Première rentrée pour le nouveau sous-préfet d’Étampes, Stéphane Sinagoga
Tout juste débarqué de la préfecture de l’Indre où il a exercé en tant que secrétaire général, le haut fonctionnaire, Stéphane Sinagoga, a retrouvé la région parisienne où vit sa famille. Mais c’est loin des ors du centre de Paris qu’il a posé ses valises. La sous-préfecture d’Étampes, jolie bâtisse de pierre de taille, lui donne l’occasion de découvrir ce qui anime les toutes petites communes rurales d’Île-de-France, les horizons infinis des cultures de la Beauce, les champs de cresson, mais aussi les industries qui forment la dynamique de cet arrondissement de 76 communes, majoritairement constitué de (toutes) petites communes (excepté Étampes et Dourdan).
Lors de la cérémonie signant son entrée sur le territoire, devant le Monument aux Morts, au Rond-Point de la Victoire à Étampes, le Niçois d’origine s’est permis quelques mots d’introduction, pour faire la jonction entre son poste à Châteauroux et sa nomination à Étampes. « J’ai eu plaisir à travailler sur des territoires à la fois industriel et surtout agricole et j’arrive sur un poste qui se situe dans cette continuité dans le Sud-Essonne avec une part importante aux grandes cultures sur les terres de Beauce mais également des cultures spécifiques comme le cresson ». Depuis juillet, Stéphane Sinagoga n’a pas chômé et a démontré qu’il était taillé pour ce poste : « j’ai décidé de consacrer les premiers mois de mon mandat à entrer en contact avec les maires, les députés, la chambre d’agriculture, une façon de comprendre directement les besoins des collectivités et les éventuelles problématiques propres au territoire », nous explique-t-il. Rencontre avec ce sous-préfet qui prend à cœur de connaître son territoire.
Actu-Juridique : Pouvez-vous nous rappeler votre parcours, et ce qui vous a mené à la sous-préfecture d’Étampes ?
Stéphane Sinagoga : C’est un parcours assez classique. Dans le cadre de la promotion professionnelle, j’ai intégré la fonction publique dans les instituts régionaux de l’administration, via la fonction territoriale en administration centrale et en préfecture. J’ai eu une petite parenthèse en intégrant la présidence de la République pendant 5 ans, sous Nicolas Sarkozy. Puis après avoir travaillé au ministère de l’Intérieur, j’ai passé le tour extérieur des administrateurs civils, grâce à cette sélection, j’ai obtenu un détachement comme directeur de cabinet dans les Deux-Sèvres, puis je suis devenu sous-préfet de l’Indre avant de me retrouver ici.
Actu-Juridique : Quelle est la particularité de la sous-préfecture d’Étampes ? Quels sont les enjeux particuliers attachés à ces communes ?
Stéphane Sinagoga : Contrairement à certains territoires de la région, le sud-Essonne est un arrondissement très ancré dans le rural. Avec des secteurs industriels et de belles entreprises certes, mais une région qui reste très rurale dans la culture, l’esprit. Avec les plaines de la Beauce au seuil de sa porte, Étampes était la porte d’entrée du blé dans le bassin parisien, le port pour remonter les cargaisons sur la Seine. Le maillage communal est très important avec 75 communes, dont Chatignonville une commune de 66 âmes ! Il existe sur ce territoire un fort esprit communaliste : le maire reste l’administration de proximité, celui des premières considérations. C’est très exacerbé ici, ce qui signifie que l’intercommunalité est plus en retrait que dans d’autres départements…
C’est l’une des raisons qui explique le fort besoin d’accompagnement de l’État : pour ne pas se sentir isolés, les édiles sont heureux d’avoir à portée de main des fonctionnaires en capacité de leur consacrer du temps d’écoute d’accompagnement sur les projets, une ingénierie qui peut être financière mais aussi technique. C’est la volonté du gouvernement d’appuyer cette demande-là. Après les Gilets jaunes, il y a eu une forte volonté d’aller au-devant des demandes de la ruralité.
Actu-Juridique : Comment cette complexité-là s’insinue dans votre travail au quotidien ?
Stéphane Sinagoga : En Île-de-France, on a une duplicité entre zones urbaines, périurbaine et rurale. Il faut jongler avec une préoccupation grandissante sur la sécurité, que l’on peut trouver dans n’importe quelle grande agglomération comme Étampes (avec des quartiers prioritaires de la politique). Mais nous sommes aussi dans des problématiques propres à des quotidiens ou les lieux de vies sont éloignés du lieu de travail, avec Paris non loin.
