Chronique de droit du crédit aux consommateurs (Septembre 2016-Juin 2017)
Le droit du crédit aux consommateurs, qui comprend le crédit à la consommation et le crédit immobilier, est en perpétuelle mutation. Eu égard aux très forts enjeux économiques et sociaux attachés à cette matière, le législateur n’a de cesse d’intervenir pour dégager un équilibre parfait entre stimulation de la croissance et protection de l’emprunteur. En témoignent les nombreuses réformes qui rythment le quotidien du juriste de droit bancaire, à l’exemple de l’ordonnance du 25 mars 2016 qui a récemment modifié le droit applicable au crédit immobilier. La jurisprudence n’est pas en reste et vient régulièrement corriger les équilibres recherchés par les pouvoirs publics, en se montrant parfois plus sensible que le législateur aux intérêts du consommateur… L’ensemble fournit une matière foisonnante et passionnante qui justifie pleinement cette chronique annuelle.
Éditorial
Pour ce sixième numéro de la chronique, deux textes ont attiré notre attention : la loi n° 2017-203 du 21 février 2017 ayant eu notamment des incidences en matière d’assurance-emprunteur, et l’ordonnance n° 2017-1090 du 1er juin 2017 ayant encadré les clauses de domiciliation mentionnées dans les contrats de crédit immobilier. De plus, quinze décisions à l’origine de précisions utiles ont été sélectionnées et sont ici brièvement commentées. Certaines d’entre elles reviennent sur des problèmes juridiques majeurs déjà évoqués à l’occasion de chroniques antérieures comme l’obligation de remettre au client une fiche précontractuelle d’information, l’obligation de vérification du FICP avant de consentir un crédit immobilier ou encore le point de départ du délai de forclusion de l’action en paiement du prêteur contre l’emprunteur défaillant en matière de crédit à la consommation. En outre, de nouvelles questions ont été abordées par les juges depuis un an. Citons des décisions des juges du fond concernant le devoir d’explication du banquier prêteur, l’assurance requise en matière de crédit à la consommation, ou encore les exigences relatives à la mise en demeure. Une décision importante de la CJUE du 9 novembre 2016 a également attiré notre attention du fait des précisions utiles qu’elle formule à l’égard de la transposition nationale de certaines dispositions de la directive n° 2008/48 du 23 avril 2008 concernant les contrats de crédit aux consommateurs.
I – Le crédit à la consommation
A – Champ d’application
Juridiction compétente et installation de panneaux photovoltaïques
CA Bordeaux, 10 janv. 2017, n° 16/03073.
1. Le financement de panneaux photovoltaïques draine, ces dernières années, un contentieux abondant, notamment en matière de crédit à la consommation affecté1. Voici que le débat se place désormais sur la question de la compétence de la juridiction saisie.
2. En l’espèce, la cour d’appel de Bordeaux rappelle qu’il résulte des dispositions de l’article L. 110-1 du Code de commerce que la loi répute « acte de commerce » certains actes juridiques et que, selon le 1° de ce même texte, il en va de la sorte pour « tout achat de biens meubles pour les revendre, soit en nature, soit après les avoir travaillés et mis en œuvre ». Or, les litiges relatifs à de tels actes de commerce relèvent, en vertu de l’article L. 721-3, 3°, du Code de commerce, de la compétence du seul tribunal de commerce. Dès lors, pour les juges bordelais, si la vente d’électricité ne figure pas expressément dans la lettre de ce texte, il convient de considérer, d’une part, que la liste n’est pas exhaustive, et, d’autre part, que la vente d’électricité peut être à bon droit considérée comme étant une vente d’un meuble. Ils en tirent comme conclusion que le contrat principal mis en place par l’appelante, en l’occurrence la revente intégrale à EDF de l’électricité qu’elle entendait produire par l’achat d’une installation photovoltaïque, est un acte de commerce par nature. De plus, et surtout, tant le contrat d’achat de l’installation que le contrat de prêt finançant cet achat doivent être vus comme les accessoires à un tel acte de commerce. Par conséquent, l’accessoire suivant le principal, ils présentent, pour les magistrats, une nature également commerciale.
3. Cette solution est-elle critiquable ? Nous ne le pensons pas. En effet, et cela est souligné par l’arrêt, toute l’électricité produite devait être revendue à EDF. Elle n’était pas, même partiellement, destinée à l’usage personnel de l’emprunteuse.
4. Mais la convention de crédit ne pouvait-elle pas, tout de même, être qualifiée de crédit à la consommation voire de crédit immobilier ? La cour d’appel répond à cette question par la négative. Plusieurs arguments sont mis en avant. Tout d’abord, le Code de la consommation prévoit qu’est emprunteur ou consommateur la personne physique qui est en relation avec un prêteur, mais seulement « dans le cadre d’une opération de crédit réalisée ou envisagée dans un but étranger à son activité commerciale ou professionnelle »2. De même, il n’était en l’espèce ni établi ni même allégué que l’installation aurait répondu à une amélioration de l’habitat de l’appelante au sens de l’article L. 313-1 du Code de la consommation relatif au crédit immobilier.
5. Dès lors, pour les magistrats bordelais, c’est à tort que le juge de la mise en état avait estimé que le prêt litigieux relevait des dispositions du Code de la consommation et que les autres contrats de l’espèce en devenaient les accessoires, pour renvoyer l’affaire devant le tribunal d’instance. La décision attaquée est donc confirmée en ce qu’elle avait déclaré le tribunal de grande instance de Foix incompétent, mais infirmée en ce qu’elle avait désigné pour en connaître le tribunal d’instance de Foix. L’affaire est, en conséquence, renvoyée à la connaissance du tribunal de commerce du même lieu.
6. Sur ce point également la décision est convaincante. Le crédit en question était bien destiné à financer une activité commerciale. Il échappait, dans de telles circonstances, au régime protecteur du crédit à la consommation ou du crédit immobilier. Toutefois, il n’en va ainsi que parce que toute l’électricité produite devait être revendue à EDF. Il en aurait été différemment si cette électricité avait dû être d’abord affectée à l’usage personnel de l’emprunteuse, seul l’excédent devant être vendu par la suite à EDF.
Jérôme Lasserre Capdeville
B – Publicité (…)
C – Information précontractuelle de l’emprunteur
La preuve de la remise de la fiche précontractuelle d’information
TI Aubervilliers, 18 oct. 2016, n° 11-15-001299.
1. En vertu de l’article L. 312-12, al. 1, du Code de la consommation : « Préalablement à la conclusion du contrat de crédit, le prêteur ou l’intermédiaire de crédit donne à l’emprunteur, sous forme d’une fiche d’information, par écrit ou sur un autre support durable, les informations nécessaires à la comparaison de différentes offres et permettant à l’emprunteur, compte tenu de ses préférences, d’appréhender clairement l’étendue de son engagement ». Cette obligation, issue de la loi Lagarde du 1er juillet 2010, commence à donner lieu à de la jurisprudence3.
2. Dans l’affaire qui nous occupe4, le prêteur n’était pas en mesure de démontrer qu’il avait effectivement remis à l’emprunteur cette fiche précontractuelle d’information ; il se limitait à mettre en avant une mention figurant au contrat, par laquelle l’emprunteur reconnaissait s’être vu remettre par la banque le document en question.
3. Ce mode de preuve était-il admissible ? Le tribunal d’instance d’Aubervilliers répond négativement. Il s’appuie, pour se prononcer de la sorte, sur une décision bien connue de la CJUE du 18 décembre 2014 ayant déclaré, pour mémoire, que les droits conférés par la directive n° 2008/48 du 23 avril 2008 relative au crédit à la consommation seraient compromis si la charge de la preuve de la non-exécution des obligations du prêteur pesait sur l’emprunteur, et donc qu’une clause par laquelle l’emprunteur reconnaîtrait que le prêteur a satisfait à ses obligations ne saurait valoir renversement de la charge de la preuve mais tout au plus comme élément devant être corroboré par d’autres indices5. Dans l’affaire qui nous occupe, il est rappelé sans surprise que la clause mentionnée ne démontre ni la réalité de la remise, ni le respect du contenu de la fiche. La déchéance du droit aux intérêts est alors logiquement prononcée.
Jérôme Lasserre Capdeville
D – Obligations à la charge du prêteur
Obligations d’explications et de vérification du FICP
TI Saint-Brieuc, 12 déc. 2016, n° 11-15-000530.
1. La loi n° 2010-737 du 1er octobre 2010 portant réforme du crédit à la consommation, dite loi Lagarde, est à l’origine de nouvelles obligations à la charge du banquier prêteur en matière de crédit à la consommation. Deux d’entre elles attirent notre attention ici. Tout d’abord, en vertu de l’article L. 312-14 du Code de la consommation : « Le prêteur ou l’intermédiaire de crédit fournit à l’emprunteur les explications lui permettant de déterminer si le contrat de crédit proposé est adapté à ses besoins et à sa situation financière (…). Il attire l’attention de l’emprunteur sur les caractéristiques essentielles du ou des crédits proposés et sur les conséquences que ces crédits peuvent avoir sur sa situation financière, y compris en cas de défaut de paiement (…) ». De plus, pour l’article L. 312-16 : « Avant de conclure le contrat de crédit, le prêteur vérifie la solvabilité de l’emprunteur à partir d’un nombre suffisant d’informations, y compris des informations fournies par ce dernier à la demande du prêteur ». Concernant cette dernière obligation, le prêteur est notamment tenu de consulter le fichier prévu à l’article L. 751-1 du code, c’est-à-dire le fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP). Ces deux obligations légales avaient été, semble-t-il, méconnues dans l’affaire à l’origine d’une décision du tribunal d’instance de Saint-Brieuc du 12 décembre 20166.
2. En l’espèce, une banque avait octroyé, successivement, deux crédits à la consommation à un particulier. Ce dernier ayant été défaillant à l’occasion de son remboursement, l’établissement de crédit avait prononcé la déchéance du terme pour les deux prêts et avait assigné l’emprunteur devant le tribunal d’instance dans le but d’obtenir sa condamnation au paiement du capital restant dû avec intérêt au taux contractuel, mais aussi l’application d’une clause pénale et la capitalisation des intérêts. Or, par un jugement, le tribunal d’instance de Saint-Brieuc relève d’office les manquements de la banque prêteuse aux obligations précitées d’explication et de consultation du FICP et prononce la déchéance du droit aux intérêts contractuels.
3. Ce jugement est riche d’enseignements. Tout d’abord, il rappelle qu’en vertu de l’article R. 632-1 du Code de la consommation : « Le juge peut relever d’office toutes les dispositions du présent code dans les litiges nés de son application ». Tel avait donc été le cas en l’espèce. Notons sur ce point que le juge européen fait également obligation au juge national d’examiner d’office le caractère abusif d’une clause contractuelle dès qu’il dispose des éléments de droit et de fait nécessaires à cet effet7.
4. Par ailleurs, concernant plus particulièrement l’obligation d’explication prévue par l’article L. 312-14 du Code de la consommation, il apparaissait que si le prêteur avait bien rempli la fiche d’information précontractuelle et établi des fiches de vérification de solvabilité de l’emprunteur, il n’établissait pas quelles avaient été les explications personnalisées et pertinentes fournies à l’emprunteur. Le jugement est donc important ici. Nous savions déjà, suite à une décision de la CJUE du 18 décembre 2014 mentionnée précédemment8, qu’une clause par laquelle l’emprunteur reconnaîtrait que le prêteur a satisfait à ses obligations ne saurait être vue comme un élément de preuve suffisant mais tout au plus comme une donnée devant être corroborée par d’autres indices9. Le prêteur doit donc démontrer « positivement » avoir respecté cette obligation, par exemple en produisant un document informatif signé par le client comparable à celui fourni à ce dernier. Or, sur ce point, la décision étudiée sous-entend que des explications personnalisées sont attendues. Le banquier doit, par conséquent, être vigilant : des informations simplement standardisées sont manifestement suffisantes. Tous les établissements de crédit respectent-ils actuellement cette exigence ? Nous pouvons légitimement en douter.
5. En outre, concernant le manquement à l’obligation de vérification du FICP10, le jugement est également à l’origine d’une solution attirant l’attention. Il faut noter, en effet, que la banque concernée avait bien produit une pièce intitulée « Consultation du FICP » comprenant une date et un numéro de dossier. Mais cette preuve n’est pas admise par le tribunal, dans la mesure où le document en question ne comportait ni le nom de l’emprunteur, ni le motif de la consultation et ne permettait pas de s’assurer du respect des modalités de consultation du fichier. Cette solution ne surprendra pas le lecteur. D’autres juges du fond ont déjà eu l’occasion d’affirmer que n’était pas suffisante la production d’un document informatique intitulé « Résultats interrogations Fichage FICP » ne comportant pas non plus les précisions requises, et notamment aucune référence à la Banque de France11. Ainsi, nous le voyons, seule la production d’une pièce complète et parfaitement individualisée est de nature à prouver la consultation du fichier. Cette pièce n’est cependant pas difficile à rapporter : le FICP permet aujourd’hui l’enregistrement ou l’impression d’un document tendant à démontrer la consultation effectuée. On parle classiquement de « fiche de conservation des données ». Cette preuve doit donc être privilégiée.
