Vente de la chose louée par adjudication, qui est responsable des travaux existants sur la chose donnée à bail ?

Publié le 12/06/2019

À partir de la vente par adjudication opérant transmission du bail, l’adjudicataire enchérisseur devient débiteur envers le locataire des travaux nécessaires à la délivrance conforme du bien loué. Ainsi, en application de l’obligation de délivrance, il est tenu in solidum avec le précédent propriétaire de réparer les dommages existant sur les locaux loués. C’est ce qui ressort d’un arrêt de la troisième chambre civile de la Cour de cassation rendu le 21 février 2019, arrêt qui fait l’objet d’une publicité puisqu’il est promis à une publication au Bulletin.

Cass. 3e civ., 21 févr. 2019, no 18-11553, PB

Cet arrêt de la troisième chambre civile de la Cour de cassation concerne la question récurrente de la prise en charge des travaux sur l’immeuble donné à bail, problème rendu dans cet arrêt quelque peu plus complexe par le fait que l’immeuble objet du bail a fait l’objet d’une vente par adjudication.

En l’espèce, une société bailleresse avait consenti un bail portant sur un immeuble à usage commercial et d’habitation à une autre société. Un litige naît entre les parties à propos de la réalisation des travaux sur l’immeuble donné à bail ; la bailleresse est condamnée par jugement du 26 avril 2016, à faire réaliser divers travaux sur l’immeuble. On apprend de la lecture des moyens annexés au pourvoi que ces travaux concernaient diverses réfections : entre autres, des menuiseries, plancher, murs et cloisons, installation électrique, fenêtre, revêtements des murs équipement sanitaire, installation électrique dans la salle de bain ; dans une autre pièce, réfections plancher, murs, plafond, chauffage ; reprise de la couverture de l’immeuble pour mettre fin aux infiltrations, etc. On le voit, il est question d’une liste impressionnante de travaux, la locataire invoquant le caractère inhabitable de la partie habitation.

En appel, la locataire sollicite et obtient (arrêts de la cour d’appel de Poitiers du 14 novembre 2017 et 13 février 2018) la condamnation in solidum d’une autre société, cette dernière étant devenue, en vertu d’un jugement du 7 juin 2016, adjudicataire de l’immeuble donné à bail.

Dans le pourvoi en cassation formé par cette nouvelle propriétaire de l’immeuble, sa critique de la décision d’appel se fonde essentiellement sur la violation de l’article 1743 du Code civil, qui oblige le nouveau propriétaire à respecter le bail en cours ; ce texte interdit en effet à l’acquéreur de la chose louée d’expulser le locataire qui a un bail authentique ou dont la date est certaine1.

La règle posée par l’article est certes entendue mais le pourvoi soutenait que « le bailleur qui vend son immeuble n’est pas dispensé de son obligation de prendre en charge les travaux qui étaient nécessaires alors qu’il était propriétaire et dont la charge lui incombait »2. En conséquence, la vente de l’immeuble loué par adjudication n’a pas eu pour effet d’opérer une transmission au profit du locataire de la prise en charge financière des travaux qui incombait à l’ancien propriétaire ; celui-ci en restant tenu.

Le même fondement est rappelé dans un second point en ajoutant cette fois la donnée selon laquelle était annexé aux conditions de vente le jugement de condamnation à exécuter les travaux par l’ancien propriétaire ; la société bailleresse en déduit que le financement desdits travaux incombait exclusivement à cet ancien propriétaire. La cour d’appel aurait ainsi violé l’article 1743 du Code civil en acceptant d’associer le nouveau propriétaire au paiement d’une charge qui ne lui incombait aucunement.

L’argumentation n’a pas convaincu la Cour de cassation qui approuve la décision des juges d’appel, légalement justifiée selon les hauts magistrats car depuis son acquisition, la société devenue bailleresse est tenue d’une obligation envers le locataire de réaliser les travaux nécessaires à la délivrance conforme du bien loué. Puisqu’elle ne s’en était pas acquittée, sa condamnation in solidum ne peut être écartée.

Il y a là une réponse des magistrats (du fond comme du droit) qui, malgré sa clarté apparente, peut (voire doit) néanmoins poser question. La chose est-elle transmise au nouveau propriétaire avec la charge des travaux liés au bail en cours ?

L’argumentaire de la locataire (qui se prévalait des manquements du bailleur à ses obligations tant légales que contractuelles) était d’ailleurs en ce sens. Selon elle, du fait de l’adjudication, l’acquéreur est tenu par les clauses et conditions du cahier des conditions de la vente, il acquiert les droits du saisi dès le jour de l’adjudication et supporte les risques liés à son acquisition et par là même est tenu, comme le saisi, de son obligation envers le locataire de l’immeuble.

La discussion s’élevant dans cet arrêt n’est pas dénuée d’intérêt au regard de la complexité de la question de la transmissibilité passive des obligations et des réponses variées qu’elle reçoit en cette matière. Il semble nécessaire de saisir les divers titres de l’analyse qui rejette l’argumentation du pourvoi contestant la condamnation in solidum retenue. Il en est ainsi, à défaut de référence expresse, de la mise à l’écart de l’article 1743 du Code civil ou en tout cas de son application non exclusive comme fondement de la solution. En effet, la position en faveur de laquelle se rangent les magistrats et qui justifie le rejet du pourvoi n’emploie pas le raisonnement classique de la transmission des obligations découlant du bail pour résoudre la question de la charge des travaux sur l’immeuble (I). En réalité, elle fait le choix de dépasser ce réflexe « normal » pour s’intéresser à la situation résultant de la transmission du bail (II).

