L’AFJE célèbre ses 50 ans et l’Europe

Publié le 22/02/2019

Le 24 janvier dernier, l’AFJE fêtait ses 50 printemps en grandes pompes. Une journée riche en débats qui s’est conclu par un gala le soir même, avec l’organisation d’un colloque sur le droit comme outil de souveraineté dans une Europe bousculée.

« Le Brexit est paradoxalement l’occasion de mettre en lumière tous les avantages de l’Europe ». C’est par ces quelques mots que Bernard Spitz, président de la commission europe et international du Medef, président de la Fédération française de l’assurance, a introduit la journée de colloque, organisée par l’AFJE, à l’occasion de ses cinquante ans et d’une direction toujours plus dédiée à l’international, sur le rôle du droit en Europe, face à la souveraineté et à la compétitivité. « Les Anglais savent bien que l’Europe a changé nos vies, que ce soient les grandes entreprises, les grands projets européens, l’euro, le programme Erasmus, le marché unique qui a permis aux entreprises de croître. L’Europe a été une immense réussite, mais qui le dit. Pas grand monde », a-t-il déploré, adoptant une position résolument optimiste. Quid des conséquences pour les chefs d’entreprise ? « L’Europe a créé de la richesse, des emplois, a permis aux gens de se déplacer et aux entreprises de se développer », a-t-il rappelé.

Mais aujourd’hui, l’Europe est en danger, avec les enjeux populistes du scrutin de 2019 et le risque que le « projet européen se dilue ». « L’Europe est sans doute critiquable par bien des aspects, mais si l’on se place dans une perspective d’avenir, y a t-il aujourd’hui un pays européen capable seul de pouvoir se défendre, d’exister, de se protéger, sa vision, son droit seul face à un condominium sino-américain ? ».

Il a ainsi rappelé que « le droit est au rendez-vous de ces piliers de la construction européenne », notamment sur trois domaines pour les entreprises. Tout d’abord, l’innovation avec les nouvelles technologies, le RGPD, les conséquences de l’intelligence artificielle (IA) qui doivent être accompagnées de règles de droit. Ensuite, l’inclusion, qui doit « renforcer la cohésion sociale, la lutte contre les inégalités qui s’appuient sur les règles de droit, là encore par exemple, en matière d’égalité femmes-hommes ou d’agenda social, dont les problématiques pour les PME qui éprouvent des difficultés à pénétrer de nouveaux territoires en Europe ». Enfin, la question de souveraineté, avec « les règles autour de la zone euro, mais aussi la gestion des frontières, les règles d’immigration ».

En tant que chef d’entreprise, il existe des attentes particulières en matière de droit, comme avec le droit européen des affaires, le statut libre de société simplifiée européenne, l’ouverture des services, etc. « Il y a aussi tout ce qui concerne l’accélération de la prise de décision, la question des surtranspositions particulièrement aiguë en France » et comment assurer l’égalité des règles du jeu, d’abord entre nous Européens (au niveau fiscal, social…) et face au reste du monde », comme avec l’affaire Alstom-Siemens. Les questions soulevées sont lourdes telle celle de l’extraterritorialité. « Est-ce qu’un pays peut imposer ses décisions à un autre par un chantage, comme dans certains cas (fonds européens, politique économique infléchie) ? », a-t-il demandé.

Vu de la planète Medef, Bernard Spitz a « le sentiment qu’en matière de droit européen, le dogme l’emporte parfois sur le pragmatisme », et déplore l’existence de trop de règles. À ses yeux, « la voiture européenne fonctionne avec des logiciels qui datent des années 60, sans compter les problèmes de règles trop strictes qui ne sont pas appliquées (comme la règles des 3 %). Il a rappelé l’idéal du concept de better regulation.

Il a regretté une « absence de leadership », ce dont les États européens sont principalement responsables. « L’Europe n’est pas incarnée, et face au vide, les populismes se dressent ». Il a terminé son introduction en réaffirmant une position favorable à la reconnaissance des avocats d’entreprise, « afin que les entreprises ne soient pas défavorisées dans le monde international ».