6. Enfin, à propos de la déchéance du droit aux intérêts prononcée, on peut noter que le tribunal d’instance de Saint-Brieuc écarte l’application des intérêts légaux. Là encore, cette solution est conforme à la jurisprudence actuelle. En effet, par un arrêt remarqué du 27 mars 201412, la CJUE était venue déclarer que le droit français, permettant en cas de déchéance du droit aux intérêts prononcée par le juge, d’appliquer les intérêts légaux ainsi qu’une majoration de cinq points à l’expiration d’un délai de deux mois à compter du jour où la décision de justice de condamnation pécuniaire est devenue exécutoire13, ne saurait être vu comme une sanction suffisamment effective, proportionnée et dissuasive dans certaines circonstances. Il en va plus particulièrement ainsi lorsque la sanction de la déchéance du droit aux intérêts « est susceptible de conférer un bénéfice au prêteur ». Dans cette hypothèse, notre droit n’est donc pas conforme à l’article 23 de la directive n° 2008/28/CE du 23 avril 2008. Il est alors recommandé à l’emprunteur, ou à son conseil, de demander au juge de ne pas prononcer l’application des intérêts légaux, ni la majoration de cinq points mentionnés plus haut. Cette solution est fréquemment appliquée aujourd’hui par les juges du fond14.
Jérôme Lasserre Capdeville
Avertissement de la Cnil pour FICP comportant des données inexactes
Cnil, avis n° SAN-2017-001, 26 janv. 2017.
1. Créé par la loi dite Neiertz du 31 décembre 1989 afin de lutter contre le surendettement, le fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP) joue un rôle majeur dans la pratique bancaire, notamment depuis que la loi dite Lagarde, du 1er juillet 2010, a imposé sa consultation au titre de l’obligation de vérification de la solvabilité de l’emprunteur15. Le volume très important des données traitées au jour le jour comme les difficultés posées par leur traitement informatique peuvent conduire à des dysfonctionnements lourds de conséquences au regard du rôle social assigné au fichier.
2. Le présent avis rendu le 26 janvier dernier16 illustre cette hypothèse en ce qu’il est dirigé contre la société Carrefour Banque et concerne plus de 38 000 clients. Il est fondé sur l’article 6-4 de la loi du 6 janvier 1978 qui prévoit qu’un traitement ne peut porter que sur des données à caractère personnel qui sont exactes, complètes et surtout mises à jour. Or, un dysfonctionnement du système d’information de l’établissement avait conduit à la désinscription et à la réinscription à une date inexacte de plusieurs milliers de personnes au FICP, et ce, parfois à plusieurs reprises.
3. La Cnil estime que la banque a manqué de diligence dans les mesures mises en œuvre, puisque le correctif technique mettant fin à cette anomalie n’est intervenu qu’en novembre 2012, soit un an après le constat de son existence par la société. Par ailleurs, la Cnil relève que ce n’est qu’après son contrôle que la société a régularisé la situation des personnes concernées, soit en septembre 2016, alors même qu’elle avait connaissance du problème technique depuis novembre 2011 et de ses conséquences sur les données à caractère personnel des clients.
4. Insistant sur le nombre de personnes impactées, les carences de la banque, le caractère national du fichier et son rôle dans la lutte contre le surendettement, la Cnil a décidé de prononcer un avertissement contre la société et de rendre sa décision publique. Les conséquences peuvent paraître dérisoires mais les banques doivent savoir que la Cnil dispose de la possibilité d’infliger des sanctions pécuniaires allant jusqu’à 150 000 ou 300 000 € en cas de réitération. Ces sanctions pourront d’ailleurs être portées à des montants bien plus élevés à compter du 25 mai 2018, date d’entrée en vigueur du règlement (UE) n° 2016/679 du 27 avril 2016 relatif aux données personnelles.
Nicolas Éréséo
E – Formation du contrat (…)
F – Mentions du contrat
Précisions sur les irrégularités liées l’assurance
TI Le Havre, 10 janv. 2017, n° 11-15-001264.
1. Cette décision, relevée par un auteur averti17, permet de rappeler quelques règles importantes concernant l’assurance souscrite par l’emprunteur en matière de crédit à la consommation.
2. En premier lieu, pour l’article L. 312-28, alinéa 1er, du Code de la consommation : « Le contrat de crédit est établi par écrit ou sur un autre support durable ». En outre, « un encadré, inséré au début du contrat, informe l’emprunteur des caractéristiques essentielles du crédit ». La liste des informations figurant dans le contrat en question est fixée par l’article R. 312-10 du code. Celui-ci vise notamment la présence dans l’encadré des « assurances exigées, le cas échéant ». L’absence d’une telle mention dans l’offre est sanctionnée de la déchéance du droit aux intérêts18.
3. En second lieu, l’article L. 312-29 du code prévoit que lorsque l’offre de contrat de crédit est assortie d’une proposition d’assurance, une notice doit être remise à l’emprunteur, celle-ci comprenant les extraits des conditions générales de l’assurance le concernant, notamment les nom et adresse de l’assureur, la durée, les risques couverts et ceux qui sont exclus. Dès lors, le prêteur qui émettrait une offre préalable assortie d’une proposition d’assurance, sans remettre à l’emprunteur cette notice subirait également la décision du droit aux intérêts19.
4. Sur ce point, la décision étudiée du tribunal d’instance du Havre vient nous dire que c’est le prêteur qui doit justifier la régularité du contrat en produisant les documents utiles, et plus particulièrement ici, la notice d’assurance. Elle déclare surtout que l’invocation par la banque d’une mention signée par les emprunteurs portant reconnaissance de ce que cette notice leur a été remise n’est pas suffisante. Cette dernière solution ne saurait surprendre le lecteur. Rappelons en effet que pour la Cour de justice de l’Union européenne, la charge de la preuve de la non-exécution des obligations du prêteur ne saurait peser sur l’emprunteur. Dès lors, une clause par laquelle l’emprunteur reconnaîtrait que le prêteur a satisfait à ses obligations ne peut être vue comme une preuve indiscutable, mais simplement comme un élément devant être corroboré par d’autres indices20. C’est donc au prêteur de démontrer « positivement » avoir respecté la ou les obligations pesant sur lui.
5. En dernier lieu, le jugement étudié précise le contenu de la sanction de la déchéance du droit aux intérêts. Rappelons que pour l’article L. 341-4 du Code de la consommation : « Le prêteur qui accorde un crédit sans remettre à l’emprunteur un contrat satisfaisant aux conditions fixées par les articles L. 312-18, L. 312-21, L. 312-28, L. 312-29, L. 312-43 ainsi que, pour les opérations de découvert en compte, par les articles L. 312-85 à L. 312-87 et L. 312-92, est déchu du droit aux intérêts ». Les intérêts déjà versés seront, quant à eux, imputés sur le capital21. Or, pour le jugement du tribunal d’instance du Havre, cette sanction de la déchéance porte aussi sur les primes d’assurance.
6. Nous ne sommes pas convaincus, quant à nous, par cette dernière solution. Certes, antérieurement à l’entrée en vigueur de la loi Lagarde, l’article L. 311-33 déclarait que « l’emprunteur n’est tenu qu’au seul remboursement du capital suivant l’échéancier prévu »22. Mais il convient de garder à l’esprit que cette disposition ne portait que sur le seul crédit à la consommation, et non les frais annexes à ce dernier. La jurisprudence a d’ailleurs déjà pu affirmer que la déchéance du droit aux intérêts ne s’étendait pas aux frais23, ou encore que le taux légal, s’appliquant depuis la mise en demeure, devait encore être payé par le débiteur24.
7. On peut penser que les magistrats havrais ont ici été influencés par une autre décision remarquée de la Cour de cassation en date du 31 mars 201125 ayant cassé la décision d’une cour d’appel qui avait estimé que la déchéance du droit aux intérêts « n’avait pas pour conséquence la répétition des frais, commissions et autres accessoires inscrits au compte » qui n’étaient pas des intérêts auxquels seule la sanction précitée s’appliquait.
8. La solution retenue par le jugement qui nous occupe va particulièrement loin ; et c’est contestable. Certes l’emprunteur doit pouvoir bénéficier d’un crédit dépourvu de tout intérêt, et donc sous cet aspect « gratuit », mais s’il a profité pour obtenir ce même crédit d’un certain nombre de services ou de prestations, nous ne voyons pas pourquoi celles-ci devraient être également gratuites. Il serait heureux que le législateur s’intéresse à cette difficulté.
Jérôme Lasserre Capdeville
G – Remboursement anticipé et défaillance de l’emprunteur (…)
H – Crédit gratuit (…)
I – Crédit affecté
Rappel des règles applicables en cas d’annulation du contrat principal
CA Riom, 18 janv. 2017, n° 14/02633.
1. Aux termes de l’article L. 312-55, alinéa 1er, du Code de la consommation26 : « En cas de contestation sur l’exécution du contrat principal, le tribunal peut, jusqu’à la solution du litige, suspendre l’exécution du contrat de crédit. Celui-ci est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vertu duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé ». Cette solution n’est cependant applicable que si le prêteur est intervenu à l’instance ou s’il a été mis en cause par le vendeur ou l’emprunteur27.
2. Dans le cas qui nous occupe, le contrat principal comportait des difficultés notables. En l’occurrence, il s’agissait d’un bon de commande signé dans le cadre d’un démarchage à domicile. Or, un tel bon de commande se trouve nécessairement soumis aux obligations de forme prévues par l’ancien article L. 121-23 du Code de la consommation28. Selon cette disposition légale, l’acte contractuel doit comporter, entre autres et à peine de nullité, l’indication de la faculté de renonciation prévue par l’article L. 121-25, ainsi que des conditions d’exercice de cette faculté, et, de façon apparente, le texte des articles L. 121-23 à L. 121-26. Surtout, l’ancien article R. 121-3 du code précise que sur l’exemplaire du contrat doit nécessairement figurer la mention : « Si vous annulez votre commande, vous pouvez utiliser le formulaire détachable ci-contre »29.
3. En l’espèce, ce formalisme n’avait pas été correctement respecté. Certes, l’exemplaire de l’acte contractuel remis à la cliente comportait un formulaire détachable conforme aux exigences réglementaires et il citait correctement le texte intégral des articles L. 121-23 à L. 121-26. Cependant, ni la mention prévue à l’article R. 121-3, ni celle concernant la faculté de renonciation prévue par l’article L. 121-25 et les modalités de son exercice ne se retrouvaient dans l’exemplaire en question. L’acte avait alors été jugé non conforme et, partant, nul.
4. Cette solution a alors une incidence sur le contrat de crédit en vertu de l’article L. 311-55 précité : il est lui-même annulé de plein droit. C’est ce que décide logiquement la cour d’appel de Riom par l’arrêt étudié. Celui-ci a alors pour intérêt de rappeler les incidences concrètes d’une telle nullité.
5. Les parties doivent ainsi être replacées dans la situation qui était la leur avant le prêt. L’emprunteuse se trouve alors tenue de restituer à la banque la somme prêtée, dans la limite du capital restant dû. La décision précise qu’une telle obligation ne peut être écartée que dans le cas d’une faute de l’établissement de crédit prêteur dans le versement de la somme en question30, « faute qui aurait pu l’exposer à payer à l’emprunteuse des dommages et intérêts ». Or, aucune faute ne pouvait être relevée en l’espèce de la part de la banque. L’emprunteuse devra, par conséquent, lui restituer le capital.
6. Sur ce point, la décision nous donne deux renseignements utiles. D’une part, le paiement de cette somme ne saurait suivre le tableau d’amortissement qui a logiquement perdu toute force obligatoire suite à l’annulation du prêt. D’autre part, la débitrice ayant déjà bénéficié de fait (en raison de la procédure) d’une suspension des paiements d’environ quatre années, rien ne justifie qu’elle puisse prétendre à présent bénéficier de délais supplémentaires.
Jérôme Lasserre Capdeville
Octroi d’un prêt manifestement nul et responsabilité de la banque
Cass. 1re civ., 8 févr. 2017, n° 15-27277.
1. Les contrats d’installation de panneaux photovoltaïques suscitent un contentieux de plus en plus nourri, comme en atteste l’arrêt rendu le 8 février 2017, par la première chambre civile de la Cour de cassation31.
2. Suite à un démarchage à domicile, des époux avaient conclu un contrat d’installation de panneaux photovoltaïques, financé par un crédit d’un montant de 20 000 €. Ils avaient assigné l’installateur du matériel et l’établissement prêteur en annulation des contrats de vente et de prêt. Les juges du fond avaient cependant condamné l’un des époux à restituer les 20 000 € à l’établissement de crédit en constatant que le mari avait signé une attestation de livraison et que lui-même et son épouse ne pouvaient ignorer que la signature de cette attestation devait conduire au déblocage du prêt et au paiement de la somme de 20 000 € à l’installateur et qu’il n’appartenait pas au prêteur de procéder à une vérification effective de l’exécution de l’obligation financée dès lors que l’emprunteur avait attesté de sa réalisation.
3. L’arrêt est cassé sur le fondement de l’article 455 du Code de procédure civile aux motifs que les juges du fond n’avaient pas répondu aux conclusions de l’époux qui « soutenait que le prêteur était privé de son droit au remboursement du capital pour avoir validé un bon de commande totalement irrégulier, ne comportant pas les mentions obligatoires prévues en cas de démarchage à domicile ni de bon de rétractation régulier, de sorte que la lecture du bon de commande aurait dû dissuader le prêteur d’accorder le prêt ».
4. À première vue, la solution rappelle les règles applicables aux crédits qui sont affectés à la conclusion d’un contrat de vente ou de prestation de services et qui organisent l’interdépendance des deux opérations, notamment en ce que les obligations de l’emprunteur ne peuvent prendre effet qu’à compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation32. Lorsque la banque débloque les fonds avant la réalisation de l’opération, elle se trouve sanctionnée en étant privée de la possibilité de demander la résolution du contrat de prêt comme conséquence de la résolution du contrat de prestation de service pour défaut d’exécution33. La restitution des fonds prêtés ne peut alors qu’être demandée qu’au prestataire et non à l’emprunteur.
