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Clause de non-concurrence : retour sur la nature controversée de la contrepartie financière

Publié le 11/05/2022
Un homme tient une feuille contenant une clause de non-concurrence dans une main et dans l'autre un stylo pour signature de la clause
Richard Villalon / AdobeStock

La contrepartie financière de la clause de non-concurrence ayant la nature d’une indemnité compensatrice de salaire stipulée en conséquence de l’engagement du salarié de ne pas exercer, après la cessation du contrat de travail, d’activité concurrente à celle de son ancien employeur, et ne constituant pas une indemnité forfaitaire prévue en cas d’inexécution d’une obligation contractuelle, elle ne peut être qualifiée de clause pénale.

Cass. soc., 13 oct. 2021, no 20-12059, FS–B

La cessation du contrat de travail ne fait pas disparaître immédiatement tout lien juridique entre les anciens contractants. Dans cet après-contrat de travail, une clause de non-concurrence peut interdire à un ex-salarié, après son départ de l’entreprise, d’exercer une activité professionnelle déterminée. Cette obligation post-contractuelle exige, sous peine de nullité, une contrepartie financière1, dont la nature juridique suscite encore un important contentieux. En témoigne l’arrêt rendu récemment par la chambre sociale de la Cour de cassation le 13 octobre 2021.

En l’espèce, un salarié a été engagé, en qualité d’ingénieur développement, par une société spécialisée dans le domaine du textile. Son contrat de travail prévoyait une clause de non-concurrence d’une durée de deux ans, assortie d’une contrepartie financière. Après avoir démissionné, le salarié a saisi le conseil de prud’hommes afin, notamment, d’obtenir le paiement de cette contrepartie. Le 6 décembre 2019, la cour d’appel de Toulouse a fait droit à sa demande. L’employeur a alors formé un pourvoi en cassation au moyen que « la contrepartie financière d’une clause de non-concurrence, ayant la nature d’une indemnité compensatrice de salaire qui tend à sauvegarder la liberté fondamentale d’exercer une activité professionnelle et à compenser l’atteinte qui y est portée, est bien une clause pénale que le juge a la faculté de modérer ou d’augmenter ». En d’autres termes, l’employeur considérait que la contrepartie financière de la clause de non-concurrence pouvait s’analyser en une clause pénale de sorte que le juge pouvait la réviser conformément aux dispositions du droit commun. Il convient, en effet, de rappeler que l’article 1231-5 du Code civil, issu de l’ordonnance du 10 février 2016 réformant le droit des contrats, le régime général et la preuve des obligations, prévoit que « le juge peut, même d’office, modérer ou augmenter la pénalité ainsi convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire » (alinéa 2). Innovation majeure de la loi du 9 juillet 1975, la révision des clauses pénales manifestement excessives ou dérisoires est reprise à la lettre par le législateur, qui lui confère un caractère d’ordre public. Une fois de plus, la question de la nature juridique de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence se trouvait donc posée. En effet, soit l’on considérait, comme le soutenait l’employeur, que la compensation pécuniaire valait clause pénale et que le pouvoir de révision des juges du fond s’appliquait. Soit l’on considérait, au contraire, que cette compensation financière constituait un élément de rémunération, en l’occurrence une indemnité compensatrice de salaire, qui ne peut donc faire l’objet d’une modification. C’est cette dernière solution que la Cour de cassation a fait prévaloir dans l’arrêt commenté.

La décision est ferme : la contrepartie financière de la clause de non-concurrence revêt la nature d’une indemnité compensatrice de salaire. La chambre sociale approuve donc les juges toulousains d’avoir décidé que cette contrepartie ne peut être qualifiée de clause pénale. Cette solution n’est pas nouvelle. Elle ne mériterait pas d’être signalée si elle ne revenait pas sur la qualification juridique de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence à l’aune du « nouveau » droit commun des contrats. En tout état de cause, si l’on ne peut que saluer la distinction faite par les juges du quai de l’Horloge entre la contrepartie financière de la clause de non-concurrence et la clause pénale (I), l’assimilation de cette contrepartie à une indemnité compensatrice de salaire suscite davantage de réserves (II).

