Chez les Surligneurs : L’affiche du livre de J. Bardella, une atteinte à la neutralité du service public ?
La promotion du livre de Jordan Bardella dans les gares constitue-t-elle une atteinte à la neutralité du service public, comme certains le soutiennent ? Pas sûr, les Surligneurs vous expliquent pourquoi. Cette semaine, les spécialistes du legal checking se penchent aussi sur les allocations familiales, la loi Lagleize et l’article 49.3.
Selon la journaliste Salomé Saqué, la promotion du livre de Jordan Bardella dans les gares va à l’encontre de la neutralité du service public
Une polémique a surgi concernant les affiches publicitaires dans des gares sur le futur livre de Jordan Bardella, président du Rassemblement national. Selon la journaliste Salomé Saqué, il s’agit là d’une atteinte au principe de neutralité du service public.
Le Code des transports établit que la SNCF et ses filiales remplissent des missions de service public, soumises aux principes de neutralité et de laïcité. La loi dite “séparatisme” de 2021 précise dans son premier article que les organismes chargés d’un service public doivent “veiller au respect des principes de laïcité et de neutralité du service public”.
La régie publicitaire de la RATP et de la SNCF, Mediatransports, a déjà appliqué ces principes avec les affiches jugées trop politiques de l’humoriste Waly Dia. Cependant, le simple fait qu’un auteur soit une figure politique ne rend pas automatiquement une affiche publicitaire politique, sous réserve de l’absence de message explicitement engagé. L’affiche du livre de Jordan Bardella, tant qu’elle reste neutre, sans slogan politique ni atteinte à la moralité, devrait pouvoir figurer sur les panneaux publicitaires.
La régie publicitaire en a décidé autrement. Si les affiches sont censurées, et selon leur contenu, l’éditeur pourra attaquer la décision devant le juge qui tranchera.
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Jordan Bardella veut réserver les allocations familiales “aux familles dont l’un des deux parents est de nationalité française”
Jordan Bardella propose de réserver les allocations familiales aux familles françaises, ce qui s’entend dans son esprit des familles comprenant au moins un parent français. Cette proposition se heurte cependant à la Constitution et aux engagements européens de la France.
Le principe d’égalité, inscrit dans l’article 1 de la constitution, garantit l’égalité devant la loi “sans distinction d’origine, de race ou de religion”. Ce principe d’égalité s’applique aux prestations sociales, qui sont accordées en fonction de la résidence en France, et non de la nationalité. La proposition du Rassemblement National serait donc une discrimination basée sur la nationalité comme le Conseil constitutionnel avait déjà pu le constater en 1990. Une décision de la Cour de cassation du 5 avril 2013 insiste d’ailleurs sur l’importance de la résidence en France comme critère d’accès aux prestations sociales, sans prendre en compte la nationalité.
En droit européen également, l’article 18 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne interdit toute discrimination en raison de la nationalité. Les citoyens européens résidant en France doivent donc pouvoir bénéficier des mêmes prestations sociales que les citoyens français. Concernant les ressortissants de pays tiers, la Convention européenne des droits de l’Homme et la Charte sociale européenne garantissent les droits sociaux aux personnes résidant légalement sur le territoire français. La proposition de Jordan Bardella risque donc d’exposer la France à une condamnation par la Cour de justice de l’Union européenne, comme ça a déjà été le cas dans un arrêt de 2002, par lequel la Cour jugeait que les prestations sociales ne peuvent pas être conditionnées par des critères discriminatoires liés à la nationalité. Les juges rappellent ainsi que le principe d’égalité garantit l’égalité de traitement pour les prestations sociales, sans distinction fondée sur la nationalité, et que cette garantie à valeur constitutionnelle.
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La loi Lagleize a-t-elle vraiment pour objectif “l’expropriation du patrimoine foncier des français pour résorber la dette” ?
Une récente vidéo accuse à tort la proposition de la loi Lagleize de viser l’expropriation foncière des français. Or, l’objectif de ce texte était au contraire de favoriser l’accession à la propriété. Afin de lutter contre l’augmentation du coût du foncier, le texte proposait de dissocier la propriété du terrain de celle de la construction qui s’y trouve. Cette dissociation, notamment utile dans les zones à forte densité, se fonde sur le “droit de superficie”, pratique déjà existante permettant de posséder une construction sans nécessairement détenir le terrain sous-jacent.
Le découplage des droits de propriété, loin de mener à une expropriation, visait donc à élargir l’accession à la propriété pour les ménages, en particulier dans les zones urbaines où le coût des terrains est élevé. Ce découplage n’aurait d’ailleurs rien d’obligatoire et aurait pour but d’augmenter le nombre de personnes pouvant devenir propriétaires. Certes, les propriétaires le seraient seulement de la construction et non du terrain, mais la jurisprudence reconnaît depuis longtemps la qualité de propriétaire du superficiaire, qui est une propriété pleine, sur laquelle le propriétaire du tréfonds n’a aucune prise.
Reste que ce texte n’est jamais entré en vigueur, il s’agit en fait d’une proposition de loi, déposée et adoptée par l’Assemblée nationale en 2019. Cependant, depuis un examen par la commission des affaires économiques du Sénat en 2020, la proposition n’a jamais été adoptée par le Sénat, et ne peut donc ni être promulguée, ni être mise en œuvre.
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Non, le 49.3 n’invalide pas le consentement à l’impôt.
Certains internautes prétendent pouvoir éviter de payer des impôts, arguant que l’usage du 49.3 invalidant le consentement à l’impôt. En droit, cette interprétation est fausse.
Le consentement à l’impôt est un principe fondamental inscrit à l’article 14 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789, qui exige que tout impôt soit approuvé par le peuple ou ses représentants, c’est-à-dire les parlementaires.
L’alinéa 3 de l’article 49 de la Constitution prévoit l’adoption d’un projet de loi du Gouvernement sans le vote des députés. Un vote reste possible car en réponse les députés peuvent déposer une motion de censure contre le Gouvernement. Si cette motion est adoptée, le texte est rejeté et le Gouvernement doit démissionner. En l’absence de l’adoption d’une motion de censure, on considère la loi comme approuvée par le Parlement. C’est-à-dire que les représentants du peuple français consentent au prélèvement de l’impôt.
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Référence : AJU479538