5. Cependant, la cassation est prononcée en l’espèce pour simple défaut de réponse à conclusion et ne concerne pas l’hypothèse d’un déblocage fautif des fonds. Les juges du fond étaient invités par les époux à sanctionner la banque pour avoir consenti le prêt alors que le contrat de vente financé était manifestement nul. En effet, il ne respectait pas les dispositions relatives au démarchage à domicile, notamment en ce qu’il ne comprenait pas de bon de rétractation. Dans ces conditions, la banque aurait sans doute dû refuser de consentir le prêt puisque la validité de celui-ci était également menacée du fait de l’interdépendance entre les deux opérations.
Nicolas Éréséo
J – Crédit renouvelable (…)
K – Sanctions (…)
L – Procédure
La nécessité pour le prêteur de procéder à une mise en demeure
TI Aubervilliers, 18 oct. 2016, n° 11-15-001299.
1. Depuis l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, l’article 1225 du Code civil précise, en matière de clause résolutoire, que la résolution « est subordonnée à une mise en demeure infructueuse, s’il n’a pas été convenu que celle-ci résulterait du seul fait de l’inexécution. La mise en demeure ne produit effet que si elle mentionne expressément la clause résolutoire ».
2. Cette solution est déjà bien connue en droit bancaire. C’est ainsi que pour une décision remarquée de la première chambre civile de la Cour de cassation34 : « si le contrat de prêt d’une somme d’argent peut prévoir que la défaillance de l’emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme, celle-ci ne peut, sauf disposition expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier sans la délivrance d’une mise en demeure restée sans effet, précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle ». La mise en demeure est donc, en principe, un « passage obligé » pour la banque qui souhaiterait prononcer la déchéance du terme35 ; elle doit laisser une ultime chance à l’emprunteur d’échapper à sanction en lui rappelant que ce n’est qu’à défaut de régularisation de ses échéances impayées, sous un certain délai, que cette déchéance sera prononcée.
3. Dans l’affaire qui nous occupe36, et qui a déjà été mentionnée précédemment concernant la fiche précontractuelle d’information37, une mise en demeure avait bien été adressée à l’emprunteur, mais postérieurement à la déchéance du terme. Cela n’était donc pas admissible. En outre, il apparaissait que cette mise en demeure n’informait pas correctement l’emprunteur des conséquences de son manquement concernant les paiements, et il ne lui était pas accordé de délai pour éviter la déchéance du terme. En conséquence, le tribunal d’instance d’Aubervilliers déclare la déchéance du terme non acquise. Le prêteur devra continuer à exécuter le contrat, et donc payer les échéances dues, selon les modalités prévues.
4. En l’espèce, du fait d’autres manquements du prêteur, concernant plus particulièrement la fiche précontractuelle d’information38, la déchéance du droit aux intérêts avait également été prononcée par le jugement. Dès lors, une nouvelle question se posait : comment concilier cette déchéance du droit aux intérêts avec la remise en cause de la déchéance du terme retenue aussi ?
5. Le jugement décide fort logiquement d’imposer à l’emprunteur le paiement au prêteur de la somme de 1 225 €, ce qui correspond au montant des mensualités échues impayées, déduction faite des intérêts. Il précise encore que cette somme ne produira pas d’intérêts au taux légal. Nous reconnaissons ici l’importante solution issue de la décision de la Cour de justice de l’Union européenne du 27 mars 201439 mentionnée dans un précédent commentaire40
Jérôme Lasserre Capdeville
Point de départ du délai de forclusion en cas de prélèvements opérés sur un compte courant
Cass. 1re civ., 25 janv. 2017, n° 15-21453.
1. Pour l’article R. 312-35 du Code de la consommation : les actions en paiement engagées devant le tribunal d’instance « à l’occasion de la défaillance de l’emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l’événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion ». Ce délai à un point de départ variable selon les circonstances.
2. Face à la brièveté de ce délai de forclusion, les banquiers tentent parfois d’en empêcher l’écoulement par certaines « pratiques » qui ne sont cependant pas approuvées par la Cour de cassation. C’est ainsi que pour plusieurs décisions récentes une « annulation de retard »41 ou un report d’échéance42 ne sauraient avoir d’incidence sur ce délai. Il est vrai que, dans de tels cas, le prêteur ne renonce pas à sa créance : il réalise simplement un report de la mensualité impayée. La dette demeure, mais son exigibilité est décalée dans le temps. Cela entraîne d’ailleurs, concrètement, une prolongation de la durée de remboursement du prêt et occasionne, souvent, des frais supplémentaires.
3. Concernant ce délai de forclusion, une décision de la première chambre civile de la Cour de cassation du 25 janvier 201743 attire l’attention. Par cet arrêt, la haute juridiction considère qu’en l’absence de convention de découvert, le prêteur ne peut faire obstacle à la forclusion biennale en procédant artificiellement au paiement de plusieurs mensualités en les prélevant sur le compte alors que le solde se trouvait débiteur. Elle déclare ainsi « qu’il ne peut être fait échec aux règles d’ordre public relatives à la détermination du point de départ biennal de forclusion propre au crédit à la consommation par l’inscription de l’échéance d’un prêt au débit d’un compte courant dont le solde est insuffisant pour en couvrir le montant, quand aucune convention de découvert n’a été préalablement conclue ».
4. Cette solution, qui a déjà été retenue par le passé44, témoigne du fait que les prêteurs ne sauraient trop facilement écarter la mise en œuvre du délai de forclusion prévu par le législateur. Il est vrai que la règle en question est d’ordre public. Ainsi, trois situations doivent être distinguées. En premier lieu, si le solde du compte courant du client est créditeur, le prêteur peut faire obstacle à la forclusion biennale en y prélevant le montant des mensualités impayées. En second lieu, il en va de même si le compte en question est débiteur, mais qu’une convention de découvert a été prévue et que son montant n’est pas dépassé. En revanche, et en dernier lieu, si en cas de solde débiteur du compte courant aucune convention de découvert n’a été passée entre les parties (ou que son montant maximum est atteint), il n’est pas possible pour le banquier de retarder le point de départ du délai de forclusion applicable en la matière par des prélèvements opérés sur le compte. La Cour de cassation cherche donc à neutraliser l’effet « classique » du compte courant en présence d’un consommateur, et ce afin d’assurer l’effectivité de la forclusion.
Jérôme Lasserre Capdeville
Point de départ du délai de forclusion en cas de découvert tacite
Cass. 1re civ., 9 juin 2017, n° 16-15140.
1. Le point de départ du délai de forclusion propre au crédit à la consommation a soulevé, par le passé, un grand nombre d’interrogations. Certes, aujourd’hui, l’article R. 312-35 du Code de la consommation est relativement précis, puisque ce point de départ varie en fonction des circonstances. Il s’agira, selon les cas, de la date du « non-paiement des sommes dues à la suite de la résiliation du contrat ou de son terme » ; de la date du « premier incident de paiement non régularisé » ; de la date du « dépassement non régularisé du montant total du crédit consenti dans le cadre d’un contrat de crédit renouvelable » ou enfin de la date du « dépassement, au sens du 13° de l’article L. 311-1, non régularisé à l’issue du délai prévu à l’article L. 312-93 ». En revanche, antérieurement à la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, dite loi Lagarde, le droit applicable, en l’occurrence l’ancien article L. 311-37 du Code de la consommation, ne donnait pas tant de précisions à propos de ce point de départ du délai de forclusion. Il revenait alors à la jurisprudence de clarifier l’état du droit. Une décision rendue le 9 juin 201745 par la haute juridiction le rappelle.
2. En l’espèce, un couple avait ouvert, le 19 janvier 2005, un compte courant dans les livres d’une banque, sans autorisation de découvert. Le 28 février 2006, la banque leur avait consenti deux prêts de 37 500 € chacun, remboursables l’un par trimestrialités, l’autre par mensualités. Or, le 23 mars 2011, la banque avait finalement prononcé la déchéance du terme des prêts et mis en demeure les époux X de lui rembourser le montant du solde débiteur du compte ainsi que le montant des prêts. Par actes du 11 avril 2011, elle les avait assignés en paiement.
3. Le cas du découvert nous intéressait plus particulièrement ici46. Il s’agissait en l’occurrence d’un dépassement d’un découvert tacite, c’est-à-dire le « dépassement » désormais défini par l’article L. 311-1, 13°, du Code de la consommation. Les juges du fond avaient décidé, pour déclarer prescrite l’action de la banque en paiement du solde débiteur du compte, que lorsqu’une banque consent à son client des avances de fonds pendant plus de trois mois, ce découvert en compte constitue une ouverture de crédit et le délai de prescription commence à courir au terme du troisième mois suivant la date à laquelle le compte est devenu débiteur de façon continue.
4. Or cette solution n’est pas du tout partagée par la haute juridiction qui casse la décision précitée. Pour la Cour de cassation, « en statuant ainsi, alors que, dans le cas d’un découvert en compte consenti tacitement par la banque, le point de départ du délai de forclusion court à compter de la date d’exigibilité du solde débiteur du compte, constituée par la date à laquelle, à défaut de résiliation, le paiement a été sollicité par la banque, la cour d’appel a violé » l’article L. 311-37 applicable antérieurement à la loi Lagarde.
5. Cette solution échappe, a priori, à la critique. Elle est ainsi conforme à la jurisprudence rendue sur ce point47, qui donnait beaucoup de pouvoirs au banquier prêteur. Celui-ci était maître de ce point de départ du délai de forclusion en décidant de la résiliation du compte en banque accompagné du découvert ou plus simplement en sollicitant le paiement au débiteur. Il suffisait donc finalement au prêteur de ne pas solliciter le paiement ou de ne pas résilier le compte pour que le délai de forclusion ne commence pas à courir.
6. Notons qu’aujourd’hui la solution légalement prévue s’écarte nettement de cette jurisprudence : le point de départ se situe au moment du « dépassement, au sens du 13° de l’article L. 311-1 », c’est-à-dire du dépassement n’ayant pas fait l’objet d’une convention expresse de découvert « non régularisé à l’issue du délai prévu à l’article L. 312-93 », soit trois mois. La solution légale actuelle est donc, finalement, bien plus proche de celle retenue par les juges du fond dans l’affaire qui nous occupe. L’évolution du droit est alors notable sur ce point.
Jérôme Lasserre Capdeville
M – Autres
Conformité des législations nationales à la directive n° 2008/48/CE du 23 avril 2008
CJUE, 9 nov. 2016, n° C-42/15, Home Credit Slovakia a. s. c/ K. B.
1. Le droit applicable aux crédits consentis à des particuliers évolue sous l’influence croissante du droit européen. Les règles relatives aux crédits à la consommation doivent en particulier tenir compte de la directive n° 2008/48/CE du 23 avril 2008 qui a opéré une harmonisation complète et impérative dans un certain nombre de domaines-clés afin d’assurer à tous les consommateurs de l’Union un niveau élevé et équivalent de protection de leurs intérêts mais également afin de faciliter l’émergence d’un marché intérieur performant du crédit à la consommation grâce à l’uniformisation des contraintes légales pesant sur tous les prêteurs48.
2. La directive accorde cependant quelques marges de manœuvre aux États membres en ne régissant pas certaines questions telles que celles qui concernent la validité du contrat ou les incidents d’exécution ou en se contentant de fixer des exigences très générales comme en matière de sanction. En pratique, la distinction entre le permis et l’interdit est souvent délicate à opérer et les juridictions n’hésitent pas à solliciter la Cour de justice lorsqu’elles doutent de la validité de la législation nationale applicable, comme l’illustre une nouvelle fois l’arrêt rendu le 9 novembre 2016 en réponse à plusieurs questions préjudicielles posées par une juridiction slovaque49.
3. Cette dernière avait été saisie par un prêteur qui sollicitait le remboursement anticipé du capital prêté dans le cadre d’un crédit à la consommation ainsi que le paiement d’intérêts et de pénalités de retard. Doutant de la validité du contrat, notamment en ce que les conditions générales associées au crédit n’avaient pas été signées par l’emprunteur, la juridiction nationale avait saisi la Cour de justice de plusieurs questions concernant la portée du formalisme prévu par la directive comme les sanctions prévues en cas de violation, le droit slovaque prévoyant la perte des intérêts et des frais.
4. S’agissant du formalisme, l’arrêt rendu par la Cour de justice ne manquera pas de réjouir la place bancaire en ce qu’il témoigne d’une souplesse plutôt inattendue. En l’espèce, le contrat signé par les parties renvoyait à des conditions générales de vente qui prévoyaient que l’emprunteur pouvait à tout moment demander un relevé de compte sous la forme d’un tableau d’amortissement indiquant les paiements dus ainsi que les périodes et les conditions de paiement de ces montants mais sans précision des proportions dans lesquelles chaque versement mensuel effectué par l’emprunteur à titre de remboursement de prêt serait destiné, d’une part, à payer les intérêts et les frais et, d’autre part, à amortir le capital.
5. La question se posait de savoir si les mentions obligatoires prévues par l’article 10§ 2 de la directive devaient apparaître sur un document unique ou pouvaient être éclatées sur plusieurs supports et, dans ce cas, si ceux-ci devaient ou non impérativement être signés par les parties. En réponse, la Cour de justice a rappelé que la directive se contentait d’exiger que les contrats de crédit soient établis « sur un support papier ou sur un autre support durable » et fassent apparaitre une série de mentions obligatoires.