I – Une distinction saluée

Dans le présent arrêt, la chambre sociale de la Cour de cassation approuve la cour d’appel d’avoir décidé que la contrepartie financière de la clause de non-concurrence n’était pas une clause pénale. La solution retenue est salutaire.

Sanction d’un manquement contractuel. La clause pénale est classiquement définie comme une clause du contrat par laquelle les parties évaluent par avance et forfaitairement l’indemnité à laquelle donne lieu l’inexécution du contrat2. De cette définition, l’on comprend que la clause pénale vise l’hypothèse où l’une des parties manquera d’exécuter le contrat, comme le précise l’article 1231-5, alinéa 1er, du Code civil. La qualification de clause pénale est donc réservée aux clauses qui sanctionnent une inexécution des obligations contenues dans la convention3. La contrepartie financière de la clause de non-concurrence a une tout autre fonction : indemniser l’ancien salarié tenu d’une obligation contractuelle qui limite ses possibilités d’exercer un autre emploi.

Assurément, la clause de non-concurrence restreint le principe de libre exercice d’une activité professionnelle4. Or la liberté du travail est un droit fondamental reconnu par les traités internationaux5 et doté de valeur constitutionnelle6. Cette liberté peut néanmoins faire l’objet d’une limitation conventionnelle, ou plutôt d’une contractualisation, à condition qu’elle soit dotée d’une contrepartie. C’est précisément ce que vient rappeler, dans le présent arrêt, la haute juridiction judiciaire lorsqu’elle affirme que l’obligation de non-concurrence est « stipulée en conséquence de l’engagement du salarié de ne pas exercer, après la cessation du contrat de travail, d’activité concurrente à celle de son employeur ». Ainsi, la contrepartie financière de la clause de non-concurrence vient indemniser un ancien salarié pour atteinte à sa liberté du travail, liberté qui permet aux personnes qui en usent de se procurer des ressources, d’obtenir les moyens nécessaires à leur existence, de gagner leur vie, d’assurer leur subsistance et celle de leur famille. L’exercice de cette liberté vise à procurer un revenu. La clause de non-concurrence restreignant cette liberté n’est donc pas justifiée si elle ne récompense, ou du moins ne compense pas, pour reprendre les termes de l’arrêt commenté, le manque à gagner qu’elle génère ou la dissuasion qu’elle provoque7. La chambre sociale relève, à cet égard, que la clause pénale relève d’une tout autre logique, puisqu’elle vient sanctionner un contractant qui ne respecterait pas les engagements qu’il a souscrits lors de la conclusion du contrat. Dans un cas (contrepartie financière), il s’agit de gratifier et, dans l’autre (clause pénale), il s’agit de sanctionner.

Nature indemnitaire de la pénalité stipulée. La contrepartie financière récompense8, alors que la clause pénale punit. C’est ce qu’explique la Cour de cassation lorsqu’elle relève que la contrepartie financière de la clause de non-concurrence ne constitue pas une indemnité forfaitaire prévue en cas d’inexécution d’une obligation contractuelle. Le versement d’une telle contrepartie n’est pas davantage subordonné à la démonstration, par le salarié, de l’existence d’un dommage9 et son montant ne peut être modéré en fonction du préjudice réellement subi10. Or, l’article 1231-5 du Code civil énonce que le débiteur défaillant paiera, en application de la clause pénale, « une certaine somme à titre de [dommages-intérêts] ». C’est affirmer la nature indemnitaire de cette sanction. Plus précisément, de sa nature indemnitaire, il en résulte que la clause pénale entraîne l’attribution de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi par le cocontractant.