Union européenne, état de droit et sécurité juridique

Marc Mossé, tout nouveau président de l’AFJE, a ensuite pris la parole pour introduire la première table ronde. Sa première question portait sur la machine Europe en tant que communautés de valeurs, de droit… et machine de normes !

Pierre Sellal, ambassadeur de France, président de la Fondation de France et Senior Counsel, August Debouzy, a rappelé qu’« au commencement étaient les valeurs de droit », et que c’est bien sur ces valeurs que s’est construit le projet européen, grâce à l’élaboration de directives, de règlements, de traités… « L’Europe est une union de régulation avant toute chose. « Et pourtant, elle marche », a-t-il plaisanté en parodiant Galilée, avec ce miracle du « marché intérieur et unique [qui] est une réalité, basée sur des règles de circulation, les prestations de services ». La confirmation de cet état de fait se concrétise par le fait que le juge national applique le droit de l’Union. À ce titre, « la Cour de justice européenne n’a jamais vu ses décision contestées ». La meilleure démonstration se fait paradoxalement par l’exemple du Brexit : « On voit ce que cela coûte à l’Angleterre de vouloir quitter l’UE ! ».

Pour autant, il existe des risques. Le premier c’est que cet État de droit et communauté de valeurs est fragilisé aujourd’hui, notamment du point de vue du fonctionnement de la justice, or l’intégrité du marché unique repose sur la fiabilité de la justice. Le deuxième risque est que cette union de la régulation a fonctionné dans un ordre international fondé sur la règle multilatérale. « Lorsque le partenaire dominant récuse cet ordre international et quand l’autre partenaire a une application distante des règles, il y a un risque », a-t-il estimé. Troisième limite qu’y voit Pierre Sellal : « les règles ne suffisent pas à fonder une politique ». Il a ensuite contredit la légendaire lenteur des prises de décisions européennes. « On décide beaucoup plus vite que dans le passé », a-t-il rappelé, en citant une anecdote personnelle : « Au début des années 80, dans mon portefeuille de jeune diplomate, j’avais les directives de libre circulation des métiers libéraux. La directive « coiffeurs » a duré, elle, 15 ans de négociation ! Seul le passage à la majorité qualifiée a permis d’adopter cette directive ».

Guy Canivet, président du Haut comité juridique de la place financière de Paris a ensuite pris la parole pour aborder le rôle du juge dans la construction européenne. « Les juges ont joué un rôle par l’adoption de traités, ils veillent à l’application des textes. Et s’assurent de l’effectivité des textes, qu’ils interprètent ». Le juge a donc une double fonction : l’application et l’interprétation des textes. S’il n’y avait pas de juge, il n’y aurait pas d’application du droit européen », a-t-il résumé.

« Si l’on prend les origines de la Cour européenne de justice, elle a réglé des problèmes essentiels de la construction, comme l’idée de primauté et de fédérer », a-t-il estimé. Aujourd’hui, les Anglais dans le contexte du Brexit essaient de contourner la jurisprudence de la Cour. En revendiquant que « s’il y a un accord de transition, ils ne voudront pas que cet accord de transition soit interprété par la Cour européenne de justice ». Ils vont malheureusement perdre l’avantage d’une régulation judiciaire européenne. Pour Louis Canivet, le Brexit est une catastrophe, car c’est tout un réseau de juges, qui « était un lieu de discussion entre la common law et le droit continental », et qui, malheureusement va disparaître.

Pour Louis Vogel, avocat et homme politique, « la plupart des Français sont au moins eurosceptiques s’ils ne sont pas carrément opposés au projet européen ». Pourtant, lui ne cache pas son enthousiasme. « Le marché unique est fantastique, c’est une vraie œuvre jurisprudentielle et pourtant nos concitoyens perçoivent très mal l’Europe, comme tatillonne, technocratique, lointaine, avec une réglementation aveugle. Le volailler Doux a eu à faire à l’Europe, puni pour avoir détourné les aides européennes, à cause du taux d’os contenu dans ses poulets. Mais pour des raisons physiologiques, il y a davantage d’os dans les poulets que lorsque la norme a été établie. Il était impossible de sortir de la norme ! Résultat : le groupe a été condamné à plus de 80 millions d’euros et a fait faillite. Voilà l’exemple qu’a eu la Bretagne de l’Europe », a-t-il expliqué.

