastien Chenu propose de constitutionnaliser le droit des étrangers, les Surligneurs s’interrogent sur le sens et l’utilité de sa démarche. Cette semaine, les spécialistes du legal checking se penchent aussi sur les OQTF.
Sébastien Chenu (RN) propose de constitutionnaliser le droit des étrangers en organisant un référendum
Sébastien Chenu, député du Rassemblement national, a proposé le 10 janvier de “constitutionnaliser le droit des étrangers” à travers un référendum. Une telle démarche soulève des interrogations sur sa précision et son utilité, mais aussi sur les obstacles juridiques à une révision constitutionnelle.
Le droit des étrangers est encadré par le Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (Ceseda). Dans ce cadre, l’idée de constitutionnaliser cette matière n’implique pas une réécriture complète du droit des étrangers, mais plutôt l’ajout de nouvelles dispositions au sein de la constitution. Une proposition similaire avait été portée en 2023 par des sénateurs Les Républicains, visant notamment à imposer le dépôt des demandes d’asile depuis l’étranger.
Cependant, la modification du droit des étrangers ne nécessite pas de changement constitutionnel : il relève du domaine législatif prévu par l’article 34 de la Constitution, comme l’a montré la récente loi immigration de 2024. L’ambition de Sébastien Chenu reste donc floue : s’agit-il d’inscrire des principes généraux ou d’introduire des restrictions particulières ?
Sur le plan juridique, une révision constitutionnelle doit suivre la procédure de l’article 89 de la Constitution. Une proposition issue du RN devrait être adoptée en termes identiques par l’Assemblée nationale et le Sénat avant d’être soumise à référendum, ce qui peut être une difficulté en soi. Cependant, bien que certaines dispositions puissent entrer en conflit avec des principes existants comme la solidarité nationale, le Conseil constitutionnel ne pourrait pas censurer la réforme, car il s’est déjà déclaré incompétent pour contrôler une révision constitutionnelle.
Le principal défi reste donc politique : il faudra réunir un consensus parlementaire avant de mesurer l’adhésion des citoyens à cette proposition.
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Non, il n’y a pas besoin de modifier la constitution française pour exécuter une OQTF
Dès son investiture, Donald Trump a signé plusieurs décrets pour durcir la politique migratoire américaine, affirmant vouloir expulser « des millions et des millions » d’immigrés en situation irrégulière. En France, certains internautes estiment qu’une telle politique est impossible sans modifier la Constitution, notamment pour appliquer les obligations de quitter le territoire français (OQTF). Pourtant, cette affirmation est juridiquement infondée.
L’OQTF est une mesure administrative prévue par le Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA). Décidée par le préfet, elle oblige un étranger en situation irrégulière à quitter la France sous peine d’expulsion forcée. Contrairement aux affirmations en ligne, la Constitution ne contient aucune disposition encadrant cette procédure, qui relève entièrement de la loi.
Ainsi, il n’est pas nécessaire de réviser la Constitution pour expulser une personne sous le coup d’une OQTF. Les débats sur l’efficacité du dispositif relèvent davantage de considérations politiques et administratives que d’un verrou constitutionnel.
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Référence : AJU496290