I – L’inapplication a priori de la transmission propter rem de la charge des travaux à l’adjudicataire

Une observation liminaire s’impose en cette matière : il ressort, nous semble-t-il, des précédents jurisprudentiels relatifs aux effets de la transmission du bail une clarté toute relative voire une confusion. En effet, s’agissant en particulier du domaine de la cession du bail commercial, si certaines décisions laissent entendre l’intransmissibilité de la charge de certaines dettes3 (le bailleur originaire restant le seul redevable), d’autres au contraire n’hésitent pas à l’admettre. On peut ainsi lire dans un arrêt du 9 juillet 2003 que les « cessions successives d’un bail commercial opèrent transmission des obligations en découlant au dernier titulaire du contrat qui devient débiteur envers le bailleur des dégradations causées par ses prédécesseurs »4. Ce même principe de transmission est parfois écarté à défaut de stipulation d’une clause de solidarité5.

Toutefois, malgré cette relative confusion, l’idée reste pour l’essentiel acquise que la loi6 organise, afin notamment de protéger le locataire, un mécanisme spécifique de transmission du bail, le bailleur originaire se substituant au tiers dans l’exécution de ses engagements initiaux. Cette règle de transmission coupe court à l’interrogation classique relative à la transmissibilité ou pas de certains droits ou obligations liés à la chose acquise.

L’article 1743 du Code civil instaure une règle en vertu de laquelle, l’adjudicataire ici mais de façon plus générale, l’acquéreur de l’immeuble donné à bail se voit investi d’un droit de propriété assez spécifique : la propriété de la chose lui est transmise avec le bail portant sur cette chose. Il n’est pas rare que la doctrine7 voie dans cette règle de la transmission du bail au nouveau propriétaire la manifestation en un certain sens de la théorie de l’obligation propter rem8. L’admission de la transmission du bail avec la chose est alors considérée comme une dérogation au principe de l’effet relatif des contrats : par la substitution qu’elle opère dans la qualité du bailleur, le nouveau propriétaire devient partie à un contrat de bail (qu’il n’a pourtant pas conclu) à la place du bailleur originaire. Chacune des parties est alors tenue par l’effet obligatoire du bail. Ainsi par exemple, du côté du preneur à bail, elle fonde son droit de réclamer l’exécution de celui-ci au nouveau propriétaire (au-delà de la seule interdiction d’expulsion que vise l’article 1743) ; également du côté du nouveau propriétaire, bailleur, le droit de réclamer l’exécution à son profit des obligations nées du bail (loyers…).

Dans la mesure où le droit réel (le transfert de propriété) et le droit personnel (le bail) se retrouvent ainsi rassemblés par un rapport juridique unique, la théorie du droit ou de l’obligation propter rem (selon qu’il s’agit de réclamer l’exécution des droits liés à la chose ou d’en assumer les charges) est souvent employée pour désigner la construction. La théorie fait prendre en effet conscience de l’existence d’une intimité forte de certains engagements contractuels avec la chose, intimité qui fait concevoir leur vocation à la transmission. La notion traduit l’irruption d’une forme de réification dans la structure des droits personnels, une réification qui correspond à la vocation de ces droits ou obligations et qui est censée permettre leur accomplissement naturel9.

Par ailleurs nous le disions tantôt, les tenants et les aboutissants de ce résultat de transfert ne sont pas toujours identifiés avec précision, mais l’enseignement certain en cette matière concerne la non-rétroactivité de cette substitution. Il est ainsi en général admis que le transfert du bail ne s’opère de plein droit que pour l’avenir10 ; le nouveau propriétaire assumant désormais les droits et obligations du bail à la place de l’ancien. La transmission déploie ses effets à compter du moment où la vente est opposable au locataire ; en conséquence, la charge du paiement des obligations auxquelles est tenu chacun des contractants s’étant succédés dans relation contractuelle née du bail, (comme le bénéfice des droits) est déterminée en distinguant les périodes.

Les données des rapports antérieurs restent en principe personnelles au preneur et au bailleur initial ; le nouveau propriétaire est en principe étranger à tout ce qui est antérieur à la vente de la chose. Il a été ainsi décidé que le nouveau propriétaire de la chose qui l’a acquise en l’état ne peut invoquer les manquements du locataire antérieurs au transfert de propriété11 (sauf stipulation dans l’acte de vente pour organiser la cession de l’indemnité en résultant). Réciproquement, les dettes du bailleur initial ou les diverses indemnités (qu’elles soient d’éviction ou de réparation de troubles de jouissance liés à l’inexécution de travaux qui lui incombaient) demeurent en principe à sa charge. La Cour de cassation l’a rappelé dans diverses décisions12 : la vente de l’immeuble ne décharge pas le bailleur originaire de la dette née de ses obligations précédentes ; il doit indemniser le locataire des troubles de jouissance causés par la non-exécution de ces travaux qui lui incombaient en sa qualité de propriétaire.

De ces décisions ressort manifestement l’affirmation d’un maintien de charge sur la tête du précédent bailleur qui n’est pas libéré. L’ancien propriétaire reste tenu de l’indemnisation des troubles de jouissance causés antérieurement à l’aliénation de la chose louée. Troubles qui ne cessent que « par l’exécution de ces travaux » pour reprendre les termes explicites d’une décision13.