6. En revanche, rien dans la directive n’impose que les contrats soient établis sur un document unique. Les mentions exigées par la directive peuvent ainsi être réparties sur plusieurs supports (conditions générales, tarifs, échéanciers, etc.) de nature différente (papier ou autre support durable50) mais à la condition que le contrat « contienne un renvoi clair et précis aux autres supports papier ou aux autres supports durables contenant ces éléments », supports qui doivent être « effectivement remis au consommateur préalablement à la conclusion du contrat, de manière à lui permettre de connaître réellement l’ensemble de ses droits et de ses obligations »51. Ces limites posées par la Cour de justice rappellent l’article R. 212-1, 1° du Code de la consommation qui répute non écrite les clauses ayant pour objet ou pour effet de « constater l’adhésion du consommateur à des clauses qui ne figurent pas dans l’écrit qu’il accepte ou qui sont reprises dans un autre document auquel il n’est pas fait expressément référence lors de la conclusion du contrat et dont il n’a pas eu connaissance avant sa conclusion ».
7. Quant aux exigences entourant la signature des documents, la Cour de justice a pris acte du silence de la directive en estimant qu’elle n’imposait pas que les supports papiers ou les autres supports durables constitutifs du contrat soient signés par les parties. Par corollaire, la directive ne s’oppose pas à ce que de telles exigences soient prévues par une loi nationale de transposition qui pourrait par exemple exiger la signature des conditions générales de l’établissement comme condition de validité du crédit.
8. Ces solutions conduisent ainsi à un net affaiblissement de l’objectif d’harmonisation attaché à la directive ; les établissements pouvant être amenés à adapter leurs supports et leurs pratiques suivant la législation nationale applicable au contrat. En outre, elles permettent l’éclatement des informations dues au consommateur sur plusieurs supports. Celles-ci doivent certes être portées à sa connaissance de « façon claire et concise » comme l’exige la directive mais la Cour de justice n’en tire que des conséquences minimales en n’exigeant pas un regroupement dans un document unique de l’ensemble des prescriptions informatives dont le consommateur a besoin.
9. Cependant, s’agissant du contenu même des informations exigées par la directive, la Cour de justice a fait preuve d’une plus grande rigueur en posant certaines limites aux libertés des États membres. La Cour a notamment éclairci le point de savoir s’il était nécessaire que le contrat de crédit indique chaque paiement à effectuer par le consommateur par référence à une date précise, ou bien s’il était suffisant de prévoir une référence générale, dans ce contrat, permettant au consommateur d’identifier les dates de ces paiements. Pour la Cour, il suffit que le consommateur puisse, sur la base des informations communiquées, déterminer lui-même mais avec certitude les dates qui le concernent pour que les exigences de la directive soient respectées. Pour autant, que dire d’une législation nationale qui irait plus loin en exigeant la mention précise des dates ? Malheureusement, la Cour n’indique pas si cette législation serait contraire à la directive…
10. Elle est plus explicite en ce qui concerne le point de savoir si le contrat de crédit à durée fixe, prévoyant l’amortissement du capital par les paiements consécutifs, devait préciser, sous la forme d’un tableau d’amortissement, quelle part de chaque paiement sera affectée au remboursement de ce capital. La Cour a relevé que la directive prévoyait que cette information devait être communiquée seulement si le consommateur la demande au cours de la durée du contrat, le prêteur devant alors lui transmettre sans frais un relevé sous la forme d’un tableau d’amortissement. En revanche, un tel tableau n’a pas à figurer dans le contrat de crédit et une législation nationale qui prévoirait une telle obligation serait contraire à la directive.
11. Mais c’est sur la question des sanctions susceptibles d’être prévues par la législation nationale en cas de violation du formalisme découlant de la directive que l’apport de l’arrêt rendu par la Cour de justice est le plus notable. La Cour a rappelé que la directive laisse les États membres libres d’établir les sanctions de leur choix sous réserve qu’elles soient « effectives, proportionnées et dissuasives ». L’exigence d’une sanction effective et dissuasive avait déjà été illustrée par une précédente affaire fortement remarquée qui s’était prononcée sur les dispositions nationales prévoyant, en dépit de la déchéance du droit aux intérêts, l’application du taux légal majoré de 5 points, deux mois après la décision de justice portant condamnation du débiteur52.
12. En l’espèce, c’est la condition de proportionnalité qui a été examinée par la Cour en réponse à la juridiction slovaque qui était confrontée à une disposition nationale conduisant à priver le prêteur de tout frais ou intérêts. La Cour de justice a livré une réponse nuancée en énonçant que la directive ne s’opposait pas à ce que l’absence d’une des mentions prévues à l’article 10, § 2, puisse être sanctionnée par la déchéance des frais et intérêts mais « pour autant qu’il s’agisse d’un élément dont l’absence est susceptible de mettre en cause la possibilité pour le consommateur d’apprécier la portée de son engagement »53. Elle invite alors les juges nationaux à opérer un tri au sein des informations obligatoires en distinguant celles qui sont essentielles au consentement du prêteur de celles qui doivent être tenues pour davantage secondaires.
13. Le droit français n’ignore pas une telle manière de procéder. Par exemple, pour l’application de la loi dite Doubin prévoyant la remise d’un document d’information précontractuelle à certains distributeurs54, les juges ne décident d’annuler le contrat qu’en présence d’omissions ou d’inexactitudes frappant les informations les plus sensibles exigées par le décret d’application55.
14. Reste à pouvoir opérer un tri s’agissant des informations prévues par l’article 10, § 2, de la directive et la Cour de justice donne des pistes en ce sens. Ainsi, elle considère comme a priori essentiels des éléments tels que le taux annuel effectif global, le nombre et la périodicité des paiements, ainsi que, le cas échéant, l’existence des frais notariaux, les sûretés et les assurances exigées56. À l’inverse, les informations concernant le nom et l’adresse de l’autorité de surveillance compétente exigées par l’article 10, § 2, v), de la directive apparaissent plus secondaires.
15. Doit-on pour autant enfermer dans l’une ou l’autre de ces qualifications telle ou telle catégorie d’information ou faut-il apprécier chaque manquement en fonction des circonstances propres à chaque espèce ? La Cour ne donne aucune réponse explicite mais la logique qui sous-tend l’arrêt invite à apprécier au cas par cas l’impact du manquement litigieux sur le consentement de l’emprunteur, sans s’arrêter à la seule nature de l’information concernée.
16. Il convient déjà de ne pas traiter l’omission pure et simple d’une information de la même manière qu’une mention présente mais entourée d’inexactitude. Par exemple, en matière de TAEG, si l’absence pure et simple de mention doit nécessairement justifier une sanction énergique57, l’hypothèse d’une simple inexactitude mérite certainement de déboucher sur une approche casuistique. En effet, de ce que la Cour mentionne le TAEG comme un élément a priori essentiel, il ne saurait s’en déduire que toute inexactitude, même mineure, doive emporter des conséquences fortement préjudiciables aux intérêts du prêteur, notamment lorsque le taux comporte une erreur favorable à l’emprunteur58.
17. Quelle que soit l’interprétation retenue des directives posées par la Cour de justice, le droit français du crédit à la consommation n’est en l’état pas en mesure de les recevoir. En effet, il n’opère actuellement aucune distinction légale selon les mentions informatives de l’article L. 312-28 du Code de la consommation, toute omission conduisant nécessairement à la déchéance totale du droit aux intérêts59. Dans le domaine du crédit immobilier, la jurisprudence récente de la Cour de cassation fait preuve d’une plus grande souplesse tant elle semble avoir déjà intégré le principe de proportionnalité en s’attachant à ne pas sanctionner les inexactitudes manifestement insusceptibles d’avoir affecté le consentement de l’emprunteur. Par exemple, la jurisprudence refuse à l’emprunteur d’invoquer une erreur de taux effectif global lorsque celle-ci n’en affecte pas la première décimale, il est vrai à la faveur d’une disposition réglementaire60. Une autre décision estime qu’une erreur de TEG en faveur de l’emprunteur ne saurait être sanctionnée par la nullité de la clause prévoyant le taux conventionnel et sa substitution au taux légal61.
18. Certes, ces décisions demeurent assez rares et la jurisprudence a toujours refusé de consacrer un véritable principe de proportionnalité, en s’appuyant par exemple sur le droit au respect de ses biens prévu par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme62. Bien que rendu dans le contexte du crédit à la consommation, l’arrêt rendu en l’espèce par la Cour de justice pourrait inciter les juges français à consacrer demain un véritable contrôle de proportionnalité valable pour l’ensemble du droit des crédits. Les réflexions récentes invitant à repenser les méthodes de motivation retenues par la Cour de cassation offrent d’ailleurs un terrain propice à l’extension du principe de proportionnalité63.
Nicolas Éréséo
II – Le crédit immobilier
A – Champ d’application
Le financement d’une activité professionnelle ne peut pas être un crédit immobilier
Cass. 1re civ., 12 oct. 2016, n° 15-20487.
1. L’article L. 311-1, 2°, du Code de la consommation définit comme l’emprunteur protégé par les dispositions intéressant le crédit à la consommation et le crédit immobilier « toute personne physique qui est en relation avec un prêteur, ou un intermédiaire de crédit, dans le cadre d’une opération de crédit réalisée ou envisagée dans un but étranger à son activité commerciale ou professionnelle ». La finalité du crédit a donc une grande importance ici. Quelques juridictions du fond l’oublient parfois et la haute juridiction se voit dans l’obligation de leur rappeler cette règle. Une décision du 12 octobre 2016 l’illustre parfaitement64.
2. Les faits étaient des plus classiques. Un établissement de crédit avait consenti à un couple un prêt immobilier destiné à acquérir un lot de copropriété en l’état futur d’achèvement. Or, ayant prononcé le 6 décembre 2010 la déchéance du terme, la banque avait fait pratiquer une saisie-attribution sur le contenu du compte bancaire du couple. Cependant, cette procédure d’exécution forcée était contestée en justice par les emprunteurs. Ainsi, pour annuler cette mesure, les juges du fond avaient considéré que le prêt litigieux « n’était pas destiné à financer une activité professionnelle » et qu’en conséquence, la prescription biennale de la créance était ici acquise.
3. Rappelons ici que pour l’article L. 218-2 du Code de la consommation65 : « L’action des professionnels, pour les biens ou les services qu’ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans ». Cette règle fait l’objet d’une jurisprudence particulièrement abondante depuis quelques années66.
4. Or, la solution retenue par les juges du fond est cassée par la haute juridiction. Selon cette dernière, « M. et Mme X avaient souscrit le prêt litigieux à fin d’acquérir un lot de copropriété destiné à la location au sein d’une résidence hôtelière et que l’époux était inscrit au registre du commerce et des sociétés en tant que loueur en meublé professionnel, ce dont il résultait que le prêt litigieux était destiné à financier une activité professionnelle, fût-elle accessoire, exclusive de la prescription biennale applicable au seul consommateur ».
5. Cette décision échappe selon nous à la critique. D’une part, les dispositions législatives régissant le crédit immobilier ne peuvent pas s’appliquer aux cas dans lesquels les crédits ont été accordés dans un but professionnel. Cette règle est expressément envisagée par l’article L. 313-2, 2°, du Code de la consommation67. D’autre part, l’article L. 218-2 du code ne visant que « les consommateurs », il ne peut s’appliquer qu’aux personnes physiques définies par l’article préliminaire du Code de la consommation comme « toute personne physique qui agit à des fins qui n’entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole ».
6. En revanche, concernant toujours ce délai de prescription, rappelons que, pour une décision rendue le 22 septembre 201668, ne perd pas la qualité de consommateur la personne qui, agissant à des fins qui n’entrent pas dans le cadre d’une activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale, souscrit un prêt de nature spéculative. Ce dernier est donc en droit d’invoquer le bénéfice du délai de prescription mentionné à l’article L. 218-2 du Code de la consommation.
Jérôme Lasserre Capdeville
B – Publicité (…)
C – Information précontractuelle de l’emprunteur (…)
D – Obligations à la charge du prêteur (…)
E – Formation du contrat (…)
F – Mentions du contrat
L’encadrement juridique des clauses de domiciliation des revenus en matière de crédit immobilier
Ordonnance n° 2017-1090 du 1er juin 2017 relative aux offres de prêt immobilier conditionnées à la domiciliation des salaires ou revenus assimilés de l’emprunteur sur un compte de paiement69
1. La clause de domiciliation des salaires et des revenus au sein de l’établissement prêteur en matière de crédit immobilier est la stipulation aux termes de laquelle l’emprunteur s’engage à faire verser son salaire ou son traitement, voire ses principaux revenus s’il n’est pas salarié ou fonctionnaire, sur un compte ouvert dans les livres de la banque lui ayant octroyé le crédit70.
2. Jusqu’ici, ces clauses n’étaient guère régies par le droit. Seule la recommandation n° 04-03 du 27 mai 2004 de la Commission des clauses abusives était venue déclarer que de telles clauses pouvaient apparaître déséquilibrées, et donc abusives, si l’obligation de l’emprunteur n’était « accompagnée d’aucune contrepartie individualisée » à son profit71. Or, les clauses de domiciliation pouvant notamment perturber les nouvelles règles privilégiant la « mobilité bancaire »72, la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016, dite Sapin 2 a habilité le gouvernement à encadrer ce type de clauses par la voie de l’ordonnance. L’ordonnance n° 2017-1090 du 1er juin 2017 relative aux offres de prêt immobilier conditionnées à la domiciliation des salaires ou revenus assimilés de l’emprunteur sur un compte de paiement a été adoptée en ce sens.
