Chez les Surligneurs : s’il est élu, le NFP pourra-t-il reconnaître l’État de Palestine ?

Publié le 21/06/2024

Le Nouveau Front Populaire (NFP) a inscrit dans son programme la reconnaissance de l’état de Palestine. Mais le pourra-t-il réellement s’il est majoritaire ? Les Surligneurs vous répondent. De son côté, Jordan Bardella, candidat RN, maintient sa volonté d’interdire le voile dans l’espace public. Possible ou pas ? 

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​Le nouveau Front Populaire (NFP), s’il forme un gouvernement, reconnaîtra l’État de Palestine

Le NFP, la coalition des partis de gauche en vue des élections législatives anticipées, prévoit dans son programme, en cas de victoire, de reconnaître l’État de Palestine. Même si la gauche est majoritaire à l’Assemblée nationale et parvient à former un gouvernement, il lui sera compliqué de reconnaître un État sans l’aval du président de la République.

Toute entité humaine comprenant une population, un territoire et un gouvernement peut prétendre accéder à la qualité d’État et faire des demandes dans ce sens. Libres aux États ensuite de reconnaître ou pas cet État. Il est donc important de préciser que la reconnaissance d’un nouvel État ne le crée pas, elle consiste simplement à en constater l’existence. Aucun texte en France ne régit la reconnaissance d’un État en tant que telle. La reconnaissance est un acte discrétionnaire que les États peuvent effectuer « au moment de leur choix, sous la forme qu’ils décident et librement ».

Il n’existe pas, en droit international, de règles particulières pour reconnaître un État ; les États et les Organisations internationales ont la capacité de reconnaître un État. Un refus de reconnaissance n’interdit pas à un État d’exister, tout comme la seule reconnaissance ne suffit pas pour créer un État. La reconnaissance témoigne néanmoins de la conviction des autorités de l’État reconnaissant que l’État reconnu « constitue une réalité » titulaire de droits et obligations au regard du droit international.

La reconnaissance peut se faire explicitement, par exemple à l’occasion d’une déclaration, ou implicitement par exemple en nouant des relations diplomatiques via l’envoi d’un ambassadeur dans cet État ou en concluant un accord.

En France, le Président de la République est le chef de la diplomatie. En tant qu’il représente l’État, il est compétent pour accréditer les ambassadeurs (art. 14 Constitution), ou encore négocier et ratifier les traités (art. 52). Il a le monopole des décisions sur les relations internationales. Il est donc libre de reconnaître ou non un État. Une éventuelle majorité des partis de gauche à l’Assemblée nationale pourrait certes inviter à procéder à la reconnaissance, mais rien ne l’obligera à donner suite. Si un gouvernement du NFP est nommé au lendemain des élections et qu’un premier ministre issu de ces rangs est nommé, ce dernier ne sera donc pas l’autorité compétente pour reconnaître l’État de la Palestine.

À ce jour, le Président est toujours sur la même position : « la reconnaissance d’un État palestinien n’est pas tabou pour la France », tout en précisant le 6 juin 2024 que ce n’était « pas raisonnable de le faire maintenant ».

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« Cela reste un objectif » : Jordan Bardella veut toujours interdire le voile dans la sphère publique

Une des mesures phare du programme du Rassemblement national (RN) est l’interdiction du voile dans l’espace public. Jordan Bardella, bien qu’il ait repoussé la mise en place de cette interdiction, la maintient dans son programme. Or, une telle mesure rencontrerait bien des obstacles juridiques, au niveau national comme européen.

En effet, en 2010, le Conseil constitutionnel a estimé que des limitations au port d’un signe religieux dans l’espace public ne peuvent être motivées que par des impératifs d’ordre public, et de manière proportionnée en se fondant sur l’article 10 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen : « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la loi ». C’est pourquoi, dans la même décision, le Conseil a validé une loi interdisant le voile dit « intégral » dans l’espace public, en raison de risques pour la sécurité publique et d’exclusion sociale des femmes ainsi voilées.

Il en est de même pour la Cour européenne des droits de l’homme qui en 2009 a admis de telles restrictions au nom de la « protection des droits d’autrui et de l’ordre public » (art. 9 CEDH). L’article 10 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne prévoit les mêmes garanties de sauvegarde de la liberté de conscience. Dans le même sens, les fameux arrêtés anti-burkini de Nice avaient été annulés par le Conseil d’État en 2016 au motif qu’en l’absence de motif d’ordre public (en l’occurrence la salubrité publique), l’interdiction du burkini portait une atteinte manifestement disproportionnée à la liberté religieuse. Toutes ces juridictions exigent un motif d’ordre public pour interdire les signes religieux sur l’espace public.

En l’état actuel de la jurisprudence de l’ensemble des juridictions, on ne voit pas comment une telle mesure pourrait passer, même en modifiant la Constitution, et sauf à sortir du Conseil de l’Europe, à moins de trouver un motif d’ordre public suffisant.

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