Mais, à partir du transfert de propriété, le nouveau propriétaire devient bailleur dans les termes du contrat initial ; il doit le respecter. L’idée selon laquelle le preneur n’a pas choisi ce changement de débiteur est parfois avancée au soutien de la jurisprudence14 qui tient le bailleur initial garant des obligations transférées à l’acquéreur de la chose15. Mais à la vérité, la théorie de l’obligation propter rem offre une explication plausible au maintien éventuel de la charge malgré le transfert de la chose. L’engagement du débiteur lié à la propriété de la chose a, dans le raisonnement de la théorie défendue, l’image d’une charge éventuelle de sorte que lorsqu’elle devient définitive, en l’occurrence par la nécessité des travaux, il devient naturel de rechercher son imputabilité originelle.

Encore faut-il que la charge présente cette originalité caractéristique d’obligations propter rem : comparée aux obligations traditionnelles, leur caractéristique de devoirs inhérents à la chose épouse en réalité la structure des risques transmis avec la propriété de la chose, une charge marquée d’éventualité. La charge des risques est assumée uniquement en raison de la seule qualité de propriétaire. La prise en charge peut alors être demandée au propriétaire initial lorsque le risque vient à se concrétiser après des transferts successifs. Au regard de cette explication, deux objections apparaissent s’opposer ici au lien qu’on souhaite établir entre la transmission des risques à l’acquéreur et cette charge des travaux antérieurs au transfert de la chose.

D’une part, la solution achoppe sur la nature du droit de jouissance conféré au locataire incompatible avec une transmission réelle des risques : malgré l’existence d’une certaine doctrine ayant défendu la thèse du caractère réel16 de ce droit, cette caractéristique n’est pas reconnue par le droit positif. Le droit du preneur est considéré comme étant fondamentalement personnel quand même les prérogatives importantes accordées aux preneurs par les statuts spéciaux des baux d’immeubles semblent lui donner une « certaine coloration réelle »17.

D’autre part et c’est en définitive l’obstacle déterminant, l’application de la théorie de l’obligation propter rem se trouve confrontée à la difficulté de concevoir les travaux déjà révélés au moment du transfert de la chose comme des risques au sens strict du terme. Dans la vente par exemple, le mécanisme de la garantie est conçu justement pour faire prendre en charge par le propriétaire, en cette seule qualité, des vices et défauts, lesquels cachés au moment de la vente, apparaissent comme des risques transmis avec la propriété de la chose18. Ainsi, l’acheteur qui se trouve confronté à la difficulté de jouir convenablement des utilités espérées de la chose acquise, utilités mesurées à l’aune de la destination du bien, peut appeler la garantie du vendeur. Dans le cas du bail, les travaux connus au moment du transfert de la chose au nouveau propriétaire ne présentent cette caractéristique de risque contrairement à ce qui est prétendu car ils n’ont rien d’éventuel. Ils peuvent d’ailleurs faire l’objet d’un engagement exprès comme le montre la reconnaissance en jurisprudence d’autres engagements19.

À défaut de cette prise en charge expresse, la substitution qu’opère l’effet translatif de la vente (en l’occurrence par adjudication) dans la charge du bail ne suffit pour expliquer et justifier la solution ici avancée. En théorie, on ne saurait relier à la structure du droit du preneur la charge des travaux comme des risques attachés au droit de propriété sur la chose et comme tels transmis avec elle. La propriété est ici transmise au nouveau propriétaire qui peut se retourner contre l’ancien pour se plaindre de cet état.

Certes la substitution permet d’expliquer le lien entre le locataire et le nouveau propriétaire qui assume désormais la charge de bailleur et bénéficie des prérogatives qui y sont attachées. Mais pourquoi, alors qu’on admet le maintien en charge du bailleur originaire (la transmission s’opérant sans rétroactivité), le nouveau propriétaire de la chose auquel il s’est substitué se trouverait-il ici associé à la dette d’indemnité ?

L’arrêt évoque explicitement les « travaux nécessaires à la délivrance conforme du bien loué ». Il faut comprendre que le nouveau propriétaire est en charge de cette obligation de délivrance commencée avec le bailleur initial et qu’il doit poursuivre dans les termes du bail qui lui a été transmis avec la chose. Ainsi règle de la transmission n’est ici qu’une première étape dans le raisonnement ; les règles du bail la doublent pour justifier la décision ici défendue.

II – Fondement de la condamnation in solidum à la dette de réalisation des travaux sur l’obligation de délivrance du bailleur

L’article 1719 du Code civil énumère quatre obligations qui, par la nature même du contrat de bail, et sans qu’il soit besoin de stipulations particulières pèsent sur le bailleur : délivrer la chose louée au locataire, entretenir cette chose, procurer la jouissance paisible au preneur, assurer la permanence des plantations. En réalité, la délivrance de la chose, condition initiale à toute jouissance, est l’obligation fondamentale autour de laquelle gravitent les autres obligations : les obligations d’entretien et de garantie. Comme le notent certains auteurs20, ces dernières obligations apparaissent comme « les divers moyens qui concourent à assurer » cette obligation unique et essentielle : assurer au locataire la jouissance paisible de la chose louée. En tout cas, obligation fondamentale, imposée « par la nature du contrat », nécessaire à toute jouissance de la chose et condition en conséquence à toute exigibilité du loyer21, l’obligation de délivrance entendue stricto sensu ne peut être écartée par aucune clause du contrat22. Sa caractéristique d’obligation composite est connue23 : le bailleur est tenu d’une délivrance au sens strict qui consiste à mettre le bien loué à la disposition du locataire. Une remise matérielle du bien, mais aussi une remise juridique24 en ce sens que le bien délivré doit répondre à la destination voulue par les parties. La délivrance comprend en définitive la possibilité de jouir de la chose selon la destination convenue25. Le bien doit ainsi être libre de toute occupation, de tous travaux26. On sait dans son exécution initiale que cette obligation, différente de l’obligation d’entretien, n’implique aucune distinction entre les réparations : le bailleur doit en principe, avant l’entrée en possession du locataire, supporter toutes les réparations (qu’elles soient locatives27 ou non) nécessaires au bon état de la chose délivrée28. Dans le régime des baux d’habitation29, la loi va plus loin et pose l’exigence30 particulière de la délivrance d’un logement décent (elle donne cependant la possibilité pour les parties d’organiser la prise en charge par le locataire des travaux incombant au bailleur31 et les modalités de leur imputation sur les loyers).