3. Cette ordonnance entrera en vigueur le 1er janvier 2018 et s’appliquera aux offres de prêt émises à compter de cette date ainsi qu’aux avenants modifiant les contrats conclus à la suite de ces offres. Elle n’aura pas d’incidence, en revanche, sur les contrats de prêt en cours, ni les offres émises jusqu’au 31 décembre 2017. Elle prévoit quatre « nouveautés » notables de nature à régir les clauses de domiciliation.
4. Tout d’abord, ce texte encadre les conditions dans lesquelles l’offre de crédit peut être subordonnée à une clause de domiciliation « des salaires ou revenus assimilés », c’est-à-dire des revenus réguliers, sur un compte de paiement ouvert auprès du prêteur en question. Ce dernier doit, dans ce cadre, consentir un avantage individualisé en contrepartie d’une telle clause73. L’avantage sera, le plus souvent, un taux préférentiel, mais on peut également imaginer une réduction de frais bancaires. Nous retrouvons ici la solution dégagée, il y a plus de 10 ans, dans la recommandation n° 04-03 du 27 mai 2004 de la Commission des clauses abusives.
5. De plus, cette domiciliation est limitée dans le temps74. Cette durée ne pourra ainsi excéder une période suivant la conclusion du contrat de prêt, ou le cas échéant de la conclusion de l’avenant au contrat de crédit initial. Cette période vient d’être fixée à 10 ans par le décret n° 2017-1099 du 14 juin 201775. À l’issue de ce délai, l’avantage individualisé consenti aux emprunteurs sera considéré comme définitivement acquis au prêteur, et ce jusqu’au terme du contrat de crédit immobilier. En revanche, si le client ne respecte pas son engagement, la banque pourra supprimer l’avantage consenti pour l’ensemble des échéances restantes.
6. En outre, l’emprunteur se voit reconnaître le bénéfice d’une information renforcée. Le prêteur doit ainsi préciser dans l’offre de prêt, ou le cas échéant dans l’avenant au contrat de prêt initial, la nature de l’avantage individualisé accordé en contrepartie de la clause précitée, le taux ou toute autre condition au regard duquel cet avantage est établi et qui serait appliqué si cette condition n’était pas remplie, la conséquence en cas de non-respect et enfin, le cas échéant, les frais d’ouverture et de tenue du compte sur lequel les salaires sont domiciliés76. Cette transparence est heureuse. Par son intermédiaire, le client saura ce qu’il gagne à domicilier ses revenus réguliers dans la banque prêteuse, et ce qu’il perd s’il ne respecte pas son engagement.
7. Enfin, l’ordonnance prévoit une sanction applicable à la clause de domiciliation qui ne comprendrait pas d’avantage individualisé pour l’emprunteur ou dont la durée excéderait 10 ans : elle est réputée non écrite dans de tels cas77. Elle est donc assimilée à une clause abusive de la liste noire. Nous retrouvons là la solution prônée par la recommandation n° 04-03 du 27 mai 2004 de la Commission des clauses abusives.
Jérôme Lasserre Capdeville
Évolution du droit régissant l’assurance-emprunteur
Loi n° 2017-203 du 21 février 2017 ratifiant les ordonnances n° 2016-301 du 14 mars 2016 relative à la partie législative du Code de la consommation et n° 2016-351 du 25 mars 2016 sur les contrats de crédit aux consommateurs relatifs aux biens immobiliers à usage d’habitation et simplifiant le dispositif de mise en œuvre des obligations en matière de conformité et de sécurité des produits et services78
1. Les crédits aux consommateurs ont été concernés par des réformes majeures en 2016, et plus précisément par l’intermédiaire des ordonnances n° 2016-301 du 14 mars 2016 relative à la partie législative du Code de la consommation79 et n° 2016-351 du 25 mars 2016 sur les contrats de crédit aux consommateurs relatifs aux biens immobiliers à usage d’habitation80. Or ces textes, particulièrement importants pour notre matière, devaient encore faire l’objet d’une loi de validation afin qu’ils puissent se voir reconnaître valeur législative. La loi n° 2017-203 du 21 février 2017 a été adoptée en ce sens.
2. Cette dernière attire l’attention81. Outre les réajustements qu’elle prévoit à l’égard du droit actuellement applicable au crédit à la consommation82 et au crédit immobilier83, la loi du 21 février 2017 vient renforcer les mesures en faveur du client en matière d’assurance-emprunteur.
3. On se souvient que la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016, dite loi Sapin 2, avait prévu un droit de résiliation annuel de l’assurance-emprunteur par l’assuré mettant ainsi un terme à la jurisprudence posée par la Cour de cassation dans une décision remarquée du 9 mars 2016 ayant estimé que l’ancien article L. 312-9 du Code de la consommation devait prévaloir sur l’article L. 113-12 du Code des assurances84. Cependant, par sa décision n° 2016-741 DC du 8 décembre 2016, le Conseil constitutionnel avait estimé que cette mesure, ajoutée à l’occasion des débats devant le Parlement, n’était pas en relation directe avec une disposition restant en discussion. Dit plus simplement, il avait relevé ici un « cavalier législatif »85.
4. Sans surprise, le législateur a profité de la loi du 21 février 2017 pour réitérer cette mesure. Désormais, l’article L. 313-30 du Code de la consommation prévoit la possibilité pour l’assuré de faire usage de son droit de résiliation annuel mentionné à l’article L. 113-12 du Code des assurances et à l’article L. 221-10 du Code de la mutualité. Dans ce cas, le prêteur ne peut refuser en garantie un autre contrat d’assurance dès lors que ce contrat présente un niveau de garantie équivalent au contrat d’assurance de groupe résilié de la sorte. L’article L. 313-31 est également retouché pour laisser une place à cette hypothèse. L’évolution en question est applicable aux offres de prêts émises depuis le 22 février 2017. Cependant, à compter du 1er janvier 2018, elle sera également opposable aux contrats d’assurance en cours d’exécution à cette date.
5. Cette solution est alors particulièrement importante. Alors que dans 85 % des cas, les ménages ont pris leur assurance-emprunteur auprès de la banque prêteuse, cette nouvelle règle peut potentiellement avoir un impact sur le marché. Selon les estimations, entre 600 millions et 1,4 milliards d’euros de prime d’assurance pourraient ainsi changer de mains86.
Jérôme Lasserre Capdeville
Erreur du TEG favorable à l’emprunteur
Cass. 1re civ., 12 oct. 2016, n° 15-25034.
1. Encouragés par quelques officines spécialisées, nombreux sont les prêteurs qui excipent l’irrégularité du TEG afin d’obtenir la plus alléchante des conséquences : la nullité de la clause prévoyant le taux conventionnel et l’application corrélative du taux légal dont le niveau est assez bas depuis quelques années ou encore la déchéance du droit aux intérêts. La jurisprudence assimile en effet l’erreur affectant la mention du TEG à son absence pure et simple pour lui appliquer la même sanction, provoquant un effet d’aubaine évident87. Dans ce contexte, le contentieux ne cesse évidemment de s’amplifier et la jurisprudence récente tend à manifester un certain agacement devant l’audace croissante des plaideurs comme en témoigne l’arrêt rendu le 12 octobre dernier par la première chambre civile de la Cour de cassation88.
2. En l’espèce, des époux emprunteurs invoquaient la nullité de la stipulation d’intérêts en faisant valoir que le TEG avait été majoré par erreur par la banque, celle-ci ayant affiché un taux de 6,42 % alors qu’il s’établissait en réalité à 6,32 %. Ainsi, alors que le contentieux concerne généralement l’hypothèse d’un taux minoré par la banque, l’espèce témoignait au contraire d’une erreur favorable à l’emprunteur.
3. Fallait-il appliquer la même sanction ? La cour d’appel avait répondu par la négative en rejetant les prétentions des emprunteurs et elle est approuvée en ces termes par la Cour de cassation : « ayant relevé que les emprunteurs arguaient d’un taux effectif global inférieur à celui qui était stipulé, de sorte que l’erreur alléguée ne venait pas à leur détriment, la cour d’appel a, par ce seul motif, à bon droit, statué comme elle l’a fait ».
4. En opportunité, la solution mérite d’être approuvée tant il apparaît nécessaire aujourd’hui, d’une part, de décourager les recours inspirés par l’effet d’aubaine et l’esprit de chicane et, d’autre part, de ne pas sanctionner les prêteurs qui, de bonne foi c’est-à-dire simplement par prudence, auraient intégré dans le calcul du TEG des éléments ne devant pas y figurer.
5. En droit, la solution invitera peut-être à reconsidérer le fondement des sanctions entourant l’inexactitude du TEG. Jusqu’ici, la jurisprudence estimait que la nullité de l’intérêt conventionnel ne se fondait pas sur l’erreur de l’emprunteur quant à la rémunération du prêteur mais sur l’absence de consentement quant au coût total du crédit89. Or, une telle approche conduisait à sanctionner mécaniquement toute absence de mention ou toute inexactitude sans vérification de leur impact sur la décision de l’emprunteur90.
6. L’arrêt rendu le 12 octobre 2016 invite au contraire à s’inspirer des principes classiques gouvernant la théorie des vices du consentement qui s’opposent à toute sanction lorsqu’il est établi que le demandeur aurait contracté en présence comme en l’absence de l’information inexacte. En outre, il rejoint la jurisprudence récente de la Cour de justice qui, dans le domaine du crédit à la consommation, invite les juges nationaux à sanctionner l’absence des mentions exigées par la directive de 2008 seulement lorsqu’il s’agit « d’un élément dont l’absence est susceptible de mettre en cause la possibilité pour le consommateur d’apprécier la portée de son engagement »91. De telles solutions méritent d’être généralisées en ce qu’elles permettent d’assurer un juste équilibre entre les objectifs de protection de l’emprunteur et la nécessaire préservation des intérêts des prêteurs.
Nicolas Éréséo
TEG et frais dus au titre de la période préfinancement
Cass. 1re civ., 14 déc. 2016, n° 15-26306.
1. La question du calcul du TEG suscite un contentieux de plus en plus nourri comme en atteste une nouvelle fois l’arrêt rendu le 14 décembre dernier par la première chambre civile qui est promis à une publication au Bulletin92. Rappelons que le TEG est le taux réellement pratiqué pour une opération de crédit déterminée. Il comprend, outre les intérêts conventionnels, tous les frais nécessaires à l’obtention du prêt si ceux-ci sont déterminables au jour de la convention93, comme par exemple les frais de dossier, les commissions liées à l’opération, la rémunération d’intermédiaires, les frais de notaire, les impôts, taxes et droits mis par le contrat à la charge de l’emprunteur, la souscription à une assurance rendue obligatoire par l’établissement prêteur, etc.
2. La question se posait en l’espèce de connaître le sort réservé aux intérêts et frais dus au titre de la période de préfinancement. En effet, un crédit immobilier soumis au Code de la consommation avait été consenti à deux emprunteurs et l’acte conclu le 8 novembre 2007 faisait état d’un TEG de 5,23 % ne prenant pas en considération les frais de la période de préfinancement, la banque ayant estimé qu’ils n’étaient pas déterminables. C’est seulement par courrier du 25 juillet 2011, que la banque devait informer l’emprunteur d’un TAEG de 5,36 %, frais de préfinancement compris. La banque à l’origine du pourvoi estimait que les frais dont le montant n’est pas déterminable au jour de la conclusion du contrat « sont par là même exclus du calcul du TEG, de sorte que l’inclusion des intérêts intercalaires dans le calcul du TEG suppose que la période de franchise soit précisément définie par le contrat, c’est-à-dire que sa durée effective et le taux d’intérêt y afférent soient expressément stipulés ». Or, en décidant que les intérêts et frais dus au titre de la période de préfinancement devaient être inclus dans le calcul du TEG, « sans constater que la convention prévoyait une période de franchise effective précisément délimitée dans le temps », la cour d’appel aurait privé sa décision de base légale au regard de l’ancien article L. 313-1 du Code de la consommation.
3. Mais pour la Cour, « les intérêts et frais dus au titre de la période de préfinancement sont liés à l’octroi du prêt et entrent dans le calcul du TEG ». Elle ajoute qu’« il résulte des énonciations de l’arrêt et des productions que, le contrat prévoyant une telle période d’une durée de vingt-quatre mois, leur montant était déterminable lors de la signature du contrat ». En conséquence, en retenant que ces intérêts et frais auraient dû être inclus dans le calcul du TEG, et que l’exclusion de ces coûts avait nécessairement minoré le TEG, la cour d’appel, « a fait l’exacte application de l’article R. 313-1 du Code de la consommation ».
4. La solution s’impose à chaque fois que les parties ont opté pour une période de préfinancement fixe de nature à rendre déterminable le montant des frais et intérêt au jour de la concurrence. En revanche, lorsque la période dépend de la volonté de l’emprunteur, la condition légale de déterminabilité fait défaut et les frais et intérêts associés n’ont pas à figurer dans le calcul du TEG94.