Il a également mis en garde contre les fake news qui ont accompagné les débats sur le Brexit, comme avec le mensonge des « 109 textes européens sur la fabrication des oreillers ! ».

Quand deux pays ne sont pas d’accord sur une directive, ils produisent tous les deux des options, ralentissant sa mise en application. Le juge européen joue là un rôle-clé, estime Louis Vogel, en essayant « de débloquer le système », a par exemple créé « un contrôle européen des concentrations, qui n’était pas inscrit dans le traité ». Mais cela manque de légitimité politique aux yeux des Européens. La population n’existe plus, que l’Europe avance sans elle.

Marc Mossé a recentré les débats sur la façon dont les partenaires économiques pourraient influencer la norme. Pour Pierre Sellal, « il est difficile de prétendre que les partenaires ne sont pas entendus lorsqu’il y a une quarantaine de parties prenantes présentes lors des négociations ». Mais là encore tout est question de perception. Un problème proprement français, selon ses chiffres : alors que le taux de confiance en l’Europe est de 48 % (baromètre sur l’Europe), la France n’est qu’à 33 %. La confiance en Europe est supérieure aux institutions nationales. Mais surtout les réponses à la question « est-ce que la voix de votre pays compte en Europe ? » est éclairante : 73 % au Danemark, et pour la France, 33 % ! ».

Consensus général entre les interlocuteurs : il faut donc changer la perception de l’Europe. « Tout le monde dit que Schengen ne fonctionne pas. Mais ce qui est fondamental, c’est le grand marché unique. Schengen n’est que l’adjuvant. On se concentre trop sur le négatif. On ne parle que des contrôles qui dysfonctionnent », a déploré Louis Vogel. Pourtant, il existe aussi des avancées positives. « L’Europe a commencé à changer : a retiré 6 000 textes car beaucoup trop de choses trop pointilleuses ! ».

Pierre Sellal a rappelé que le « Parlement a des pouvoirs considérables » car il est codécideur de toute la législation, mais là encore nous nous frottons à un problème de perception des concitoyens. « La surtransposition a longtemps été une maladie française, et on peut compter sur les doigts d’une main les textes dont la France n’a pas été à l’initiative ». Attention, met-il en garde, en se gardant d’opter pour la mauvaise solution : « Ne pas se lancer dans la frénésie institutionnelle. À chaque fois que nous avons ajouté hiérarchiquement au triangle institutionnel des origines, nous avons plutôt affaibli le système », juge-t-il. La « Commission européenne est la création la plus géniale de tout le système européen. C’est vraiment ce qui distingue radicalement l’Union européenne de toute forme, de toute force internationale. Elle tient sa force de son monopole d’initiative », et tient à ce qu’elle la conserve.

Les coopérations renforcées entre institutions sont cependant très difficiles. Pourtant, Louis Vogel a insisté sur la nécessité de créer, par exemple, « un géant du numérique chez nous ».

Droit européen et compétitivité

Marie-Astrid d’Évry, directrice du département éditorial du droit des affaires et compliance chez LexisNexis, a demandé aux interlocuteurs si le corpus européen de règles permettait d’innover ou à tout le moins d’être compétitives.

Fabrice Picod, professeur de droit, plaide plutôt en faveur de la qualité de la norme plutôt que pour une norme pléthorique, et cite l’existence d’environ « 23 000 textes normatifs européens ». Pour lui, « l’Europe est allée trop loin mais a pris conscience de ses excès, et ce dès le traité de Maastricht », d’où la reconnaissance de la subsidiarité utile seulement quand l’État est impuissant.

Les perspectives d’amélioration sont considérables : il faudrait améliorer les algorithmes des moteurs de recherche, rendre des textes plus concis, puisqu’ils « enflent lors des discussions au Parlement européen ». Une fois adoptés, ces textes doivent être connus, mais il faut aussi les consolider, au fur et à mesure des décennies. Dans tous les cas, il a prôné la simplification de la codification : « avant le traité de Lisbonne, il existait une dizaines d’actes juridiques contre quatre aujourd’hui : règlements, directives, décisions, actes non obligatoires ».