Pour ce qui est de la délivrance en droit commun du Code civil, on note une relative liberté contractuelle concernant l’état de la chose délivrée. Mais sauf application d’une clause de prise en l’état de la chose valable32, force est de revenir au principe qui met à la charge du bailleur l’obligation de délivrer la chose « en bon état de réparations de toute espèce »33, ce qui implique en principe la délivrance d’une chose apte à servir immédiatement, sans nécessité de réparations, l’usage pour lequel le locataire a pris la chose à bail34. Le bail étant un contrat à exécution successive, la caractéristique de continuité de l’obligation de délivrance est souvent soulignée pour justifier l’existence d’autres obligations, l’obligation d’entretien de la chose louée35 principalement. La notion de continuité met ici en lumière le sens d’une sorte de prolongement de l’obligation initiale exécutée mais qui doit l’être pendant tout le temps du bail. L’obligation d’entretien prolonge ainsi l’obligation de délivrance du bailleur. Il s’agit d’entretenir la chose « en état de servir à l’usage pour lequel elle a été louée ». Le bailleur a dès lors la charge d’effectuer « toutes les réparations qui peuvent devenir nécessaires autres que locatives »36 (C. civ., art. 1720, al. 2). La nature juridique des obligations assumées dans le bail ne change pas avec la transmission de la chose. À l’égard du bailleur initial comme du nouveau, l’exigence est que la chose délivrée demeure, pendant toute la durée du bail, apte à satisfaire l’usage convenu.

Or on s’aperçoit que c’est souvent sur l’unicité de nature de la dette que les tribunaux s’appuient pour faire jouer à la technique de la condamnation in solidum son rôle d’amplificateur de protection. L’arrêt l’affirme : le nouveau propriétaire est tenu, depuis son acquisition d’une obligation envers le locataire, de réaliser les travaux nécessaires à la délivrance conforme du bien loué ; puisqu’il ne s’en était pas acquitté, sa condamnation in solidum se justifie. Le raisonnement s’appuie donc sur la transmission pour l’articuler avec la dette de l’indemnité des travaux. La transmission du bail à l’adjudicataire depuis son acquisition implique la délivrance d’une chose conforme. Que penser de la solution de l’arrêt ?

Il y a tout d’abord lieu de faire attention à une interprétation hâtive qui consisterait à voir dans cet attendu la conséquence d’un transfert de charge. Fondamentalement, l’arrêt ne signifie pas que la substitution du vendeur le fait échapper à la dette de l’indemnité grevant la chose. Il n’y a pas à proprement parler avec la transmission de la chose, cession de la dette des travaux antérieurs au transfert de la chose. La solution ressort implicitement de l’arrêt qui situe l’obligation de délivrance de la société adjudicataire depuis son acquisition. La Cour de cassation approuve effectivement l’analyse des juges du fond qui ont considéré que depuis cette acquisition, la société adjudicataire se doit de réaliser les travaux nécessaires à la délivrance conforme du bien loué. Le lien explicite ainsi établi avec le temps amène donc à voir que la transmission de la chose n’a pas eu pour effet d’éteindre la dette d’indemnité du propriétaire initial. Du reste, admettre la solution contraire ne serait pas compatible avec l’idée acquise de la non-rétroactivité de la transmission du bail dans ces hypothèses. Décider que l’acquéreur de la chose prend la place du bailleur originaire dès l’acquisition ne signifie pas que cette substitution s’opère rétroactivement. Instaurer la rétroactivité conduirait à l’extinction37 de la dette d’indemnité pesant sur le bailleur initial. Or la substitution n’efface pas rétroactivement la période pendant laquelle le propriétaire initial de la chose avait la qualité de bailleur.

Dès lors, la conséquence de la non-transmission passive de la dette avec la chose38fait concevoir que l’ancien bailleur doit se libérer en participant à hauteur de l’indemnisation du chef des travaux antérieurs à la vente de la chose.

En second lieu, les règles précédemment évoquées du bail montrent que le nouveau propriétaire doit désormais assurer cette aptitude de la chose à remplir l’usage normal ou la destination spéciale voulue par le bail. La volonté de protéger la victime contre l’inaction des sujets en charge, le substitué comme le substituant, amène alors les juges à actionner le mécanisme de l’obligation in solidum. La notion conduit souvent à considérer que chacun des coobligés a causé tout le dommage « soit parce qu’il y a entre chaque dommage et l’intégralité du préjudice un lien direct et nécessaire, soit parce que le préjudice est indivisible, ce qui veut dire que l’on ne peut pas attribuer une simple partie à chaque auteur »39.

Mais cette sorte de cotitularité de la charge de jouissance (assumée par les deux propriétaires successifs) au profit du locataire se conçoit aisément lorsque l’adjudicataire a eu connaissance avant l’adjudication de l’état de la chose. Des décisions ont ainsi admis la transmission d’obligations en relevant que l’adjudicataire avait été prévenu40. On remarquera d’ailleurs que les arguments de la locataire laissaient entendre cette information parfaite de l’adjudicative assurée par le biais du cahier des charges. Selon elle, le cahier des conditions de la vente aux enchères faisait état de l’instance en cours et annexait même le jugement rendu sans prévoir que le saisi en supporterait exclusivement les conséquences financières ; il en résultait donc que l’acquéreur était alors parfaitement informé.