5. La banque contestait encore l’arrêt d’appel en faisant valoir d’autres arguments. Elle estimait en premier lieu que les juges du fond avaient à tort prononcé la nullité de la stipulation d’intérêts et la substitution du taux légal. En effet, le TEG était erroné aussi bien dans l’offre de prêt que dans le contrat de prêt lui-même. Or, il est admis que la sanction du TEG dans l’offre est la déchéance dans la proportion décidée par le juge, alors que la sanction du non-respect de l’exigence légale dans le contrat est la nullité de la stipulation d’intérêt et la substitution du taux d’intérêt légal. Le client avait demandé et obtenu cette dernière sanction en fondant son action sur l’article L. 313-2 du Code la consommation et l’article 1907 du Code civil alors que pour la banque, dès lors que le TEG était erroné dans l’offre, seule la sanction de la déchéance était envisageable. L’avantage pour le prêteur résidant dans la possibilité laissée au juge de moduler sa sanction au cas par cas et donc de préserver, le cas échéant, une partie substantielle de la rémunération du prêteur.
6. Hélas, la Cour retient au contraire que, dès lors que l’inexactitude affecte l’acte de prêt, l’emprunteur a toujours la possibilité d’opter pour la sanction de la nullité du taux d’intérêt et sa substitution du taux d’intérêt légal au taux d’intérêt contractuel.
7. La banque estimait en deuxième lieu que les juges du fond auraient dû rechercher si le consentement de l’emprunteur avait été altéré. Cependant, malgré un timide infléchissement dans la jurisprudence récente95, la Cour de cassation décide depuis de nombreuses années que la sanction de la nullité du taux conventionnel ne suppose pas de vérifier in concreto que le consentement de l’emprunteur a été altéré96.
8. La banque invoquait en dernier lieu le principe de proportionnalité, énoncé par l’article 1er du protocole additionnel n° 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme. Réitérant une solution déjà adoptée par la chambre commerciale au début de l’année à l’occasion d’un arrêt fort remarqué97, la Cour a énoncé de nouveau « que cette sanction, qui est fondée sur l’absence de consentement des emprunteurs au coût global du prêt, ne constitue pas une atteinte disproportionnée au droit de l’établissement de crédit prêteur au respect de ses biens garanti par l’article 1er du protocole additionnel n° 1 à la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales ». Comme dans la précédente décision, la Cour ne précise pas si sa solution se justifie par l’absence d’atteinte au respect des biens de la banque ou par la proportionnalité de la mesure au regard du but poursuivi à savoir la protection de l’emprunteur et la transparence du marché98.
9. L’absence de consécration d’un contrôle de proportionnalité in concreto fondé sur la Convention européenne ne prive cependant pas le juge, lorsqu’il est saisi d’une demande visant l’offre et non l’acte de prêt, de la possibilité de moduler sa sanction en prononçant une déchéance totale ou seulement partielle du droit aux intérêts tenant compte de la gravité du manquement du prêteur et l’impact de celui-ci sur le consentement du prêteur et le fonctionnement du marché.
Nicolas Éréséo
Crédit immobilier : mention erronée du TEG et point de départ de la prescription
Cass. 1re civ., 1er mars 2017, n° 16-10142.
1. Les exigences entourant la mention du TEG dans les crédits immobiliers sont susceptibles de déboucher sur deux sanctions bien distinctes : la déchéance du droit aux intérêts conventionnels lorsque l’erreur affecte l’offre de prêt99 ou la nullité relative de la clause d’intérêts conventionnels lorsque l’erreur affecte le contrat de prêt lui-même100. Mais lorsque le contrat reprend l’offre à l’identique, la jurisprudence décide que l’emprunteur dispose d’une option entre les deux actions101. Le choix de l’emprunteur est bien évidemment guidé par les règles relatives à la prescription et l’arrêt commenté apporte d’utiles précisions sur le sujet102.
2. En l’espèce, un emprunteur avait souscrit, le 28 décembre 1998, un prêt immobilier d’une durée de quinze ans dont les intérêts étaient payables par mensualités et le capital en une échéance unique, le 31 décembre 2013, au terme du contrat. À la suite de la défaillance de l’emprunteur lors du paiement de cette échéance, la banque lui avait délivré un commandement de payer valant saisie immobilière et l’avait assigné devant le juge de l’exécution. En réponse, l’emprunteur avait sollicité la déchéance du droit aux intérêts conventionnels et la nullité de la clause de stipulation d’intérêts contractuels, en se fondant sur une erreur de TEG mais la banque lui opposait la prescription de ses demandes.
3. La prescription applicable à l’action en nullité de la stipulation d’intérêts était celle prévue par l’article L. 110-4 du Code de commerce dans sa rédaction antérieure à la réforme opérée par la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 et qui prévoyait alors un délai de 10 ans alors que l’action en déchéance affectant l’offre se prescrivait par cinq ans.
4. Restait à connaître le point de départ de la prescription et l’arrêt attaqué avait suivi les argumentations de la banque en fixant le point de départ au jour de la conclusion du contrat de prêt pour conclure que la prescription était acquise, suivant en cela la solution retenue par la chambre commerciale pour l’action en nullité de la stipulation d’intérêts conventionnels103.
La décision est cependant cassée par la Cour aux motifs que « le point de départ du délai de prescription de l’action en déchéance du droit aux intérêts conventionnels se situe au jour où l’emprunteur a connu ou aurait dû connaître l’erreur affectant le TEG ».
5. La première chambre civile de la Cour de cassation revient ainsi sur une précédente décision qui avait énoncé de manière moins favorable à l’emprunteur que le délai courait à compter de la date à laquelle le contrat est définitivement formé104. Confirmant ce qui se dégageait déjà d’un arrêt plus récent mais non publié au Bulletin105, elle s’aligne dorénavant sur la solution rendue, toujours par cette 1re chambre civile, en matière de nullité de la stipulation d’intérêts : le délai court à compter du moment où l’emprunteur a pu constater son erreur. Le point de départ correspondra alors à la date de l’offre mais seulement si son examen lui permet de constater son erreur.
Nicolas Éréséo
G – Remboursement anticipé et défaillance de l’emprunteur
L’absence de capitalisation des intérêts en cas de défaillance de l’emprunteur
Cass. 1re civ., 30 nov. 2016, n° 15-16660.
1. En vertu de l’article L. 313-52 du Code de la consommation : « Aucune indemnité ni aucun coût autres que ceux qui sont mentionnés à l’article L. 313-51 ne peuvent être mis à la charge de l’emprunteur dans les cas de défaillance prévus par les dispositions de cet article ». Or, selon ce dernier, lorsque le prêteur est amené à demander la résolution du contrat, il peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, ainsi que le paiement des intérêts échus. Jusqu’à la date du règlement effectif, les sommes restant dues produisent aussi des intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt. Enfin, le prêteur peut demander à l’emprunteur défaillant une indemnité qui ne peut excéder un montant fixé suivant un barème déterminé par décret. Toutes ces dépenses doivent alors être vues comme exhaustives. Un arrêt de la Cour de cassation du 30 novembre 2016106 le rappelle.
2. En l’espèce, une banque avait consenti un prêt-relais à des emprunteurs. Or, après la déchéance du terme prononcée, la banque avait obtenu en justice la condamnation des emprunteurs. Surtout, les juges du fond avaient prononcé la capitalisation des intérêts à compter des conclusions la sollicitant. Pour mémoire, cette capitalisation est l’ajout au capital dû les intérêts échus pour faire produire à nouveau à cette masse des intérêts. La haute juridiction ne partage cependant pas cette solution. Selon elle, en effet, aucune indemnité ni aucun coût autre que ceux mentionnés dans les articles du Code de la consommation ne peut être mis à la charge de l’emprunteur dans les cas de remboursement par anticipation ou de défaillance prévue par ces dispositions légales.
3. Cette solution, qui a déjà été retenue par le passé107, est convaincante. Outre le fait qu’elle est en parfaite conformité avec le droit applicable, il convient de rappeler que la capitalisation des intérêts présente un réel danger pour le débiteur, dans la mesure où elle alourdit très rapidement la charge financière de ce dernier.
Jérôme Lasserre Capdeville
H – Lien entre les contrats (…)
I – Sanctions (…)
J – Procédure
Point de départ de la prescription biennale
Cass. 1re civ., 14 déc. 2016, n° 15-24055.
1. La prescription de l’action en paiement menée contre un emprunteur immobilier n’est envisagée par aucune des dispositions figurant aux articles L. 313-1 du Code de la consommation régissant spécifiquement le crédit immobilier. Cette carence a conduit la jurisprudence à faire un choix entre la prescription quinquennale de l’article L. 110-4 du Code de commerce et la prescription biennale de l’article L. 137-1 (devenu L. 218-2) du Code de la consommation en optant pour cette dernière à l’occasion d’une série remarquée d’arrêts108.
2. Restait à en déterminer le point de départ et à l’occasion d’un spectaculaire revirement de jurisprudence, la Cour de cassation a abandonné la solution consistant à partir du premier incident de paiement non régularisé et décide dorénavant qu’à l’égard d’une dette payable par termes successifs, la prescription se divise comme la dette elle-même et court à l’égard de chacune de ses fractions à compter de son échéance, de sorte que, si l’action en paiement des mensualités impayées se prescrit à compter de leurs dates d’échéance successives, l’action en paiement du capital restant dû se prescrit à compter de la déchéance du terme, qui emporte son exigibilité109. L’arrêt commenté110 confirme cette solution et l’illustre de manière concrète pour la première fois.
3. En l’espèce, une banque avait consenti le 12 février 1999 un prêt immobilier à un couple d’un montant de 380 000 F (soit 57 931 €). Après leur avoir délivré un commandement de payer valant saisie immobilière, la banque avait assigné les emprunteurs aux fins de vente forcée de l’immeuble mais ces derniers opposaient la prescription de l’action. La cour d’appel avait jugé l’action non prescrite aux motifs que des incidents de paiement étaient intervenus à compter du mois de janvier 2009 et que des versements d’acomptes et des règlements provenant de l’assureur avaient été opérés postérieurement à cette date, de sorte que le délai de prescription avait commencé à courir à compter de la déchéance du terme intervenue le 10 août 2012 cependant que le commandement de payer valant saisie immobilière avait été délivré le 31 décembre 2012 soit dans les délais.
4. L’arrêt est cassé après le rappel de la solution de principe posée depuis 2016 et aux motifs que la cour d’appel aurait dû distinguer entre l’action relative au paiement du capital restant dû à la date de la déchéance du terme, qui n’était pas prescrite, et celle portant sur les mensualités échues depuis le mois de janvier 2009, et constater, pour ces dernières, que les paiements effectués jusqu’à la déchéance du terme avaient permis de régulariser les incidents de paiement antérieurs.
5. La Cour distingue ici clairement les mensualités antérieures à la déchéance du terme et le capital restant dû. S’agissant des mensualités, il convient de raisonner échéance par échéance et de vérifier si elles sont ou non prescrites en application du délai biennal et en tenant compte de toutes les éventuelles causes de suspension ou d’interruption. S’agissant du capital restant dû, qui inclut toutes les échéances non prescrites, le point de départ doit en revanche être établi à la date de la déchéance du terme. Or, en l’espèce, la cour d’appel avait appliqué la date de la déchéance du terme pour le tout, de manière assez curieuse puisque la jurisprudence de l’époque optait pour le premier incident non régularisé.
6. Par ailleurs, et surtout, la cour d’appel aurait dû constater que la prescription de l’action en paiement des échéances impayées de 2009 avait commencé à courir dès son échéance et vérifier si les paiements intervenus postérieurement, à l’initiative de l’assurance visiblement avaient eu pour conséquence de régulariser les incidents et donc de faire échec à la prescription.
Nicolas Éréséo
Notes de bas de pages
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1.
V. par ex., Cass. 1re civ., 11 mai 2017, n° 16-15483 ; Cass. 1re civ., 11 mai 2017, n° 16-13272 ; Cass. 1re civ., 26 avr. 2017, n° 15-28443 ; Cass. 1re civ., 8 févr. 2017, n° 15-27277 : v. infra, obs. Eréséo N. – Cass. 1re civ., 1er févr. 2017, n° 15-27277 ; v. également en matière de crédit immobilier, Cass. 1re civ., 29 mars 2017, n° 15-28013 ; Cass. 1re civ., 18 déc. 2014, nos 13-27871 et 14-10872 : LPA 1er juin 2015, p. 15, obs. Lasserre Capdeville J.
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2.
C. consom., art. L. 311-1, 2°. Pour une non-application des règles relatives au crédit à la consommation à une convention de compte courant à vocation professionnelle, Cass. 1re civ., 14 oct. 2015, n° 14-21894 : LPA 9 janv. 2017, n° 122a2, p. 6, obs. Lasserre Capdeville J.
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3.
V. par ex., CA Douai, 17 déc. 2015, n° 15/03126 ; CA Douai, 15 oct. 2015, n° 15/01008 ; TI Beauvais, 16 sept. 2015, n° 11-15-000135 : LPA 9 janv. 2017, n° 122a2, p. 6, obs. Lasserre Capdeville J.
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4.
TI Aubervilliers, 18 oct. 2016, n° 11-15-001299 : D. 2016, p. 2277, obs. Poissonnier G.
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5.
CJUE, 18 déc. 2014, n° C-449/13 : D. 2015, p. 715, note Poissonnier G. ; RTD com. 2015, p. 138, obs. Legeais D. ; LPA 1er juin 2015, p. 9, obs. Eréséo N.
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6.
TI Saint-Brieuc, 12 déc. 2016, n° 11-15-000530 : Contrats, conc. consom. 2017, comm. 65, obs. Bernheim-Desvaux S.
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7.
CJUE, 4 juin 2009, n° C-243/08 : D. 2009, p. 2312, note Poissonnier G. ; RTD com. 2009, p. 794, obs. Legeais D. ; Procédures 2009, comm. 275, obs. Nourissat C. – V. également, CJUE, 30 mai 2013, n° C-397/11 : RTD eur. 2013, p. 559, obs. Aubert de Vincelles C. ; Europe 2013, comm. 321, obs. Bouveresse A.