Pour Frédéric Jenny, professeur d’économie et co-directeur du Centre européen de droit et d’économie (ESSEC), « Que se serait-il passé sans la construction juridique européenne, du point de vue de la compétitivité ? Le marché unique a contribué à développer la concurrence ». L’une des grandes difficultés de la tâche est qu’on a libéralisé « mais l’action dans tous les traités commerciaux a été de pousser ces pays à adopter des principes concernant leurs entreprises qui sont sur la même base européenne, donc les entreprises évoluent globalement dans des environnements juridiques relativement similaires ».

Nicolas Guérin, secrétaire général d’Orange, estime, quant à lui, que le bilan n’est pas négatif. Pour lui, « le corpus de règles peut être un levier de compétitivité, comme avec le RGPD. Parfois l’Europe offre des perspectives qui permettent de mieux se défendre face aux géants américains ». Ainsi, les clients verront qu’en Europe « on n’exploite pas n’importe comment les données et voudront communiquer leurs données à nous plutôt qu’à d’autres » ! Deuxième exemple positif : dans les télécoms, « nous avons déjà un Code européen des télécoms », qui permet de soutenir les investissements, où l’innovation ne doit pas être asymétrique. « Le texte prévoit des menaces si les entreprises ne réalisent pas assez d’investissements. Elles n’ont plus le choix : il faut investir » !

Définitivement, « l’Europe peut proposer une concurrence plus saine que la simple guerre des prix ou un consumérisme sans limite », a-t-il conclu.

Par ailleurs, le juriste a changé de statut. Désormais, il est « le chef d’orchestre du droit au sein de l’entreprise et ses instruments sont extrêmement nombreux. 60 % du traitement juridique des entreprises est internationalisé, et les juristes sont de plus en plus rattachés à la direction juridique comme c’est le cas des DPO. « Les juristes pilotent carrément des projets (ex : loi Sapin II…) », a-t-il rappelé avec enthousiasme.

Fabrice Picod souligne lui aussi « l’importance du juriste [qui] se voit de plus en plus dans la création de l’harmonisation du droit. Il doit faire remonter des best practices vers un mouvement ascendant ». Comment inciter les États et l’Europe a légiférer ? « Il faudrait sortir des voies connues (lobbying) pour proposer des demandes innovantes, comme avec les initiatives citoyennes européennes, malheureusement pas assez mûries sur les question d’économie (notamment les débouchés économiques, protection des consommateurs…)

Et surtout, il faut redéfinir la notion de marché qui n’est plus la bonne, a affirmé Frédéric Jenny. « Les économistes ne voient pas de lien entre concurrence et innovation. L’exemple d’Uber montre que désormais la concurrence des taxis vient de l’extérieur du marché ».

Des axes de réflexion sont en marche, comme avec le travail lancé par les gouvernements allemand et français, à l’initiative d’un Code européen des affaires, et à laquelle Michèle Grégoire, avocate à la Cour de cassation et professeur de droit à Bruxelles, participe, pour renforcer la « convergence ente le droit français et allemand ».

Le droit, outil de souveraineté économique pour l’UE ?

Dernier temps fort de la journée, la thématique de la souveraineté économique. Pour Hugues Bouthinon-Dumas, professeur associé du département droit et environnement de l’entreprise, concernant la souveraineté économique, l’idée n’est pas évidente. Il distingue donc plusieurs situations potentielles : la subordination institutionnelle, où les autorités normatives supranationales dicteraient les règles de l’UE. Mais ce n’est pas le cas en Europe, car l’ONU ou l’OCDE n’ont pas de normes coercitives, et elles restent donc souveraines. L’inféodation économique non plus ne s’applique pas à l’Europe grâce « à sa remarquable diversification » sectorielle.

Ainsi « le droit économique peut être largement impuissant pour éviter ces prises de contrôle, voire les favoriser avec la libre circulation des capitaux qui peuvent défavoriser les acteurs européens », a-t-il reconnu.