En définitive, si donc l’on admet que cette décision ne substitue pas les acquéreurs successifs dans la charge des dettes de leurs auteurs, on est tenté de déduire que la spécificité de la solution tient à la spécificité de la situation du locataire : le bailleur est tenu de procurer la jouissance sans laquelle l’exécution de son obligation de délivrance apparaît illusoire. De la question initiale de la transmission de la chose avec des créances ou des dettes, on passe à celle de sa possession. En vertu de l’obligation de délivrance qui se prolonge par une obligation d’entretien, l’acquéreur (bailleur) ne peut priver le locataire de la jouissance qui lui est due. Ainsi tenu de procurer la jouissance au preneur, de maintenir après la transmission, la chose en état de servir la destination voulue par le bail, l’acquéreur devient en quelque sorte garant de cet état. Si des troubles persistent, la prétention juridique du preneur d’appeler le nouveau propriétaire en exécution voire en garantie de la délivrance apparaît légitime.

Le nouveau propriétaire est obligé, à cause de l’obligation de délivrance dont il est tenu, de prendre en charge les troubles susceptibles de contrecarrer l’effectivité de la jouissance. Des troubles de jouissance qui ne cessent que par l’exécution des travaux pour reprendre les termes de l’arrêt du 14 novembre 2007 précité.

La décision prend ainsi appui sur cette nature essentielle de l’obligation de délivrance pour offrir au preneur une garantie41 destinée à en assurer l’effectivité. Diversité de liens obligatoires mais unis par l’unicité de l’objet, il s’agit là des caractéristiques classiques de l’obligation in solidum42. Le propre de cette solidarité imparfaite est d’exiger la réparation intégrale43 à chacun des débiteurs in solidum tenus de prestations semblables. Elle est, faut-il le rappeler, un mécanisme inventé par la jurisprudence pour offrir à la victime en cas de pluralité de responsables des chances plus sérieuses d’obtenir réparation. Par ailleurs, dans son application, il importe peu comme en matière de solidarité, que le débiteur poursuivi ne puisse pas se retourner contre son coobligé, pour des raisons de fait ou de droit44. Un risque qui peut s’avérer réel dans cette hypothèse d’adjudication, les ventes faites sous l’autorité de justice ne donnant en principe pas lieu à garantie45.

Or on conviendra aisément que l’obligation de délivrance qui fonde la condamnation à la prise en charge des travaux n’est pas un droit nouveau, non marqué, coloré des rapports contractuels antérieurs. Par rapport à ces travaux antérieurs, le nouveau bailleur n’assume pas une dette personnelle ; la substitution s’opérant sans rétroactivité. L’acquéreur voudra donc rechercher la responsabilité de l’auteur direct de ces manquements pour lesquels il a en réalité assumé une obligation de couverture, de garantie. En application des principes généraux de la solidarité, chacun des coobligées peut se retourner contre son ou ses coobligés en remontant la chaîne pour définir l’imputabilité originelle. Dans la contribution entre coobligés, il faudra alors distinguer l’indemnité correspondant à la période pendant laquelle le propriétaire initial a été bailleur et celle due depuis la vente par l’adjudication. Dans les rapports entre co-responsables, explique-t-on, une division de la fraction du dommage imputable à chacun s’impose nécessairement46. Observation qui conduit à se demander si un tel raisonnement limpide est concevable à propos de la division de la dette des coresponsables, quelle impérieuse nécessité conduit à l’écarter dans leurs rapports avec la victime ?

Adjoignant en tout cas cette modalité in solidum à l’obligation de délivrance, la solution de l’arrêt conduit à faire supporter au bailleur la charge intégrale des troubles de jouissance en l’absence de toute stipulation expresse de solidarité avec l’ancien propriétaire et ce, même s’il n’y est pour rien. Une condamnation à la réparation pour le tout rigoureuse qui peut sembler gênante dans une matière où la volonté des parties et la prévisibilité paraissent incontournables. La solution prend en effet le contrepied de l’affirmation selon laquelle « l’obligation in solidum ne saurait suppléer, en matière contractuelle, l’absence de clause expresse de solidarité, ce qui se traduirait par la négation de l’hypothèse d’une pluralité d’obligés non solidaires »47.

Plus fondamentalement, la doctrine souligne souvent l’imprévisibilité et la complexité du régime48 de l’obligation in solidum malgré de savantes études tentant de la cerner49. Le projet de réforme du droit de la responsabilité civile propose d’ailleurs d’abandonner le concept et d’instituer une véritable solidarité entre coresponsables d’un même dommage50. En attendant que la jurisprudence abandonne sa pratique51, des précautions s’imposent si l’on veut éloigner en cette matière de transmission du bail, autant que faire se peut, le spectre d’une condamnation solidaire fondée sur la délivrance. L’acquéreur de la chose louée peut soit exiger que le vendeur effectue les travaux nécessaires à la délivrance conforme (à la destination des lieux, éventuellement à l’usage contractuel) soit, tenant compte des travaux à réaliser, demander une diminution de prix de vente. La stipulation bien connue de la clause « travaux »52, ou en l’occurrence dans le cadre particulier de la vente par adjudication par un dire (défini comme des observations consignées par les parties sur un cahier des charges) apparaît ainsi déterminante. La spécificité de la vente par adjudication fait même penser, pour être sûr de l’effectivité de ces mentions (au regard de l’accueil imprévisible53 que réservent les tribunaux à de telles observations), à l’insertion d’une mention claire et précise54 que l’adjudicateur achetant la chose en l’état, il ne répondra d’aucun trouble de jouissance antérieur à la vente. En effet, si la cause de protection de la victime est certes respectable et entendue, il est tout aussi nécessaire sur le plan des principes, de veiller à ce que l’aggravation de la charge par ce mécanisme de la condamnation in solidum ne conduise à des solutions imprévisibles et surtout injustes.