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8.
V. supra, notre commentaire sous TI Aubervilliers, 18 oct. 2016, n° 11-15-001299.
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9.
CJUE, 18 déc. 2014, n° C-449/13 : D. 2015, p. 715, note Poissonnier G. ; Contrats, conc. consom. 2015, comm. 75, obs. Raymond G. ; RTD com. 2015, p. 138, obs. Legeais D. ; LPA 1er juin 2015, p. 9, obs. Eréséo N.
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10.
Ce manquement est fréquemment relevé en pratique. V. par ex., concernant des vérifications trop tardives car postérieures à la date de conclusion du contrat de crédit, CA Paris, 8 janv. 2015 : LEDB mars 2015, n° 43, p. 5, obs. Lasserre Capdeville J. ; LPA 1er juin 2015, p. 7, obs. Eréséo N. – TI Nogent-sur-Marne, 10 sept. 2013 : D. 2013, p. 2637, obs. Poissonnier S. – Pour une consultation à l’inverse trop précoce, TI Mamoudzou, 17 mai 2016 : LPA 9 janv. 2017, op. cit., obs. Lasserre Capdeville J.
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11.
CA Versailles, 10 mai 2016 : LEDB sept. 2016, n° 127, p. 3, obs. Lasserre Capdeville J.
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12.
CJUE, 27 mars 2014, n° C-565/12 : D. 2014, p. 1307, note Poissonnier G. ; RTD com. 2015, p. 139, obs. Legeais D. ; RTD eur. 2014, p. 724, obs. Aubert de Vincelles C. ; Gaz. Pal. 5 juin 2014, n° 178x1, p. 11, note Lasserre Capdeville J. ; LPA 1er août 2014, p. 13, obs. Eréséo N.
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13.
C. mon. fin., art. L. 313-3.
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14.
V. par ex, infra, TI Aubervilliers, 18 oct. 2016, n° 11-15-001299 ; V. également, TI Orléans, 3 juill. 2014 : D. 2014, p. 1685, obs. Poissonnier G. Les juges doivent alors, au cas par cas, apprécier le caractère dissuasif de la sanction de la déchéance du droit aux intérêts conventionnels du prêteur, CA Paris, 17 déc. 2015 : LEDB févr. 2016, n° 30, p. 7, obs. Lasserre Capdeville J. ; LPA 10 janv. 2017, n° 123h8, obs. Eréséo N.
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15.
C. consom., art. L. 312-16 (anc. 311-9).
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16.
CNIL, avis n° SAN-2017-001 du 26 janv. 2017 : LEDB mai 2017, n° 110p1, p. 4, obs. Lasserre Capdeville J. ; Gaz. Pal. 13 juin 2017, n° 297h9, p. 83, obs. Morel-Maroger J.
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17.
TI Havre, 10 janv. 2017, n° 11-15-001264 : D. 2017, p. 349, obs. Poissonnier G.
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18.
TI Vichy, 3 mai 2016, n° 11-15-000628 : Contrats, conc. consom. 2016, comm. 202, obs. Bernheim-Desvaux S.
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19.
Cass. 1re civ., 19 févr. 2013, n° 12-15764 : Contrats, conc. consom. 2013, comm. 145, obs. Raymond G.
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20.
CJUE, 18 déc. 2014, n° C-449/13 : D. 2015, p. 715, note Poissonnier G. ; RTD com. 2015, p. 138, obs. Legeais D. ; LPA 1er juin 2015, p. 9, obs. Eréséo N.
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21.
Cass. 1re civ., 18 févr. 2009, n° 08-12584 : Bull. civ. I, n° 34 ; Contrats, conc. consom. 2009, comm. 150, obs. Raymond G.
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22.
Si les intérêts ont déjà été perçus, le prêteur devra les restituer ou les imputer sur le capital restant dû, Cass. 1re civ., 18 févr. 1997, n° 94-18017 : Bull. civ. 1997, I, n° 66.
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23.
Cass. 1re civ., 18 mars 2003, n° 00-17761 : Bull. civ. I, n° 4 ; D. 2003, p. 1036, obs. Rondey C. ; Contrats, conc. consom. 2003, comm. 97, obs. Raymond G. ; RTD com. 2003, p. 554, obs. Legeais D.
-
24.
Cass. 1re civ., 26 nov. 2002, n° 00-17119 : Bull. civ. I, n° 288 – Cass. 1re civ., 27 mai 2003, n° 01-10635 : Bull. civ. n° 131 ; Contrats, conc. consom. 2003, comm. 169, obs. Raymond G.
-
25.
Cass. 1re civ., 31 mars 2011, n° 09-69963 : Bull. civ. I, n° 65 ; D. 2011, p. 1069, obs. Avena-Robardet V. ; D. 2012, p. 1914, obs. Martin D.-R. ; RTD com. 2011, p. 621, obs. Legeais D. ; Contrats, conc. consom. 2011, comm. 177 obs. Raymond G.
-
26.
Il s’agissait, avant l’ordonnance du 14 mars 2016, de C. consom., art. L. 311-32.
-
27.
Cass. 1re civ., 9 déc. 2015, n° 14-23272 : Contrats, conc. consom. 2016, comm. 58, obs. Raymond G. ; RD bancaire et fin. 2016, comm. 57, obs. Mathey N.
-
28.
Il s’agit désormais de C. consom., art. L. 221-5 et s.
-
29.
Ce sont à présent C. consom., art. R. 221-1 et s.
-
30.
Il en va plus particulièrement ainsi si la banque délivre les fonds trop tôt. En ce sens, par exemple, Cass. 1re civ., 19 févr. 2014, n° 12-26100 : LPA 1er août 2014, p. 12, obs. Eréséo N. ; LEDB avr. 2014, n° 44, p. 5, obs. Lasserre Capdeville J. – Cass. 1re civ., 10 déc. 2014, nos 13-26585 et 13-12290 : LPA 1er juin 2015, p. 12, obs. Lasserre Capdeville J. – Cass. 1re civ., 1er juin 2016, n° 15-18043 : LPA 10 janv. 2017, n° 123h8, p. 8, obs. Eréséo N. ; LEDB juill. 2016, n° 117, p. 7, obs. Lasserre Capdeville J. – Cass. com., 18 janv. 2017, n° 15-19349 – CA Pau, 4 avr. 2017, n° 15/02194 : LEDB juill. 2017, n° 110s2, p. 3, obs. Lasserre Capdeville J.
-
31.
V. égal. dans cette chronique, supra, CA Bordeaux, 10 janv. 2017, n° 16/03073.
-
32.
C. consom., art. L. 312-48 (anc. art. L. 311-31).
-
33.
Le contrat de crédit est résolu de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même résolu en justice, pourvu que le prêteur soit intervenu à l’instance ou ait été mis en cause. C. consom., art. L. 312-55 (anc. art. L. 311-32).
-
34.
Cass. 1re civ., 3 juin 2015, n° 14-15655 : D. 2015, p. 1677, note Poissonnier G. ; Dr. bancaire et fin. 2016/1, p. 6, obs. Lasserre Capdeville J. – Dans le même sens, Cass. 1re civ., 22 juin 2017, n° 16-18418 : AJ contrats 2017, obs. Lasserre Capdeville J., à paraître.
-
35.
Dans le même sens, TI Le Havre, 21 oct. 2016, n° 11-15-001549.
-
36.
TI Aubervilliers, 18 oct. 2016, n° 11-15-001299 : D. 2016, p. 2277, obs. Poissonnier G.
-
37.
V. supra.
-
38.
V. supra.
-
39.
CJUE, 27 mars 2014, n° C. 565/12 : D. 2014, p. 1307, note Poissonnier G. ; RTDE 2014, p. 724, obs. Aubert de Vincelles C. ; Gaz. Pal. 5 juin 2014, n° 178x1, p. 11, note Lasserre Capdeville J. ; LPA 1er août 2014, p. 13, obs. Eréséo N.
-
40.
V. supra, TI Saint-Brieuc, 12 déc. 2016, n° 11-15-000530
-
41.
TI Digne-les-Bains, 7 juin 2016 : LPA 10 janv. 2017, n° 123h8, p. 11, obs. Lasserre Capdeville J.
-
42.
Cass. 1re civ., 28 oct. 2015, n° 14-23267 : D. 2016, p. 411, note Lasserre Capdeville J. ; LEDB déc. 2015, n° 182, p. 4, obs. Mignot M. – CA Colmar, 15 mai 2017 : LEDB juill. 2017, n° 110s1, p. 2, obs. Lasserre Capdeville J.
-
43.
Cass. 1re civ., 25 janv. 2017, n° 15-21453 : LEDB mars 2017, n° 110j6, p. 3, obs. Mathey N. ; Gaz. Pal. 4 avr. 2017, n° 291q4, p. 19, obs. Piédelièvre S. ; Contrats, conc. consom. 2017, comm. 92, obs. Bernheim-Desvaux S.
-
44.
Cass. 1re civ., 22 janv. 2009, n° 06-15370 : RTD com. 2009, p. 420, obs. Legeais D. ; Gaz. Pal. 3 mars 2009, n° H3487, p. 18, obs. Piédelièvre S. ; Defrénois 15 déc. 2009, n° 39040-5, p. 2336, obs. Savaux E. ; Contrats, conc. consom. 2009, comm. 115, obs. Raymond G. – Cass. 1re civ., 29 janv. 2009, n° 05-20176.
-
45.
Cass. 1re civ., 9 juin 2017, n° 16-15140.
-
46.
Concernant les deux prêts, la Cour rappelle une solution désormais classique concernant le point de départ du délai de prescription biennal envisagé par l’article L. 218-2 du Code de la consommation : « à l’égard d’une dette payable par termes successifs, la prescription se divise comme la dette elle-même et court à l’égard de chacune de ses fractions à compter de son échéance, de sorte que, si l’action en paiement des mensualités impayées se prescrit à compter de leurs dates d’échéance successives, l’action en paiement du capital restant dû se prescrit à compter de la déchéance du terme, qui emporte son exigibilité ». Nous reconnaissons ici la solution dégagée, sur cette question, par des arrêts de principe de la première chambre de la Cour de cassation du 11 février 2016 – Cass. 1re civ., 11 févr. 2016, nos 14-23383, 14-27938, et 14-29539 : LPA 11 janv. 2017, n° 123h9, p. 13, obs. Eréséo N. ; LEDB mars 2016, n° 39, p. 1, obs. Lasserre Capdeville J. ; RD bancaire et fin. 2016, comm. 59, obs. Mathey N.
-
47.
V. par ex., Cass. 1re civ., 12 nov. 2015, n° 14-25787 : Dalloz actualité, 1er déc. 2015, obs. Avena-Robardet V. ; RD bancaire et fin. 2016, comm. 7, obs. Mathey N. ; LEDB janv. 2016, n° 09, p. 5, obs. Lasserre Capdeville J.
-
48.
CJUE, 21 avr. 2016, n° C-377/14, Radlinger et Radlingerová, pt n° 61.
-
49.
CJUE, 9 nov. 2016, aff. C-42/15, Home Credit Slovakia et a. s. c/ K. B. : D. 2017, p. 328, note Boucard F. ; Contrats, conc. consom. 2017, comm. 42, note Bernheim-Desvaux S. ; RD bancaire et fin. 2017, comm. 4, note Mathey N. ; Gaz. Pal. 21 févr. 2017, n° 287f2, p. 55, obs. Roussille M. ; LEDB déc. 2016, n° 110d0, p. 3, obs. Lasserre Capdeville J.
-
50.
Le support durable doit garantir au consommateur, de manière analogue à un support papier, la possession des informations concernées pour lui permettre de faire valoir, le cas échéant, ses droits. Est pertinente à cet égard la possibilité, pour le consommateur, de stocker les informations qui lui ont été adressées personnellement, la garantie de l’absence d’altération de leur contenu ainsi que leur accessibilité pendant une durée appropriée, et la possibilité de les reproduire telles quelles, CJUE, 5 juill. 2012, n° C-49/11, Content Services, pts 42 à 44.
-
51.
Pt n° 34.
-
52.
CJUE, 27 mars 2014, n° C-565/12 : Gaz. Pal. 5 juin 2014, n° 178x1, p. 11, note Lasserre Capdeville J. ; LPA 1er août 2014, p. 6, note Éréséo N. ; Dalloz actualité, 11 avr. 2014, obs. Avena-Robardet V. ; LEDB mai 2014, n° 54, p. 1, obs. Routier R. ; D. 2014, p. 1307, note Poissonnier G.
-
53.
Pt n° 73.
-
54.
C. com., art. L. 330-3.
-
55.
Dissaux N., « Pauvre loi Doubin », JCP E 2016, 1235.
-
56.
Pt n° 70.
-
57.
Nous ne suivons pas un auteur lorsqu’il affirme qu’un « client qui n’aura pas mis sa banque en concurrence ne pourra (…) probablement pas se prévaloir de l’absence de TAEG dans son contrat de prêt », v. Boucard F., obs. préc. En effet, ce serait oublier que la mention du TAEG n’a pas seulement pour objet de permettre la comparaison de plusieurs offres dans un contexte de concurrence mais d’informer le consommateur quant au coût de l’opération.
-
58.
V. infra.
-
59.
C. consom., art. L. 341-4.
-
60.