La solution retenue ici par les magistrats de la chambre sociale de la Cour de cassation est donc conforme aux règles légales et ne peut être qu’approuvée. Cette solution pourrait-elle conduire à un revirement de jurisprudence en droit du travail, notamment s’agissant de l’indemnité contractuelle de licenciement ? Dans un arrêt du 16 mars 2016, la haute Cour jugeait que le montant d’une indemnité contractuelle de licenciement peut être révisé lorsqu’il est excessif au regard du préjudice subi par le salarié11. Pour reconnaître ce pouvoir de révision aux juges du fond, la Cour de cassation se base sur l’article 1231-5 du Code civil12. Or ce fondement est discutable : comme nous l’avons précédemment indiqué, la clause pénale prévoit l’octroi de dommages et intérêts lorsque l’un des contractants ne respecte pas ses engagements contractuels ; en la circonstance, l’employeur qui licencie un salarié viole-t-il ses engagements nés du contrat de travail ? La réponse est à l’évidence négative… Il use simplement de la faculté reconnue par la loi de rompre unilatéralement le contrat de travail à durée indéterminée et verse une somme prévue par le contrat dans ce type de situation.

Articulation avec la convention collective. Nonobstant ce débat jurisprudentiel, il ressort de l’arrêt commenté que clause pénale et contrepartie financière n’ayant pas la même nature, l’employeur ne pouvait obtenir la révision de cette dernière. En outre, ce dernier basait notamment son argumentaire sur le fait que la clause de non-concurrence prévue dans la convention collective limitait la contrepartie financière à un tiers du salaire et de la capacité financière de l’entreprise, alors que le contrat de travail du salarié prévoyait une contrepartie supérieure. Autrement dit, l’employeur souhaitait obtenir la nullité de la clause en raison du caractère excessif de la contrepartie financière au regard de la convention collective. Une telle analyse a logiquement, et fort heureusement, été écartée. En effet, si l’article L. 2254-1 du Code du travail prévoit que les conventions collectives s’appliquent au contrat de travail, les deux actes restent néanmoins distincts. Cela signifie, pour rappel, que le salarié peut bénéficier des avantages de la convention collective, sans que celle-ci ne s’incorpore au contrat de travail. Cependant, dans le silence du contrat de travail, la convention collective peut imposer au salarié une obligation de non-concurrence. Ainsi, lorsque deux dispositions, l’une contractuelle, l’autre conventionnelle imposent au salarié une obligation de non-concurrence, la plus favorable au salarié sera retenue (mais il n’y aura pas de cumul !). Ce principe de faveur exclut donc, en l’espèce, l’application de la convention collective qui semble moins favorable au salarié démissionnaire. L’employeur ne pouvait donc obtenir la mise à l’écart de la clause de non-concurrence sur ce fondement. Il aurait été plus judicieux pour ce dernier d’y renoncer dans un délai raisonnable après la rupture du contrat…

II – Une assimilation discutée

L’approche travailliste. La solution commentée trouve un écho dans un arrêt du 26 septembre 200213. À cette occasion, la Cour de cassation avait énoncé que « la contrepartie financière de l’obligation de non-concurrence a, quelle que soit la qualification contractuelle que lui donnent les parties, la nature d’une indemnité compensatrice de salaire »14. Dans ses décisions de 2007 et 201015, la chambre sociale de la Cour de cassation retient pareillement la qualification juridique de salaire à la contrepartie pécuniaire de la clause de non-concurrence. L’explication, selon les juges, tient à ce que cette contrepartie ne se concevrait qu’en raison du contrat de travail, dont elle constituerait en quelque sorte un salaire d’inactivité. Ce raisonnement travailliste est moins évident qu’il n’y paraît.

Définition. En effet, le salaire est juridiquement la contrepartie du travail accompli par le salarié16. Si l’on s’en tient à cette conception purement contractuelle rattachant le salaire à la prestation de travail, la contrepartie financière de la clause de non-concurrence devrait être exclue de la qualification de salaire puisqu’elle prend précisément sa source dans la rupture de la relation de travail. L’absence de travail doit donc entraîner l’absence de salaire, la rupture du contrat ouvrant droit à des « indemnités ». Or une indemnité octroyée lors de la rupture de la relation de travail ne peut être qualifiée de salaire. Ainsi, la jurisprudence a décidé que « l’indemnité de licenciement ou son équivalent conventionnel n’est pas la contrepartie d’un travail fourni et ne constitue donc pas un salaire »17 ; elle est « la contrepartie du droit de l’employeur de résiliation unilatérale du contrat de travail »18. Une telle qualification est donc déterminante car elle emporte des conséquences pratiques différentes. Exemple : l’action en paiement d’une indemnité de licenciement n’est pas soumise à la prescription de l’action en paiement du salaire. Dès lors, si la contrepartie financière de la clause de non-concurrence est qualifiée d’indemnité se rattachant à la rupture du contrat, la prescription est de 12 mois en vertu de l’article L. 1471-1, alinéa 2, du Code du travail.