On peut en définitive affirmer, qu’en ces matières où la confiance légitime des parties constitue un socle essentiel, l’usage ou l’utilité de cet instrument de l’obligation in solidum paraît concevable (en attendant la disposition légale la généralisant) ; il faut toutefois s’assurer que la volonté certaine et légitime des parties n’est pas justement d’y échapper55.

Notes de bas de pages

  • 1.
    Soit parce qu’il est conclu par acte notarié soit qu’il a acquis date certaine selon l’un des modes que prévoit l’article 1377 du Code civil ; la jurisprudence a une compréhension large de l’exigence : l’acquéreur est forcé de respecter le bail si celui-ci a été porté à sa connaissance de quelque manière que ce soit : Cass. 3e civ., 20 juill. 1989, n° 8-13413 : Bull. civ. III, n° 169 ; RTD civ. 1990, p. 101, obs. Rémy P. – par ex, par le biais du cahier des charges précédant l’adjudication, v. Cass. 3e civ., 29 sept 1999, n° 97-22129 : Bull. civ. III, n° 188 ; Cass. 3e civ., 11 févr. 2004, n° 02-12762 : Bull. civ. III, n° 24.
  • 2.
    Qui reprend là une jurisprudence constante.
  • 3.
    La Cour de cassation met ainsi en avant le caractère personnel de l’indemnité d’éviction lorsque le congé a été donné avec refus de renouvellement avant la vente par l’ancien bailleur pour écarter sa prise en charge par le nouvel acquéreur : Cass. 3e civ., 10 déc. 1997, n° 96-13616 : Bull. civ. III, n° 218.
  • 4.
    Cass. 3e civ., 9 juill. 2003, n° 02-11794 : Rev. Loyers, 2003, n° 841, obs. Guilly-Friant S. ; RTD civ. 2003, p. 725, obs. Gautier P.-Y. V. déjà dans une décision antérieure, le « cessionnaire était, à défaut de toute stipulation contraire dans l’acte de cession, tenu envers le bailleur, en sa qualité d’ayant cause du cédant, des dégradations causées par celui-ci sauf celles pour lesquelles ce dernier s’était engagé à effectuer les réparations lors de l’établissement de l’état des lieux de sortie » (Cass. 3e civ., 13 juin 2001, n° 99-18047). Dans une autre espèce postérieure (Cass. 3e civ., 8 déc. 2015, n° 14-13179), la charge de remise en l’état de la chose résultant des dégradations commises par le précédent locataire (entretien et réparations des devantures et fermetures) a été imputée au cessionnaire du fonds de commerce (nouveau preneur) à cause de son inaction. La censure de l’arrêt d’appel prononcée sous le double visa des articles 1134 du Code civil et L. 145-41 du Code de commerce reprochait à la cour d’appel de n’avoir pas recherché si à la suite des commandements qui lui avaient été délivrés, « il n’incombait pas à la locataire de mettre un terme à la persistance des manquements contractuels visés par le premier commandement et si la régularité d’une modification de la devanture des lieux loués visée au second commandement n’était pas, selon le bail, conditionnée à une autorisation des bailleurs », Aubin-Brouté R.-J., « L’obligation de remise en état des lieux pèse sur le dernier cessionnaire », Rev. Loyers 2016, n° 964. Par ailleurs, v. sanctionnant au visa de l’article 1717 du Code civil, le refus de condamnation du dernier locataire, cessionnaire du droit au bail, à supporter le coût des travaux de remise en état de l’immeuble : Cass. 3e civ., 7 janv. 1987, n° 85-13974. Les juges du fond avaient considéré que la charge des travaux « pèse sur la personne de chacun des locataires successifs et n’est pas de nature à être transmise aux autres ».
  • 5.
    V. Cass. 3e civ., 12 juill. 1988, n° 86-15759, « la société [locataire] s’était engagée solidairement avec les cessionnaires successifs au paiement des loyers jusqu’à l’expiration du bail en 1990 ».
  • 6.
    C. civ., art. 1743.
  • 7.
    Bénabent A., Droit des contrats spéciaux civils et commerciaux, 12e éd., 2017, LGDJ, Précis Domat, n° 368.
  • 8.
    Bénabent A., Droit des contrats spéciaux civils et commerciaux, 12e éd., 2017, LGDJ, Précis Domat, n° 368.
  • 9.
    Flour J. et a., Droit civil, Droit des obligations : Le rapport d’obligation, Dalloz, Sirey Université, n° 433.
  • 10.
    Bénabent A., Droit des contrats spéciaux civils et commerciaux, 12e éd., 2017, LGDJ, Précis Domat, n° 372 ; Collart-Dutilleul F. et Delebecque P., Contrats civils et commerciaux, 11e éd., 2019, Précis Dalloz, n° 465.
  • 11.
    Cass. 3e civ., 2 oct. 2002, n° 01-00696 : Bull. civ. III, n° 189 ; l’ancien bailleur reste en droit de demander l’indemnisation : Cass. 3e civ., 13 févr. 1985, n° 82-14220 : Bull. civ. III, n° 33.
  • 12.
    Cass. 3e civ., 14 nov. 2007, n° 06-18430 : Bull. civ. III, n° 202 ; RDC 2008, p. 385, obs. Seube J.-B. ; Defrénois 30 mars 2008, n° 38740, p. 710, obs. Savaux E.
  • 13.
    Cass. 3e civ., 14 nov. 2007, n° 06-18430 : Bull. civ. III, n° 202.
  • 14.