Enfin, la dépendance économique de l’Europe (hydrocarbures, technologies, épargne mondiale…) « Là encore, le droit ne peut pas faire grand-chose, c’est plutôt vers les politiques sectorielles et industrielles qu’il faut se tourner ».

Bernard Cazeneuve, avocat associé, Auguste Debouzy, président du Club de juristes, ancien Premier ministre, a ré-insisté, quant à lui, sur la question politique plus qu’économique. « Les souverainistes sont ceux qui remettent la capacité européenne à défendre les intérêts souverains des nations et des peuples, et c’est pour contester les transferts de compétences donnés à l’Europe. C’est plus qu’une question de droit, mais une question politique ».

Malheureusement, souvent le droit anglo-saxon s’est emparé de questions avant le droit continental, et notamment la régulation financière et bancaire. « Il n’y a pas de droit qui s’impose à nous, il y a des rapports de force », a-t-il estimé. Sur la corruption, « on ne peut pas laisser les Américains comme seuls gendarmes à travers le monde. Si nous avions mis en places des règles [plut tôt], nous aurions été plus efficaces ». Il a regretté qu’aujourd’hui, nous n’ayons pas « de droit européen de la compliance, sinon nous serions capables de définir une compétence extraterritoriale du juge européen. Nous serions dans une relation un peu plus équilibrée, donc le droit peut faire de la défense de souveraineté. Mais il faut une volonté politique ».

Xavier Hubert, directeur éthique chez Engie, est lui, persuadé que le droit est un outil formidable dans la souveraineté économique. Mais « il faut faire une différence entre le juge américain et l’administration américaine. Le DOG considère sa compétence extraterritoriale comme extrêmement développée. Pour autant, le DOG n’avait aucune compétence pour une affaire impliquant un citoyen britannique qui travaillait pour Alstom. Il faut dissocier les pratiques agressives de l’administration versus une pratique plus légaliste du juge ».

« Le droit est l’outil que nous avons au service de la compétition internationale. Il ne faut pas l’oublier, au risque de se désarmer. Sur le RGPD, la corruption, les questions environnementales, il faut nous positionner comme acteur économique, mais si l’on n’a pas nous-mêmes les outils internes de compliance, on permet à des acteurs extérieurs de venir nous déstabiliser via l’outil juridique ». Petite fierté : « le modèle GDPR brésilien est un copier-coller de l’européen. On est en train d’exporter notre modèle ». À ses yeux, « l’Europe n’est pas désarmée, car elle a pour elle une arme puissante, qui est son marché. Son marché est désirable pour beaucoup de marchés internationaux et il n’existe pas d’entreprises internationales qui peut se priver du marché européen ».

Bernard Cazeneuve a par ailleurs insisté sur les données personnelles qui deviennent désormais un enjeu. (RGPD et directive de e-evidence), notamment dans un contexte de terrorisme. « Dans des enquêtes sensibles, nous avons besoin d’avoir accès à la preuve numérique ». Et le RGPD a déjà imposé aux Américains des logiques auxquelles ils voulaient se soustraire. Le droit peut ainsi produire de la défense des intérêts souverains.

Concernant des sanctions, l’exemple de l’Iran montre bien que « les relations deviennent politiques et non juridiques. Sur les sanctions, il existe la loi de blocage de 1968, mais le droit ne peut avoir de vraie valeur que si l’on décide de l’utiliser. La loi de 1968 n’a servi qu’à une seule sanction ! In fine, on peut avoir une très belle loi mais si elle n’est pas utilisée, elle n’a aucune consistance ! Les Américains en rient », a estimé Xavier Hubert. Aux États-Unis, au contraire, le « Cloud Act a été voté en 48h ! Il y a un consensus global, où les États-Unis refusent le processus d’entraide judiciaire, mais veulent avoir accès à l’information directement. Pour eux, l’article 48 du RGPD n’a aucune valeur ». Par ailleurs, il pense que l’absence de « legal privilege est une position juridique de faiblesse ».

De quoi nourrir la réflexion avant le discours de Nicole Belloubet, qui a notamment salué l’action de l’AFJE depuis 50 ans et le rôle des « juristes dans le rayonnement du droit français dans le droit européen ».

X