Explication. En réalité, si l’on souhaite s’en tenir à cette qualification de salaire, c’est la nature juridique de l’obligation de non-concurrence elle-même qu’il faut interroger. Comme indiqué précédemment, cette obligation trouve sa source dans le contrat de travail qui unissait le salarié à l’employeur. Elle est dépendante du contrat de travail antérieur. Il s’agit d’un lien en vertu duquel l’employeur, le créancier, a le droit d’interdire à son ancien salarié, le débiteur, l’exercice d’une activité professionnelle concurrente. Cette obligation est l’accessoire du contrat de travail19, c’est-à-dire qu’elle est liée à lui, elle le complète et n’existe que par lui. Dès lors, cette corrélation entre contrat de travail et obligation de non-concurrence permet au second d’emprunter les éléments de qualification du premier…

Ainsi, la compensation pécuniaire de la clause de non-concurrence peut être qualifiée de salaire dès lors qu’elle est accordée « à l’occasion » du contrat de travail qui liait les anciens contractants. Elle est, pour reprendre les termes de la Cour de cassation, « une indemnité compensatrice de salaire ». Cette somme vient compenser la rémunération qui ne peut pas être normalement touchée par le salarié durant toute la période de non-travail. Elle est considérée comme salaire, bien que versée hors toute prestation effective de travail, au même titre que l’indemnité de remplacement en cas de maladie ou les heures de délégation payées aux représentants du personnel. Dans ces derniers cas, les sommes versées au salarié sont qualifiées de salaire alors même que le contrat de travail est suspendu, par un arrêt de travail dans un cas et par l’exercice de fonctions de représentation du personnel de l’entreprise dans l’autre.

Une nouvelle approche civiliste20 ? Toutefois, à y regarder de plus près, le renvoi à une autre qualification pour analyser la contrepartie pécuniaire de la clause de non-concurrence serait plus convaincant. En premier lieu, dans les exemples précités (arrêt maladie et heures de délégation), les sommes versées sont assimilées au salaire parce que le contrat de travail n’est pas rompu bien que suspendu. Ce qui n’est pas le cas de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence, qui est octroyée, selon l’arrêt commenté, en raison de « la cessation du contrat de travail ». En second lieu, les juges admettent eux-mêmes que la clause de non-concurrence ne produit ses effets que lorsque le contrat est rompu, ce qui justifie que le montant de la contrepartie financière ne peut faire l’objet d’un paiement au cours de l’exécution du contrat de travail21. La clause de non-concurrence n’est-elle donc pas un contrat à part entière, autonome du contrat de travail ? N’est-ce pas un contrat conclu sous condition suspensive de la rupture du contrat de travail ? Ce « contrat de non-concurrence » ne devrait-il pas être soumis aux dispositions du Code civil, en l’absence de tout lien de subordination juridique entre l’employeur et son ancien salarié22 ? Ainsi, la contrepartie financière de la clause de non-concurrence ne pourrait-elle pas s’analyser en prix23 et non en salaire24 ? Une telle analyse permettrait à l’employeur victime d’une inexécution de l’obligation de non-concurrence d’obtenir, en vertu de l’article 1223 du Code civil, la sanction de la réduction de ce prix. Ce texte, modifié par la loi du 20 avril 2018, prévoit qu’« en cas d’inexécution imparfaite de la prestation, le créancier peut, après mise en demeure et s’il n’a pas encore payé tout ou partie de la prestation, notifier dans les meilleurs délais au débiteur sa décision d’en réduire de manière proportionnelle le prix ». L’application de cette disposition est conditionnée à l’acceptation du débiteur. En revanche, « si le créancier a déjà payé, à défaut d’accord entre les parties, il peut demander au juge la réduction de prix ». Cette voie est très incertaine, en l’espèce, puisqu’aucun acte de concurrence ne peut être effectivement reproché au salarié.