    Aujourd’hui la solution pourrait trouver appui sur l’article 1216-1 du Code civil créé par l’ordonnance du 10 février 2016 : « Si le cédé y a expressément consenti, la cession de contrat libère le cédant pour l’avenir. À défaut, et sauf clause contraire, le cédant est tenu solidairement à l’exécution du contrat ».
  • 15.
    Cass. 3e civ., 9 juill. 1970, n° 69-10888 : Bull. civ. III, n° 471 ; JCP 1971, II, 16745 qui condamne le bailleur initial à faire effectuer des travaux sur la chose cédée.
  • 16.
    V. Derruppé J., La nature juridique du droit du preneur à bail et la distinction des droits réels et des droits de créance, thèse, 1952, Toulouse ; du même auteur « Souvenirs et retour sur le droit réel du locataire », in La nature juridique du droit du preneur à bail et la distinction des droits réels et des droits de créance, thèse, 1952, p. 169 et s ; Trolong R.-T., De l’échange et du louage, p. 488, n° 12.
  • 17.
    Collart-Dutilleul F. et Delebecque P., Contrats civils et commerciaux, 11e éd., 2019, Précis Dalloz, n° 469.
  • 18.
    Coeffard P., Garantie des vices cachés et « responsabilité contractuelle de droit commun », 2005, LGDJ, coll. Fac. Dr. Poitiers ; Atani A., Transmission des droits et actions « attachés à la chose », thèse, 2012, Poitiers.
  • 19.
    V. un arrêt récent de la Cour de cassation censurant la décision d’une cour d’appel qui avait écarté l’application d’une clause pénale : « le vendeur peut s’engager dans l’acte de vente à faire son affaire personnelle de la libération des lieux par le locataire, un tel engagement n’étant pas subordonné à ce que le débiteur de cette obligation demeure propriétaire du bien en cause », Cass. 3e civ., 14 févr. 2019, n° 18-11683.
  • 20.
    Bénabent A., Droit des contrats spéciaux civils et commerciaux, 12e éd., 2017, LGDJ, Précis Domat, n° 353.
  • 21.
    Cass. 3e civ., 6 mai 2014, n° 12-29504 : RDC 2014, n° 111c5, p. 647.
  • 22.
    Collart-Dutilleul F. et Delebecque P., Contrats civils et commerciaux, 11e éd., 2019, Précis Dalloz, n° 488.
  • 23.
    Une « obligation à multiples facettes », Collart-Dutilleul F. et Delebecque P., Contrats civils et commerciaux, 11e éd., 2019, Précis Dalloz, n° 488.
  • 24.
    Le bailleur doit par exemple fournir l’objet du contrat ainsi que ses accessoires, nécessaires à assurer la jouissance paisible.
  • 25.
    Cass. 3e civ., 26 mars 1997, n° 95-14103 : Bull. civ III, n° 70.
  • 26.
    Une réponse ministérielle l’avait précisé : (Rép. min. n° 8669 : JO Sénat Q, 10 févr. 1983, p. 253) : « il ne serait pas envisageable que le nouveau locataire prenne en charge le coût de réparations au lieu et place du bailleur ou du locataire précédent ».
  • 27.
    En dehors des statuts spéciaux, l’article 1754 du Code civil donne une liste indicative des réparations et menu entretien à la charge du locataire.
  • 28.
    V. l’arrêt qui censure la décision d’une cour d’appel pour défaut de base légale (au visa de l’article 6 de la loi du de la loi du 6 juillet 1989) parce qu’elle n’avait recherché si « les réparations ne restaient pas à la charge du bailleur dans la mesure où les désordres existaient au jour de l’entrée de la locataire dans les lieux », Cass. 3e civ., 23 févr. 1999, n° 97-13196 : Rev. Loyers et copr. 1999, comm. 18.
  • 29.
    Loi du 6 juillet 1989.
  • 30.
    Qui s’applique également au bailleur commercial pour la partie des locaux que son locataire occupe à titre d’habitation principale, Cass. 3e civ., 14 oct. 2009, nos 08-10955 et 08-17750.
  • 31.
    Étant entendu que les travaux destinés à mettre le logement aux normes de décence relèvent des obligations qui incombent impérativement au bailleur : Cass. 3e civ., 8 juin 1995, n° 93-14869 : RDJ 1995, p. 801 – Cass. 3e civ., 3 févr. 2010, n° 08-21205 : Bull. civ III, n° 28 ; D. 2010, p. 1192, note Niboyet F.
  • 32.
    Clause qui non seulement est interprétée strictement par les tribunaux mais aussi est écartée lorsqu’elle porte atteinte à l’économie du contrat de bail. La clause par laquelle le locataire prend les lieux dans leur état actuel sans pouvoir exiger aucune réparation ne concerne que l’état dont le locataire avait pu se convaincre lors de la conclusion du contrat et ne concerne donc pas les désordres non apparents ou ceux qui sont apparus postérieurement Cass. 3e civ., 18 déc. 2012, n° 10-21636. Ainsi « la clause, selon laquelle le locataire prend les lieux en l’état où ils se trouvent, ne décharge pas le bailleur de son obligation de les maintenir, en cours de bail, en état de servir à l’usage auquel ils sont destinés » – Cass. 3e civ., 18 mars 1992, n° 90-12809 : Bull. civ, III, n° 88 ; Cass. 3e civ., 19 déc. 2012, n° 11-25414 : Bull. civ III, n° 188 ; D. 2013, p. 1794 ; RTD com. 2013, p. 231.
  • 33.
    C. civ., art. 1720.
  • 34.