Dans notre travail avec les collectivités, nous devons réfléchir à tout cela. Réfléchir et planifier les projets entre communautés, travailler sur l’attractivité du territoire pour faire venir les entreprises et réduire la distance entre le domicile et le lieu de travail. Il faut également essayer de préserver les terres agricoles, lutter contre l’artificialisation des sols qui ne va pas dans le sens de l’histoire. Nous travaillons donc ensemble pour la densification des centres bourgs, la revitalisation des centres-villes. C’est une des difficultés sur ce territoire, à cause de l’esprit communautariste, il y a très peu de plans locaux intercommunaux on doit donc mettre en place des réflexions d’ensemble sur l’attractivité du territoire, ou la gestion de la construction pour développer le sud-Essonne ensemble. C’est ce que l’on peut faire grâce à des programmes comme Action Cœur de Ville et Petites villes de demain.
Actu-Juridique : Quel est le rôle du sous-préfet dans un territoire comme le sud-Essonne ?
Stéphane Sinagoga : En premier lieu, il s’agit d’accompagner les élus et développer le territoire, c’est le fil rouge. Mais nous accompagnons également les entreprises touchées par les crises sanitaires ou économiques, accompagner des projets d’entreprises structurantes pour le territoire avec des approches de type France Relance : des projets industriels ou agricoles, des pratiques culturelles nouvelles qui peuvent entrer dans ce domaine-là. Par exemple, on essaie de promouvoir le cresson dans le sud-Essonne avec une reconnaissance de label, donc on met les producteurs main dans la main avec la chambre d’agriculture, le conseil départemental, le comité d’agglomération, le Parc naturel régional du Gâtinais et la Région. Il y a une vraie demande sociétale de consommer local et en circuit court : tous les besoins se rejoignent. C’est un bel exemple de mise en commun des forces, qui est au cœur de notre mission.
J’ai également la casquette de référent ruralité pour le département, donc j’ai comme prérogative de donner une nouvelle dynamique à l’agenda rural, questionné au travers de discussions qui ont lieu au Conseil national de la refondation. D’autres thématiques abordées entrent également en ligne de compte, notamment sur l’accès à la santé : pour trouver un pédiatre, un médecin, un kiné en zone rurale, c’est très compliqué et il faut y remédier. Puisque des efforts structurants ont été faits sur le déploiement du haut débit grâce au maillage numérique, on a désormais une solution pour les consultations à distance, des solutions de proximité, mais ce n’est pas suffisant. Même chose pour l’accès au droit et aux services. Dans l’agenda rural, on retrouve le développement de France Services (proposant un accès aux services administratifs de base, que l’on trouve en préfecture) et c’est aussi à nous de s’assurer de sa mise en place. Dans mon arrondissement, on veut en développer 26, on en est à 24 et on est en train d’en faire deux autres itinérants, pour être au plus proche des citoyens dans la cité commune Val d’Essonne et le nord ouest du département, en partenariat avec l’intercommunalité et la MSA.
Actu-Juridique : Le président de la République a annoncé la réouverture de six nouvelles sous-préfectures sur le territoire français : comment s’explique cette décision à votre sens ?
Stéphane Sinagoga : Le président veut travailler sur l’échelon infragouvernemental, remettre de la proximité dans le rapport entre les citoyens et l’accès au droit et aux services. À Étampes, on a un bel exemple : nous avons 25 agents, un accueil pour les étrangers et demandeurs d’asile, un accès France Services, un service de gestion des manifestations sur la voie publique, sur les manifestations sportives… Le principe est vraiment de simplifier l’accès aux droits et aux services. Ce que le président de la République a annoncé en Mayenne, le fait de recréer des sous-préfectures, vient d’un besoin des citoyens exprimé ces derniers mois, celui d’une proximité plus grande avec les élus dans le cadre de la gestion de crise. La sous-préfecture permet également d’être en support avec des initiatives locales, des agriculteurs, par exemple qui lancent des projets liés aux énergies renouvelables (centrales photovoltaïques, méthanisation…) qui peuvent être des solutions intéressantes sur notre territoire, dans le contexte actuel.
Référence : AJU006r6