Cass. 1re civ., 1er oct. 2014, n° 13-22778 : RD bancaire et fin. 2015, comm. 32 ; Gaz. Pal. 17 mars 2015, n° 216v7, p. 18, obs. Roussille M. ; D. 2014, p. 2395, note Lasserre Capdeville J. ; Banque et droit 2015, n° 160, p. 29, obs. Bonneau T. – Cass. 1re civ., 26 nov. 2014, n° 13-23033 : JCP G 2014, 1306, obs. Lasserre Capdeville J. ; Banque et droit 2015, n° 160, p. 29, obs. Bonneau T. ; RTD com. 2015, p. 137, obs. Legeais D. – Cass. 1re civ., 9 avr. 2015, n° 14-14216 : D. 2015, p. 1150, obs. Lasserre Capdeville J. – Cass. 1re civ., 25 janv. 2017, n° 15-24607 : RD bancaire et fin. 2017, p. 1158, obs. Mathey N. ; JCP E 2017, 1158, spéc. n° 11, note Lasserre Capdeville J.
-
61.
V. Cass. 1re civ., 12 oct. 2016, n° 15-25034 et nos observations dans cette chronique.
-
62.
Cass. com., 12 janv. 2016, n° 14-15203 : Banque et droit 2016, n° 166, p. 36, Bonneau T. ; JCP E 2016, 1194, Périn-Dureau A. ; Gaz. Pal. 8 mars 2016, n° 259m5, p. 71, Moreil S. ; LEDB mars 2016, n° 47, p. 6, obs. Lasserre Capdeville J. – Cass. 1re civ., 14 déc. 2016, n° 15-26306 : D. 2017, p. 443, note Lasserre Capdeville J. ; JCP E 2017, 1171, spéc. n° 12, note Périn-Dureau A. ; LEDB févr. 2017, n° 110g4, p. 1, obs. Piédelièvre S. ; RD bancaire et fin. 2017, comm. 8, obs. Mathey N. et nos obs. dans cette chronique.
-
63.
Louvel B., « Réflexions à la Cour de cassation », D. 2015, p. 1326 ; Deumier P., « Repenser la motivation des arrêts de la Cour de cassation », D. 2015, p. 2022 ; Jamin C., « Juger et motiver », RTD civ. 2015, p. 263.
-
64.
Cass. 1re civ., 12 oct. 2016, n° 15-20487 : Gaz. Pal. 13 déc. 2016, n° 281t6, p. 30, obs. Piédelièvre S. ; JCP E 2016, 1671 note Loir R.
-
65.
Il s’agit de l’ancien article L. 137-2 du Code de la consommation.
-
66.
V. par ex., l’article ne s’applique pas aux prêts souscrits par des SCI, Cass. 1re civ., 17 févr. 2016, n° 14-29261 : LPA 11 janv. 2017, n° 123h9, p. 14, obs. Lasserre Capdeville J. – Cass. 1re civ., 13 juill. 2016, n° 15-17702 : Contrats, conc. consom. 2016, comm. 222, obs. Bernheim-Desvaux S. – Cass. 1re civ., 3 nov. 2016, n° 15-23405 : Contrats, conc. consom. 2017, comm. 46, obs. Bernheim-Desvaux S. – Cass. 1re civ., 1er mars 2017, n° 16-11034 : RD bancaire et fin. 2017, comm. 108, obs. Mathey N. – Cass. com., 8 mars 2017, nos 15-17158, 15-17160 et 15-17161 : LEDB mai 2017, obs. Mignot M. ; RD banc. fin. 2017, comm. 108, obs. Mathey N. – En revanche, il s’applique au prêt immobilier constaté par acte notarié, Cass. 1re civ., 28 sept. 2016, n° 15-19346 : RD bancaire et fin. 2016, comm. 237, obs. Mathey N.
-
67.
De ce fait, les dispositions régissant le crédit immobilier ne sauraient s’appliquer aux crédits obtenus par des SCI, V. par ex., Cass. 1re civ., 14 oct. 2015, n° 14-24915 : LPA 11 janv. 2017, n° 123h9, p. 7, obs. Lasserre Capdeville J. – V. déjà, Cass. 1re civ., 10 févr. 1993, n° 91-12382 : Bull. civ. I, n° 71 – Cass. 1re civ., 11 oct. 1994, n° 92-20563 : Bull. civ. I, n° 285 – Cette solution est désormais mentionnée à C. consom., art. L. 313-1, 3°.
-
68.
Cass. 1re civ., 22 sept. 2016, n° 15-18858 : RD banc. fin. 2016, comm. 236, obs. Mathey N. ; JCP E 2016, 1574, note Loir R. ; Contrats, conc. consom. 2016, comm. 269, obs. Bernheim-Desvaux S.
-
69.
JO, 3 juin 2017, texte 13.
-
70.
de Ravel d’Esclapon T., « De la validité de la clause de domiciliation des revenus en matière de crédit immobilier », AJ contrat 2017, p. 118.
-
71.
Recommandation CCA n° 2004-03 du 27 mai 2004 : JCP N 2004, 213.
-
72.
C. mon. fin., art. L. 312-1-7 – Lasserre Capdeville J., « La mobilité bancaire : contenu et premiers effets », LPA 16 mai 2017, n° 126f7, p. 6.
-
73.
C. consom., art. L. 313-25-1 créé.
-
74.
C. consom., art. L. 313-25-1 créé.
-
75.
JO, 16 juin 2017, texte 38 ; JCP E 2017, 474, spéc. n° 25 – C. consom., art. R. 313-21-1 créé.
-
76.
C. consom., art. L. 313-25 et C. consom., art. L. 313-39 modifiés.
-
77.
C. consom., art. L. 341-34-1 créé.
-
78.
JO, 22 févr. 2017, n° 1.
-
79.
LPA 9 janv. 2017, n° 122a2, p. 6, obs. Lasserre Capdeville J.
-
80.
LPA 10 janv. 2017, n° 123h8, p. 6, obs. Eréséo N. ; Lasserre Capdeville J., « La réforme du crédit immobilier : une évolution juridique de bon sens ! », JCP G 2016, 517.
-
81.
Lasserre Capdeville J., « Les incidences en droit du crédit aux consommateurs de la loi n° 2017-203 du 21 février 2017 », JCP E 2017, 426, spéc. n° 23.
-
82.
Par exemple, jusqu’à ce texte, l’article L. 312-1 prévoyait que le régime juridique du crédit à la consommation s’appliquait aux crédits dont le montant « est supérieur à 200 € et inférieur à 75 000 ». Désormais, il en va de la sorte lorsque ce montant « est égal ou supérieur à 200 € et inférieur ou égal à 75 000 ».
-
83.
À titre d’illustration, la définition donnée au prêteur par l’article L. 311-1, 1°, du code est retouchée afin de ne plus renvoyer uniquement au crédit à la consommation visé par l’article L. 312-1. Désormais, l’article vise les crédits mentionnés « au présent titre », ce qui permet d’inclure le crédit immobilier.
-
84.
Cass. 1re civ., 9 mars 2016, nos 15-18899 et 15-19652 : Contrats, conc. consom. 2016, comm. 131, obs. Bernheim-Desvaux S. ; LPA 11 janv. 2017, n° 123h9, p. 10, obs. Lasserre Capdeville J. ; LEDB mai 2016, p. 1, obs. Mignot M.
-
85.
Lasserre Capdeville J., « Les évolutions du droit bancaire résultant de la loi Sapin 2 », JCP E 2017, 103.
-
86.
Thévenin L., « Résiliation annuelle : le marché de l’assurance-emprunteur à l’aube d’un choc », Les Echos, 28 févr. 2017, p. 26.
-
87.
Sur l’ensemble de la question : Périn-Dureau A., « Mention du taux effectif global – Étude d’une mesure à l’efficacité et à la cohérence discutables, partie 2 », RD bancaire et fin. 2016, étude 29.
-
88.
Cass. 1re civ., 12 oct. 2016, n° 15-25034 : LEDB déc. 2016, n° 110d7, p. 5, obs. Lasserre Capdeville J. ; JCP E 2017, 1013, note Perin-Dureau A. ; RD bancaire et fin. 2017, comm. 5, obs. Mathey N. ; RD bancaire et fin. 2017, comm. 1, obs. Samin T. et Torck S.
-
89.
V. note Périn-Dureau A. préc. et Cass. 1re civ., 24 juin 1981, n° 80-12903 : JCP G 1982, II, 19713, note Vasseur M.
-
90.
Pourvu que l’erreur soit supérieure à une décimale, conformément aux dispositions réglementaires applicables, v. C. consom., art. R. 314-2 et Cass. 1re civ., 26 nov. 2014, n° 13-23033 : JCP G 2014, 1306, note Lasserre Capdeville J. ; RD bancaire et fin. 2015, comm. 36, obs. Mathey N. et comm. 32, obs. Crédot F. J. et Samin T. ; Gaz. Pal. 15 mars 2015, n° 216v7, p. 18, note Roussille M. ; Banque et droit 2015, n° 160, p. 29, obs. Bonneau T. ; RTD com. 2015, p. 1367, obs. Legeais D.
-
91.
CJUE, 9 nov. 2016, n° C-42/15, Home Credit Slovakia a. s. c/ K. B. v. nos obs. dans cette chronique.
-
92.
Cass. 1re civ., 14 déc. 2016, n° 15-26306 : D. 2017, p. 443, note Lasserre Capdeville J. ; JCP E 2017, 1171, spéc. n° 12, note Périn-Dureau A. ; LEDB févr. 2017, n° 110g4, p. 1, obs. Piédelièvre S. ; RD bancaire et fin. 2017, comm. 8, obs. Mathey N.
-
93.
C. consom., art. L. 314-1 (anc. L. 313-1).
-
94.
En ce sens, v. Lasserre Capdeville J., note préc.
-
95.
V. nos obs. supra sur Cass. 1re civ., 12 oct. 2016, n° 15-25034.
-
96.
Cass. 1re civ., 24 juin 1981, n° 80-12903 : JCP G 1982, II, 19713, note Vasseur M.
-
97.
Cass. com., 12 janv. 2016, n° 14-15203 : Banque et droit 2016, n° 166, p. 36, Bonneau T. ; JCP E 2016, 1194, Périn-Dureau A. ; Gaz. Pal. 8 mars 2016, n° 259m5, p. 71, Moreil S. ; LEDB mars 2016, n° 47, p. 6, obs. Lasserre Capdeville J. ; RTD com. 2016, p. 825, obs. Legeais D.
-
98.
En ce sens, v. Périn-Dureau A., note préc.
-
99.
Ancien art. L. 312-33, al. 5, devenu C. consom., art. L. 341-34.
-
100.
Cass. 1re civ., 14 juin 2007, n° 05-22011.
-
101.
Cass. 1re civ., 18 févr. 2009, n° 05-16774.
-
102.
Cass. 1re civ., 1er mars 2017, n° 16-10142 : Gaz. Pal. 18 avr. 2017, n° 292h1, p. 27, note Lasserre Capdeville J. ; LEDB mai 2017, n° 110p1, p. 5, obs. Piédelièvre S. ; Contrats, conc. consom. 2017, comm. 111, obs. Bernheim-Desvaux S.
-
103.
Cass. com., 10 juin 2008, nos 06-19452, 06-18906 et 06-19905 : Bull. civ. IV, nos 116, 117 et 118.
-
104.
Cass. 1re civ., 3 juill. 2013, n° 12-12350 : LEDB sept. 2013, n° 107, p. 2, obs. Lasserre Capdeville J.
-
105.
Cass. 1re civ., 15 juin 2016, n° 15-12803 : LEDB sept. 2016, n° 134, p. 6, obs. Lasserre Capdeville J. ; RD bancaire et fin. 2016, comm. 160, obs. Mathey N.
-
106.
Cass. 1re civ., 30 nov. 2016, n° 15-16660 : RD bancaire et fin. 2017, comm. 9, obs. Mathey N. ; Gaz. Pal. 4 avr. 2017, n° 291q3, p. 19, obs. Piédelièvre S.
-
107.
Cass. 1re civ., 29 juin 2016, n° 15-16945 : RD bancaire et fin. 2016, comm. 197, obs. Mathey N. ; LEDB sept. 2016, n° 135, p. 7, obs. Lasserre Capdeville J. – Cass. 1re civ., 17 juin 2015, n° 14-11807 : Contrats, conc. consom. 2015, comm. 249, obs. Raymond G. – Cass. 1re civ., 13 mai 2014, n° 12-35149 : RD bancaire et fin. 2014, comm. 191, obs. Crédot F. J. et Gérard Y.
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108.
Cass. 1re civ., 28 nov. 2012, n° 11-26058 : Bull. civ. I, n° 247 ; RD bancaire et fin. 2013, comm. 47, obs. Mathey N. ; Contrats, conc. consom. 2013, comm. 45, obs. Raymond G. ; LPA 4 nov. 2013, p. 6, obs. Eréséo N. ; LEDB janv. 2013, n° 01, p. 5, obs. Lasserre Capdeville J.
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109.
Cass. 1re civ., 11 févr. 2016, n° 14-22938 : LEDB mars 2016, n° 38, p. 1, obs. Lasserre Capdeville J. ; RTD com. 2016, p. 314, obs. Legeais D. ; JCP E 2017, 1175, note Bazin E. ; JCP N 2016, 1298, note Piédelièvre S. ; RD bancaire et fin. 2016, comm. 59, obs. Mathey N. ; JCP G 2016, 220, obs. Lasserre Capdeville J.
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110.
Cass. 1re civ., 14 déc. 2016, n° 15-24055 : LPA 5 avr. 2014, p. 10, note Lasserre Capdeville J. ; LEDB févr. 2017, n° 110h1, p. 5, obs. Mignot M.