    Ce qui signifie comme le relèvent souvent certains que « le bailleur est tenu, pour la délivrance, à toutes les réparations ou mise aux normes nécessaires (…) y compris celles qui seront à la charge du locataire en cours de bail », v. Collart-Dutilleul F. et Delebecque P., Contrats civils et commerciaux, 11e éd., 2019, Précis Dalloz, n° 488.
  • 35.
    Derruppé J., La nature juridique du droit du preneur à bail et la distinction des droits réels et des droits de créance, thèse, 1952, Toulouse, p. 172.
  • 36.
    Alors que l’obligation de délivrance entraine celle de supporter, au moment de l’entrée dans les lieux, toutes les réparations, le texte impose en principe pour les réparations qui deviennent nécessaires en cours de bail une répartition entre le bailleur et le locataire : seules les réparations locatives c’est-à-dire de menu entretien pèsent sur le locataire (C. civ., art. 1754) ; les réparations plus importantes qui ont trait à la structure, aux éléments essentiels de la chose louée (toit, murs…) incombent au bailleur qui doit au locataire le clos et le couvert.
  • 37.
    L’acte produit certes un effet extinctif pour l’avenir, le bailleur initial n’étant plus tenu, après la transmission de la chose, de l’exécution du bail.
  • 38.
    V. par ex. Gautier P.-Y., « De l’intransmissibilité passive des obligations du vendeur à l’adjudicateur enchérisseur », RTD civ. 1992, p. 134
  • 39.
    Chabas F., « Remarques sur l’obligation in solidum », RTD civ. 1967 p. 310 et s. ; spéc. p. 314.
  • 40.
    Cass. 3e civ., 6 nov. 1984, n° 83-13749 : Bull. civ III, n° 184 ; D. 1985, p. 547, note Souleau H.
  • 41.
    Il n’est pas rare qu’on tienne l’adjudicataire pour une sorte de caution du débiteur saisi v. Cass. 3e civ., 6 nov. 1984, n° 83-13749 : D. 1985, p. 547, note Souleau H.
  • 42.
    La doctrine considère en général que le mécanisme de l’obligation in solidum est une garantie qui vise à éviter au créancier de diviser ses recours et de supporter l’éventuelle insolvabilité de l’un des débiteurs, Terré F., Droit civil, Les obligations, 12e éd., 2019, Dalloz, n° 1404.
  • 43.
    Comme le laisse clairement entendre entre divers autres arrêts, v. not. Cass. 3e civ., 9 janv. 1973, n° 71-12606, affirmant : « Chacun des responsables, quelle que soit la nature de sa faute, d’un même dommage, doit être condamné in solidum à le réparer en totalité ».
  • 44.
    Terré F., Droit civil, Les obligations, 12e éd., 2019, Dalloz, n° 1404.
  • 45.
    C. civ., art 1649.
  • 46.
    Terré F., Droit civil, Les obligations, 12e éd., 2019, Dalloz, n° 1405.
  • 47.
    Terré F., Droit civil, Les obligations, 12e éd., 2019, Dalloz, n° 1403.
  • 48.
    S’agissant surtout la question de l’opposabilité des exceptions avec cette distinction triptyque des exceptions communes, purement personnelles et simplement personnelles.
  • 49.
    Terré F., Droit civil, Les obligations, 12e éd., 2019, Dalloz, n° 1403, qui voit dans cette importante littérature juridique qui lui est consacrée l’attestation de l’incertitude persistance du concept.
  • 50.
    V. L’article 1265 dispose ainsi que lorsque plusieurs personnes « sont responsables d’un même dommage, elles sont solidairement tenues à réparation envers la victime. Si toutes ou certaines d’entre elles ont commis une faute, elles contribuent entre elles à proportion de la gravité et du rôle causal du fait générateur qui leur est imputable. Si aucune d’elles n’a commis de faute, elles contribuent à proportion du rôle causal du fait générateur qui leur est imputable, ou à défaut par parts égales ».
  • 51.
    Il n’est pas sûr qu’elle le fasse.
  • 52.
    La garantie devant elle jouer, comme dans toute vente, pour les vices et défauts cachés de la chose. La négociation d’une garantie conventionnelle étant d’ailleurs envisageable pour une prise en charge totale ou partielle des désordres latents ou apparaissant, pour lesquels le chiffrage des travaux peut sembler délicat. L’acquéreur pourra alors se retourner contre l’ancien propriétaire pour ces désordres non encore révélés dans toute leur nature et leur ampleur.
  • 53.
    Gautier P.-Y., « De l’intransmissibilité passive des obligations du vendeur à l’adjudicateur enchérisseur », RTD civ. 1992, p. 134.
  • 54.
    Aujourd’hui l’article 1216-1 du Code civil nouveau applicable à la cession de contrat règle expressément la question : si le cédé y a expressément consenti, la cession de contrat libère le cédant pour l’avenir ; à défaut, et sauf clause contraire, le cédant est tenu solidairement à l’exécution du contrat.
  • 55.
    Et si tel est le cas, on ne fera fi de la volonté exprimée d’une partie qu’en considération de l’intérêt majeur de sécurité et de justice, concrètement si elle génère des injustices choquantes.
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