Toutefois, une autre sanction aurait pu être invoquée par l’employeur : l’exception d’inexécution « préventive ». À côté de l’exception de droit commun qui ne peut être mise en œuvre qu’une fois constatée l’inexécution effective de ses obligations par une partie, l’ordonnance du 10 février 2016 met en place, à l’article 1220 du Code civil, la possibilité d’invoquer ce mécanisme de manière préventive. Selon cette disposition, « une partie peut suspendre l’exécution de son obligation dès lors qu’il est manifeste que son cocontractant ne s’exécutera pas à l’échéance et que les conséquences de cette inexécution sont suffisamment graves pour elle ». Cette suspension du contrat par anticipation est soumise à des conditions particulières. D’une part, le créancier doit notifier sa décision au débiteur dans les meilleurs délais. D’autre part, le créancier doit prouver qu’il est manifeste que son cocontractant ne s’exécutera pas à l’échéance. Il doit donc y avoir seulement un risque évident de non-exécution, dont la réalité sera appréciée par le créancier. Ainsi, dans la présente affaire, cette sanction serait plus adéquate dans la mesure où l’employeur invoquait le fait que le salarié avait déjà entrepris des actes de concurrence déloyale durant l’exécution du contrat (moyens annexes). Si aucun manquement à son obligation de non-concurrence ne pouvait être reproché au salarié, ne peut-on pas considérer qu’il est manifeste que les actes entrepris conduiraient à une inexécution ? Ainsi, ce risque ne peut-il pas être prévenu en application de l’article 1220 du Code civil ?

Si ces voies demeurent incertaines actuellement, le juge du travail n’est pas dépourvu de toute marge de manœuvre, car il lui est loisible, du moins en présence d’une contrepartie financière considérée comme trop faible, d’annuler la clause de non-concurrence ou bien d’en réduire le périmètre25.

Notes de bas de pages

  • 1.
    Cass. soc., 10 juill. 2002, n° 00-45387 (trois arrêts) : Bull. civ. V, n° 239 ; D. 2002, p. 2491, note Y. Serra ; D. 2002, Somm., p. 3111, obs. J. Pelissier ; Dr. soc. 2002, p. 954, obs. R. Vatinet.
  • 2.
    S. Porchy-Simon, Droit des obligations, 14e éd., 2022, Dalloz, p. 328.
  • 3.
    D. Mazeaud, La notion de clause pénale, 1990, LGDJ, spéc. p. 7 : « En cas d’inexécution, la clause pénale est une peine qui sanctionne l’inexécution illicite de l’obligation garantie ». Cependant, l’auteur relève que la clause pénale a aussi un rôle de garantie de l’exécution de l’obligation : « Même si elle ne s’exécute pas, c’est-à-dire même si la peine qu’elle contient ne s’applique point, la clause joue un rôle spécifique. Elle stimule la diligence du débiteur et assure, ainsi, l’exécution de l’obligation initiale par la menace de l’exécution d’une peine. Dès lors, si la clause produit son effet dissuasif et que le débiteur ne se rend pas coupable d’une inexécution illicite, la peine qu’elle fixe n’a plus de raison d’être ».
  • 4.
    L.-F. Pignarre, « Les droits fondamentaux, fondement de l’exigence de contrepartie financière », RLDA 2013, n° 78.
  • 5.
    Voir notamment l’article 6.1 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels du 16 décembre 1966.
  • 6.
    Le Conseil constitutionnel (28 mai 1983) reconnaît implicitement à cette liberté la valeur d’un principe constitutionnel.
  • 7.
    F. Fouvet, Le principe de libre exercice d’une activité professionnelle, 2018, LGDJ, spéc. p. 302 : en quelque sorte, la force de travail du salarié reste à sa disposition. Il est donc nécessaire que l’employeur fournisse les ressources que le salarié ne peut plus obtenir par l’exercice de l’activité temporairement prohibée.
  • 8.
    La contrepartie financière ne peut-elle pas être qualifiée tout simplement de « récompense » ? La notion se rencontre principalement en droit des régimes matrimoniaux. Dans cette matière, la récompense vise à redonner à chaque masse ce qui lui est objectivement dû. En effet, les articles 1433, alinéa 1, et 1437 in fine, du Code civil prévoient, d’une part, que « la communauté doit [récompenser l’époux] toutes les fois qu’elle a tiré profit des biens propres », et, d’autre part, que « toutes les fois que l’un des époux a tiré un profit personnel des biens de la communauté, il en doit la récompense ». De ces définitions, l’on comprend que la « récompense » pourrait être l’exacte qualification de la contrepartie financière de l’obligation de non-concurrence dans la mesure où l’employeur tire profit du préjudice subi par le salarié, préjudice dû à l’atteinte portée à son droit de gagner sa vie par un travail librement choisi.
  • 9.
    Cass. soc., 5 mars 1986, n° 83-41618 : Bull. civ. V, n° 55.
  • 10.
    Cass. soc., 26 mai 1988, n° 85-45074 : Bull. civ. V, n° 318.
  • 11.
    Cass. soc., 16 mars 2016, n° 14-23861 : Bull. civ. V, n° 846.
  • 12.
    Pour rappel, ce seul article résume les anciens articles 1152 et 1226 à 1233 du Code civil.
  • 13.
    Même si cet arrêt ne constitue pas une nouveauté, il est néanmoins la première décision rendue par la chambre sociale de la Cour de cassation après ses arrêts de revirement de jurisprudence du 10 juillet 2002.
  • 14.
    Cass. soc., 26 sept. 2002, n° 00-40461 : Bull. civ. V, n° 283.
  • 15.
    Cass. soc., 23 juin 2010, n° 08-70233 : Bull. civ. V, n° 145 ; Dr. soc. 2010, p. 1254, obs. J. Mouly.
  • 16.
    P.-H. Antonmattei, « La qualification de salaire », Dr. soc. 1997, p. 571 ; G. Couturier, « De quoi le salaire est-il la contrepartie ? », Dr. soc. 2011, p. 10.
  • 17.
    Cass. soc., 22 mai 1986, n° 83-42341 : Bull. civ. V, n° 245.
  • 18.
    Cass. soc., 27 janv. 2021, n° 18-23535.
  • 19.
    G. Diotallevi, De quelques obligations accessoires au contrat de travail, 2014, LGDJ.
  • 20.
    L.-F. Pignarre, « Contrepartie financière de la clause de non-concurrence et droit des obligations : jeux d’influences », RDT 2009, p. 151. Cet auteur proposait de soumettre l’exigence de contrepartie financière de la clause de non-concurrence à la théorie des obligations, et plus spécifiquement à la notion de cause.
  • 21.
    Cass. soc., 15 janv. 2014, n° 12-19472 : Bull. civ. V, n° 15 ; Dr. soc. 2014, p. 288, obs. J. Mouly ; RDT 2014, p. 177, note. L. Bento de Carvalho.
  • 22.
    Pour rappel, l’article 1105 du Code civil dispose que « les contrats, qu’ils aient ou non une dénomination propre, sont soumis à des règles générales, qui sont l’objet du présent sous-titre ».
  • 23.
    P. Puig, « Droits fondamentaux et formation du contrat », in A. Pelissier et D. Costa (dir.), Contrats et droits fondamentaux, Actes du colloque d’Avignon du 12 janvier 2007, 2013, PUAM, p. 30, spéc. n° 25 : « La contrepartie financière compense directement l’atteinte. Elle en est le prix. À défaut de rendre le salarié plus libre et plus digne, elle le rend plus riche ».
  • 24.
    X. Lagarde, « Prix et salaire », in Études offertes à Jacques Ghestin, 2001, LGDJ, p. 527.
  • 25.
    G. Loiseau, « La révision de la contrepartie financière d’une clause de non-concurrence », JCP S 2021, 1285.
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